Mais, qu’ils parviennent à avoir, parfaitement, ce langage musical ; qu’ils fassent une musique wagnérienne, comme le sait M. de Goldschmidt : ils seront loin, encore, d’être des wagnéristes. […] Savoir nous indiffère, ensuite, si cette peinture peut, ou non, être parfaite. […] C’est pourquoi il a su réunir, dans une étroite et magnifique union, la parole et la note, le verbe et l’harmonie. […] On sait que la précédente assemblée (la première) avait eu lieu à Bayreuth, le 22 juillet 1884. […] Saint-Saëns fait appel, pour défendre la description, au goût du public ; mais ne sait-il pas que, pour ce public, tous les chefs orchestraux paraissent grossiers, comparés aux vocalises de M.
… Le peintre Renoir, se trouvant, ces jours-ci, dans une maison protestante, où je ne sais quoi l’amena à parler des Valois, de Charles IX, le maître de la maison l’interrompit, en lui disant : « On ne parle pas de ces gens-là, ici ! […] Je ne sais plus qui ajoute, comme trait du caractère décoratif de l’homme, qu’il avait fait jeter sur le pied de son lit un manteau d’officier, s’ensevelissant d’avance dans son ancien uniforme. […] À cinq heures, je vais savoir de ses nouvelles. […] Je ne sais pas, si mon livre sera un chef-d’œuvre, mais ce sera mon chef-d’œuvre. » Malheureusement Musotte venait se jeter en travers de son livre, et le retardait. […] Tous les deux ou trois jours, une petite crise, à propos d’on ne sait quoi, et le dégoût croissant de la nourriture, et des suées de faiblesse, tous les matins, et de la rejaunisse à tout moment dans la figure.
Le cartésianisme d’après le xviiie siècle, ne saurait être aussi inoffensif, aussi sincèrement chrétien que le cartésianisme d’ auparavant ; et en effet il ne l’est pas du tout. […] Sosthène de La Rochefoucauld, duc de Doudeauville, vient de publier un volume d’Esquisses et Portraits, où figurent un grand nombre de femmes du monde : le livre semble très-peu digne d’un homme, d’un gentilhomme qui doit savoir les convenances.
Je dirai plus : il y a ici des fragments dignes des plus beaux chapitres de l’Adorant (Sixtine)… Cela me confirme dans l’appréciation très digne que je me suis formée de M. de Gourmont, à savoir : que c’est un prosateur exquis qui a des douceurs de poète et des grandeurs de philosophe. […] Il faut louer sans réserve le style de M. de Gourmont, d’une pureté et d’une souplesse admirables, la joliesse de ses descriptions, l’art avec lequel il sait choisir le détail qui doit frapper l’observateur.
Nous l’avertirons que ce n’est pas assez de savoir coudre les lambeaux étrangers à son Ouvrage, & dont on reconnoît d’abord la friperie ; de pousser de grandes exclamations sur le mérite de Voltaire ; d’avoir été admis à compulser les Archives du Mercure ; de nous reprocher habilement d’avoir omis quantité d’Ouvrages qui étoient sous presse, & qu’il ne nous étoit pas possible de connoître. […] La premiere de ces fautes est d’un homme qui ne sait pas l’Histoire de notre Littérature ; la seconde, d’un homme qui en ignore les finesses.
Je ne sais, Monsieur de La Grenée, ce que c’est que votre Massacre des Innocents. […] Pour votre Josué qui combat les Amorrhéens, et qui commande au soleil, je ne saurais vous dissimuler qu’il est mauvais.
Un peu moins de prévention aurait permis au critique de se souvenir qu’autrefois les étrangers, gens d’esprit, savaient s’approprier l’ancien genre tout aussi aisément qu’ils peuvent faire aujourd’hui pour le nouveau. […] L’auteur de ce recueil n’est pas non plus Français d’origine ni de naissance ; sorti des vallées vaudoises du Piémont, il appartient à cette antique tribu persécutée, qui a su garder sa primitive croyance. […] Un sentiment évangélique et chrétien les a inspirés, en effet, non sans mélange toutefois d’un certain humanitarisme moderne, d’un certain culte optimiste et confiant de la création et de la nature, qui fait songer à Jocelyn et qui l’a précédé : Ô Nature, immense Évangile Que rien ne saurait altérer !
Quelle que soit l’horreur qu’inspire un scélérat, il surpasse toujours ses ennemis dans l’idée qu’il se fait de la haine qu’il mérite ; par-delà les actions atroces qu’il commet à nos yeux, il sait encore quelque chose de plus que nous qui l’épouvante, il haït dans les autres l’opinion que, sans se l’avouer, il a de son propre caractère ; et le dernier terme de sa fureur serait de détester en lui-même ce qu’il lui reste de conscience, et de se déchirer s’il vivait seul. […] de quelle nature est celui qui sait braver tout ce que cette idée a de solennel et de terrible, cette idée dont le retour immédiat sur soi-même devrait effrayer tout ce qui veut vivre. […] il serait si difficile de ne pas s’intéresser à l’homme plus grand que la nature, alors qu’il rejette ce qu’il tient d’elle, alors qu’il se sert de la vie pour détruire la vie, alors qu’il sait dompter par la puissance de l’âme le plus fort mouvement de l’homme, l’instinct de sa conservation : il serait si difficile de ne pas croire à quelques mouvements de générosité dans l’homme qui, par repentir, se donnerait la mort ; qu’il est bon que les véritables scélérats soient incapables d’une telle action ; ce serait une souffrance pour une âme honnête, que de ne pas pouvoir mépriser complètement l’être qui lui inspire de l’horreur.
L’homme est placé, par toutes ses affections, dans cette triste alternative ; s’il a besoin d’être aimé pour être heureux, tout système de bonheur certain et durable est fini pour lui, et s’il sait y renoncer, c’est une grande partie de ses jouissances sacrifiées pour assurer celles qui lui resteront, c’est une réduction courageuse qui n’enrichit que dans l’avenir. […] Je sais, bien qu’au tableau de toutes ces inquiétudes, on peut opposer les êtres froids qui, aimant, comme ils font toutes les autres actions de leur vie, consacrent à l’amitié tel jour de la semaine, règlent à l’avance quel pouvoir sur leur bonheur ils donneront à ce sentiment, et s’acquittent d’un penchant comme d’un devoir ; mais j’ai déjà dit dans l’introduction de cet ouvrage, que je ne voulais m’occuper que du destin des âmes passionnées, le bonheur des autres est assuré par toutes les qualités qui leur manquent. […] Enfin, deux amis d’un sexe différent, qui n’ont aucun intérêt commun, aucun sentiment absolument pareil, semblent devoir se rapprocher par cette opposition même ; mais si l’amour les captive, je ne sais quel sentiment, mêlé d’amour propre et d’égoïsme, fait trouver à un homme ou à une femme liés par l’amitié, peu de plaisir à s’entendre parler de la passion qui les occupe ; ces sortes de liens ou ne se maintiennent pas, ou cessent, alors qu’on n’aime plus l’objet dont on s’entretenait, on s’aperçoit tout à coup que lui seul vous réunissait.
C’est une action continuelle, et l’homme ne saurait renoncer à l’action ; sa nature lui commande l’exercice des facultés qu’il tient d’elle. […] Cet effet naturel de la distraction que donne l’étude, est le plus efficace secours qu’elle puisse apporter à la douleur ; car aucun homme ne saurait vivre à l’aide d’une continuelle suite d’efforts. […] Je relis sans cesse quelques pages d’un livre intitulé : La Chaumière indienne ; je ne sais rien de plus profond en moralité sensible que le tableau de la situation du Paria, de cet homme, d’une race maudite, abandonné de l’univers entier, errant la nuit dans les tombeaux, faisant horreur à ses semblables sans l’avoir mérité par aucune faute ; enfin, le rebut de ce monde, où l’a jeté le don de la vie.
D’ailleurs cette espece de vol ne prouveroit que mieux son génie ; on ne pourroit en conclure autre chose, sinon qu’il a su se rendre propres des richesses étrangeres, par la maniere dont il les a mises en œuvre. […] Tant qu’ils se bornent à ne puiser que dans leur propre fond, on s’apperçoit d’une sécheresse, d’un désordre, d’une monotonie rebutante, partage ordinaire d’un esprit qui n’a pas su fortifier ses propres richesses par celles des autres. […] Il se transforme en son Original, évite ses défauts, s’approprie ses beautés, & , en les adoptant au sujet qu’il traite, il sait leur donner une forme & un caractere qui les lui rend propres.
À défaut de cette vérité objective qui eût pu être prise comme but, comme principe directeur et comme terme de comparaison, l’intelligence ne saurait rencontrer en effet aucun motif rationnel d’élire et de réaliser quelque état de la substance phénoménale de préférence à un autre : elle assisterait impassible à son écoulement indéfini, et rien ne saurait la déterminer à faire jamais le geste qui, modérant la vitesse du flux phénoménal, rend perceptible quelqu’un de ses aspects. […] Que l’on mette en cause une conception de l’ordre moral, politique, social ou religieux, il ne s’agit plus de la comparer avec un modèle idéologique d’une valeur présumée absolue, dont on sait maintenant l’origine arbitraire, avec une idée divinisée de vérité ou de justice, dont on connaît qu’elle n’exprime autre chose qu’un état de sensibilité particulier et propre à un temps donné.
— Et si hardis même, que la Critique, obligée d’être plus pudique que la femme qui s’est faite, sans peur et sans honte, l’historienne de tous les amours de sa vie, ne sait comment s’y prendre pour décemment y toucher. […] Déjà de cette amère comédie, on savait quelque chose. […] S’il revenait au monde, que dirait-il de se savoir si bien habillé ou déshabillé (as you like) dans le livre de sa maîtresse ?
Avant l’histoire de Forneron, on savait déjà beaucoup sur ce temps terrible, mais, après cette histoire, je ne crois pas qu’on ait beaucoup à apprendre encore… et même le Forneron des deux derniers volumes surpasse, en renseignements, le Forneron des deux premiers. […] Il sait, en effet, de quels éléments elles sont faites : ignorance, sottise, brutalité, envie, aptitude à toutes les corruptions et à tous les aveuglements, et cela sans exception d’aucune sorte. […] … — Il faut savoir le reconnaître… Nous nous tenons pour tels, et la politique de Forneron nous tient pour tels aussi.
Ce sera une question longtemps encore de savoir si une traduction est possible quand l’homme qui la fait est de taille, d’aplomb et de sang-froid à juger de haut et l’œuvre et l’auteur qu’il reproduit et qu’il interprète. […] Mais quand le cadavre a été dissous par le temps, par l’oubli, par le mépris mérité des hommes, il faut laisser toute cette poussière qu’aucun baume ne saurait conserver. […] Il y a je ne sais quoi du Job de la Bible sous l’armet du chevalier de la Triste Figure.
La grande idée de la science économique fut réalisée dès l’origine, savoir : qu’il faut que les pères, par leur travail et leur industrie, laissent à leurs fils un patrimoine où ils trouvent une subsistance facile, commode et sûre, quand même ils n’auraient plus aucun rapport avec les étrangers, quand même toutes les ressources de l’état social viendraient à leur manquer, quand même il n’y aurait plus de cités ; de sorte qu’en supposant les dernières calamités les familles subsistent, comme origine de nouvelles nations. […] Dans ce dernier genre d’héroïsme, les Romains se montrèrent supérieurs à tous les peuples de la terre, puisqu’ils surent également Parcere subjectis, et debellare superbos. […] Ce que Tacite dit des Germains peut s’entendre de tous les premiers peuples barbares ; et nous savons que chez les anciens Romains le père de famille avait droit de vie et de mort sur ses fils, et la propriété absolue de tout ce qu’ils pouvaient acquérir, au point que jusqu’aux Empereurs les fils et les esclaves ne différaient en rien sous le rapport du pécule.
Le payement de la voiture acheva d’épuiser sa bourse, et il entra dans la maison sans savoir comment il en sortirait le lendemain. […] Cependant la pauvreté de cette bonne vieille l’affligeait, et il se mit à la questionner pour savoir comment elle se trouvait dans un pareil délaissement. « Oh ! […] Lorsqu’ils surent parler, les premiers noms qu’ils apprirent à se donner furent ceux de frère et de sœur. […] Au reste, ils étaient ignorants comme des créoles, et ne savaient ni lire ni écrire. […] Marie, qui travaillait dans un coin de l’habitation, n’a su nous dire où vous étiez allés.
Deux ont brisé la chaîne qui fait garde-fou au pont et sont tombés ; sans la présence d’esprit, l’adresse et la vigueur extrême du postillon qui a su faire porter à temps le timon contre un pilier ou poteau, la voiture était immanquablement précipitée. […] Je ne sais si on la décidera, et si on la pressera beaucoup.
Victor Remouchamps En des tournures impulsives, effarantes d’abord, charmeuses ensuite comme une révélation lointaine, il a su exprimer ce qu’il y a, en nous de candeur latente, de joie insoupçonnée ; il a su noter les rêves blancs ; il a fait fleurir, sur les vies les pins stériles, tout un miracle de sensations jeunes ; il a ressuscité, en leur fraîcheur d’aurore, les plus exquis symboles catholiques.
Cette économie a manqué peut-être à Nodier : esclave du caprice, pressé souvent par la nécessité, il travaillait au jour le jour, cédant sans cesse aux sollicitations des libraires, qui osent tout demander à un homme dont la bonté ne savait rien refuser. […] Fort jeune, il savait diriger le quadrige de l’ode, déployer dans l’air libre les ailes brûlantes du dithyrambe ; les strophes du Poète malheureux sont animées d’un large souffle et la Napoléone vaudrait qu’on s’en souvînt, quand bien même Napoléon n’aurait pas voulu faire connaissance à Sainte-Hélène avec toutes les œuvres de son jeune ennemi.
Il prodigue la cocasserie d’un style enrichi d’épithètes inattendues pour lancer ses invectives cinglantes, et personne comme lui ne saurait atteindre au biscornu cruel d’un octosyllabe ou d’un alexandrin parfait, et cette perfection leur confère la durée d’une marque au fer rouge. […] Et l’on sait aussi comme se vengèrent courageusement, en le bafouant et en l’insultant quand il fut blessé, le 4 avril 1894, au restaurant Foyot, par l’explosion d’une bombe d’anarchiste, les éminents illettrés qu’auparavant, dans son livre et dans sa conférence au Théâtre de l’Œuvre, lors de la représentation d’Un ennemi du peuple, il avait fustigés sans qu’ils aient alors osé répondre.
Celui-ci avec du génie, de l’éloquence & une Littérature étendue, a prouvé combien un homme sage doit se défier de ses préventions, & combien il est essentiel, pour le bonheur & la véritable gloire, de savoir les réprimer, lorsqu’elles nous emportent trop loin. […] Arnaud : une humeur prompte à s’enflammer, une grande facilité pour écrire, &, plus que tout cela, le désir de la célébrité, désir dont on sait si rarement se garantir, le précipiterent dans les disputes de son temps, & consumerent des travaux qu’il eût pu rendre infiniment plus utiles.
Mais ne sait-on pas que tous ces beaux Siecles ont dégénéré, quand ces météores ont paru ? M. de Gomicourt est beaucoup plus connu par un Ouvrage périodique, intitulé, l’Observateur François à Londres, où il sait répandre de l’intérêt sur les matieres qu’il traite.
Ils sont deux ou trois, paraît-il, en France, à savoir ce que c’est qu’Homère et la Grèce. Taine ne le sait pas, ni Leconte de Lisle, ni le reste du monde non plus.
Vous savez que tout ce qui n’est point prose est vers, et que tout ce qui n’est point vers est prose. […] Nous savons que leurs larmes et leurs cris ne sont pas véritables. […] Elles arrivèrent à la feuillée où Chrysogone endormie avait mis au monde, sans le savoir, deux filles aussi belles que le jour naissant. […] Un démon épouvantable marche derrière lui à pas monstrueux sans qu’il le sache, prêt à l’engloutir au moindre signe de convoitise. […] Pour employer des forces, il faut qu’elles soient mesurées, vérifiées ; pour bâtir une maison, il faut savoir avec exactitude la résistance des poutres, autrement la maison croulera ; pour guérir un malade, il faut savoir avec certitude l’effet d’un remède, autrement le malade mourra.
Tout le monde sait qu’un certain nombre des théâtres de Paris ne vivent que par la mise en scène. […] Je ne sais si beaucoup de directeurs remplissent ces deux conditions. […] Une actrice intelligente ne saurait hésiter. […] Je ne sais si celle-ci se rend bien compte de l’arme puissante que les révolutions de l’esprit remettent entre ses mains. […] Cette contradiction optique provient, on le sait, de ce que la profondeur de la scène est en grande partie fictive.
Après tant de témoignages de constante attention, on ne saurait dire assurément que je l’aie négligé : je crains cependant de n’être pas tout à fait arrivé, à son sujet, au niveau des exigences de quelques-uns, — et je ne parle pas seulement de sa famille, mais des admirateurs enthousiastes qu’il n’a cessé de recruter dans les générations survenantes. […] Ce n’est pas ici le lieu d’apporter les correctifs à ce qui est devenu un engouement, et je crois que, pour qui sait lire, la double part est suffisamment faite dans ce qui précède.
Ce n’est pas un sentiment : c’est un poids réel, une douleur causée par un je ne sais quoi de caché, d’invisible, mais que l’on doit pouvoir arracher de la plaie comme un trait de la blessure… Aussi le remords pour Caïn prend-il la forme d’un œil qui brille au fond des cieux, et qui demeure fixé sur le meurtrier. […] Parodi est Italien de naissance et je ne sais s’il est venu en France de très bonne heure.
Nous doutions-nous, au milieu des agitations stériles de notre vie artificielle et tourmentée, qu’un homme extraordinaire, isolé depuis plus de quarante années dans le silence et la méditation, avait su élever un monument qui, par sa splendeur et sa vérité, domine la mêlée de nos passions, de nos luttes et de nos médiocrités tapageuses, comme les Pyramides surplombent de leur hauteur écrasante les sables mouvants et les simouns du désert ? […] Il ne commandera pas non plus au respect, parce qu’il ne sut pas — ou ne voulut pas — donner à son art la forme impeccable devant laquelle s’agenouillent si dévotement les jeunes, qui sont de si charmants et de si vains poètes.
Or, nous savons que, parmi toutes, les œuvres de l’Opéra touchaient le moins Beethoven, tandis que les impressions les plus intimes lui venaient de la musique religieuse de son temps. […] Il se sentait lié à Haydn, semble-t-il, comme, à un vieillard enfantin, celui qui sait être né un homme. […] Il se sentait un Vainqueur ; il savait qu’il devait appartenir au monde, seulement, comme un homme libre. […] Wotan, roi des Dieux, maître de Walhall, sait que la Fin viendra ; à l’heure de la Souillure, celle qui connaît toutes choses, la Primordiale Mère, la Chaotique Wala, Erda, la Dormeuse-Voyante, avertit son esprit, que le Crépuscule ensombrirait le ciel. […] Le Voyageur Tu n’es pas — ce que tu te rêves… — La Sagesse de la Première-Mère — va vers-la Fin : — ta Science s’incline — devant ma Volonté. — Sais-tu ce que Wotan veut ?
Nous rougirions surtout de rêver, d’imaginer et de croire que Dieu, comme un ouvrier impuissant et maladroit, n’a pas su créer du premier jet l’homme dans toute la plénitude de son humanité ; que le Tout-Puissant a tâtonné, comme un aveugle, en pétrissant son morceau d’argile, et qu’après l’avoir ébauché dans les marais diluviens de la terre, il a chargé je ne sais quelle force occulte de l’achever, de l’animer, d’en faire un homme ! […] Quel est l’homme qui ne sait pas le mensonge de cet instinct, et quel est l’homme qui ne s’y laisse pas éternellement tromper ? […] Et ces hymnes sacrés des Védas se chantaient dans l’Inde on ne sait combien de siècles avant la religion des Brahmanes, et la religion des Brahmanes avait été remplacée par celle de Bouddha, et celle de Bouddha était déjà vieillie du temps de la conquête d’Alexandre, c’est-à-dire trois cent vingt-six ans avant Jésus-Christ. […] On y respire je ne sais quel souffle à la fois saint, tendre et triste, qui semble avoir traversé plus récemment un Éden refermé sur l’homme. […] « Or, sais-tu ce que c’est que ce divin secret dont la connaissance te conduira à l’immortalité ?
Ceux qui pensaient ou qui sentaient un peu plus fortement que les autres ne savaient dans quelle langue parler. […] La nation lui sait gré de lui avoir enseigné à oser croire à son propre génie. […] Les rhéteurs n’ont jamais pu l’enseigner ni le surprendre, pas plus que les chimistes n’ont pu saisir le principe de vie qui fuit sous leurs doigts dans les éléments qu’ils élaborent : on sait ce qu’il produit, on ne sait pas ce qu’il est. Et comment le saurait-on ? […] L’imagination ne saurait se représenter Bossuet sous l’habit laïque.
Ils veulent que leur civilisation dure comme un monument : ils savent que rien ne dure dans les mobiles démocraties, gouvernements des passions et des caprices du peuple ; la hiérarchie est en tout la forme de l’ordre et la condition de la durée. […] Quand on sait de quel parti est la France dans une question ou dans un congrès européen, on n’a pas besoin de s’informer de quel parti est l’Angleterre, toujours et invariablement du parti opposé à l’avis de la France ; et il en est de même de la France, quoique avec moins d’animosité systématique. […] — Partisans dénaturés de ces unités antifrançaises, savez-vous ce que vous aurez ? […] Comment se fait-il que, dans l’intérieur même de l’Asie Mineure, jusqu’aux pieds du Taurus, les villages chrétiens soient mêlés aux villages turcs, de telle sorte que le voyageur a peine à savoir laquelle des deux populations domine l’autre en nombre, en autorité, en richesse, dans toutes ces parties de l’empire ? […] Croyez-moi, voilà l’alliance du destin de l’Europe ; sachez la voir, sachez la saisir, et, au besoin, sachez la venger !
on le saura bientôt. […] On sait quelle lettre émue il écrivit à Liszt, lettre reproduite à la première page de la partition d’orchestre. […] Le décor examiné, nous allons passer su premier degré de mimique, la première perceptible à l’œil, la plus accessible aux sens. […] Bourgeois sait apporter une agréable variété dans sa manière de succomber sous la lance du Dieu. […] de drames lyriques, dont les sujets sont empruntés, comme on sait, aux anciennes légendes germaniques et scandinaves.
On sait le joli fragment : Fille du vieux pasteur, qui, d’une main agile, Le soir remplis de lait trente vases d’argile. […] De l’oubli taciturne et de son onde noire Nous savons détourner le cours. […] On traiterait, en un mot, André comme un ancien, sur lequel on ne sait que peu, et aux œuvres de qui on rattache pieusement et curieusement tous les jugements, les indices et témoignages. […] Quand on relit un auteur ancien, quel qu’il soit, et qu’on sait André par cœur, les imitations sortent à chaque pas. […] tant de grands hommes ont cru tout cela… Avez-vous plus d’esprit, de sens, de savoir ?
Du bas en haut de l’échelle, les pouvoirs légaux ou moraux qui devraient représenter la nation ne représentent qu’eux-mêmes, et chacun d’eux s’emploie pour soi au détriment de la nation À défaut du droit de s’assembler et de voter, la noblesse a son influence, et, pour savoir comment elle en use, il suffit de lire les édits de l’almanach. […] On sait combien celui de l’Église est large ; j’estime qu’ils en prélèvent au moins la moitié. […] « Votre Majesté sait mieux que moi, écrit l’abbé de Vermond à l’impératrice Marie-Thérèse135, que, d’usage immémorial, les trois quarts des places, des honneurs, des pensions sont accordés non aux services, mais à la faveur et au crédit. […] Vous savez, Monsieur l’ambassadeur, qu’on a fort multiplié ces places, et qu’elles se donnent par crédit et faveur, comme les régiments. […] — Celui qui paye ne peut jamais savoir ce qu’il doit.
Chaque dimanche et chaque jour de fête, ils se tiennent à la sortie de l’église, avertissant les retardataires ; puis, dans la semaine, ils vont de chaumière en chaumière pour obtenir leur dû. « Communément, ils ne savent point écrire et mènent avec eux un scribe. » Sur les six cent six qui courent dans l’élection de Saint-Flour, il n’y en a pas dix qui puissent lire le papier officiel et signer un acquit ; de là des erreurs et des friponneries sans nombre. […] À Rennes693, pour une barrique de vin de Bordeaux, les droits des devoirs et le cinquième en sus l’impôt, le billot, les 8 sous pour livre et les deniers d’octrois montent à plus de 72 livres, non compris le prix d’achat ; à quoi il faut ajouter les frais et droits dont le marchand de Rennes fait l’avance et qu’il reprend sur l’acheteur, sortie de Bordeaux, fret, assurance, droit d’écluse, droit d’entrée pour la ville, droits d’entrée pour les hôpitaux, droits de jaugeage, de courtage, d’inspecteurs aux boissons. […] En second lieu, pour la capitation, qui, à l’origine, distribuée en vingt-deux classes, devait peser sur tous à proportion de leurs fortunes, on sait que, dès l’abord, le clergé s’en est affranchi moyennant rachat ; et, quant aux nobles, ils ont si bien manœuvré, que leur taxe s’est réduite à mesure que s’augmentait la charge du Tiers. […] Nous ne nous en prenions pas à vous, tant nous vous aimions, mais à ceux que vous employez et qui savent mieux faire leurs affaires que les vôtres. Nous croyions qu’ils vous trompaient, et nous nous disions dans notre chagrin : Si notre bon roi le savait !
Expliquez à un ouvrier, à un paysan les droits de l’homme, et tout de suite il deviendra un bon politique ; faites réciter aux enfants le catéchisme du citoyen et, au sortir de l’école, ils sauront leurs devoirs et leurs droits aussi bien que les quatre règles Là-dessus l’espérance ouvre ses ailes toutes grandes ; tous les obstacles semblent levés. […] Il suffit des moindres notions physiologiques pour savoir qu’elle est un état d’équilibre instable, lequel dépend de l’état non moins instable du cerveau, des nerfs, du sang et de l’estomac. […] Déjà, depuis longtemps, par la centralisation administrative, l’État a la main partout440. « Sachez, disait Law au marquis d’Argenson, que ce royaume de France est gouverné par trente intendants. […] En effet, « les clauses du contrat social se réduisent toutes à une seule441, savoir, l’aliénation totale de chaque associé avec tous ses droits à la communauté ». […] Les peuples sont à la longue ce que le gouvernement les fait être : guerriers, citoyens, hommes quand il le veut, populace, canaille quand il lui plaît », et c’est par l’éducation qu’il les façonne. « Voulez-vous prendre une idée de l’éducation publique, lisez la République de Platon447… Les bonnes institutions sociales sont celles qui savent le mieux dénaturer l’homme, lui ôter son existence absolue pour lui en donner une relative, et transporter le moi dans l’unité commune, en sorte que chaque particulier ne se croie plus un, mais partie de l’unité, et ne soit plus sensible que dans le tout.
Beaucoup de choses me soutiennent et me consolent ; le concours de ceux qui pleurent avec nous notre perte, la douleur générale qui se manifeste dans toute la ville, le deuil public, et beaucoup d’autres considérations de cette nature, propres à adoucir en grande partie notre chagrin : mais ce qui me console le plus, c’est de t’avoir ; c’est d’avoir un frère en qui j’ai plus de confiance et d’espoir que je ne le saurais dire. […] Je vous en écris une qu’il m’a été permis de savoir : « Les citoyens te reconnaîtront pour mon successeur, je n’en doute pas. […] Par le mouvement de ses lèvres, par ses yeux vers le ciel, par l’agitation de ses doigts, il montrait qu’il en savait par cœur toutes les pensées et tous les mots. […] « Cet homme, né pour toutes les grandes choses, navigua si bien par le flux et le reflux des événements, qu’il est difficile de savoir s’il montra plus de constance dans la prospérité que d’égalité d’âme et de calme dans la mauvaise fortune : quant à son génie, il était si grand, si facile, si pénétrant, qu’il excellait autant en toutes choses que d’autres dans quelques-unes. […] Aux nones d’avril, vers la troisième heure du jour et le troisième avant sa mort, une femme, je ne sais laquelle, dans l’église qu’on dit dédiée à Maria Novella, écoutait le prédicateur, lorsque tout à coup, au milieu d’une masse de peuple, elle se leva effrayée, consternée, courant comme une folle, poussant d’effroyables cris et disant : « Ah !
Mais je ne sais. […] La Fontaine fut près du peuple par bonhomie narquoise, sans doute aussi très naïvement, sans le savoir, en campagnard un peu touché par des souvenirs archaïques. […] L’Iliade et l’Odyssée (œuvre commune d’aèdes anonymes et quasi inconscients, je le sais, mais retranscrite et unifiée ensuite par l’art) sont un répertoire du folklore grec que vient encore compléter Hésiode. […] Mais il n’a pas je crois abandonné l’armure sans la regarder à loisir ; il en a considéré les justes proportions, il a compté les gemmes incrustées et je sais fort bien qu’il en a détaché une sombre et radieuse améthyste pour parer sa mélancolie. […] L’un écouteur plus direct de sa spontanéité, l’autre plus fidèle prêtre de l’immuable norme, de loin ils se tendent les mains, car M. de Régnier sait aussi d’ingénues mélodies et M.
Ces Réflexions ne sauroient être déplacées dans un Ouvrage ; dont le but principal de l'Auteur, en le publiant, a été de ramener aux vrais principes de la Morale & du Goût, les esprits que les déclamations de la Philosophie ont égarés. […] Socrate n’a été regardé comme le plus sage des Hommes, que parce qu’il avoit su se dégager des erreurs Philosophiques & populaires de son temps, pour s’élever à la connoissance de l’Etre suprême. […] La Religion a su poser sagement ses limites. […] C’est sur la foi de ceux qu’on suppose plus instruits, plus éclairés, qu’on se forme les différentes idées des choses ; celui qui croit savoir moins qu’un autre, quelque pénétrant qu’il soit d’ailleurs, s’en rapporte volontiers à des lumieres qu’il juge supérieures ; & c’est sur cette adhésion aux idées d’autrui, que se sont établies les différentes persuasions qui ont donné cours à tous les systêmes adoptés depuis le commencement du monde. […] Son principal objet est d’apprendre aux Hommes de tour rang & de tout âge, que le bonheur ne sauroit consister que dans la pratique de leurs devoirs.
Il en sait long, mais il se tait : « un bœuf est sur sa langue », selon le proverbe. — « Si ce palais prenait une voix, il parlerait clairement ; quant à moi, je parle volontiers à ceux qui savent : pour qui ignore ou ne comprend pas, je ne sais rien, j’oublie tout. » — La terreur sort déjà de cette réticence de l’esclave. […] Sait-il l’adultère ? […] Il sait que la pourpre irrite le regard des dieux autant que l’œil des taureaux, et que leur jalousie s’offusque des ostentations du triomphe humain. […] Avant de la quitter, Clytemnestre lui jette cette menace ambiguë : — « Certes, cette femme est folle : pour qu’elle se plie au frein, il faudra qu’elle l’ait rougi d’une salive sanglante. » — C’est proposer une énigme au Sphinx : la devineresse qui lit dans les âmes sait déjà qu’elle est condamnée.
» Diderot, qui dit ce mot sublime, en savait-il la profondeur, les sens divers, admirables et féconds ? […] Je vous dirai encore : La vérité vous est fermée, vous n’avez pas su lire dans le monde, dont les livres ne parlent pas ! […] Il est juste, bienfaisant et indispensable que l’homme « qui sait » dirige celui « qui ne sait pas ». […] Nous sentons clairement que le Dieu des chrétiens n’était comme tous les autres qu’un fantôme d’erreur ; et cependant la totalité de notre vie journalière, les moindres actions du monde, tous les faits qui nous environnent, la famille, les affaires, les institutions, le langage, ne sont-ils pas encore pétris de cette conception ruinée, que nous savons mensongère et néfaste, mais que la vie commune retient encore dans son inextricable complexité ? […] On sait enfin ce que M.
Mais, entre ces questions et nous, une philosophie trop systématique interpose d’autres problèmes. « Avant de chercher la solution, dit-elle, ne faut-il pas savoir comment on la cherchera ? […] Je ne vois qu’un moyen de savoir jusqu’où l’on peut aller : c’est de se mettre en route et de marcher. […] Pour savoir de science certaine qu’un être est conscient, il faudrait pénétrer en lui, coïncider avec lui, être lui. […] Rien de ce qui concerne l’homme ne saurait se dérober de parti pris à l’homme. […] Quelques années après, on inventait l’analyse spectrale, et nous savons aujourd’hui, mieux que si nous y étions allés, de quoi sont faites les étoiles.
Ces abbés brillants et légers, qui oubliaient d’être prêtres avant 89, s’en étaient ressouvenus tout d’un coup dès qu’il avait fallu confesser la foi ou l’honneur de leur engagement dans les prisons, dans les pontons qui les déportaient ; semblables à ces gentilshommes qui savent combattre et mourir pour leur opinion dès qu’il y a péril. […] Ce fut un beau moment dont rien ne saurait effacer l’éclat dans cette première splendeur de l’inauguration du siècle : « Ils ne sont pas encore assez loin pour être oubliés, s’écriait en 1818 un des témoins émus, ces jours alors si nouveaux et si sereins, si inattendus et si consolants, dans lesquels, après tant d’années d’interruption et d’outrages, on vit le culte catholique ramené en pompe dans le même temple où il avait reçu les plus graves insultes, — ramené par la main d’un jeune guerrier qui semblait jusque-là aussi étranger aux choses religieuses qu’il était familiarisé avec la victoire. On se souvient encore des acclamations qui accompagnèrent la promulgation de cet acte éminent en sociabilité autant que hardi de la part de celui qui osa le tenter : acclamations qui, interprètes sincères de l’opinion publique, étouffèrent les cris des mécontents et les fureurs concenirées que le rétablissement de la religion fit naître dans quelques cœurs. » La suite, on le sait trop, répondit mal à de si heureux débuts, et sans même que les événements politiques survenus peu après en Italie eussent besoin d’y mêler leur complication, il y avait dans la seule situation intérieure bien des germes de difficultés futures. […] Cependant des esprits courageux dans le Clergé, et M. de Lamennais en tête (rien ne saurait lui retirer l’honneur de cette initiative), ne désespérèrent pas de la situation si mauvaise qui leur était faite, qu’ils s’étaient faite eux-mêmes, et comme ils n’avaient point trempé du moins dans les ruses et les tortuosités du précédent régime, ils crurent qu’ils pouvaient affronter la lutte au grand jour sous un régime nouveau (1831). […] Je sais que les esprits généreux aiment à avoir à faire et à lutter ; il se forme aujourd’hui, dans la libre et studieuse jeunesse, bien des intelligences.
Comment ferait-il parler ses acteurs, s’il ne sait pas lui-même parler ? […] Que créera-t-il, s’il ne sait dire ? […] Ne croyez pas, je vous le jure par le nom que je porte, ne croyez pas que je tremble ici pour moi-même (pour moi, qui, éprouvé déjà par la mauvaise fortune, sais qu’il y a autant à craindre de la prospérité) ; non ! […] Ils se trompent, ceux qui croient que son luxe sera de la libéralité : il saura dissiper, jamais donner. […] Othon sent enfin la nécessité de rétablir la discipline dans les troupes de Rome et de réprimer l’anarchie ; il parle aux prétoriens le langage de la raison et de la sévérité : XXVII « Il est des choses dans le gouvernement, leur dit-il, que le soldat doit savoir ; il en est d’autres qu’il doit ignorer.
Au moins le poète du xiie siècle sait-il choisir, et retrancher, et abréger : au moins voit-il quelque chose par-delà les faits, il a aperçu la grandeur pathétique du premier péché et du premier crime, et il a tâché de rendre quelque chose des sentiments intimes des acteurs. […] On sait l’adoration, la tendresse dont le moyen âge a honoré Notre-Dame : une foule de confréries pieuses s’établissaient sous son invocation. […] Les quarante miracles joués on ne sait dans quel puy, dans l’Ile-de-France, sans doute ou en Champagne, dont un manuscrit nous a présenté le recueil, sont de moindre valeur littéraire, et n’ajoutent pas grand’chose à l’idée qu’on se fait de l’évolution du genre dramatique. […] On ne saurait imaginer quels péchés ni quels pécheurs la Vierge arrache à l’enfer, au supplice, au déshonneur, sur un mot de repentir, même sur un simple acte d’hommage et de foi. Et d’autre part, si l’on voulait savoir à quelle exaspération de folie mystique la confiance en l’intercession de la Vierge pouvait s’égarer, on n’aurait qu’à lire le Miracle de la femme que Notre-Dame garda d’être arse : c’est l’un des plus intéressants de la série.
Or dans une société énervée par l’excès de l’exercice intellectuel et la pratique de la politesse, le plaisir est dans le sentiment ; on ne sait plus agir. […] Et qui saurait que Beaumarchais a fait Eugénie et les Deux Amis, s’il n’avait créé Figaro ? Le meilleur modèle du genre sérieux, c’est le Philosophe sans le savoir de Sedaine (1763) : ce n’est pas une œuvre supérieure486 ; c’est une comédie sans profondeur et sans déclamation, d’un optimisme aimable sans niaiserie. […] Quel malheur que de tant d’idées originales et parfois remarquablement justes, Diderot n’ait su faire que deux pitoyables pièces ! […] Le Cercle de Poinsinet (1771) est le type le plus fameux du genre : on ne saurait mieux exprimer le vide absolu des cervelles mondaines, la puérilité des engouements, des caquetages, des vanités, toute l’insignifiance de cette vie extérieurement brillante et exquise.
Sa vie fut simple, et je ne la rappelle ici que pour ceux qui aiment à bien savoir de quel homme on parle quand on a affaire à un auteur. […] Mais, en tombant dans une âme si délicate et si légère, ces idées de réforme littéraire et de régénération de l’art qui, chez Diderot, avaient conservé je ne sais quoi de bourgeois et de prosaïque, de fumeux et de déclamatoire, s’éclaircirent et s’épurèrent, revêtirent un caractère d’idéal qui les rapprocha insensiblement de la beauté grecque ; car c’était un Grec que M. […] Cet esprit trop vif, qui ne savait pas marcher lentement, aimait à voler et à s’élever près d’elle. […] C’est de l’esprit distillé et fixé dans tout son suc : on n’en saurait prendre beaucoup à la fois. […] Veut-on savoir comment M.
» Il parle donc à ces juges de vingt ans leur langue, il sait leurs images, il leur rend visible par moments leur poésie. […] Grâce à ce ton de facilité généreuse et de franchise, il a su conquérir, sur son auditoire de jeunes gens, une autorité de faveur et de sympathie ; il a pu leur donner des conseils moraux sur les sujets les plus délicats : il a fait sur la chasteté, par exemple, des conférences qui sembleraient d’une étrange audace, si cette audace n’était revêtue d’autant de candeur et servie d’un aussi prodigieux talent. […] À le bien écouter, on en saurait pourtant les raisons. […] Je ne sais si sa tentative d’ordre réussira ; mais du moins, on put s’en apercevoir dès le premier jour, sa robe blanche de dominicain ne lui nuisait pas. […] Drouot était fils d’un boulanger de Nancy, le troisième de douze enfants : Issu du peuple par des parents chrétiens, il vit de bonne heure, dans la maison paternelle, un spectacle qui ne lui permit de connaître ni l’envie d’un autre sort, ni le regret d’une plus haute naissance ; il y vit l’ordre, la paix, le contentement, une bonté qui savait partager avec de plus pauvres, une foi qui, en rapportant tout à Dieu, élevait tout jusqu’à lui, la simplicité, la générosité, la noblesse de l’âme, et il apprit, de la joie qu’il goûta lui-même au sein d’une position estimée si vulgaire, que tout devient bon pour l’homme quand il demande sa vie au travail et sa grandeur à la religion.
un quart de siècle, et représentez-vous l’incalculable somme de développement intellectuel que contient ce seul mot : tout le monde sait lire ! […] II Il ne saurait y avoir deux lois ; l’unité de loi résulte de l’unité d’essence ; nature et art sont les deux versants d’un même fait. […] Qui sait maintenant ce que c’est que l’Homœomérie d’Anaximène, laquelle est peut-être d’Anaxagore ? […] Il savait d’innombrables choses, entre autres celles-ci : — La terre est plate. — L’univers est rond et fini. — La meilleure nourriture pour l’homme est la chair humaine. — La communauté des femmes est la base de l’ordre social. — Le père doit épouser sa fille. — Il y a un mot qui tue le serpent, un mot qui apprivoise l’ours, un mot qui arrête court les aigles, et un mot qui chasse les bœufs des champs de fèves. — En prononçant d’heure en heure les trois noms de la trinité égyptienne, Amon-Mouth-Khons, Andron d’Argos a pu traverser les sables de Libye sans boire. — On ne doit point fabriquer les cercueils en cyprès, le sceptre de Jupiter étant fait de ce bois. — Thémistoclée, prêtresse de Delphes, a eu des enfants et est restée vierge. — Les justes ayant seuls l’autorité de jurer, c’est par équité qu’on donne à Jupiter le nom de Jureur. — Le phénix d’Arabie et les tignes vivent dans le feu. — La terre est portée par l’air comme par un char. — Le soleil boit dans l’océan et la lune boit dans les rivières. — Etc. — C’est pourquoi les athéniens lui élevèrent une statue sur la place Céramique, avec cette inscription : À Chrysippe, qui savait tout.
Je sais cependant qu’au Bouré on croit à l’existence d’un guinné qu’on appelle Sanou (c’est-à-dire l’Or ou le semeur d’or). […] — L’aspect véritable des guinné n’est pas connu et ne saurait l’être car — disent les Peulh — ils prennent toutes les formes qu’il leur plaît. […] Le véritable guinné ne saurait avoir de religion que celle de soi-même s’il est, comme je le pense, un des vestiges d’une ancienne religion panthéiste. […] Il dit presque invariablement à qui il rencontre : « Je sais ce que tu as dans le cœur. — Je sais ce que tu veux ».
L’intention de Mayenne n’était pas très nette ; il ne savait pas poursuivre une solution ; il voulait seulement avoir plusieurs cordes à son arc, balancer l’assemblée des États généraux et la conférence de Suresnes l’une par l’autre, de manière à n’être dépendant d’aucune : faux calcul qu’il prolongea trop et qui le trompa ! […] Il faut faire cette double part dans ce qu’on sait et ce qu’on devine de la conduite du président Jeannin durant la Ligue, et par exemple quand on lit ses lettres à Villeroi du 14 et du 22 avril 1592, et celle du 8 mai suivant, où il semble faire la paix plus difficile et la mettre à de plus chères conditions qu’on ne voudrait. […] Villeroi était à la veille de redevenir ministre : Jeannin ne songeait pas à sa soumission, et il rendait à son duc, qui guerroyait encore et qui n’avait pas su faire sa paix à temps, tous les bons offices d’un serviteur loyal et d’un ami. […] Sully, dans ses Mémoires, ou plutôt ses secrétaires ont travesti ce conseil sensé du président, et ils ont supposé de sa part je ne sais quel plan exagéré proposé à M. de Mayenne de faire ériger la Bourgogne en royaume, par l’aide du pape et de l’empereur, et autres chimères.
Au sortir des boudoirs, des toilettes et de tous ces bosquets de Cythère et d’Amathonte, dont il s’est tant moqué, mais dont il aurait dû se garder davantage, il se réfugie au sein de la nature, comme en un temple majestueux où il respire et se déploie plus à l’aise ; il la voit peu et sait peu la retracer sous les couleurs aimables et fraîches dont elle se peint autour de lui ; il préfère la contempler face à face dans ses soleils, ses volcans, ses tremblements de terre, ses comètes échevelées, et plonge avec Buffon à travers les déserts des temps. […] En se déclarant contre le mauvais goût du temps par ses épigrammes et par ses œuvres, Le Brun ne sut pas assez en rester pur lui-même. […] Enfin, vers le temps d’Arcole et de Rivoli, il soutint, comme personne ne l’ignore, sa fameuse querelle avec Legouvé, sur la question de savoir si l’encre sied ou ne sied pas aux doigts de rose. […] Un mortel peut toucher une lyre sublime, Et n’avoir qu’un cœur faible, étroit, pusillanime, Inhabile aux vertus qu’il sait si bien chanter, Ne les imiter point et les faire imiter, etc., etc.
« Je sais, disait-il, à ce sujet au Dr Cabanès, je sais qu’on me reproche de mettre trop de complaisance à m’étudier, et ce reproche, nos voisins les Anglais, qui sont si bien renseignés sur notre littérature, me l’ont signifié sous une forme bien inattendue : un caricaturiste de là-bas a imaginé de me représenter faisant des grimaces, des contorsions devant une glace et les notant sur le papier. […] L’on ne saurait reprocher à Zola de n’avoir pas couronné la documentation nécessaire à l’Assommoir — et en particulier à la scène magistrale de delirium qui la clôt — par une personnelle expérience d’éthylisme suraigu. […] « Et qui sait, ajoute M. de Fleury, si le xxe siècle n’écrira pas Werther à sa manière, avec figures dans le texte, chez un éditeur médical ?
. — Le lecteur sait que les objets géométriques n’existent pas dans la nature ; nous ne rencontrons pas, et probablement nous ne pouvons pas rencontrer, des cercles, des cubes, des cônes qui soient parfaits. […] Nous savons, avec une certitude entière, quelle est l’ouverture de chaque angle dans un myriagone régulier, et combien tous ses angles pris ensemble font d’angles droits. […] En d’autres termes, un caractère abstrait, noté par les premiers mots, a été uni à un autre caractère abstrait, noté par les seconds mots, et le composé total, ainsi fabriqué, désigne une chose nouvelle, que nos sens n’atteignent pas, que notre expérience ne rencontre pas, que notre imagination ne sait pas tracer. […] Ce ne sont pas les nombres, sauf les trois ou quatre premiers, que nous pensons, mais leurs équivalents, à savoir le nom du nombre précédent joint à l’unité ; ce ne sont pas les objets infinis, ni les objets idéaux que nous pensons, mais les caractères abstraits qui sont leurs générateurs ; ce ne sont pas les caractères abstraits que nous pensons, mais les noms communs qui leur correspondent.
Il serait singulier qu’un homme qui tenait la caisse et qui savait ce qu’il allait perdre par la mort du chef, eût échangé les profits de son emploi 1068 contre une très petite somme d’argent 1069. […] Elle ne sait pas résister à un entraînement momentané. […] Il fit signe à Jean de tâcher de savoir de qui le maître parlait. […] Partant de l’hypothèse que Jésus savait d’avance avec précision le moment de sa mort, les disciples devaient être amenés à supposer qu’il réserva pour ses dernières heures une foule d’actes importants.
« La facilité de toutes ces dames, dit-il, avait rendu leurs charmes si méprisables, qu’on ne savait plus ce que c’était que les regarder. » De là ces amours à l’italienne décrits par le même auteur, ces amours dont Dangeau a aussi parié dans ses mémoires, et qui ont été longuement décrits dans ceux de la princesse Palatine, d’après les monuments de l’époque : ce sont ces mêmes amours contre lesquels l’éloquence de Bourdaloue a tonné le jour de Noël 1687, dans un sermon prêché devant le roi, qui le lendemain exila plusieurs jeunes gens de la cour : ait cité dans l’Abrégé chronologique du président Hénault. […] Il est, ce me semble, curieux de savoir comment l’autorité de la société polie, la considération qu’elle donnait aux personnes qu’elle distinguait, celle qu’elle en recevait, celle qu’y sut acquérir madame de Maintenon, parvinrent, à l’aide des agréments personnels et par la conversation de cette femme célèbre, à opérer un changement total dans les mœurs de la cour ; changement qui eut été trop heureux si l’ambition des ministres n’eut jeté l’esprit du roi dans une extrémité opposée ; je veux dire dans l’aveugle dévotion. […] Toutefois, le secret de madame de Maintenon ne réside pas uniquement dans son mérite et dans ses charmes ; il faut aussi reconnaître en elle deux autres principes de conduite qui mirent en valeur tous ses avantages : ce furent deux passions que madame de Maintenon ressentit au plus haut point ; savoir : Un amour vif pour Louis XIV, et un grand respect pour elle-même.
On ne sait par qui. […] Une telle passion ne perd jamais de vue le but qu’elle veut atteindre, elle marche toujours ; sans se presser, mais sans se détourner ; elle sait attendre, mais ne néglige rien ; elle n’avance pas toujours d’un pas égal, mais ne recule jamais. […] La première question que madame Scarron avait donnée à résoudre à Gobelin, quand elle le prit pour directeur, était de savoir si elle pouvait, sans scrupule, se charger de l’éducation proposée. […] Je rentrais chez moi le matin par une porte de derrière, et après m’être habillée le montais en voiture par celle de devant, pour aller à l’hôtel d’Albret ou de Richelieu, afin que ma société ordinaire ne sut pas seulement que j’avais un secret à garder.
Les prêtres s’en plaignirent, et leurs plaintes fondèrent un proverbe : « Cela est beau, disait-on ; mais on n’y voit rien de Bacchus. » L’embarras est de savoir comment Thespis imagina le premier cette ombre de la tragédie, si les chœurs ne lui en ont pas donné lieu. […] Il ne l’est pas moins qu’ils ne nous disent point nettement (excepté Philostrate et Quintilien) une chose qu’il faut toutefois nécessairement conclure de leurs écrits, savoir, qu’Eschyle fut le véritable inventeur de la tragédie proprement dite. […] Un monstre horrible nous ferait sécher de frayeur ; un misérable que nous ne pourrions soulager, nous déchirerait les entrailles : mais ce monstre et ce malheureux, en peinture, l’un fût-il plus effrayant que l’hydre de Lerne, et l’autre plus à plaindre que Bélisaire, ne sauraient manquer de faire un plaisir très grand aux spectateurs, s’ils sont tracés par une main habile ; et voilà pourquoi Boileau a si bien dit après Aristote : Il n’est point de serpent ni de monstre odieux, Qui, par l’art imité, ne puisse plaire aux yeux. […] Toutefois, comme cette ressemblance ne saurait être toujours si parfaite, qu’elle n’admette quelque différence en faveur des beautés de l’art, l’art même, pour ménager ces beautés, peut faire illusion au spectateur, et lui montrer avec succès une action dont la durée exige huit ou dix heures, quoique le spectacle n’en emploie que deux ou trois : c’est que l’impatience du spectateur, qui aime à voir la suite d’une action intéressante, lui aide à se tromper lui-même, et à supposer que le temps nécessaire s’est écoulé, ou que ce qui exigeait un temps considérable s’est pu faire en moins de temps.
Nous savons d’où il était sorti et où il est allé, ce dernier venu du xviiie siècle, qui en avait la négation, l’impiété, l’analyse meurtrière et orgueilleuse, qui portait enfin dans tout son être le venin concentré, froidi et presque solidifié de cette époque empoisonnée et empoisonneuse à la fois, mais qui, du moins, n’en eut jamais ni la déclamation ni la chimère ! […] Il avait touché à cette baguette magique d’acier qui s’appelle une épée et qu’on ne touche jamais impunément, et il en avait gardé dans la pensée je ne sais quoi de militaire et, qu’on me passe le mot ! […] Ainsi que tous les Tartuffes qui possèdent l’esprit de leur vice et la majorité des hommes doublés d’une idée qu’ils ne disent pas, mais qui chatoie dans leur silence comme le jais brille malgré sa noirceur, Stendhal inspire un intérêt dont on ne saurait se défendre. […] Assurément il eût mieux valu ne pas les penser et ne pas les soutenir, mais il ne s’agit pas ici du fond des choses et du mutisme radical de l’esprit de Stendhal en fait de morale, il s’agit seulement de signaler la fermeté d’un caractère dont la force augmentait encore celle d’un esprit qui, naturellement, savait oser.
Nous savons d’où il était sorti et où il est allé, ce dernier venu du xviiie siècle, qui en avait la négation, l’impiété, l’analyse meurtrière et orgueilleuse, qui portait enfin dans tout son être le venin concentré, froidi et presque solidifié de cette époque empoisonnée et empoisonneuse à la fois, mais qui, du moins, n’en eut jamais ni la déclamation ni la chimère ! […] C’était un homme d’action, fils d’une époque qui avait été l’action même, et qui portait la réverbération de Napoléon sur sa pensée ; il avait touché à cette baguette magique d’acier qui s’appelle une épée, et qu’on ne touche jamais impunément, et il avait gardé dans la pensée je ne sais quoi de militaire et, qu’on me passe le mot, de cravaté de noir, qui tranche bien sur le génie fastueux des littératures de décadence. […] Ainsi que tous les tartuffes qui possèdent l’esprit de leur vice, et la majorité des hommes doublés d’une idée qu’ils ne disent pas, mais qui chatoie dans leur silence, comme le jais brille malgré sa noirceur, Stendhal inspire un intérêt dont on ne saurait se défendre. […] Assurément, il eût mieux valu ne pas les penser et ne pas les soutenir, mais il ne s’agit pas ici du fond des choses et du mutisme radical de l’esprit de Stendhal, en fait de morale, il s’agit seulement de signaler la fermeté d’un caractère dont la force augmentait encore celle d’un esprit, qui, naturellement, savait oser.
Et en effet il ne suffit pas pour qu’un ouvrage prétende à un renom et à une récompense de moralité dans le talent, qu’après avoir présenté des scènes plus ou moins vives et hasardées, empruntées à un monde équivoque, l’auteur se ravisant ajoute après coup je ne sais quelle intention et quel correctif, comme on met une affabulation au bout d’une fable, ou plutôt comme on mettrait un quatrain moral à la fin d’un conte. […] Pourtant la limite entre les ridicules et les vices proprement dits ne saurait se franchir indifféremment, et dans ces vices mêmes tous ne sont pas de telle sorte qu’ils puissent être impunément exposés. […] Le poète dramatique, s’il est vraiment tel qu’il s’en est vu aux glorieuses époques et qu’on a le droit d’en espérer toujours, ce poète, dans la liberté et le premier feu de ses conceptions, ne songe point à faire directement un ouvrage moral ; il pense à faire un ouvrage vrai puisé dans la nature, dans la vie ou dans l’histoire, et qui sache en exprimer avec puissance les grandeurs, les malheurs, les crimes, les catastrophes et les passions.
Ier, page 280) presque dans le sens mystique et apocalyptique qui avait cours parmi les écrivains de droite, et que ne saurait accepter une plume aussi ferme et aussi historique que la sienne. […] Sous cette rédaction générale et très-circonspecte, en la pressant un peu, on ne saurait méconnaître toutes les solutions qui, depuis 89, sont en train de se faire jour, de se dégager des accidents qui les ont tour à tour compromises, et de régner souverainement chez nous et ailleurs. […] On ne saurait se mettre en rapport par trop d’aspects avec les âmes intelligentes et généreuses.
La vie, le sentiment de la réalité, y respirent ; de frais paysages, l’intelligence poétique symbolique de la nature, une conversation animée et sur tous les tons, l’existence sociale du xviiie siècle dans toute sa délicatesse et sa liberté, des figures déjà connues et d’autres qui le sont du moment qu’il les peint, d’Holbach et le père Hoop, Grimm et Leroy, Galiani le cynique ; puis ces femmes qui entendent le mot pour rire et qui toutefois savent aimer plus et mieux qu’on ne prétend ; la tendre et voluptueuse madame d’Épinay, la poitrine à demi nue, des boucles éparses sur la gorge et sur ses épaules, les autres retenues avec un cordon bleu qui lui serre le front, la bouche entr’ouverte aux paroles de Grimm, et les yeux chargés de langueurs ; madame d’Houdetot, si charmante après boire, et qui s’enivrait si spirituellement à table avec le vin blanc que buvait son voisin ; madame d’Aine, gaie, grasse et rieuse, toujours aux prises avec le père Hoop, et madame d’Holbach, si fine et si belle, au teint vermeil, coiffée en cheveux, avec une espèce d’habit de marmotte, d’un taffetas rouge couvert partout d’une gaze à travers la blancheur de laquelle on voyait percer çà et là la couleur de rose ; et au milieu de tout ce monde une causerie si mélangée, parfois frivole, souvent souillée d’agréables ordures, et tout d’un coup redevenant si sublime ; des entretiens d’art, de poésie, de philosophie et d’amour ; la grandeur et la vanité de la gloire, le cœur humain et ses abîmes, les nations diverses et leurs mœurs, la nature et ce que peut être Dieu, l’espace et le temps, la mort et la vie ; puis, plus au fond encore et plus avant dans l’âme de notre philosophe, l’amitié de Grimm et l’amour de Sophie ; cet amour chez Diderot, aussi vrai, aussi pur, aussi idéal par moments que l’amour dans le sens éthéré de Dante, de Pétrarque ou de notre Lamartine ; cet amour dominant et effaçant tout le reste, se complaisant en lui-même et en ses fraîches images ; laissant là plus d’une fois la philosophie, les salons et tous ces raffinements de la pensée et du bien-être, pour des souvenirs bourgeois de la maison paternelle, de la famille, du coin du feu de province ou du toit champêtre d’un bon curé, à peu près comme fera plus tard Werther amoureux de Charlotte : voilà, et avec mille autres accidents encore, ce qu’on rencontre à chaque ligne dans ces lettres délicieuses, véritable trésor retrouvé ; voilà ce qui émeut, pénètre et attendrit ; ce qui nous initie à l’intérieur le plus secret de Diderot, et nous le fait comprendre, aimer, à la façon qu’il aurait voulu, comme s’il était vivant, comme si nous l’avions pratiqué. […] Leroy, homme d’esprit et philosophe, capitaine des chasses, amateur du sexe et ami de Diderot : « Si vous saviez combien je l’aime, écrit ce dernier, vous sauriez aussi combien il m’a été doux de le voir. […] si je l’avais su !
L’écrivain allemand, qui résidait presque officiellement chez nous durant la Restauration (car à toutes les époques nous avons eu en France un écrivain allemand qui a résidé), M. le baron d’Eckstein, homme de grand savoir et d’une véritable étendue d’esprit, tenait tout à fait par ses études et ses liaisons au parti des Stolberg, des Frédéric Schlegel, des artistes et philosophes catholiques de son pays. […] Homme de guerre, d’escarmouche rapide, archer fuyant et un peu cruel, il s’est jeté parmi nous, sur notre rive du Rhin, et de là, il nous a montré comment il savait décocher l’ironie et frapper au cœur des siens quand les siens n’étaient pas des nôtres. […] La force physique des maniaques est plus grande, comme on sait, que celle des gens sensés et prudents.
Voici ce que nous écrivions nous-même récemment sur cette question ou plutôt sur ce mystère : « Nous plaignons sincèrement les philosophes qui discutent depuis des siècles pour savoir si c’est l’homme qui a inventé la parole. Nous aimerions presque autant discuter pour savoir si c’est l’homme qui a inventé la pensée, c’est-à-dire si c’est l’homme qui s’est créé lui-même ; car il nous est aussi impossible de concevoir la pensée sans la parole qui lui donne conscience d’elle-même, que de concevoir la parole sans la pensée qui la constitue. […] On n’en sait rien : peut-être une éclaboussure ignée de lave refroidie, lancée avec une impulsion rotatoire par quelque éruption d’un volcan céleste ; peut-être un grain de poussière éthérée soulevé dans sa course par le vent de quelque astre démesuré de grandeur ; peut-être un atome de fumée émané tout noir et tout calciné de quelque foyer de soleil ?
Mais l’homme — l’homme qui nous l’a donnée après vingt années, lesquelles ont été probablement des années de recherches et d’étude, — est-il fini et mort sans qu’on en ait rien su, et ce qu’on en voit là, est-ce donc son fantôme ? […] , de jouer une musique à laquelle il n’ajoute, pour celui qui sait discerner partout la ligne droite sous ses courbes, que quelques arpèges ou quelques fioritures, rien de plus. […] — je ne sais quelle grâce méprisante qui l’empêchera de tomber jamais dans les hautes niaiseries du pédantisme contemporain : « Cela est assez ignoble pour être historique », est un mot qui le révèle.
Ceux qui aiment les livres le savent seuls. […] On ne sait pas assez à quel point elle importe dans l’étude de leurs œuvres et dans le jeu de leurs facultés. […] Nous n’avons besoin d’aucun commentateur, d’aucun savant, d’aucun scoliaste, pour savoir ce qu’il y a d’humain et d’universel dans les Caractères de La Bruyère.
Au bout de dix ans, l’impatience a pris Lefèvre-Deumier, ou, qui sait ? […] Il savait admirablement John Ford, Webster, Drummond, Gascoigne, Fletcher, Spenser, Dryden, ceux dont on parle et ceux dont on ne parle pas, et ce fut là dès son début sa supériorité tranchée. […] Pathétique et sarcastique à la fois, Lionel d’Arquenay est un roman profond et amer, ironique et tendre, dont le premier volume a été écrit avec la plume du lord Byron de Don Juan, et le second… on ne sait plus avec quelle plume !
Je n’en sais rien. […] Qui sait ? […] Le poète du matérialisme adoré, étreint, possédé, est devenu le poète du panthéisme qui, philosophiquement, n’est que du matérialisme déguisé, — on le sait de reste, — mais qui, poétiquement, n’en est plus.
Imagination qu’aurait préservée l’ignorance et qui n’était pas assez forte pour résister à la culture, M. de Gères ne sait pas ou peut-être a-t-il oublié que la fraternité tue les poètes autant que les peuples, et qu’ils doivent ressembler, pour être aussi impressifs qu’elle, à cette Tour seule qu’il a si bien peinte et chantée dans une de ses poésies le plus genuines par la rêverie et par le rythme : Au faîte où le sentier se plie Et plonge vers l’autre vallon, Droite sur son dur mamelon, Qu’au paysage rien ne lie, Sans arbre, sans maison autour, Sans voisinage qu’une meule, S’élève, muette, la tour Seule ! […] Celui qui gît sur cette couche N’a pas dit ce qu’il éprouvait, Mais l’arrêt ancien qui le touche Depuis longtemps il le savait ! […] Nous ne savons absolument rien de M. de Gères, si ce n’est le talent qu’il a, et ce talent a l’accent assez profond pour nous faire croire qu’il n’est pas tout à fait un jeune homme et qu’il a mordu dans cette pomme empoisonnée de la vie.
Quoique dans l’introduction qui précède son livre il nous dise, vers la fin : « La conspiration que j’ai rapportée est une conspiration vraie, aussi vraie que la conspiration du général Malet », ce qui est peut-être trop vite dit et pas assez prouvé, et, quoique l’imagination, beaucoup plus intéressée à ce roman d’une conspiration qu’elle ne le serait à une histoire, veuille bien accepter, sans le chicaner, ce qu’affirme si brièvement l’auteur, cependant il reste toujours, non pas uniquement l’embarras de savoir où le personnage historique finit et où le personnage inventé commence, mais il reste encore — et c’est autrement important — que tous les personnages de l’action sont tous vus de par dehors, comme les personnages d’une histoire, au lieu d’être vus de par dehors et de par dedans tout ensemble, comme doivent être vus tous les personnages d’un roman, dont l’auteur peut approfondir à son gré ou idéaliser les caractères, puisqu’il les a lui-même inventés ! […] Je ne sache pas de plus triste spectacle. […] Il le sait peut-être aussi bien que moi.
On sait que dans tous les ouvrages de Platon, c’est Socrate qui mène l’homme à la vérité ; Socrate en même temps conserve son caractère et son génie ; partout il garde sa manière de raisonner, ses inductions, ses interrogations, ces espèces de pièges et de longs détours dans lesquels il enveloppait ses adversaires, pour les amener malgré eux à une vérité qu’ils combattaient. […] les dieux le savent, mais aucun homme ne le sait. » Tel est ce premier discours de Platon, où il a développé l’âme de Socrate ; il y règne une éloquence douce et noble, le courage de la vertu, le respect pour la divinité et pour soi-même.
Mais comme tout devait s’y ramener à l’urne du sort ou à la balance, la Providence empêcha que le hasard ou la fatalité n’y régnât en ordonnant que le cens y serait la règle des honneurs, et qu’ainsi les hommes industrieux, économes et prévoyants plutôt que les prodigues ou les indolents, que les hommes généreux et magnanimes plutôt que ceux dont l’âme est rétrécie par le besoin, qu’en un mot les riches doués de quelque vertu, ou de quelque image de vertu, plutôt que les pauvres remplis de vices dont ils ne savent point rougir, fussent regardés comme les plus dignes de gouverner, comme les meilleurs120. […] La forme même de la monarchie retient la volonté du monarque tout infinie qu’est sa puissance, dans les limites de l’ordre naturel, parce que son gouvernement n’est ni tranquille ni durable, s’il ne sait point satisfaire ses peuples sous le rapport de la religion et de la liberté naturelle. […] Au défaut des sentiments religieux qui faisaient pratiquer la vertu aux hommes, les réflexions de la philosophie leur apprirent à considérer la vertu en elle-même, de sorte que, s’ils n’étaient pas vertueux, ils surent du moins rougir du vice.À la suite de la philosophie naquit l’éloquence, mais telle qu’il convient dans des états où se font des lois généralement bonnes, une éloquence passionnée pour la justice, et capable d’enflammer le peuple par des idées de vertu qui le portent à faire de telles lois.
« Cette heure, utile à tous, appelle chacun à faire ce qu’il sait, le soldat, le magistrat, le nautonier, l’artisan, le laboureur. […] « Une fois libre de soins, l’âme, née du ciel, et dont l’éther est la source pure, ne saurait languir oisive. […] On sait ce qu’avaient été chez les Hellènes la plainte et la prière funèbres.
Le journal de Didier, l’État, a cessé brusquement de paraître après quelques numéros, on ne sait ce que cela veut dire. […] Je ne sais en vérité, si la disette dure, comment se passera la saison.
Par exemple, le comte de Charolais s’amusait, comme on sait, par manière de passe-temps, à tirer sur les couvreurs pour les précipiter des toits : ce n’était là, selon elle, qu’un effet du sang qui fermentait avec violence ; ces moments passés, personne n’était d’une probité plus intacte. […] Les pièces officielles n’y manquent pas, les décrets du Comité de salut public, l’interrogatoire et l’inventaire de la Dubarry, les arrêtés du parlement, que sais-je ?
Il n’eut jamais d’autres fonctions ; mais depuis, chargé de correspondance pour certains journaux, il revit l’Espagne, il visita l’Angleterre ; il savait à merveille ces deux pays, parlait leur langue dans toutes les propriétés de l’idiome, chérissait leurs portes, leurs peintres : il était intéressant à entendre là-dessus. […] Des infortunes privées, tout un roman désastreux que tous ses amis savent, s’y joignirent et achevèrent de ruiner, non pas son courage qui fut grand jusqu’au bout, mais sa santé et ses forces.
La collection riche et complète qu’il avait su rassembler des poëtes de cette époque et de la suivante, dans un temps où la plupart étaient à peine connus de nom par les littérateurs même instruits, fournissait une base essentielle à une histoire de la poésie, et était déjà une partie de cette étude. […] Si nous avions à joindre quelque remarque critique générale aux éloges de détail que mérite presque constamment le modeste et ingénieux travail, ce serait surtout en ce que l’auteur, qui sait si bien les époques poétiques antérieures, semble méconnaître et vouloir ignorer trop absolument celle-ci.
S'il eut contre lui les clameurs philosophiques, ressource ordinaire d'un Peuple qui ne sait que crier, il obtint le suffrage de plusieurs de nos célebres Ecrivains. […] Rien n'est plus flatteur, dit-on avec raison, que les louanges de quelqu'un que nous en savons mille fois plus digne & plus couvert que nous.
Et vous ne songez pas que ces arbres doivent être touchés fortement, qu’il y a une certaine poésie à les imaginer selon la nature du sujet, sveltes et élégans, ou brisés, rompus, gercés, caducs, hideux ; qu’ici pressés et touffus, il faut que la masse en soit grande et belle ; que là rares et séparés, il faut que l’air et la lumière circulent entre leurs branches et leurs troncs ; que cette terrasse veut être chaudement peinte ; que ces eaux imitant la limpidité des eaux naturelles, doivent me montrer comme dans une glace l’image affaiblie de la scène environnante ; que la lumière doit trembler à leur surface ; qu’elles doivent écumer et blanchir à la rencontre des obstacles ; qu’il faut savoir rendre cette écume ; donner aux montagnes un aspect imposant ; les entr’ouvrir, en suspendre la cime ruineuse au-dessus de ma tête, y creuser des cavernes, les dépouiller dans cet endroit, dans cet autre les revêtir de mousse, hérisser leur sommet d’arbustes, y pratiquer des inégalités poétiques ; me rappeller par elles les ravages du temps, l’instabilité des choses, et la vétusté du monde ; que l’effet de vos lumières doit être piquant ; que les campagnes non bornées doivent, en se dégradant, s’étendre jusqu’où l’horizon confine avec le ciel, et l’horizon s’enfoncer à une distance infinie ; que les campagnes bornées ont aussi leur magie ; que les ruines doivent être solennelles, les fabriques déceler une imagination pittoresque et féconde ; les figures intéresser, les animaux être vrais ; et que chacune de ces choses n’est rien, si l’ensemble n’est enchanteur ; si composé de plusieurs sites épars et charmans dans la nature, il ne m’offre une vue romanesque telle qu’il y en a peut-être une possible sur la terre. Vous ne savez pas qu’un paysage est plat ou sublime ; qu’un paysage où l’intelligence de la lumière n’est pas supérieure est un très-mauvais tableau ; qu’un paysage faible de couleur, et par conséquent sans effet, est un très-mauvais tableau ; qu’un paysage qui ne dit rien à mon âme, qui n’est pas dans les détails de la plus grande force, d’une vérité surprenante, est un très-mauvais tableau ; qu’un paysage où les animaux et les autres figures sont maltraités, est un très-mauvais tableau, si le reste poussé au plus haut degré de perfection, ne rachète ces défauts ; qu’il faut y avoir égard pour la lumière, la couleur, les objets, les ciels, au moment du jour, au temps de la saison ; qu’il faut s’entendre à peindre des ciels, à charger ces ciels de nuages tantôt épais, tantôt légers ; à couvrir l’atmosphère de brouillards, à y perdre les objets, à teindre sa masse de la lumière du soleil ; à rendre tous les incidens de la nature, toutes les scènes champêtres, à susciter un orage, à inonder une campagne, à déraciner les arbres, à montrer la chaumière, le troupeau, et le berger entraînés par les eaux ; à imaginer les scènes de commisération analogues à ce ravage ; à montrer les pertes, les périls, les secours sous des formes intéressantes et pathétiques.
Vous ignorez sans doute tout ce que je vous dois ; vous savez du moins dans quel sentiment je vous offre ces pages qui sont une œuvre d’amour plus encore que de science. […] Ni ces craintes, ni ces vains espoirs ne sauraient arrêter la marche en avant.
Peut-être alors pourriez-vous… qui sait ? […] James, si vous saviez comme mon cœur est fier, vous me plaindriez doublement ! […] Nous savons par lui que nous ne sommes plus forcés d’aller chercher en Grèce, à Rome, dans les palais, chez les héros et les académiciens, les objets poétiques. Ils sont tout près de nous : si nous ne les voyons pas, c’est que nous ne savons pas les voir ; le défaut est dans nos yeux, non dans les choses. […] Sitôt qu’on lui avait récité une ballade du Border, il la savait par cœur.
Comme nous savons, lorsqu’elle vient nous rendre visite, découvrir l’occasion d’apprendre à nos amis sa position dans le monde ! […] Mon cher et excellent lecteur, ne savez-vous pas que Brutus fit couper la tête à ses propres fils ? […] Il court sus à la belle fortune de mistress Hoggarthy, affligé de voir qu’elle rapporte à peine quatre pour cent à mistress Hoggarthy, décidé à doubler le revenu de mistress Hoggarthy. […] En physiologiste, il sait que les nerfs de la bête de proie s’amollissent et qu’elle ne cesse de bondir que pour dormir. […] Les enfants n’en doivent rien savoir.
Les dimensions des grands journaux se sont agrandies ; le système des annonces Duveyrier se déploie en long et en large ; les feuilletons nagent au milieu de tout cela comme de minces vaisseaux à travers un Océan, et l’œil du lecteur ne sait plus où se poser. […] On sait mon nom, ma vie est heureuse et facile ; J'ai plusieurs ennemis et quelques envieux ; Mais l’amitié chez moi toujours trouve un asile, Et le bonheur d’autrui n’offense pas mes yeux.
Je ne sais quel effet la littérature de ce temps-ci fera dans l’avenir à ceux qui la regarderont à distance respectueuse ; il est à croire que, moyennant les inclinaisons de la perspective, et un peu de bonne volonté et d’illusion chez les spectateurs, tout cela prendra une tournure, une configuration générale et appréciable, une sorte de simplicité. […] Quoi qu’il advienne de ce jugement vénérable et suprême, pour ce que nous savons et voyons directement nous avons bien le droit de dire que le caractère de notre littérature actuelle est avant tout la diversité, la contradiction, le pour et le contre coexistants, accouplés, mélangés, l’anarchie la plus inorganique, chaque œuvre démentant celle du voisin, un choc, un conflit, et, comme c’est le mot, un gâchis immense.
Or, nous le savons de Benjamin Constant lui-même ; voici un passage textuel tiré de son Carnet, que j’ai eu entre les mains, et que M. […] Je pars pour l’Angleterre par Bruxelles, 31 octobre 1815, etc., etc. » Et maintenant, quand on publiera les lettres d’amour de Benjamin Constant à Mme Récamier, quand on relira la biographie flatteuse qu’il a tracée d’elle pour lui plaire et la charmer, quand on le verra prodiguer les larmes, les soupirs, faire jouer les feux follets de l’imagination et même les légères vapeurs du mysticisme (car tout est bon pour s’insinuer), on aura le revers ; on saura ce qu’il était avant et après ; avant, tant qu’il eut le désir, et après, quand il eut cessé d’espérer.
On sait, messieurs, que les temps sont loin où l’auteur dramatique était aux gages de la troupe et du directeur, et confectionnait une pièce de théâtre pour un écu. […] Il n’est pas mal assurément, messieurs, que dès que quelqu’un se croit victime d’une injustice ou croit apercevoir un abus, il s’écrie : « J’en appellerai au Sénat. » Le Sénat ne saurait décourager un sentiment si honorable de confiance en sa justice.
Madeleine ; mais il a su être sincère et jeune, c’est un musicien raffiné, il a des trouvailles très heureuses, la distinction lui est innée. […] Dans ces deux volumes, il manque un je ne sais quoi ; le poète se garde trop, s’observe trop, il surveille son lyrisme à la façon d’un grammairien, et je suis persuadé qu’il l’émonde trop.
Victor Hugo Poète, dans ce siècle où la poésie est si haute, si puissante et si féconde, entre la messénienne épique et l’élégie lyrique, entre Casimir Delavigne qui est si noble et Lamartine qui est si grand, vous avez su, dans le demi-jour, découvrir un sentier qui est le vôtre et créer une élégie qui est vous-même. […] Sainte-Beuve aime cette Sainte-Périne de professeurs qu’on appelle l’Académie, et il y va tous les jours de séance, pour y pédantiser un peu… et pour y chercher provision de commérages et de petits scandales qu’il saura distiller plus tard.
N’oublions pas qu’au mérite du savoir il joignit le mérite plus estimable encore, des vertus sociales. […] Ceux qui s’obstinent à reprocher à l’Eglise un caractere odieux de dureté, d’intolérance, n’ont qu’à parcourir les instructions qu’il donnoit à ses Diocésains pendant les troubles des Cévenes ; ils verront comment un esprit vraiment pastoral sait allier la fermeté de la foi avec la charité qu’elle ordonne ; ils admireront des exhortations propres à affermir le courage des Ministres de la Religion, & à soutenir leur patience dans les persécutions ; ils seront pénétrés de respect & d’attendrissement pour cette douceur de morale, cette générosité de sentiment, cette indulgence qui plaint l’erreur en la combattant, cette magnanimité qui se refuse même la plus légere satisfaction, lorsque les persécuteurs les plus atroces sont devenus malheureux.
Si nous voulions d'abord en critiquer le titre, nous dirions que le mot Maximes ne sauroit convenir qu'à des vérités évidentes & consacrées par une adoption générale, non à des pensées qui peuvent être vraies, mais qui sont nouvelles, & ne doivent être regardées que comme le fruit de la méditation d'un esprit qui réfléchit pour lui même, sans avoir droit de fixer les idées d'autrui. […] S'il entendoit par amour-propre l'amour de nous-mêmes, qui ne sauroit être vicieux tant qu'il est éclairé par de saines lumieres & retenu dans de justes bornes, son principe ne seroit pas défectueux ; mais ce n'est pas ainsi qu'il l'entend.
On sait combien le caractère chevaleresque est favorable à l’Épopée. […] On est avec eux sous les murs de Solyme ; on croit entendre le jeune Bouillon s’écrier, au sujet d’Armide : « Que dira-t-on à la cour de France, quand on saura que nous avons refusé notre bras à la beauté ?
Il est certain que les poètes n’ont pas su tirer du merveilleux chrétien tout ce qu’il peut fournir aux Muses. […] On sait comment Neptune, ……… S’élevant sur la mer, D’un mot calme les flots……… Nos dogmes fournissent un autre genre de poésie.
tandis qu’ils m’adorent sur le trône des enfers, ils savent peu combien je paie cher ces paroles superbes, combien je gémis intérieurement sous le fardeau de mes douleurs ! […] Le tyran le sait ; il est aussi loin de m’accorder la paix, que je suis loin de demander grâce.
d’un roman inédit dont je ne sais encore ni la conception ni les caractères. […] Le moraliste, que j’ai vu aussi dans ces Propos littéraires et pittoresques, où l’auteur tire les petits ridicules comme les bécassines, et en entretiendrait la cuisine du Nain Jaune s’il lui plaisait, le moraliste doublera parfaitement le peintre quand Dusolier voudra sérieusement être romancier et regarder dans les cœurs et dans le sien comme il sait regarder dans les choses extérieures, — les paysages de ses campagnes ou les êtres de son logis !
Ces chanteurs n’étaient sans doute autres que les rapsodes, ces hommes du peuple qui savaient chacun par cœur quelque morceau d’Homère, et conservaient ainsi dans leur mémoire ses poèmes, qui n’étaient point encore écrits. […] Mais comment savoir ces particularités de l’histoire d’un homme, lorsqu’on en ignore les deux circonstances les plus importantes, le temps et le lieu ?
Troïlus, si brave et si fort dans la bataille, ne sait devant Cressida que pleurer, demander pardon et s’évanouir. […] — Ils savaient tous ce service par cœur. […] Elle prouve qu’elle a bien fait de se marier cinq fois, et elle le prouve d’un style clair, en femme expérimentée203 : « Dieu nous a dit de croître et de multiplier. » Voilà un « gentil texte », elle a « bien su le comprendre. » — « Je sais aussi que Dieu a dit que mon mari quitterait père et mère et s’attacherait à moi. […] Allons confesser les riches, « les vendeurs de victuaille. » On ne gagne honneur et profit que chez eux. — Mais il faut, comme lui, savoir s’y prendre. […] — Que les attributs déterminent les personnes, et non pas la substance, c’est-à-dire la nature. — Comment les propriétés peuvent être dans la nature de Dieu et ne pas la déterminer. — Si les esprits créés sont locaux et circumscriptibles. — Si Dieu peut savoir plus de choses qu’il n’en sait. » Voilà les idées qu’ils remuent ; quelle vérité en peut sortir ?
Quarante volumes suffisent, et au-delà, pour bien connaître un homme ; d’ailleurs ils montrent de lui tout ce qu’il importe d’en savoir. […] Cependant il n’y a pas d’écrivain qui sache mieux toucher et attendrir ; il fait pleurer, cela est à la lettre ; avant de l’avoir lu, on ne se savait pas tant de pitié dans le cœur. […] Il y mûrit au double souffle de la religion et de la morale ; on sait quels sont leur popularité et leur empire au-delà du détroit. […] Les meilleurs sont des automates de fer poli qui exécutent méthodiquement leurs devoirs légaux et ne savent pas qu’ils font souffrir les autres. […] Il se replie sur lui-même, étudie en machine les leçons qu’on lui impose ; il ne peut les apprendre, tant il a crainte de ne pas les savoir.