La ville de Toulouse, pour le remercier d’avoir bien voulu mettre aux jeux floraux, dont il remporta le premier prix, ne jugeant pas la récompense ordinaire proportionnée à tant de mérite, fit faire une Minerve d’argent massif, & d’un prix considérable, qu’elle lui envoya.
Son épitaphe par Ménage est fameuse* : Les graces d’Etrurie, Les muses d’Ibérie, La syrene Latine & l’Apollon François, L’enjoûment, les amours & la plaisanterie, Les ris, les jeux, l’esprit, tout ce qu’on vit jamais D’agrémens inspirés par la galanterie, Au même tombeau descendu, Avec Voiture a disparu.
Cependant ce jeu de mots est plus supportable que tous ceux qui se trouvent dans la réponse de la fourmi.
A ce jeu, on s’habitue à un immense orgueil et à se considérer comme infiniment supérieur, ce qui d’abord est assez déplaisant, et ce qui ensuite rend très peu capable de grandes choses ; car c’est en regardant en haut qu’on fait effort et qu’on tire de soi tout ce qui est possible qu’on en tire.
les plus minutieux détails sur les jeux, les occupations et les distractions de ce petit Roi, triste déjà comme un vieux homme, et qui resta triste et petit.
Scott et Balzac (Balzac surtout, plus grand que Scott par ce côté) ont inventé des manières si supérieures de couper le jeu et de donner les cartes dans cette fameuse partie d’imagination, qu’après eux la difficulté a pris des proportions qui semblent la rendre invincible.
Cladel ne le croit pas ; mais je le lui affirme, moi dont le métier est de dégager du talent qui se sent la métaphysique qui s’ignore… Et faites le jeu vous-même sur son livre, et voyez si Cladel est autre chose qu’un peintre ; mais un peintre d’une force infinie !
Peut-être vivre c’est inventer. » Toujours est-il que le jeu de nos instincts et surtout les causes du jeu de nos instincts nous sont inconnues. […] Il faut bien qu’en face de cet état sa volonté soit en jeu ; autrement il lui semble que puissance et bonheur ne lui appartiendraient pas. […] Les professeurs de morale ont beau jeu à invectiver contre les passions. […] Pour moi, elle est un monde de dangers et de victoires où les sentiments héroïques se déploient et ont aussi leur place de danse et de jeux. […] Mais comment comprendrait-il que l’on puisse « par exemple, pour la passion de la connaissance, mettre en jeu sa santé et son honneur ?
Subitement, ce qui nous enchantait n’existe plus ; il nous devient difficile d’imaginer un instant de l’avenir où nous plairait encore le jeu subtil et anodin des phrases et des mots, le jeu d’autrefois. […] Il proclame « qu’un peuple de 65 millions d’habitants, qui met en jeu toutes ses énergies pour s’affirmer et se maintenir, ne peut pas être vaincu » ; mais il n’a pas la certitude que l’Allemagne mette en jeu toutes ses énergies. […] Les rois de Prusse, alors déjà, furent des malins, qui surent mettre dans leur jeu nos philosophes. […] Et l’œuvre de la raison, si utile, n’est pas un jeu, n’est pas un divertissement. […] Il appelle la vie « un jeu sans enjeu ».
Maniables et apparents dans les expériences, on les rend plus visibles par les signes qui en sont les caractères, et par le jeu des machines dont l’aspect aide encore à l’explication du démonstrateur. […] Il y a loin de la découverte des effets que deux verres placés l’un devant l’autre ont sur la vue, à ceux des télescopes fabriqués après qu’on eut étudié les jeux physiques de la lumière. […] Le maître de notre scène comique nous enseigne là ce que les locutions triviales et les basses mœurs fournissent de bonnes plaisanteries, d’esprit en proverbes, de jeux plaisants, et d’agréable folie pleine de bon sens et de sel. […] L’espèce parodiste met en jeu les masques des mimes d’Italie, connus sous les noms d’Arlequin et de sa vagabonde maîtresse, de Pantalon et de sa burlesque famille. […] Ce genre n’est soutenable que par une surabondance de verve plaisante, par le jeu enflammé des plus savants comiques, et par les vives enluminures de ses masques.
Faut-il s’étonner si la conséquence de ce jeu, au théâtre comme à la Bourse, est quelquefois une spéculation heureuse, et le plus souvent une belle et bonne faillite ? […] Le métier de courtisane n’est pas plus fait pour enseigner la bonté que l’ivrognerie pour enseigner la tempérance, et la passion du jeu la prudence. […] Chez lui, les ardeurs sensuelles du tigre humain deviennent jeux de jeune chat. […] Le jeu libre et spontané des facultés, voilà ce qui constitue le poète, et comment sa liberté s’exercera-t-elle, s’il commence par la comprimer ? […] Il a le don du mouvement si nécessaire au poète dramatique, et l’entente des jeux de la scène ; mais ne lui demandez pas l’agitation nerveuse et les tours d’adresse de M.
C’était là un jeu Parnassien renouvelé de Banville. […] Le jeu est connu des traditionnistes qui s’appuient sur une gloire de tout un passé à laquelle ils n’ajoutent qu’une faible glose, et dont ils usurpent le rayonnement. […] Il y a là un jeu de Verlaine, parant de costumes amusants des pensées à lui, et nullement un pastiche des temps éteints, ni un air de flûte. […] Il y a ce que Vielé-Griffin appelait des jeux parnassiens, d’assez inutiles ballades. […] Théodore de Banville néanmoins continue avec une expansion claire et ensoleillée et les plus beaux dons lyriques le jeu purement romantique.
Quel jeu d’équilibre diplomatique à concilier la déférence d’usage et sa belle sincérité ! […] Il aurait beau jeu. […] L’ironie sur les « sources » a beau jeu, et beau drapeau. […] Distinction à laquelle il faut donner, quand l’occasion s’en présente, de l’air et du jeu. […] Et ce jeu (qu’il soit de l’oie ou de l’aigle de Jupiter) est renouvelé des Grecs.
On pourrait en faire un jeu pour les heures de pluie à la campagne : le jeu des charades académiques. […] Un valet de chambre, en serrant dans la table de jeu les jetons d’argent (nous sommes dans le plus grand monde), s’aperçoit que le compte n’y est pas. […] Car ce jeu ne cesse d’être ignoble que s’il est mortellement dangereux pour ceux qui s’y livrent. […] On peut faire avec cela un petit jeu innocent et pédant pour les soirées d’hiver à la campagne. […] Il y a vraiment trop longtemps, ma cousine, que nous n’avons joué au noble jeu des citations.
Et plus exactement encore, si nous voulions jouer au jeu frivole des comparaisons, c’est avec Daumier que nous songerions à le mettre en parallèle. […] Par les uns il a gagné une réputation d’homme d’esprit, par les autres d’essayiste, et presque de penseur : voilà le jeu des apparences. […] Inapte au jeu des idées, il connaît fort bien les règles de celui des mots. […] Mais certains jeux de mots — l’abus de l’allitération19 par exemple — débilitent incurablement l’art et l’œuvre. […] Montfort méprise les mièvreries du jeu d’esprit ou du jeu de mots ; sa robustesse n’en a que faire.
Ne se fait-il pas tantôt un devoir, tantôt un jeu de montrer le réel ? […] Que devant le peuple on mette en jeu le ressort des sentiments : le mécanisme d’une tension savamment progressive l’intéressera moins que la surprise de la détente. […] Plus de jeux, plus de rires, plus de chansons. […] En effet, c’est un jeu futile d’esprit et de main. […] Que de jolis jeux d’enfants qui vont passer à l’adolescence !
C’était un jeu. […] Ce qui importe, c’est que le critique impressionniste, comme l’autre, comprend, explique, interprète, et, — en dépit du jeu des mots, — qu’il juge. […] Ce n’est pas là un pur jeu. […] S’il ne travaille pas à irriter ses contemporains, de parti pris et par jeu, il ne lui déplaît pas non plus de les entendre crier. […] Le Père en veut surtout aux riches qui passent la nuit à sabler le champagne et dépensent au jeu des sommes considérables.
Le printemps est en jeu et le soleil ; le créateur se manifeste dans ces admirables et toutes petites créations dont il anime son œuvre sublime. […] On pouvait dire, de son jeu, ce que disait Démosthène de ses propres harangues, qu’elles sentaient l’huile. Mais, en fin de compte, ça devait être ennuyeux quand mademoiselle Dumesnil voulait mettre dans son jeu un peu de règle et d’art ? […] Il savait par cœur, aussi bien qu’elle-même, le jeu parfait de mademoiselle Clairon ; il devinait, il pressentait mademoiselle Dumesnil et sa sublime singerie ! […] Et pour entrer en jeu, savez-vous ce qu’il avait fait, le hardi poète ?
Ce sont là jeux de prince. […] On lui décerne dix-huit cents couronnes ; on traîne aux égouts, pour faire place aux siennes, les statues des anciens vainqueurs des Jeux Olympiques. […] Un de ses jeux est d’avilir les fiertés et de souiller les pudeurs. […] Ses ridicules mêmes ajoutaient à la perfection de son jeu. […] Leur costume favori semble l’emblème de ce jeu féroce.
Un de ses camarades, qui remarqua ce changement dans son jeu, dit malignement : On voit bien qu’il revient de Ferney. […] Heureusement on ne les comprend pas ; le jeu de l’actrice les couvre ; elles passent sous le nom d’amour. […] Le jeu et le talent de l’actrice ajoutent à ce morceau beaucoup de poésie qui n’est pas sur le papier. […] Crébillon ne fait intervenir ni les dieux, ni les prêtres ; il n’a ni spectres, ni tombeau, ni foudres, ni coffre sacré ; il ne se propose pas d’effrayer les enfants et les nourrices, et ne met en jeu que les passions de ses personnages : le merveilleux ne doit point se mêler à l’action tragique. […] Ce poète ingénieux a trois pièces qui se disputent le premier rang : La Surprise de l’amour, Les Fausses Confidences, Les Jeux de l’amour et du hasard.
Comme, selon lui, le propre de l’ honnête homme est de n’avoir point de métier ni de profession, il pensait que la cour de France était surtout un théâtre favorable à le produire : « car elle est la plus grande et la plus belle qui nous soit connue, disait-il, et elle se montre souvent si tranquille que les meilleurs ouvriers n’ont rien à faire qu’à se reposer. » Ce parfait loisir constitue véritablement le climat propice : être capable de tout et n’avoir à s’appliquer à rien, c’est la plus belle condition pour le jeu complet des facultés aimables : « Il y a toujours eu de certains fainéants sans métier, mais qui n’étoient pas sans mérite, et qui ne songeoient qu’à bien vivre et qu’à se produire de bon air. » Et ce mot de fainéants n’a rien de défavorable dans l’acception, car « ce sont d’ordinaire, comme il les définit bien délicatement, des esprits doux et des cœurs tendres, des gens fiers et civils, hardis et modestes, qui ne sont ni avares ni ambitieux, qui ne s’empressent pas pour gouverner et pour tenir la première place auprès des rois : ils n’ont guère pour but que d’apporter la joie partout39, et leur plus grand soin ne tend qu’à mériter de l’estime et qu’à se faire aimer. » Voilà les f ainéants du chevalier. […] On fit pourtant le traité à des conditions plus douces, et le tumulte finit agréablement. » Ainsi voilà, en si beau monde, un sage mari qui, pour être en pointe de vin, se met à jouer un très-vilain jeu, et si au vif que la dame alarmée dégaine l’épée de quelqu’un de la compagnie pour se défendre. […] Cette duchesse de Lesdiguières, qui revient à tout instant sous la plume du chevalier, la Reine des Alpes, comme il l’appelle, la même qui joua un certain rôle sous la Fronde et que Sénac de Meilhan a fort agréablement mise en jeu dans ses prétendus Mémoires de la Palatine, était Anne de la Magdeleine de Ragny, fille unique de Léonor de la Magdeleine, marquis de Ragny, et d’Hippolyte de Gondi. […] Voir la lettre 11e, où il se montre comme assiégé par les créanciers, qui l’empêchaient, de sortir de chez lui et de faire des visites ; la lettre 37e, sur le triste état de ses affaires ; la lettre 8e, sur une dette de jeu.
Le dimanche est pour nous le jour du souvenir ; Car, dans la tendre enfance, on aime à voir venir, Après les soins comptés de l’exacte semaine Et les devoirs remplis, le soleil qui ramène Le loisir et la fête, et les habits parés, Et l’église aux doux chants, et les jeux dans les prés. […] Elle m’y racontait souvent, pour me distraire, Son enfance, et les jeux de mon père, son frère, Que je n’ai pas connu ; car je naquis en deuil, Et mon berceau d’abord posa sur un cercueil. […] Il y placera César (c’est-à-dire Auguste) comme le dieu du temple, et il instituera, il célébrera des courses et des jeux tout à l’entour, des jeux qui feront déserter à la Grèce ceux d’Olympie.
Béranger a trop d’esprit pour avoir tant d’enthousiasme ; il possède son enthousiasme, il n’en est pas possédé ; il le conduit avec un fil imperceptible, mais sûr, partout où il veut passer, comme le conducteur des chars, aux jeux Olympiques, conduit au mouvement du doigt ses coursiers qui ne s’emportent jamais dans la carrière : « Rasant la borne, et ne la touchant pas. » Il n’y brise jamais son essieu, il n’y fait même ni bruit ni poussière ; il arrive sans qu’on s’aperçoive qu’il est arrivé juste, et court au but qu’il s’est proposé. […] Que ferait-on de l’enthousiasme à ce jeu d’adresse ? […] Le père du jeune Béranger, homme spirituel, entreprenant, léger et aimable, disait son fils, s’était jeté tout à la fois dans les jeux de la banque et dans les aventures contre-révolutionnaires. […] La sandale retentissante sur la dalle, chaussée au pied droit, le gant de combat à la main, le plastron sur le sein, l’épée mouchetée au poing, le masque de fil de fer sur le visage, treillis à travers lequel brillait l’ardeur des joues colorées par le jeu du combat, tout ce costume obligé d’un prévôt de salle d’armes devait faire, de la belle Judith, une Clorinde de quinze ans, plus facile à admirer qu’à combattre.
On a dit avec raison que les jeux de l’enfant étaient les exercices préparatoires auxquels la nature le convie en vue de la besogne qui incombe à l’homme fait. Mais on peut aller plus loin, et voir des exercices préparatoires ou des jeux dans la plupart des guerres enregistrées par l’histoire. […] Si ce sont deux partis adverses qui sont en présence, et deux seulement, le jeu se poursuivra avec une régularité parfaite. […] Mais il aura été composé de jaune et de rouge quand ces deux couleurs existeront à leur tour : l’orangé primitif pourra être envisagé alors du double point de vue du rouge et du jaune ; et si l’on supposait, par un jeu de fantaisie, que le jaune et le rouge ont surgi d’une intensification de l’orangé, on aurait un exemple très simple de ce que nous appelons la croissance en forme de gerbe.
Au milieu de ces revers, qui affectent si profondément l’honneur militaire et l’avenir de la monarchie, l’apathie de Louis XV est complète ; « Il n’y a pas d’exemple qu’on joue si gros jeu avec la même indifférence qu’on jouerait une partie de quadrille. » Le seul honneur de Bernis chargé de la partie politique, mais naturellement exclu des questions militaires, et qui n’a qu’un peu plus de faveur que les autres sans avoir plus d’autorité et d’influence aux heures décisives, est de comprendre le mal et d’en souffrir : « Sensible et, si j’ose le dire, sensé comme je suis, je meurs sur la roue, et mon martyre est inutile à l’État. » Il demande un gouvernement à tout prix, du nerf, de la suite, de la prévoyance : « Dieu veuille nous envoyer une volonté quelconque, ou quelqu’un qui en ait pour nous ! […] Le point précis que Bernis avait cru pouvoir saisir pour rentrer dans la voie des négociations pacifiques, avant de plus grands revers qu’il prévoyait, était donc vers janvier et février 1758 ; il avait cru trouver je ne sais quel instant unique « que la sagesse lui montrait du bout du doigt », et qui fut manqué, il commençait cette année 1758 avec les plus noires prévisions, trop tôt justifiées : Nous allons jouer le plus gros jeu du monde.
La conversation, ajoute-t-il, est pour eux un jeu, une mine d’événements. […] C’est qu’à tel jeu la recette de la critique ne suffit pas, et il n’est que le génie qui trouve son art.
» Le comte de Maistre, dans une des charmantes lettres à sa fille, Mlle Constance de Maistre, a badiné agréablement sur cette question, et il y a mêlé des vues pleines de force et de vérité : « L’erreur de certaines femmes est d’imaginer que pour être distinguées, elles doivent l’être à la manière des hommes… On ne connaît presque pas de femmes savantes qui n’aient été malheureuses ou ridicules par la science. » Au siècle dernier, un jésuite des plus éclairés et des plus spirituels, le père Buffier, qui était de la société de Mme de Lambert, dans une dissertation légèrement paradoxale, s’est plu à soutenir et à prouver que « les femmes sont capables des sciences » ; et après s’être joué dans les diverses branches de la question, après avoir montré qu’il y a eu des femmes politiques comme Zénobie ou la reine Élisabeth, des femmes philosophes comme l’Aspasie de Périclès et tant d’autres, des femmes géomètres et astronomes comme Hypatie ou telle marquise moderne, des femmes docteurs comme la fameuse Cornara de l’école de Padoue, et après s’être un peu moqué de celles qui chez nous, à son exemple, « auraient toutes les envies imaginables d’être docteurs de Sorbonne », — le père Buffier, s’étant ainsi donné carrière et en ayant fini du piquant, arrive à une conclusion mixte et qui n’est plus que raisonnable : À l’égard des autres, dit-il, qui ont des devoirs à remplir, si elles ont du temps de reste, il leur sera toujours beaucoup plus utile de l’employer à se mettre dans l’esprit quelques connaissances honnêtes, pourvu qu’elles n’en tirent point de sotte vanité, que de l’occuper au jeu et à d’autres amusements aussi frivoles et aussi dangereux, tels que ceux qui partagent la vie de la plupart des femmes du monde. […] comme elle préférait vos doctes recueils aux jeux de son âge !
À le voir, cependant, tel qu’il était d’abord et qu’il dut être avant les accidents qui rembrunirent ses pensées, il paraît avoir eu bien des heures de gaieté, de joie, et de la plus gracieuse sociabilité ; il excellait aux jeux de son âge, et particulièrement à la crosse et au ballon. […] Cependant il était fort amusant à sa manière ; ses maussaderies mêmes étaient un sujet de divertissement, et, dans ses jeux, il gardait un tel air de gravité, et il s’acquittait de ses repas avec une telle solennité de manières, qu’en lui aussi j’avais un agréable compagnon.
On se donne bien du mal pour arriver à être juste, à voir juste, et quand on a à peu près atteint le point, entrent à l’instant de nouveaux venus qui brouillent tout encore une fois, remettent tout en jeu, et, au nom de leurs passions ou de leurs convictions, ne veulent voir qu’un côté, sont excessifs dans l’enthousiasme comme dans l’invective ; et c’est ainsi que tout est à recommencer toujours. […] Il devait y être préparé par ses conversations avec Bolingbroke, qu’il avait beaucoup vu à Paris et à sa terre de la Source, près d’Orléans ; mais l’impression qu’il reçut de ce spectacle nouveau, moins encore de la chose politique et du jeu de la constitution que du groupe philosophique et librement penseur qu’il y rencontra, paraît avoir surpassé son attente ; elle fut sur lui profonde et indélébile.
. — Un billet du roi, de quelques lignes, lui fournit prétexte à deux pages de réflexions (p. 365-366) sur les autres rois qui perdent leur temps de mille manières, tandis que Frédéric le perd à rimer : « Je leur pardonne de donner à la chasse, à la bonne chère, au jeu, à la représentation, plus d’heures que je n’en donne à mes amusements littéraires. […] Ce ne sont point là des supercheries innocentes, et l’on ne saurait y voir de simples jeux de l’esprit.
Je laisse les souvenirs de Rouen comme trop lointains et trop vagues ; mais, depuis sa translation au siège de Paris, depuis qu’il avait changé de théâtre, comme il lui était échappé un jour de le dire, il n’avait pas changé de jeu, et les chansons n’avaient cessé de pleuvoir : À Paris comme à Rouen, il fait tout ce qu’il défend ; et bien d’autres refrains qu’il faut chercher dans le Recueil de Maurepas et qu’on ne peut redire. […] Il était Harlay, cinquième du nom ; ce qui prêtait au jeu de mots (Arlequin).
Il est orphelin de naissance et d’enfance ; il a perdu sa mère presque en naissant, et, peu d’années après, son père ; il a grandi au milieu des vieux domestiques de la maison, et a eu pour compagnons de jeux les enfants des paysans du voisinage. […] Entre lui et Madeleine, mariée, femme du monde, il s’engage un jeu délicat, périlleux, dans lequel calme, supérieure, affectueuse et sans émotion d’abord, elle s’efforce de le ramener, de le guérir.
On dit que vous négligez de parler aux grands, de les distinguer ; qu’à la table, au jeu, vous ne vous entretenez qu’avec vos jeunes dames, en leur parlant à l’oreille, en riant avec elles. […] » Ce dernier mot est dit à l’occasion des jeux de hasard, dont la reine donnait l’exemple et qu’elle favorisait.
Du moment que c’était une révolution et non une réforme, il n’était plus qu’un vaincu ; il a été battu et annulé dès le 14 juillet, dès le serment du Jeu de Paume. […] L’espèce de jeu de scène et de surprise qu’on ménagea et sur laquelle on comptait en cette circonstance ne pouvait qu’ajouter au mauvais effet.
Il y a une intrigue sous jeu dont les fils échappent. […] … Je me tais par prudence, et plutôt pour vous que pour moi… » Berthier, ce grand chef d’état-major dont je ne prétends point méconnaître les mérites appropriés au génie du maître, mais « à qui il fallait tout dicter » ; Berthier, « à qui vingt campagnes n’avaient pas donné une idée de stratégie », et qui n’en avait que faire sans doute dans son rôle infatigable d’activité toute passive ; Berthier, qui, au début de la dernière guerre d’Allemagne (1809), dépêché d’avance à Ratisbonne pour y rassembler l’armée, avait signalé son peu de coup d’œil personnel, son peu de clairvoyance dans l’exécution trop littérale des ordres en face d’une situation non prévue ; Berthier, qui pourtant s’était vu comblé de toutes les dignités, de toutes les prérogatives, et finalement couronné et doté jusque dans son nom de cette gloire même de Wagram, — un tel personnage avait certes beau jeu contre un simple officier en disgrâce, dont il ne prévoyait pas les titres distingués et permanents auprès de tous les militaires instruits et des studieux lecteurs de l’avenir.
Je ne promets pas de me rendre aveuglément à toutes vos critiques (quoique vous en soyez trop avare avec moi) : nous avons tous une partie de nous-même en jeu dans nos œuvres, et nous tenons souvent autant à nos défauts qu’à nos qualités ; mais un lecteur éclairé voit mieux que nous, quand nous rendons bien ou mal nos idées les plus personnelles, et nous empêche de donner une mauvaise forme à nos sentiments. […] Elle a pu et dû se tromper quelquefois, et avec violence, mais toujours avec sincérité ; personne n’a joué plus franc qu’elle à ce jeu si périlleux de la vie.
Je ne prétends pas dire que Gresset n’ait pas eu là d’heureuses années embellies de succès légitimes ; des idées riantes, un certain jeu de vivacité naturelle et de mollesse voluptueuse, quelques éclairs de tendresse, des accents sortis d’un cœur droit, d’une âme honnête et bonne, animaient ces productions de sa veine dans leur fraîcheur : presque tout cela, encore un coup, a disparu. […] et que cela donnait beau jeu à Voltaire de s’écrier dans le Pauvre Diable, qui est justement de l’année suivante : ………….
Il aima trop le jeu, la table, tous les plaisirs, et la pauvreté l’affola toute sa vie, parce que ses vices étaient plus forts que ses protecteurs et ses pensions. […] La littérature où la raison tend à dominer, s’oriente vers l’universel : elle reconnaît pour son objet ce dont chacun trouve en soi, la vérité et l’usage ; rien ne lui sera plus propre que la vie humaine, que les faits moraux, les forces et les freins que met en jeu dans Taine l’existence de chaque jour.
Mais ce mépris, je l’avoue, se change en une profonde indignation quand je crois m’apercevoir qu’un certain étalage de sensibilité n’est qu’un jeu de théâtre. […] Mais en ce qui est de la France, de la connaissance des partis, du jeu des divers éléments, de leur qualité et de leur force relative, il est juge excellent.
C’est ainsi que pour le jeu, qu’il croyait un ingrédient nécessaire dans la composition d’un jeune homme de bel air, il s’y plongea sans passion d’abord, mais ne put s’en retirer ensuite, et compromit par là pour longtemps sa fortune. […] Or, c’est précisément ce feu sacré, cette étincelle qui fait les Achille, les Alexandre et les César, être le premier en tout ce qu’on entreprend, c’est cette devise des grands cœurs et qui est celle des hommes éminents en tout genre, que la nature avait tout d’abord négligé de mettre dans l’âme honnête, mais foncièrement médiocre, du petit Stanhope : Vous paraissez manquer, lui disait son père, de ce vivida vis animi qui anime, qui excite la plupart des jeunes gens à plaire, à briller, à effacer les autres. — Quand j’étais à votre âge, lui dit-il encore, j’aurais été honteux qu’un autre eût mieux appris sa leçon, l’eût emporté sur moi à aucun jeu, et je n’aurais trouvé de repos que je n’eusse repris l’avantage.
Ce jeu est décrit avec grâce et vivacité. […] Les deux jeunes filles, l’aimante et la légère, apportent au jeu un même intérêt de curiosité et d’effroi : « Les deux bouches sont sans parole ; les quatre yeux riants, effrayés, suivent le mouvement des doigts. » Tout allait bien, les cartes promettaient, presque tous les piques étaient dehors, quand, pour dernière carte, la fatale dame de pique tombe et vient crier : Malheur !
Parquoi Numa, pensant bien que ce n’étoit pas petite ne légère entreprise que de vouloir adoucir et ranger à vie pacifique un peuple si haut à la main, si fier et si farouche, il se servit de l’aide des dieux, amollissant petit à petit et attiédissant cette fierté de courage et cette ardeur de combattre, par sacrifices, fêtes, danses et processions ordinaires que il célébroit lui-même… Et plus loin, marquant que, durant le règne de Numa, le temple de Janus, qui ne s’ouvrait qu’en temps de guerre, ne fut jamais ouvert une seule journée, mais qu’il demeura fermé continuellement l’espace de quarante-trois ans entiers : Tant étoient, dit-il, toutes occasions de guerre et partout éteintes et amorties : à cause que, non seulement à Rome, le peuple se trouva amolli et adouci par l’exemple de la justice, clémence et bonté du roi, mais aussi aux villes d’alenviron commença une merveilleuse mutation de mœurs, ne plus ne moins que si c’eût été quelque douce haleine d’un vent salubre et gracieux qui leur eût soufflé du côté de Rome pour les rafraîchir : et se coula tout doucement ès cœurs des hommes un désir de vivre en paix, de labourer la terre, d’élever des enfants en repos et tranquillité, et de servir et honorer les dieux : de manière que par toute l’Italie n’y avoit que fêtes, jeux, sacrifices et banquets. […] Dans le style de Longus, ce ne sont, à bien des endroits, que phrases à compartiments, avec des membres symétriques accouplés artistement et ayant volontiers des sortes de rimes et d’assonances : tout cela sent le jeu et la recherche du rhéteur.
Assistant à toutes ces choses avec un esprit clairvoyant et non acharné, n’y prenant plaisir d’abord que pour se désennuyer, elle a en elle de bonne heure une ressource qui lui vient de famille, c’est d’écrire ; aux moments que les autres dames donnent au jeu ou à la promenade, elle s’enferme et elle note ce qu’elle a vu, ce qu’elle a entendu, pour se le rappeler un jour. […] Le genre d’adresse du cardinal Mazarin, sa dissimulation, la grâce et la finesse de son jeu, cet esprit de cabinet où il excellait, et « qui fait jouer tant de grandes machines », nous est rendu avec fidélité et vie par une personne qui, sans avoir à se louer de lui, a le mérite d’apprécier avec équité ses parties supérieures.
« J’ai souvent remarqué avec étonnement, dit encore Mme de Motteville, que dans ses jeux et dans ses divertissements ce prince ne riait guère. » On a une lettre par laquelle il demande au duc de Parme (5 juillet 1661) de lui faire venir un Arlequin pour sa troupe italienne : il le demande dans les termes du plus grand sérieux, et sans le moindre petit mot de gaieté. […] Louis XIV, peu instruit dans les lettres, et dont la première éducation avait été fort négligée, avait reçu cette instruction bien supérieure qu’un esprit juste et droit et qu’un cœur élevé puisent dans les événements où l’on est de bonne heure en jeu.
Sa constitution s’y trempa vigoureusement, et ce qui eût été souffrance pour un autre n’était qu’un jeu pour lui. […] Ce sont là de ces jeux du sort, lequel, au milieu de ses rigueurs, a aussi ses réparations et presque ses piétés, et qui semble ici avoir voulu apprendre la réconciliation et la clémence aux hommes.
Ce sont les petites choses qui l’ont décidé, les petites vexations locales, de voir des abus de pouvoir dans l’endroit, de voir un homme trop puni pour avoir manqué au curé, d’entendre ce curé défendre le cabaret aux paysans le dimanche, enfin des querelles de maire et de garde champêtre ; c’est ce qui le décida pour l’opposition ; et, une fois piqué au jeu, il y prend goût : le talent, chez lui, qui cherchait jour et matière et qui s’ennuyait à ne point s’exercer, s’empare de ces riens et en fait à la fois des thèmes d’art achevés et de merveilleuses petites pièces de guerre. […] Cette légère incohérence du rôle, et que toute l’habileté du jeu ne saurait couvrir, se retrouve un peu dans l’expression même, qui reste sensiblement artificielle et sans une complète fusion ; style de campagnard manié par un docte.
La définition de l’œuvre d’art comprend au même titre le roman feuilleton et le roman d’analyse, les genres supérieurs et bas ; elle s’applique aussi bien à l’émotion d’un charretier écoulant une chanson de café-concert, qu’à celle d’un poète charmé par un lied de Schumann, d’un philosophe admirant les démonstrations de Malebranche, ou d’un ingénieur suivant le jeu d’une locomotive. […] Guyau contre la théorie qui fait de l’œuvre d’art un jeu, un moyen artificiel d’émouvoir fictivement proviennent de ce que cette hypothèse paraît écarter de l’art toute notion d’agrément, d’utilité, de réalité, de bonté.
Mais on sa science des nuances morales, son habileté à minutieusement analyser la dépendance et le jeu des départements spirituels, atteint encore au plus liant, c’est dans le débat d’un des problèmes psychologiques les plus considérables de notre époque, celui dont la solution importe le plus à nos races débilitées par une culture intellectuelle trop rapide : l’atrophie graduelle de la volonté par le développement excessif de l’intelligence. […] Tout n’est que fumée et vapeur, pensait-il, tout paraît perpétuellement changer, une image remplace l’autre, les phénomènes, succèdent aux phénomènes mais en réalité tout reste la même chose ; tout se précipite tout se dépêche d’aller on ne sait où, et tout s’évanouit sans laisser de trace, sans avoir rien atteint ; le vent a soufflé d’ailleurs, tout se jette du côté opposé, et là recommence sans relâche le même jeu fiévreux et stérile. » Ailleurs ces passages attristés ne manquent pas, et même dans les pages les plus souriantes, on voit que la plume est tenue par un homme qui connaît la vanité d’énormément de choses, qui s’en afflige, qui s’en persuade et ne peut cependant se résigner à la vanité de son propre être.
L’effet moral vraiment digne de ce nom, sur une scène élevée, doit sortir du spectacle même de la nature humaine observée et saisie dans le jeu varié de ses passions, dans ses misères et dans ses grandeurs, et jusque dans l’énergique naïveté de ses ridicules.
Les procureurs du roi de chefs-lieux d’arrondissement et même les présidents de cour sont émus et correspondent avec l’auteur pour lui soumettre leurs idées et discuter les siennes ; il répond dans les Débats très-officiellement et sans rire à ces missives qui lui donnent un caractère respectable et qui servent à couvrir son jeu.
Voici l’article sur Cinq-Mars, tiré du Globe, 8 juillet 1826 : Pendant que Richelieu, vainqueur des grands et des calvinistes au dedans du royaume, et de la maison d’Autriche au dehors, poursuivait tout ensemble, dans cette triple voie de l’organisation intérieure, de la religion et de la politique, les plans tour à tour conçus et ébauchés par Louis XI contre la féodalité, par François Ier contre la réforme, et par Henri IV contre la postérité de Charles-Quint, Louis XIII, indolent et mélancolique, renfermé dans ses maisons de plaisance, cherchait à tromper son ennui par des jeux puérils ; son goût le plus prononcé était d’élever et de dresser des oiseaux.
Mais, si toutes les conséquences de l’art nouveau ne sont pas tirées, s’il reste encore des applications possibles au gré des génies inventeurs, si, parmi les idées en jeu dans la société, il en est quelqu’une, noble et féconde, qui attende encore son organe éclatant et son expression éternelle, rien ne s’arrête ; la révolution que les uns ont entamée se consomme par d’autres, et le siècle accomplit jusqu’au bout sa destinée de gloire.
Quand l’Assemblée eût été moins sage, moins logique et moins rationnelle qu’elle n’a été, quand le parti Mounier et Lally eût pris le dessus par impossible et fait avorter les conséquences législatives du jeu de paume, qu’aurait-on gagné, je le demande ?
Sainte-Beuve de leurs hostilités, jouent, sans s’en douter, un mauvais jeu.
Ils se livraient à ces exercices pour leur santé, et n’avaient pas l’air de se douter que rien au monde n’était plus risible que le contraste de leur extérieur pédantesque et de leurs jeux enfantins.
Bientôt les événements dans leur réalité nous présentent nos enfants élevés par nous, pour d’autres que pour nous-mêmes, s’élançant vers la vie, tandis que le temps nous place en arrière d’elle, pensant à nous par le souvenir, aux autres par l’espérance ; quels parents sont alors assez sages, pour considérer les passions de la jeunesse comme les jeux de l’enfance, et pour ne pas vouloir occuper plus de place parmi les unes que parmi les autres ?
Pendant un temps, l’Angleterre, l’Italie méridionale et la Sicile appartiennent à la langue d’oïl : une riche littérature de langue française s’épanouit des deux côtés de la Manche dans les possessions des successeurs de Guillaume le Conquérant, et le Jeu de Robin et Mur ion fut écrit au xiiie siècle pour divertir la cour française de Naples.
Je me rappelle les longues fuites de Maupassant hors de la société des hommes, ses solitudes de plusieurs mois, en mer ou dans les champs, ses tentatives de retour à une vie simplifiée, toute physique et tout animale, où il pût oublier l’ennemi sourd, l’ennemi patient qu’il portait en lui ; puis, quand il rentrait parmi nous, cette fièvre d’amusement, et de plaisanteries, et de jeux presque enfantins, qui était encore comme une fuite, une évasion hors de soi… Vains efforts !
Je crois savoir que vous êtes de mon avis et que vous en avez assez des politiciens de l’ancien jeu, des Cléons sans bonté et sans grâce, sceptiques à la fois et sectaires, car l’un n’exclut pas toujours l’autre.
Mais il serait absurde de supposer qu’il est incompréhensible ; le jeu de citer tels vers, obscurs par leur isolement, n’est pas loyal, car, même fragmentée, la poésie de M.
Moréas est-il moins précieux chanteur de Madeline et d’Æmilius, après avoir expliqué, sur une table du café Voltaire, l’évolution de la littérature française, par le jeu étonnamment simplet de quelques moitiés d’allumettes ?
La muraille semblait par le vent remuée ; C’étaient des croisements de flamme et de nuée, Des jeux mystérieux de clartés, des renvois D’ombre d’un siècle à l’autre et du sceptre aux pavois, Où l’Inde finissait par être l’Allemagne, Où Salomon avait pour reflet Charlemagne ; Tout le prodige humain, noir, vague, illimité ; La liberté brisant l’immuabilité ; L’Horeb aux flancs brûlés, le Pinde aux pentes vertes ; Hicétas précédant Newton, les découvertes Secouant leurs flambeaux jusqu’au fond de la mer, Jason sur le dromon, Fulton sur le steamer ; La Marseillaise, Eschyle, et l’ange après le spectre ; Capanée est debout sur la porte d’Électre, Bonaparte est debout sur le pont de Lodi ; Christ expire non loin de Néron applaudi.
Les anagrammes & les jeux de mots lui plaisoient singulièrement.
Non contente d’augmenter le jeu des passions dans le drame et dans l’épopée, la religion chrétienne est elle-même une sorte de passion qui a ses transports, ses ardeurs, ses soupirs, ses joies, ses larmes, ses amours du monde et du désert.
La gestion des grandes affaires, l’art d’appliquer les hommes aux emplois pour lesquels ils sont nez ; la medecine, le jeu même, tout a son génie.
Le joueur de trictrac, qui de vingt parties qu’il joüe avec la même personne en gagne dix-neuf, passe constamment pour sçavoir le jeu mieux qu’elle, quoique le caprice des dez puisse faire gagner deux parties de suite au joüeur malhabile contre le joueur habile.
Mais au point de vue catholique, la curiosité de savoir pour savoir n’est-elle pas une vanité aussi coupable que la folie du jeu, la débauche et autres « divertissements » ?
Je ne puis me faire une image du jeune Hippolyte-Adolphe jouant ses premiers jeux dans Vouziers.
Renée, pour une prochaine édition, de mieux marquer le contraste de l’une des figures, celle de la princesse de Conti, l’aînée des Martinozzi, avec ses brillantes sœurs et cousines qui aimaient tant le plaisir, le jeu, la folle et spirituelle orgie. […] Comprendre quelque chose au jeu de la machine, avoir la moindre idée de la constitution anglaise, impossible ! […] Je ne sais ce qu’a voulu nous dire Stendhal par cette note ; s’il a prétendu dire que le duc de Nivernais était un de ces petits-maîtres et qu’il n’a rien compris au jeu de la machine anglaise, il s’est trompé, et cette correspondance même qu’il atteste, et qui n’est qu’une faible partie des dépêches dont cependant elle peut donner l’idée, en est la meilleure preuve.
Car, à un degré modéré et dans les limites du moraliste, elle avait l’imagination inventive ; ses pensées, loin de rester à l’état de maximes, entraient volontiers en jeu et en conversation dans son esprit ; elle savait faire vivre et agir sous quelques aspects des caractères qui n’étaient pas de simples copies. […] On fait alors, si l’on est sensible, comme Gray qui, revoyant le collége d’Éton et les jeux des générations folâtres, se dit, après avoir souri d’abord à leurs ébats et se les être décrits complaisamment : Hélas ! devant la bergerie, Agneaux déjà marqués du feu, La troupe, de plaisir, s’écrie Sans regarder la fin du jeu.
Qu’il est bien, par exemple, de nous montrer, à la fin d’une scène joyeuse, Virginie à qui ces jeux de Paul (d’aller au-devant des lames sur les récifs et de se sauver devant leurs grandes volutes écumeuses et mugissantes jusque sur la grève) font pousser des cris de peur ! […] A partir de ce moment, depuis ce cri perçant de Virginie pour un simple jeu, le calme est troublé ; la langueur amoureuse dont elle est atteinte la première, et à laquelle Paul d’abord ne comprend rien (autre délicatesse pudique), va s’augmenter de jour en jour et nous incliner au deuil ; on entre, pour n’en plus sortir, dans le pathétique et dans les larmes. […] Le chenu vieillard a mille fois raison sur lui-même quand il se déclare à son ami par ce naïf étonnement : « Il y a dans mon clavecin poétique des jeux de flûte et de tonnerre ; comment cela va-t-il ensemble ?
Nous ne vous en donnerons ici qu’un exemple ; il y en a presque autant que de pages dans ce pire des jeux d’esprit, le jeu de mots, le son pris pour l’idée, la parole pervertie de son sens. […] les Grecs nous avaient devancés dans l’invention du jeu de mots.
J’abrège ; … je m’arrête ; … j’ai trop beau jeu. […] Heureusement que ceux qui la méprisent dans un bonnet la vénèrent dans un chapeau. » Saillie peu décente dans la bouche d’un évêque, assimilant par un jeu de mots le bonnet rouge du terroriste au chapeau du cardinal, d’un évêque, exaltant ce dont Robespierre et d’autres avaient rougi : le terroriste avait fait un digne prosélyte ! […] J’ai trop beau jeu.
C’est un jeu pour lui, comme pour l’ogre du Chat botté, de se changer en toute sorte d’animaux. […] Transplanté chez une race plus dure, qui versait à îlots le sang dans ses jeux, le dieu reprit ses instincts féroces, son mauvais génie se réveilla brusquement. […] Alors on les voit inter rompre leurs jeux, cesser leurs grimaces et leurs contorsions.
La première sensation devient ainsi le signe de l’autre, et la classification des objets, où Platon voyait une opération du pur esprit, se fait alors par le fonctionnement automatique des cellules cérébrales, par le jeu de l’habitude et de la sélection mentale. […] répond de Hartmann, l’égalité ne se tire pas davantage des perceptions seules que les choses font naître en nous, car le même raisonnement s’appliquerait ici aux perceptions, dont la première ne peut enrichir la seconde d’une qualité nouvelle. » De Hartmann est dupe des jeux de sa dialectique : il considère les perceptions comme de petits cubes qui existent l’un en dehors de l’autre avec une parfaite indifférence l’un pour l’autre, si bien que leur voisinage ne leur apporte pas le moindre changement. […] Outre qu’il ne rend compte ni de la sensation même, ni de l’émotion, il ramène la formation de la pensée à un jeu d’impressions passives et reçues toutes faites du dehors ; il méconnaît la part de la réaction dans le cerveau.
Pour avoir voulu régénérer le roman par l’emploi d’une psychologie presque uniquement dressée à surprendre et à noter le jeu des plus furtifs mouvements de l’âme, ils ont quintessencié à l’excès, ils ont trop raffiné, trop subtilisé ; ils sont vite devenus ennuyeux. […] Tout comme le colossal auteur de la Comédie humaine, les plus puissamment musclés d’entre nos écrivains d’imagination ont voulu se mettre eux-mêmes tout entiers dans une œuvre de trame continue ; rassembler de nombreux personnages et poursuivre leurs destinées à travers des compositions successives, les montrer en action, et observer leurs mobiles ou le jeu de leur énergie au milieu des aventures les plus diverses. […] Au reste, la gravité redoutable du problème rend plus angoissant encore qu’un drame de pitié ce débat intime qui, sans aucun moyen artificiel, par le jeu des seuls événements de la vie courante, étreint quelques âmes jusqu’au plus violent désespoir.
Elle n’a rien tant en recommendation que les jeux, les danses, les spectacles. […] Quand on veut comprendre les comédies dans les anathêmes qu’elle prononce contre le jeu, le vin, la table, la parure, les tableaux, le luxe, c’est qu’on ne réfléchit pas que ces anathêmes tombent moins sur ces choses là, que sur l’abus qu’on peut en faire. […] La Vénus du Titien & celle du Corrège, qui sont toutes nues, offensent-elles moins notre jeunesse modeste, que le jeu de nos acteurs ?
Bien que certaines de ses poésies révèlent un commerce intime avec la Bible, c’est là, nous assure-t-on, jeu de poète et sa vraie pensée était ailleurs. […] Un instinct de distinction extrême le porte à négliger certains ressorts et moyens très nécessaires à l’effet théâtral et au jeu de la scène. […] La Coccinelle est une gentillesse de printemps, gâtée par un jeu de mot. […] Il arrangea si bien son jeu, grâce à son front chauve et à son air prématurément vieilli, qu’il éluda la terrible levée militaire. […] Dans cette mesure-là, l’espoir n’est jamais perdu et le mari a beau jeu pour sortir sain et sauf du péril.
Mais ce n’est pas un jeu pour de Maistre. […] A ce jeu, on risque, comme on sait, d’être confondu avec eux. […] Nous ne lui refusons pas notre admiration, et même il faudrait peu de chose pour que nous prissions au jeu, en ne le tenant que pour un jeu, autant de plaisir qu’il en prend lui-même. […] On sent bien qu’il y a plus de jeu et plus de tâtonnement dans la marche de l’humanité et du monde. […] Il adorait le monde, les dîners, les soupers, les soirées, les conversations, les discussions, le jeu.
Molinier n’ait pas tort ; mais je ne puis m’empêcher d’observer d’abord que le passage n’est pas écrit de la main de Pascal ; qu’en plusieurs endroits des Pensées tout le monde sait que Pascal a tiré ses exemples ou comparaisons du jeu de la « balle » ou de la « paume », mais nulle part ailleurs qu’ici du jeu de la barre ou des barres ; enfin que M. […] Qui voudrait s’ingénier et s’obstiner à ce jeu, trouverait dix indications peut-être encore, dont chacune, ainsi détachée de l’ensemble et curieusement examinée, pourrait être donnée comme la clef de l’édifice tout entier. […] De retour à Paris, sur la scène du jeu de paume des Métayers, M. […] Un sieur Dufresne présente requête au lieutenant particulier de la ville pour être mis en possession d’un jeu de paume loué par les comédiens, et qu’on tardait à leur livrer. […] Il en est une, plus générale, plus littéraire surtout : c’est que pour peindre des caractères il est à peine besoin des secours extérieurs, du décor, du costume, des jeux et des coups de théâtre.
Le voyageur anglais, Arthur Young, dont on a lu les curieuses relations, s’extasiait sur le luxe et la magnificence des commerçants de Bordeaux. « Leurs maisons et leurs établissements, écrivait-il, sont d’un genre dispendieux ; ils donnent de grands repas et plusieurs sont servis en vaisselle plate. » Quelques-uns d’entre eux étaient dix ou douze fois millionnaires ; et dans les soirées qui réunissaient la haute société commerciale les femmes faisaient assaut de diamants et les hommes luttaient de profusion aux tables de jeu ; car le jeu, cette passion dominante du dix-huitième siècle, prélevait son impôt sur ces immenses fortunes, mais jamais de façon à les tarir. […] « De tant de jeux, de tant de fêtes, de tant de jours, mes plus beaux jours, de mon printemps, que me reste-t-il ? […] Les Jeux Floraux, célébrés à la même époque, devaient décerner une couronne à Victor Lieutaud, le sympathique poète marseillais, l’auteur de Marius, dont les vers tonnent comme l’entrechoquement des hordes sauvages avec les cohortes de légionnaires romains. […] Il avoua, nomma des complices, se rétracta, les nomma de nouveau, bref, mit en jeu tous les subterfuges qu’il est d’usage d’employer pour sauver sa tête lorsqu’on ne la sent plus très solide sur ses épaules. […] Paul Gourdou (d’Alzonne) présentait, aux Jeux Floraux de la Maintenance du Languedoc (1880), un drame en vers, Anfos (Alphonse), qui est plus lyrique que respectueux des exigences scéniques.
Les comédiens auront une diction et un jeu naturels. […] Elle marque sa défiance par un jeu de physionomie. […] Il se peut même que j’en aie ajouté, par jeu. […] Son jeu est ardent et contenu, passionné et plastique. […] Bref, on sentait dans son jeu l’effort d’une intelligence.
Daudet rappelle beaucoup le jeu du massacre. […] Et il faut voir comme il s’échauffe à ce jeu, M. […] C’était le vieux jeu et nous avons changé tout cela. […] C’est un jeu pour lui. […] N’admirez-vous pas encore ici les grandes conséquences d’un jeu de mots ?
… Les masques, les tournois, tous les jeux où elle se plaisait auparavant, lui deviennent ennuyeux ; elle fuit la ville et, comme jadis l’amoureux Pétrarque, elle recherche les bois épais et solitaires. […] Rome est un échafaud public, une scène, un théâtre où se voit le jeu de la fortune, où chacun, malgré sa prudence, se montre à la fin tel qu’il est ; où les courtisans font l’amour et trament l’intrigue, où l’ambition et la duplicité abondent, où l’oisiveté rend le bon vicieux, où le vil faquin discourt des faits du monde. […] Nous avons de lui des Amours, des Mimes, des Passe-Temps, des Jeux, des Églogues, des Psaumes, des Chansonnettes, des Poèmes mêlés et copieux. […] Le jeu sans vous n’a point de grâce, Et sans vous, Grâces, le plaisir Ne peut plaire en aucune place, Ny contenter aucun désir. […] Car le seul juste point est un jeu de balance.
Aux jeux il éblouissait, et le Journal parlera plus tard de plus de dix-huit cents coups, réussis de suite au volant. […] Presque tout son temps libre du 6 mars 1840 est employé « à rédiger cette petite carte de quatre pouces de surface, où se trouvent toutes les règles que j’adopte pour ma conduite. » Quand il sera professeur, ses cours consisteront à donner à ses élèves des plans compliqués, abondants, bien faits, avec des subdivisions indéfinies et des jeux d’accolades. […] Sur ce terrain de la paresse, élastique et doux comme un tapis de billard, l’éternel ennemi sait les finesses du jeu. […] C’était le futur Marc Monnier, à qui l’étudiant suisse, contraint de garder la chambre pendant deux mois à cause d’un mal au genou, fut appelé à donner des leçons : il lui apprit au moins la manière de faire des vers, et le jeu d’échecs. […] Quand j’ai voulu entrer dans l’église, où résonnait un jeu d’orgues solennel, j’ai trouvé la porte fermée ; alors je ne sais quelles images lugubres se sont mises à défiler devant ma fantaisie ébranlée.
Le nerf est un simple conducteur ; de quelque point que parte son ébranlement pour aller éveiller l’action des centres sensitifs, la même sensation se produit et entraîne le jeu du même mécanisme interne, c’est-à-dire l’attribution de la sensation à tel endroit qui n’est pas le centre sensitif. […] Ainsi, étant donnée une sensation visuelle à laquelle ne correspond aucun objet extérieur, elle provoque le jeu d’un mécanisme interne qui la transporte hors de nous et qui, selon qu’elle est telle ou telle, munie de tels ou tels accompagnements, la situe ici ou là, toujours à l’endroit où dans les circonstances ordinaires sa cause ou condition ordinaire a coutume d’être : la loi est générale et explique toutes les illusions d’optique. — Par conséquent, même dans les circonstances ordinaires, lorsque la cause ou condition ordinaire, c’est-à-dire l’objet, est présent et occupe l’endroit désigné, lorsqu’un fauteuil rouge ou un arbre vert est réellement à six pieds de moi, le mécanisme interne fonctionne comme dans le cas exceptionnel où j’ai dans la rétine une impression consécutive, comme dans le cas exceptionnel où j’ai dans les centres cérébraux une hallucination proprement dite. […] Le lecteur les a vues quand nous avons montré la persistance sourde des images, leur vie latente, leur état rudimentaire, l’effacement qu’elles subissent, souvent pendant des années entières, et la prédisposition organique qui les conserve à l’état hibernant ou nul, comme la vie d’un rotifère desséché, jusqu’au moment où les cellules corticales en qui cette prédisposition est établie reprendront leur jeu, propageront leur danse et ramèneront l’image correspondante au premier plan cérébral. […] De l’usage prolongé de ces symboles et de leur assemblage en symboles plus complexes, naissent nos idées de l’étendue visible, idées qui, comme celles d’un algébriste occupé à résoudre une équation, sont tout à fait différentes des idées symbolisées, et qui cependant, comme ces idées de l’algébriste, occupent l’esprit tout entier avec exclusion complète des idées symbolisées ». — Il suit de là qu’à l’état actuel, pendant le jeu des substituts optiques, l’image des longues sensations musculaires et tactiles qu’ils remplacent doit être absente. […] À la fin, le volet disparut, et il vit et reconnut tous les objets dans leurs justes proportions. » (Franz, On the Eye, p. 34, 36.) — Le docteur Franz ajoute : « Puisque les idées sont produites par la réflexion appliquée aux sensations, pour qu’un individu se fasse par la vue une idée exacte des objets, il est nécessaire, dans tous les cas, que les facultés de son esprit soient complètes et aient leur jeu libre.
Ce n’est point seulement un jeu. […] Et ceci n’est pas jeu d’antithèse de ma part. […] Il réussit du reste pleinement à ce jeu aimable. […] Elles ne sont que les définitions du jeu de cet organisme. […] » ; ce sont là des jeux pour Voltaire. — Ce ne lui sont pas même des jeux.
C’est un entraînement fatal et un jeu assez dangereux. […] L’homme qui a inventé le jeu, a un besoin d’employer son activité à quelque chose qui n’ait pas d’objet, et, si on lui interdit le jeu supérieur, c’est aux jeux bas ou au moins frivoles qu’il aura recours. […] Si vous vous livrez au jeu scientifique très intéressant où M. […] Le jeu des abstractions est dangereux parce qu’il est facile et parce qu’il est délicieux. […] Il finit par être un jeu de l’esprit avec lui-même.
Ce ne sera qu’un jeu, bien entendu, mais un jeu sincère. […] Taine fait voir le jeu des nerfs, ils montraient l’action du diable, mais la psychologie n’était pas bien différente. […] ma bonne vieille, mon mari est un jaloux qui me couperait le nez pour m’empêcher de gagner encore à ce jeu de bagues. […] Il avait vu, dans le corridor noir du petit hôtel où se tenait le Comité de salut public, des fillettes prendre des paquets et des lettres pour madame de Chalabre, femme de l’entrepreneur des jeux, et grande dévote du sauveur futur. […] C’est là un jeu d’impie et l’on sait où il mène.
De-là les jeux de mots qui regnerent long-tems, et les jeux d’esprit dont on s’est corrigé encore plus tard. […] Voilà un jeu de mots ridicule, et qui ne peut pas tomber dans l’esprit d’un amant véritablement touché. […] La différence que je trouve entre les jeux de mots et les jeux d’esprit, c’est que dans les uns on abuse de la ressemblance des termes, pour unir ensemble des idées qui n’ont point de raport, ce qui ne peut jamais être qu’un vuide de sens et de raison ; au lieu que le vice des jeux d’esprit n’est pas de manquer de sens ; mais seulement de blesser le naturel, et de s’étudier à ranger ses pensées dans une simétrie brillante et difficile qui ne marque ni vraïe passion ni raisonnement sérieux. […] Les anthitèses ne sont donc blâmables, et ne deviennent des jeux d’esprit, que par la recherche et la continuité ; en un mot quand l’art et l’effort se font trop sentir. […] Ils s’applaudiront même d’avoir donné l’air de faute à quelque chose de raisonnable, d’autant plus qu’il leur a fallu plus d’adresse pour le présenter sous ce faux jour ; et le spectateur, qui de son côté se prête volontiers à la séduction, croit la critique exacte, dès qu’elle est plaisante : or je dis que ces jeux d’esprit entretiennent le mauvais goût, produisent la précipitation des jugemens, et accoutument à prendre de bons mots pour des raisons.
C’est alors qu’on tenta de les séparer les uns des autres, de mettre en jeu de basses intrigues, de les isoler afin d’en avoir plus facilement raison. […] À cause de cela surtout, ils se distinguent de leurs aînés immédiats, les Symbolistes qui se montrèrent des cérébraux, experts aux jeux intellectuels, passionnés pour l’idéologie. […] Un jeu de lumière sur la surface quasi saignante d’un toit de tuiles, le spectacle d’un paysage vaporeux qui se noie peu à peu dans des lointains crépusculaires, tout cela le fait défaillir, le tient en extase tout un jour. […] Stéphane Mallarmé, l’intelligence doit donc être agissante, elle doit s’efforcer de faire vibrer la matière verbale, tandis que pour les autres poètes, c’est cette matière verbale et la puissance lyrique qui provoquent précisément, chez celui qui écoute, le jeu des émotions et les mouvements de l’âme. […] Car Léon Dierx n’est pas un être profondément sensible et palpitant, un bloc vibrant à tous les chocs sentimentaux ; chez lui, la raison et la conscience président au jeu des émotions.
Gérome essayera de surprendre notre curiosité en transportant ce jeu dans une espèce de pastorale antique. […] Que ces jeux romains soient exactement représentés ; que la couleur locale soit scrupuleusement observée, je n’en veux point douter ; je n’élèverai pas à ce sujet le moindre soupçon (cependant, puisque voici le rétiaire, où est le mirmillon ?) ; mais baser un succès sur de pareils éléments, n’est-ce pas jouer un jeu, sinon déloyal, au moins dangereux, et susciter une résistance méfiante chez beaucoup de gens qui s’en iront hochant la tête et se demandant s’il est bien certain que les choses se passassent absolument ainsi ? […] Cette lettre déplacée ressemble à un de ces jeux intelligents du hasard, qui a quelquefois l’esprit pointu comme un homme. […] Il y a de longues années, il nous étonnait déjà par l’aplomb de sa fabrication, par la rondeur de son jeu, comme on dit au théâtre, par son mérite infaillible, modéré et continu.
— Et c’est sur cette base-là, ajoute-t-il, qu’a été élevé ensuite tout mon édifice. » Ce fut à la campagne, à la maison d’Athée qui lui venait de sa mère, qu’il éprouva une autre vive impression de lecture ; il vient de parler des jeux de son enfance : J’y ai joui aussi bien vivement, nous dit-il, dans mon adolescence, en lisant un jour dans une prairie à l’âge de dix-huit ans les Principes du droit naturel de Burlamaqui. […] Comme il lui arriva plus tard de vendre cette maison d’Athée qui était du côté de Beauvais-sur-Cher, il lui semble voir là-dedans un rapport avec sa destinée qui a été de rompre avec les athées : un pur jeu de mots !
Il démêle l’espèce de jeu de mots et d’escamotage à l’aide duquel l’école de Condillac se flattait d’expliquer tout l’homme : Vous êtes tellement plein de votre système des sensations, que ce ne sera pas votre faute si tous les mots de nos langues, si tout notre dictionnaire enfin ne se réduit, pas un jour au mot sentir. […] Je ne me charge pas ici d’entrer dans les points particuliers du débat, ni de voir si, parmi les assertions de Saint-Martin, il n’en est point de bien vagues et de bien fuyantes aussi, et si, parmi celles de Garat, il n’en est pas qui eussent pu se défendre dans un meilleur et plus véritable sens : ce qui est manifeste, c’est que Garat et les idéologues de seconde main qui se croyaient maîtres du jeu ont, ce jour-là, rencontré leur maître à l’improviste dans Saint-Martin.
Réduit souvent par sa faute à de tristes extrémités et amené, bien que jeune, à songer à sa dernière heure, Villon suppose qu’il fait son testament (il y en a deux de lui, le grand et le petit, sans compter un codicille), et dans cette supposition il lègue à ses amis tout ce qu’un pauvre diable qui n’a pas un sou vaillant peut donner ; parmi ses legs, il y a bon nombre de lays ou de ballades, et il a dû penser au jeu de mots : C’est à un poète une idée singulièrement originale et touchante, nous dit d’abord M. […] Il préférait le titre de Legs, probablement à cause du jeu de mots et de la double entente qui leur convenait parfaitement.
Partout ailleurs, c’eût été un affreux guêpier de bas-bleus : là, ce n’est qu’un jeu de société assez original et amusant, un passe-temps de dilettanti, qui entretient dans ce cercle l’activité de l’esprit et sauve des commérages. […] Moi-même il m’est arrivé de l’appeler en un endroit « le Talleyrand de l’art », voulant indiquer par là qu’il tirait à temps son épingle du jeu et qu’il était homme à tricher quelquefois avec les passions mêmes qu’il exprimait.
L’esprit passe sur le visage, l’efface, et le transfigure ; il y palpite, il y tressaille, il y respire ; et mettant en jeu toutes ces fibres invisibles qui le transforment par l’expression, l’assouplissant jusqu’à la manière, lui donnant les mille nuances du caprice, le faisant passer par les modulations les plus fines, lui attribuant toutes sortes de délicatesses, l’esprit du xviiie siècle modèle la figure de la femme sur le masque de la comédie de Marivaux, si mobile, si nuancé, si délicat et si joliment animé par toutes les coquetteries du cœur, de la grâce et du goût ! […] Je crois qu’en tout elle aura été assez contente de son voyage… » On distingue bien en tout ceci l’art, le jeu, l’amabilité naturelle, la considération, et aussi cette crainte qu’on avait de ne pas réussir auprès d’elle, même d’égale à égale. — D’autres visites et voyages à Chanteloup se passent encore mieux les années suivantes : « La chatte rose est tout aussi douce et aussi aimable cette année (mai 1772) que l’année passée. » Elle s’accorde avec tous.
Supposez que, du premier ou du second étage, vous regardiez dans la cour deux personnes qui causent : vous voyez leurs gestes, leur jeu de physionomie, et vous n’entendez qu’imparfaitement leurs paroles ; elles ne vous arrivent qu’en bruit confus. […] Mais avec Gavarni, quand c’est lui qui baptise, cela sort du jeu ; il frappe sa médaille comme pas un, il bat sa monnaie au bon coin, et elle entre dès lors dans la circulation ; elle court le monde.
La dernière exposition de l’Académie de peinture en 1791 avait offert les trois grandes productions classiques de David, les Horaces, Brutus, et la Mort de Socrate, avec le dessin du Serment du Jeu de Paume. […] « Lorsque périt le dernier des Gracques de la main des patriciens, atteint du coup mortel, il lança de la poussière vers le ciel en attestant les dieux vengeurs, et de cette poussière naquit Marius. » Mais cette admirable et menaçante parole, digne du serment du Jeu de Paume, n’est qu’un éclair, et je dirai qu’elle est plus voisine de Shakespeare que des Romains de David.
» La campagne d’Iéna, comme celle d’Ulm, « devait servir de modèle un jour pour apprendre aux généraux l’art de réunir à propos leurs forces, et de les diviser ensuite quand elles ont frappé : je dis modèle, si tant est qu’il y en ait à pareil jeu ; car tout jeu savant suppose le joueur, tout art suppose essentiellement l’artiste ; et la variété, la nouveauté dans l’application, qui se différencie et recommence sans cesse à chaque cas imprévu, c’est l’habileté souveraine, c’est le génie35.
Étale ta riche parure Aux yeux de mes jeunes enfants ; Témoin de leurs jeux innocents, Plane autour d’eux sur la verdure. […] Leur mère les suivra sans doute, Triste compagne de leurs jeux : Vole alors gaiment devant eux Pour les distraire de la route.
L’amour, comme tout ce qui tient à la pensée, ne saurait être à la merci d’un jeu du dehors, d’un tort sans intention ; il ne se brise pas comme le verre dont le cadre neuf a tout d’un coup joué sous un rayon ardent, ou sous une pluie humide. […] Mais les traditions du tendre nstituteur s’étaient transmises ; elle vit jouer ses pièces sacrées, elle y eut son rôle peut-être ; elle dut néanmoins peu réussir à ces jeux, comme si elle se réservait pour les affections sérieuses.