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1374. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Gabriel Ferry »

L’auteur semble avoir oublié, ou n’avoir jamais su, que le véritable génie dramatique ne procède pas plus par des événements que par des chiffres, et qu’on peut en ajouter beaucoup les uns aux autres sans avoir plus d’imagination pour cela… Comme inventeur, donc, Gabriel Ferry ne nous paraît pas une grande perte. […] L’écrivain futur est au fond de ce style solide, rapide et ferme, lequel n’a pas, il est vrai, le coup de lime définitif qui donne au fer l’éclat de l’acier, mais qui brille de force à plus d’un endroit et semble mépriser toutes les petites gentillesses littéraires de ce temps d’énervation et de prétention intellectuelle pour aller au fait, l’appréhender et le rendre avec un relief vigoureux.

1375. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Taine — III »

Le cas tout à fait lamentable, c’est celui que l’on flétrissait, il y a peu, ici même, de cette Correspondance de Baudelaire que, malgré toutes les démarches, les éditeurs Calmann-Lévy ne semblent que trop décidés à publier. […] Taine qui, théoriquement, semble avoir eu tort de ne pas se prêter aux reporters, — tandis que son maître, Gœthe, en avait installé un d’office auprès de lui (Eckermann), — eut raison dans la pratique.

1376. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxvie entretien. L’ami Fritz »

» En parlant ainsi, le vieux rebbe semblait tout ému ; le gros percepteur Hâan le regardait, les yeux écarquillés, et Iôsef, de temps en temps, murmurait des paroles confuses. […] À force de le voir, il n’y pensait plus ; mais alors il lui sembla le retrouver après une longue absence. […] Sûzel, elle, ses grands yeux bleus écarquillés d’admiration et sa petite bouche rose entr’ouverte, semblait en extase. […] Il lui semblait voir Sûzel étendre ces feuilles vertes au fond de la corbeille, puis déposer les cerises dessus, ce qui lui procurait une satisfaction intérieure, et même un attendrissement qu’on ne pourrait croire. […] Hâan semblait tout glorieux de son choix : il se redressait en arrangeant son jabot, et la grande fille, qui le dépassait de la moitié de la tête, avait l’air de le conduire.

1377. (1896) Journal des Goncourt. Tome IX (1892-1895 et index général) « Année 1895 » pp. 297-383

Moi, au milieu de cela, il me semble m’apercevoir dans une glace, avec sur la figure un doux hébétement, quelque chose d’un bonheur bouddhique. […] Un racontar si bien rédigé, qu’il me fait douter complètement de l’indélicatesse de ce faux voleur, et qui semble un truc très original, pour attendrir un romancier psychologue, et lui attraper une pièce de cent sous. […] Et tout près du chapeau de l’exil, cette veste de piqué blanc, aux taches jaunes, qui semblent sorties du foie du Prométhée de l’île africaine. […] Les heures, où l’on va à un enterrement, où on le suit, me semblent des heures, où l’activité de votre esprit est engourdie par du néant. […] Quoi, ce pays qui a eu le coquet et rondissant mobilier de paresse du xviiie  siècle, est sous la menace de ce dur et anguleux mobilier, qui semble fait pour les membres frustes d’une humanité des cavernes et des lacustres.

1378. (1875) Premiers lundis. Tome III « De la liberté de l’enseignement »

A ceci, que ce n’est nullement la vérité, ce qui semble tel à un individu, même le plus respectable, qui doit être la mesure de la loi et du droit dans le régime moderne. […] La fin aussi semble excéder et entamer une question nouvelle, toute une théorie pénale, sans la traiter et l’embrasser suffisamment. […] Or, c’est sous l’empire de cette philosophie de montre, trop docilement acceptée de l’Université, que semble avoir été conçu et motivé l’arrêté ministériel. […] La mollesse des mœurs, la lâcheté des opinions, la facilité ou la connivence des gens bien appris, laissent le champ libre plus que jamais en aucun temps à l’activité et au succès d’un parti ardent qui a ses intelligences jusque dans le cœur de la place et qui semble, par instants, près de déborder le pouvoir lui-même. […] Il a semblé à l’éditeur que la note inédite suivante, extraite du dossier de Monsieur Sainte-Beuve et préparée en cas d’interruption, trouvait assez naturellement sa place ici : « Et ne venez pas parler d’immoralité en même temps que de jeunesse.

1379. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXVIe entretien. Biographie de Voltaire »

Plus la mort semble approcher, plus le flot se clarifie, plus le crépuscule réfléchit d’aurore matinale dans les splendeurs de ce soleil couchant. […] Il encensait jusqu’aux papes, aux cardinaux ; il semblait, avec un art habile, ranger les personnes en dehors des lois de la guerre qu’il faisait aux choses. […] Il ne semblait du reste nullement penser à convertir à sa cause la majorité du genre humain. […] Les rêves de constitutions chimériques et contradictoires de ce philosophe génevois lui semblaient, avec raison, aussi creux et aussi impratiques que ceux de Platon et de Fénelon. […] La France semblait couronner en lui sa propre personnification triomphale.

1380. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre VII. La littérature et les conditions économiques » pp. 157-190

  Il me semble inutile d’insister davantage sur les liens qui rattachent ainsi la littérature à l’industrie. […] En France, l’Église a eu longtemps en réserve des canonicats, des abbayes, des évêchés même, pour des écrivains qui ne semblent pas avoir eu toujours l’âme très ecclésiastique, témoin Rabelais et Régnier. […] » En revanche, après des années où les forces vives de la nation ont été détournées vers d’autres activités, comme ce fut le cas dans l’orgie militaire du premier Empire, il semble qu’un chemin de velours s’ouvre aux débutants : « Michelet raconte63 que, quand il sortit du collège, les libraires se jetaient sur le moindre écolier pour en faire un homme de lettres. […] A ne voir que l’apparence, la presse semble être la reine de l’opinion et par conséquent du monde contemporain. […] Il me semble difficile qu’on ne sente pas l’intérêt et l’importance des renseignements que peut fournir cette application à l’ordre d’études qui nous occupe de ce qu’on appelle « le matérialisme historique ».

1381. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 mai 1886. »

Il me semble que la place d’honneur doit être assignée à M.  […] Ses programmes étaient tout d’essai, et leur objet semblait être de prouver premièrement que Wagner était au moins aussi mélodique qu’aucun autre compositeur. […] Nos jeunes compositeurs, en dépit des exhortations de leurs mentors, prenne ni avec assiduité dans les œuvres de Berlioz et de Wagner leurs modèles d’instrumentation et, moins prudemment ce me semble, leurs modèles de mélodies. […] Cari Rosa qui semblait vouloir devenir le champion du drame Wagnérien chez nous, paraît avoir perdu courage ; une saison de trois à six semaines ne peut être appelée un Opéra National. […] Elle fait entendre la voix des syrènes qui dans l’éloignement semble gagner des inflexions encore plus alanguies, et se penchant amoureusement vers son oreille, paraît instiller goutte à goutte dans ses veines un incurable poison, une défaillance voluptueuse qui accable de chaînes indissolubles ses forces évanouies.

1382. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre II. La poésie lyrique » pp. 81-134

« Désormais, il existe un style intermédiaire entre la prose et le vers français, un style complet qui semble unir les qualités contraires de ses deux aînés… » M.  […] Subtil, il se refuse aux argumentations des pédagogues, il répudie l’instinct dans l’art et semble l’estimer néanmoins. […] Il semble avoir dérobé à chaque maître son secret pour en composer de longues laisses de vers d’une harmonieuse souplesse sans monotonie. […] La mort, mais elle est dans chacun des poèmes de Mme de Noailles, c’est la hantise baudelairienne, mais il semble que Mme de Noailles l’accepte autant comme un encouragement que comme une crainte. […] Le paysage est brut, semble morne de vivre En l’air jaunâtre et gris de cette aube… Pleuvoir !

1383. (1900) Le rire. Essai sur la signification du comique « Chapitre I. Du comique en général »

Il semble que le comique ne puisse produire son ébranlement qu’à la condition de tomber sur une surface d’âme bien calme, bien unie. […] Il semble que le rire ait besoin d’un écho. […] Question embarrassante, semble-t-il, puisque des psychologues tels que Hecker, Kraepelin, Lipps se la posèrent tour à tour et y répondirent diversement. […] Tout à l’heure, le vêtement habituel avait beau être distinct de la personne ; il nous semblait faire corps avec elle, parce que nous étions accoutumés à le voir. […] Le corps vivant nous semblait donc devoir être la souplesse parfaite, l’activité toujours en éveil d’un principe toujours en travail.

1384. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre I. La Renaissance païenne. » pp. 239-403

Il semble que les hommes ouvrent tout d’un coup les yeux et voient. […] Il est tiré éternellement et invinciblement par la même pensée, et les comparaisons qui semblent lointaines ne font qu’exprimer la présence incessante et la puissance souveraine de l’image dont il est obsédé. Stella est malade ; il semble à Sidney293 « que la joie hôte de ses yeux pleure en elle. » Ce mot est absurde pour nous. […] Oserai-je traduire ces songes d’amoureux et de peintre, ces charmantes imaginations païennes et chevaleresques où Pétrarque et Platon semblent avoir laissé leur souvenir ? […] Le monde, qui paraissait un amas de puissances instinctives, ne semble plus qu’une machine de rouages engrenés.

1385. (1853) Histoire de la littérature française sous la Restauration. Tome I

Le temps où nous sommes semble heureusement choisi pour écrire et pour publier ce livre. […] La barque qui obéit à la traction de la vague qui l’entraîne, semble la dominer : c’est l’image des hommes qui semblaient dominer la révolution qui les entraînait, et l’on en trouve la preuve dans leur impuissance dès qu’ils ont voulu l’arrêter ou même cesser de la suivre. […] Peu d’éclat, peu de bruit ; l’empire, cette grande prise d’armes militaire, semble produire une espèce de suspension d’armes dans la guerre des idées. […] « Les temps où nous sommes, disait-il lui-même, semblent demander un nouveau genre d’instruction. […] L’impudique Vénus, qui présidait à la poésie matérialiste et voluptueuse des écrivains idolâtres, lui semblait indigne d’être invoquée par des poëtes chrétiens.

1386. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CVIIIe entretien. Balzac et ses œuvres (3e partie) » pp. 433-527

Le commerce de grains semblait avoir absorbé toute son intelligence. […] Là se découvre une vallée qui commence à Montbazon, finit à la Loire, et semble bondir sous les châteaux posés sur ces doubles collines, une magnifique coupe d’émeraude au fond de laquelle l’Indre se roule par des mouvements de serpent. […] « Ces dispositions donnent une élégante physionomie à ce castel ouvragé comme une fleur, et qui semble ne pas peser sur le sol. Vu de la vallée, le rez-de-chaussée semble être au premier étage ; mais, du côté de la cour, il est de plain-pied avec une large allée sablée donnant sur un boulingrin animé par plusieurs corbeilles de fleur. […] « — Ceci me semble difficile, répondit-il, Mme de Chessel nous attend.

1387. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Discours prononcé à la société des visiteurs des pauvres. » pp. 230-304

Quand vous avez trouvé vos pauvres, une seconde difficulté se présente : c’est d’établir entre eux et vous des rapports vraiment affectueux et qui leur semblent, à eux comme à vous, « naturels ». […] Mais il faut poursuivre, et il semble que l’auteur ait éprouvé, ici, quelque embarras. […] Lavedan, ceux-ci et ceux-là semblent s’éloigner également, quoiqu’en sens contraire, de « l’humble vérité ». […] Il me semble d’abord qu’il est le seul de sa bande qui écrive encore plus pour son plaisir que pour celui des autres ; et que cet esprit, qui plaît si naturellement, ne sacrifie que peu, si l’on y regarde de près, au désir de plaire. […] Cette dose me semble plus forte dans Mariage bourgeois que dans les autres pièces de M. 

1388. (1814) Cours de littérature dramatique. Tome II

Bajazet et Atalide expient d’une manière terrible un artifice que la nécessité de leur situation semblait devoir excuser : voilà la tragédie. […] Il me semble que cette espèce de nature basse et commune serait bien plus déplacée, bien plus inconvenante dans une tragédie. […] Digne fils de Mithridate, il semble n’avoir hérité que de ses vertus. […] Il semble que l’action ait dû réellement se passer telle qu’on la représente. […] Il semble que Racine était né pour éprouver des injustices, et pour les sentir bien vivement.

1389. (1923) Au service de la déesse

L’épopée homérique, après l’anéantissement d’Homère, a pu sembler comme un peu orpheline. […] » Le lecteur, il me semble, n’est pas si prompt à conclure. […] Les bambins, après cela, semblèrent « consommés dans la pratique de ces connaissances diverses ». […] Il semble si moderne ; et, à certains égards, il est si moderne ! […] Il me semble que sa peinture est fidèle : on m’excusera si je n’en suis pas sûr.

1390. (1895) Nos maîtres : études et portraits littéraires pp. -360

Et, maintenant, cette vérité-là me semble aussi vaine que les autres. […] Ici les doctrines ne sont pas moins nombreuses, et ne semblent pas moins opposées. […] Il me semblait que M.  […] Et, de fait, il semble bien qu’on en ait fini avec l’excentricité. […] Sabatier ne me semble pas l’avoir bien apprécié.

1391. (1890) Derniers essais de littérature et d’esthétique

En tout cas, ces fragments semblent être d’un travail fort inférieur. […] Il semble que le monde ancien revient à la vie pour nous charmer. […] Il semble que les mots le dominent. […] Ne faire qu’un avec les éléments, tel semble être le but de M.  […] Il semble que présentement la muse de M. 

1392. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Académie française — Réception de M. Jules Sandeau » pp. 322-326

Jules Sandeau a eu bien des succès : celui de l’autre jour les lui résumait tous, ce nous semble, et les lui réfléchissait d’une manière sensible et bien touchante, qui a dû lui aller au cœur. […] À travers les charmants et bien mérités éloges auxquels prêtait ce genre de réponse toute personnelle, j’ai regretté, je l’avoue, de rencontrer deux ou trois traits piquants qui visaient au-delà, qui semblaient s’adresser à de grands talents placés hors de la sphère et de la portée académique60.

1393. (1874) Premiers lundis. Tome I « Mémoires de madame du Hausset, femme de chambre de madame de Pompadour. »

Madame du Hausset semblait faite pour ce rôle de Suétone par sa position et par son caractère ; il est dommage qu’elle n’ait ni plus regardé ni plus écrit. […] Pour ne pas les entendre, on s’abîma de plus en plus dans le tourbillon des voluptés et des intrigues ; en partie volonté, en partie fatalité, on s’étourdit sur les dangers de sa postérité et d’un avenir qu’on ne jugeait pas si prochain : l’illusion de cette cour usée semblait un rêve de la caducité délirante.

1394. (1874) Premiers lundis. Tome I « Mémoires de Dampmartin, Maréchal de camp »

Quoi qu’il en soit de ce rigorisme qui doit après tout moins exciter le blâme que le regret, on trouve d’ailleurs dans son livre des détails sur l’armée et sur l’émigration, d’où ressortent des vues générales assez curieuses, ce nous semble, et qu’on ne saurait trop rappeler. […] Coblentz même, l’incomparable Coblentz, cette arche sainte aux yeux de nous autres profanes, ce sanctuaire unique, ce nous semble, d’honneur et de zèle, Coblentz était entaché de modérantisme, et on le réputait trop monarchien pour le reconnaître monarchique.

1395. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — J — Jammes, Francis (1868-1938) »

Et il semble que l’orthographe n’en est pas très rigoureuse : James serait plus exact. […] De tels vers semblent bien avoir été écrits, comme nous le confie çà et là, au cours du livre, M. 

1396. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre V. Un livre de Renan et un livre sur Renan » pp. 53-59

Et cette volonté d’une critique nouvelle semble louable assurément. […] Et alors la pensée libre de Renan, qui croit à beaucoup de vérités, lui semble nulle de par ses recherches variées et sa richesse même.

1397. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre quatrième. Du Merveilleux, ou de la Poésie dans ses rapports avec les êtres surnaturels. — Chapitre XIV. Parallèle de l’Enfer et du Tartare. — Entrée de l’Averne. Porte de l’Enfer du Dante. Didon. Françoise de Rimini. Tourments des coupables. »

Toute oreille sera frappée de la cadence monotone de ces rimes redoublées, où semble retentir et expirer cet éternel cri de douleur qui remonte du fond de l’abîme. […] Elle était sombre comme la nuit, hagarde comme dix furies ; sa main brandissait un dard affreux, et sur cette partie qui semblait sa tête, elle portait l’apparence d’une couronne. » Jamais fantôme n’a été représenté d’une manière plus vague et plus terrible.

1398. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 8, des instrumens à vent et à corde dont on se servoit dans les accompagnemens » pp. 127-135

Il me semble que ce passage jette presentement un grand jour sur le titre des comedies de Terence, qui souvent ont mis à la géne des sçavans commentateurs, sans qu’ils y disent rien sur quoi l’on puisse fonder un jugement arrêté. […] Mais, me dira-t-on, vous semblez louer les acteurs des anciens, d’une chose qui passe pour un défaut.

1399. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « VI »

Le mot de Sarcey lui semble « une belle autorité ». […] Il me semble que mon esprit est habillé en masque.

1400. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre ii »

Ils semblent avoir hâte de se dire les uns aux autres ce que la vie et la mort soulèvent en eux de réflexions. […] Il me semble que je suis moins seul… » (Manuel général de l’Instruction primaire.)‌

1401. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) «  Chapitre treizième.  »

Il semble qu’il se soit peint dans un portrait de saint Paul, un des plus beaux qu’il ait tracés. […] Le pardon lui semble un attribut de Dieu si essentiel, que c’est à peine s’il s’accommode de l’innocence qui le rendrait inutile. […] Que l’amour, qui semble aussi vouloir le troubler, cède lui-même126 !  […] Il faut aussi admirer cette force d’imagination par laquelle Bossuet, présentant les raisons de l’adversaire, semble les sentir pour son compte, et s’approprier ce qu’il réfute. […] Lui-même semble se faire solitaire pour préparer des lectures à des solitaires, et il prend sa part de ce doux aliment qu’il accommodait aux loisirs inquiets du couvent.

1402. (1714) Discours sur Homère pp. 1-137

Ces qualités qui se nuisent d’ordinaire dans les autres, semblent, en lui, se donner mutuellement la perfection ; et cette perfection est si sensible et si reconnuë, qu’il faut être aveugle pour ne la pas voir, et insensé pour n’en pas convenir. à suivre d’autres mémoires, Homere n’étoit qu’un homme. […] Il leur semble que les plus vaillans hommes de ce poëme ne le sont que pour donner du lustre à la valeur d’Achille ; on diroit qu’Homere ne leur fait faire des prodiges, qu’afin que son héros les efface. […] Voilà, ce me semble, quelle doit être essentiellement l’union du vraisemblable et du merveilleux : mais il entre bien de l’arbitraire dans l’application de ce principe. […] Les unes littérales, et c’est à celles-là que le nom de traduction semble être propre ; les autres plus hardies, et qui doivent plutôt passer pour des imitations élégantes, qui tiennent le milieu entre la traduction simple et la paraphrase. […] En vérité, quand Homere auroit eu dessein d’avilir ses deux héros, qu’il auroit voulu que l’un pérît avec infamie, et que l’autre triomphât sans gloire, il me semble qu’il n’auroit pû mieux s’y prendre.

1403. (1932) Les deux sources de la morale et de la religion « L’obligation morale »

En d’autres termes, parents et maîtres semblaient agir par délégation. […] Il semble qu’une erreur du même genre ait été commise par beaucoup de ceux qui ont spéculé sur l’obligation. […] Les grands entraîneurs de l’humanité, qui ont forcé les barrières de la cité, semblent bien s’être replacés par là dans la direction de l’élan vital. […] Bref, sa mission est d’ordre religieux et mystique, au sens où nous prenons aujourd’hui ces mots ; son enseignement, si parfaitement rationnel, est suspendu à quelque chose qui semble dépasser la pure raison. […] La raison ne peut qu’alléguer des raisons, auxquelles il semble toujours loisible d’opposer d’autres raisons.

1404. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCVe entretien. Alfred de Vigny (2e partie) » pp. 321-411

Sans cesse elle fait naître le souvenir des Vierges maternelles de Raphaël et des plus beaux tableaux de la Charité ; — sans efforts elle est posée comme elles ; comme elles aussi, elle porte, elle emmène, elle assied ses enfants, qui ne semblent jamais pouvoir être séparés de leur gracieuse mère ; offrant ainsi aux peintres des groupes dignes de leur étude, et qui ne semblent pas étudiés. […] « Il avait à son cou une noix de coco, très bien sculptée, arrangée en flacon, avec un goulot d’argent, et dont il semblait tirer assez de vanité. […] « — Cela me semble aussi, dit-elle ; je voudrais n’arriver jamais. […] Elle avait une autre figure ; il me sembla qu’elle riait, et ses cachets paraissaient couleur de rose. […] Cette foi, qui me semble rester à tous encore et régner en souveraine dans les armées, est celle de l’honneur.

1405. (1864) Cours familier de littérature. XVII « XCIXe entretien. Benvenuto Cellini (1re partie) » pp. 153-232

Il me semble que j’ai déjà fait la moitié du chemin. […] et il me semblait que je lui répondais : Mon cher père, cela m’est impossible. […] D’après cette satisfaction que je lui avais donnée, il me semblait que tout dût me réussir ; et je m’occupai du vase que j’avais commencé pour l’évêque de Salamanque. […] Il me semble que je lui répondis que je reconnaissais tous les bienfaits de Dieu. […] Ne pars point, sa rigueur semble s’être adoucie !

1406. (1893) Du sens religieux de la poésie pp. -104

Voilà pourquoi Lamartine, Baudelaire et Verlaine, tous trois mystiques et mystiques chrétiens, semblent écrire en des idiomes différents. […]  » L’avenir de la poésie, je le répète, me semble donc être aux poètes de pensée qui seront doués aussi d’une sensibilité extrême et qui tâcheront de n’ignorer rien des secrets de leur art. […] Aux heures troubles ou mornes, quand ce sont les violents ou les médiocres qui semblent triompher, — toujours, en quelque lieu caché, dans des âmes inconnues mais valeureuses et fécondes, la pensée créatrice se recueille, préparant les belles revanches du lendemain. […] L’excuse de ceux-ci, quand ils semblent parfois se refuser à l’appel de l’immense fraternité, quand avec le dédain de Baudelaire ou d’E.  […] Il semble que nous soyons à l’heure où l’Art déserte les religions.

1407. (1856) Jonathan Swift, sa vie et ses œuvres pp. 5-62

Mais l’art suprême de Temple était de paraître agir et de sembler nécessaire. […] Les apparentes bontés du roi Guillaume, qui causait familièrement avec le secrétaire de sir Temple, semblaient lui assurer la protection royale. […] Les choses défendues ne semblent-elles pas plus douces ; la soie prohibée fait les délices des femmes, et le vin de contrebande celles des hommes. […] Le prince de Galles, sa femme Caroline, sa favorite Miss Howard, attirèrent Swift dans leur petite cour et lui firent un accueil qui semblait devoir réparer toutes les déceptions antérieures du doyen de Saint-Patrick. […] Il avait été question d’une union des Whigs et des Tories contre Walpole ; le prince y semblait disposé, et c’est ce que Swift avait indiqué en donnant à l’héritier du trône de Lilliput un talon haut et un bas talon.

1408. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre VII : Instinct »

Un acte que nous ne pourrions accomplir qu’à l’aide de la réflexion et de l’habitude, lorsqu’il est accompli par un animal, surtout par un animal très jeune et sans aucune expérience, ou lorsqu’il est accompli de la même manière par beaucoup d’individus sans qu’ils semblent en prévoir le but, est en général regardé comme instinctif. […] En Suisse comme en Angleterre, les esclaves semblent avoir exclusivement soin des larves, et les maîtres seuls vont à la chasse aux esclaves. […] Qu’on leur accorde tout l’instinct qu’on voudra, il semble encore incompréhensible, au moins au premier abord, qu’elles réussissent à tracer les angles et les plans nécessaires, ou même qu’elles puissent savoir s’ils sont corrects. […] Il semble d’autant plus difficile de comprendre comment se bâtissent les cellules, qu’une multitude d’Abeilles y travaillent ensemble : un de ces insectes travaillant quelque temps à une cellule, puis à une autre et ainsi de suite, de sorte que, comme l’a constaté François Huber, une vingtaine d’individus participent dès le commencement à la construction de la première cellule. […] De plus, ces castes ne semblent pas généralement se confondre les unes dans les autres, mais sont au contraire parfaitement délimitées, étant aussi différentes les unes des autres que pourraient l’être deux espèces du même genre ou même deux genres de même famille.

1409. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE KRÜDNER » pp. 382-410

Si nous avons trouvé, par exemple, que Mme de Souza était simplement du dix-huitième siècle qu’elle continuait dans le nôtre, il nous a semblé que, tout en représentant de près la Restauration dans sa meilleure nuance, Mme de Duras ne représentait pas moins, dans un lointain poétique, par sa vie, par ses pages élégantes, par ses sentiments passionnés suivis de retours chrétiens, et par sa mort, quelque chose des plus touchantes destinées du dix-septième siècle. […] écrit-elle naïvement ; il a été fait avec le Ciel ; voilà pourquoi j’ose dire qu’il y a des beautés. » En se replaçant ainsi au moyen-âge, aux horizons de la croisade teutonique et chrétienne, il semblait que Mme de Krüdner revenait par instinct à ses origines naturelles. Un grand poëte, le Tasse, sujet à l’illusion comme Mme de Krüdner et idéalement touchant comme elle, dut, ce me semble, offrir à sa pensée, dans le tableau qu’elle essaya, quelques tons de la même harmonie, et je me figure que cette Othilde pouvait être écrite et conçue dans la couleur de Clorinde baptisée. […] Si l’on a pu dire de la conversion de quelques âmes tendres à Dieu : C’est de l’amour encore, il semble que le mot aurait dû être trouvé tout exprès pour elle. […] Ceux qui croient sérieusement à l’intervention de la Providence dans les choses de ce monde ne doivent pas juger avec trop de sourire le rôle et la tentative de Mme de Krüdner ; il est certain que 1815 fut un moment décisif, et aux esprits religieux il doit sembler que l’épreuve était de force à susciter son témoin mystique et son prophète.

1410. (1858) Cours familier de littérature. V « XXVIIe entretien. Poésie lyrique » pp. 161-223

De là aussi la poésie lyrique, dans laquelle l’âme se chante à elle-même ou chante aux autres âmes ce que la simple parole parlée ou écrite lui semble insuffisante à révéler. […] Il semble que la statue de Memnon, rendue musicale par un rayon de soleil, est la parfaite image du cœur humain, que la présence divine rend plus mélodieuse que le marbre. […] Ils se pleuraient eux-mêmes en harmonieux gémissements, et leurs oreilles semblaient jouir de leurs propres lamentations. […] L’idée révolutionnaire semblait s’être faite homme et marcher, sous la figure de cette horde, à l’assaut des derniers débris de la royauté. […] Le nôtre reçut des circonstances où il jaillit un caractère particulier qui le rend à la fois plus solennel et plus sinistre : la gloire et le crime, la victoire et la mort semblent entrelacés dans ses refrains.

1411. (1860) Cours familier de littérature. X « LVIIIe entretien » pp. 223-287

Il était grand et mince comme ceux qui ne tiennent au sol que par l’extrémité inférieure, les pieds, et qui semblent prêts à s’élever dans l’atmosphère ; il ne lui manquait de l’esprit pur que les ailes ; sa tête oblongue avait l’organe du spiritualisme pieux, une proéminence visible au sommet du crâne, cette coupole intérieure où les spiritualistes contemplent et adorent d’instinct la divinité de leur pensée. […] Cette poésie qui marche à pied, qui ne se drape pas à l’antique, qui ne se met ni blanc ni rouge sur la joue, qui ne porte ni masque tragique ni masque comique à la main, mais qui a le visage véridique de ses sentiments, et qui parle la langue familière du foyer, cette poésie qui semble une nouveauté parce qu’elle est la nature retrouvée de nos jours sous les oripeaux de la déclamation et de la rhétorique en vers, sera la poésie de ce nouveau venu dans la famille qui chante. […] Le sentier ruisselait de verdure et d’eau vive, Tournait autour des houx que l’eau froide ravive ; Leurs grains rouges semblaient des grappes de corail. […] Il me semble encore entendre sa voix de poitrine, résonnante comme une vague d’Ionie dans un creux de rocher des Phocéens, la première fois qu’il adressa, comme un vrai Horace à un faux Virgile, les adieux du poète sédentaire au poète errant ! […] Je la reconduisis tout ébloui d’intelligence jusque sur le palier de ma petite maison ; elle marchait devant moi dans le soleil, et j’avoue qu’au lieu d’une trace d’ombre derrière elle, elle me semblait laisser une trace de lumière sur les dalles qu’elle avait foulées en se retirant.

1412. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxive Entretien. Réminiscence littéraire. Œuvres de Clotilde de Surville »

Te voy toujours ; te voy et veulx te veoir encore : Pour ce trop brief me semblent nuict et jour. […] Lors nul n’est estrangier à ma vive tendresse ; Te cuyde veoir ; me semble te parler : Là, me dis-je, ay receu sa dernière caresse… » Et jusqu’aux oz soudain me sens brusler. […] D’autres foiz escartant ces cruelles imaiges, Croy, m’enfonçant au plus dense des bois, Mesler des rossignolz aux amoureux ramaiges, Entre tes braz, mon amoureuse voix : Me semble oyr, eschappant de ta bouche rosée, Ces mots gentils que me font tressaillir ; Ainz voyds, au mesme instant, que me suis abusée, Et, souspirant, suis preste à desfaillir. […] Car onc icy n’est propoz de l’armée ; Et maintes fois, durant ces longues nuicts, Du sombre Arcas, quand oy bruyr les tempestes, Ou que d’Oryon tombent les froids torrents, Que toicts, battus de cent coulps différents, Semblent aller s’escroulant sur nos testes : « Où porte-t-il, me dis, ses pas errants ? […] Toutesfois aux transportz craint de s’abandonner ; Cognoist que resve sien n’avoit esté mensonge, Voyd mesmes traicts qu’alors luy peignist le sommeil, Ainz trop n’oze gouster les charmes d’ung réveil Que luy semblent tenir des prestiges d’un songe.

1413. (1892) Boileau « Chapitre I. L’homme » pp. 5-43

Despréaux ne semble pas s’en être avisé. […] À la cour même, il avait eu de bonne heure des défenseurs : le chirurgien Félix ; La Rochefoucauld et son fils ; Dangeau ; et puis, conquête plus précieuse, tous les Mortemart, chez qui il semblait que l’esprit fut un héritage de famille. […] Despréaux ne semble pas avoir mis d’empressement à profiter des ouvertures qu’il avait à la cour. […] Boileau fit encore deux voyages, en Alsace et en Flandre ; puis il se tint en repos, laissant à Racine la principale part de travail, comme aussi des libéralités royales, qui semblent s’être proportionnées à l’activité déployée par chacun des deux collaborateurs. […] Il ne semblait rien regretter ni rien désirer.

1414. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre V. Le roman romantique »

L’œuvre est très riche de pensée : voisine de Cabanis et de Destutt de Tracy par certaines théories, par d’autres elle touche à Sainte-Beuve et à Sand, et par d’autres enfin elle nous semble devancer Gautier et Baudelaire. […] Dans un chef-d’œuvre plus récent, on retrouvait des qualités que, depuis Marivaux, les romanciers semblaient avoir délaissées. […] Mais à la première heure, une nouvelle forme du roman s’épanouira, qui semblera devoir éclipser ou étouffer toutes les autres : c’est le roman historique. […] Au contraire il a représenté en perfection les âmes moyennes ou vulgaires, les mœurs bourgeoises ou populaires, les choses matérielles et sensibles ; et son tempérament s’est trouvé admirablement approprié aux sujets où il semble que l’art réaliste doive toujours se confiner chez nous. […] Le secret de cette sympathie, c’est peut-être la place que l’amour — toutes les qualités d’amour — tient à ses yeux dans la vie italienne : c’est surtout que le tempérament italien lui semble plus impulsif, plus énergique que le français.

1415. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « Division dramatique. » pp. 64-109

Corneille prétend que le poète est dispensé de motiver, dans l’exposition, l’arrivée des acteurs ; c’est une licence qui peut quelquefois être prise, mais il semble qu’il est mieux de s’en passer. […] Il semble que celle d’Iphigénie réunit ce double avantage. […] Je m’étonne qu’un moderne ait dit que la monodie est un poème composé pour un seul personnage, tel que la Cassandre de Licophron ; car n’étant pas même d’accord avec Scaliger touchant l’intelligence de ce simple terme poétique, il me semble qu’on peut bien aussi n’approuver pas son opinion. […] C’est encore, ce me semble, une manière indirecte de manquer au dialogue, que de faire sortir des personnages qui devraient attendre qu’on leur répondît, ou de faire rester ceux qui devraient répondre. […] Racine semble s’être proposé cette espèce de beauté pour modèle dans Andromaque.

1416. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Émile Zola »

Zola me semble bâti pour aller aussi loin que possible dans cette voie descendante qui nous conduit… j’ai déjà dit où… Il est jeune, je crois, et il a malheureusement de l’avenir. […] — il semblait que c’étaient les paroles mauvaises de madame Lecœur et de mademoiselle Saget qui puaient si fort !  […] Son livre semble n’avoir pour but que de peindre la nature et d’exalter les forces physiques de la vie. […] Je ne veux lui objecter que de la littérature, quoiqu’il semble, dans son Assommoir, sorti autant de la littérature que de la morale. […] Je n’ai pas besoin même de morale pour condamner absolument un livre inouï, qui semble une gageure dans ce qu’il a, il faut bien le dire, de trivial et de crapuleux.

1417. (1870) La science et la conscience « Chapitre II : La psychologie expérimentale »

Il nous semble, d’autre part, que l’Allemagne, si savante d’ailleurs, et si féconde en œuvres d’un autre genre, n’est guère plus en mesure de disputer le prix à l’Angleterre de nos jours. […] Enfin, il n’est pas jusqu’au langage qui ne semble commun à l’homme et à l’animal, quand on voit les animaux s’entendre et se concerter par des signes dont le sens se devine aux mouvements qui les suivent. […] C’est là du moins l’explication qui nous semble la plus conforme tout à la fois à l’expérience historique et à l’expérience psychologique. […] Ainsi, qu’il soit possible d’expliquer autrement que ne le fait l’école rationaliste les caractères de nécessité et d’universalité que présente toute une classe de nos jugements, c’est ce que l’analyse semble avoir démontré ; mais rien n’est moins évident que l’explication du lien qui unit les termes de ces jugements par l’association des idées convertie en habitude. […] Il retrouve cette liberté dont le sentiment semblait oblitéré par les explications spécieuses de la physiologie et de la psychologie expérimentale.

1418. (1891) Essais sur l’histoire de la littérature française pp. -384

Nisard, ce qui peut sembler à la fin légèrement monotone. […] Flaubert semble ne l’avoir retracé que pour démontrer par un exemple la philosophie de M.  […] Toute expression lui semble irréprochable, pourvu qu’elle soit précise. […] Il semble que déplacer les hommes équivaille à ses yeux à changer les choses. […] Toute arme lui semble bonne, toute mesure lui semble juste contre le parlement, corps bourgeois, usurpateur des privilèges de la pairie.

1419. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « La princesse Mathilde » pp. 389-400

On était en plein exil alors, et aucun moyen, même détourné, de rentrer en France ne semblait à dédaigner. […] Un soir, elle était joyeuse, et semblait avoir eu dans la journée un bonheur ; qu’était-ce donc ? […] À la voir l’hiver, chaque soir, dans le monde perpétuel et brillant quelle reçoit, toujours présente et toujours prête, parlant à chacun, variant l’accueil et l’à-propos, elle semble née pour la représentation : à la retrouver à la campagne, entourée de quelques amis toujours les mêmes, on dirait plutôt qu’elle est faite pour l’intimité, pour un cercle d’habitudes paisibles, riantes et heureuses.

1420. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Dübner »

« Les dernières années de Dübner semblaient devoir le tirer de l’ombre où il avait si longtemps et si volontiers vécu. […] « Mort il y a juste un an, le 13 octobre 1867, Dübner n’avait pas accompli sa soixante-cinquième année : à ne voir que sa vie saine et son apparence robuste, de longs jours lui semblaient encore promis. […] De tout ce pour et ce contre, de tous ces dits et contredits, il résulte, ce me semble, un crayon assez complet de l’homme.

1421. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Victor Hugo — Victor Hugo, Les Feuilles d'automne, (1831) »

À la verte confiance de la première jeunesse, à la croyance ardente, à la virginale prière d’une âme stoïque et chrétienne, à la mystique idolâtrie pour un seul être voilé, aux pleurs faciles, aux paroles fermes, retenues et nettement dessinées dans leur contour comme un profil d’énergique adolescent, ont succédé ici un sentiment amèrement vrai du néant des choses, un inexprimable adieu à la jeunesse qui s’enfuit, aux grâces enchantées que rien ne répare ; la paternité à la place de l’amour ; des grâces nouvelles, bruyantes, enfantines, qui courent devant les yeux, mais qui aussi font monter les soucis au front et pencher tristement l’âme paternelle ; des pleurs (si l’on peut encore pleurer), des pleurs dans la voix plutôt qu’au bord des paupières, et désormais le cri des entrailles au lieu des soupirs du cœur ; plus de prière pour soi ou à peine, car on n’oserait, et d’ailleurs on ne croit plus que confusément ; des vertiges, si l’on rêve ; des abîmes, si l’on s’abandonne ; l’horizon qui s’est rembruni à mesure qu’on a gravi ; une sorte d’affaissement, même dans la résignation, qui semble donner gain de cause à la fatalité ; déjà les paroles pressées, nombreuses, qu’on dirait tomber de la bouche du vieillard assis qui raconte, et dans les tons, dans les rhythmes pourtant, mille variétés, mille fleurs, mille adresses concises et viriles à travers lesquelles les doigts se jouent comme par habitude, sans que la gravité de la plainte fondamentale en soit altérée. […] Il est donc à errer dans ce monde, à interroger tous les vents, toutes les étoiles, à se pencher du haut des cimes, à redemander le mot de la création au mugissement des grands fleuves ou des forêts échevelées ; il croit la nature meilleure pour cela que l’homme, et il trouve au monstrueux Océan une harmonie qui lui semble comme une lyre au prix de la voix des générations vivantes. […] Or le poëte, qui possède cependant une vertu de volonté si efficace et qui en donne chaque jour des preuves assez manifestes dans le cours de son infatigable carrière, semble en être venu, soit indifférence pratique, soit conscience de l’infirmité humaine en ces matières, à ne plus appliquer cette volonté à la recherche ou à la défense de certaines solutions religieuses, à ne plus faire assaut avec ce rocher toujours instable et retombant.

1422. (1874) Premiers lundis. Tome II « Thomas Jefferson. Mélanges politiques et philosophiques extraits de ses Mémoires et de sa correspondance, avec une introduction par M. Conseil. — I »

Une comptabilité compliquée, force emprunts, de gros traitements, de lourds impôts, de perfides poursuites contre la presse sous prétexte de sédition, d’inhospitalières mesures contre les proscrits et les réfugiés de l’Europe, toutes les questions douteuses et indéterminées constamment résolues dans le sens d’un pouvoir central envahisseur ; tels étaient les points essentiels de ce programme monarchique, que l’intérêt populaire trouve partout à combattre, et que la République semblait avoir dérobé par avance à la quasi-légitimité, Voici une lettre de Jefferson, datée de 1796, et qui exprime trop exactement notre propre situation de 1833, pour que nous ne la transcrivions pas en entier : « L’aspect de notre pays est étonnamment changé depuis que vous nous avez quittés. […] Le spectacle, que les États-Unis présentent en ce moment au monde dans le conflit élevé entre le Congrès et la Caroline du Sud, est, ce nous semble, un sujet d’admiration encore plus que de crainte. […] Deux lettres nous ont semblé particulièrement dignes de méditation : celle à John Taylor, qui lui avait envoyé ses Recherches sur les principes du gouvernement, et l’autre à Samuel Kerchival, qui le consultait sur la nécessité d’une réforme dans la constitution de Virginie.

1423. (1874) Premiers lundis. Tome II « Chronique littéraire »

Quoi qu’il en soit, il est bien sûr pour nous, en ce moment, que le siècle va grand train, qu’une étrange activité l’accélère dans tous les sens ; qu’à lui tâter le pouls chaque matin, sa vie semble une fièvre, et que, si dans cette fièvre il entre bien des émotions passagères, de mauvais caprices, d’engouements à la minute, il y a aussi là-dedans de bien nobles palpitations, une sérieuse flamme, des torrents de vie et de génie, et toute la marche d’un grand dessein qui s’enfante. […] Quoiqu’il y ait eu, ce semble, dans la conduite si généreuse de M.  […] L’auteur, qui a passé, à ce qu’il semble, par les doctrines saint-simoniennes, est arrivé à considérer le système de M. 

1424. (1823) Racine et Shakspeare « Chapitre premier. Pour faire des Tragédies qui puissent intéresser le public en 1823, faut-il suivre les errements de Racine ou ceux de Shakspeare ? » pp. 9-27

Cette question semble usée en France, et cependant l’on n’y a jamais entendu que les arguments d’un seul parti ; les journaux les plus divisés par leurs opinions politiques, la Quotidienne, comme le Constitutionnel, ne se montrent d’accord que pour une seule chose, pour proclamer le théâtre français, non seulement le premier théâtre du monde, mais encore le seul raisonnable. […] Comment pourriez-vous savoir que les heures, qui paraissent si longues à un homme qui s’ennuie, semblent voler pour celui qui s’amuse, si l’expérience ne vous l’enseignait ? […] Il me semble que ces moments d’illusion parfaite sont plus fréquents qu’on ne le croit, en général, et surtout qu’on ne l’admet pour vrai dans les discussions littéraires.

1425. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Deuxième partie. Invention — Chapitre II. Définition. — Énumération. — Description »

Et pourtant, par un jeu mécanique de la mémoire, ces mêmes esprits pensent avec des mots abstraits, généraux, collectifs : les ayant pensés et exprimés, ils semblent avoir épuisé du coup leur puissance d’invention, et ne peuvent passer outre. […] De courtes aurores, des midis plus longs, plus pesants qu’ailleurs, presque pas de crépuscule ; quelquefois une expansion soudaine de lumière et de chaleur, des vents brûlants qui donnent momentanément au paysage une physionomie menaçante et qui peuvent produire alors des sensations accablantes ; mais, plus ordinairement, une immobilité radieuse, la fixité un peu morne du beau temps, enfin une sorte d’impassibilité qui du ciel semble être descendue dans les choses, et des choses avoir passé dans les visages. […] Une fois qu’on a dit : je suis joyeux, ou triste, ou irrité, j’aime ou je hais, il semble que vraiment on n’ait plus rien à dire, et de fait on voit souvent des écrivains, de fort grands, se tirer de là par la simple rhétorique, par les périphrases et les comparaisons, par le développement à la Sénèque, qui consiste à inventer cent formes de la même pensée.

1426. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre III. Association des mots entre eux et des mots avec les idées »

D’où vient qu’un discours sensé où les expressions ont leur sens exact et précis, où il semble qu’il ne manque rien d’essentiel, manque son effet, et soit faible, froid, ennuyeux ? […] Toute cette voûte semblait incrustée d’écailles de cuivre ; des bosselures innombrables, les unes presque ardentes, les autres presque sombres, s’étageaient par rangées avec un étrange éclat métallique jusqu’au plus haut du ciel, et, tout en bas, une longue bande verdâtre qui touchait l’horizon était rayée et déchiquetée par le treillis noir des branches. […] Le chevet de la cathédrale avec ses aiguilles et ses contreforts articulés, tout petit, en un seul tas, semblait la carapace vide d’un crabe.

1427. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre I. Renaissance et Réforme avant 1535 — Chapitre I. Vue générale du seizième siècle »

La fécondité du moyen âge semblait tout à fait épuisée à la fin du xve  siècle : le dogme limitait l’essor des esprits, et fermait de tous côtés l’horizon. […] Ce goût mièvre et mondain est comme une banqueroute de notre poésie, qui semble revenir à Charles d’Orléans, à Marot, si l’on veut, avec le naturel en moins. De l’esprit et de la distinction, il semble que ce soit tout l’art où nous puissions atteindre : un art charmant et petit, dont la principale affaire sera d’orner les salons et d’amuser les cours, et qui n’aura guère que la grâce d’un bibelot ou la beauté d’un ajustement.

1428. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Baudelaire, Œuvres posthumes et Correspondances inédites, précédées d’une étude biographique, par Eugène Crépet. »

Je ne parle pas de ces maximes d’une perversité si aisée qu’il semble qu’on en fabriquerait comme cela à la douzaine : « Moi, je dis ; la volupté unique et suprême de l’amour gît dans la certitude de faire le mal. […] Hélas l’œuvre posthume de Baudelaire se réduit presque à des titres de nouvelles et de romans, tels que : Le Marquis invisible, la Maîtresse de l’idiot, la Négresse aux yeux bleus, la Maîtresse Vierge, les Monstres, l’Autel de la volonté, le Portrait fatal… Evidemment ces titres lui semblaient très singuliers et très beaux. […] Chose inattendue : vers la fin de sa vie, de sa pauvre vie si sombre où la débauche morne et appliquée, puis l’opium, le haschich, et, enfin, l’alcool, avaient fait tant de ravages, son catholicisme si peu chrétien, son catholicisme impie et sensuel, celui des Fleurs du mal, semble s’épurer et s’attendrir, et lui descendre  ou lui remonter  dans le cœur.

1429. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre VII. Développement des idées de Jésus sur le Royaume de Dieu. »

Il semble aussi que son séjour près de Jean, moins par l’action du baptiste que par la marche naturelle de sa propre pensée, mûrit beaucoup ses idées sur « le royaume du ciel. » Son mot d’ordre désormais, c’est la « bonne nouvelle », l’annonce que le règne de Dieu est proche 340. […] Le monde semblera renversé ; l’état actuel étant mauvais, pour se représenter l’avenir, il suffit de concevoir à peu près le contraire de ce qui existe. […] Ce gouvernement lui semble purement et simplement un abus.

1430. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XVIII. Institutions de Jésus. »

Il semble parfois que son plan était d’entourer sa personne de quelque mystère, de rejeter les grandes preuves après sa mort, de ne se révéler complètement qu’à ses disciples, confiant à ceux-ci le soin de le démontrer plus tard au monde 824. « Ce que je vous dis dans l’ombre, prêchez-le au grand jour ; ce que je vous dis à l’oreille, proclamez-le sur les toits. » Cela lui épargnait les déclarations trop précises et créait une sorte d’intermédiaire entre l’opinion et lui. […] Cette idée féconde du pouvoir des hommes réunis (ecclesia) semble bien une idée de Jésus. […] Plusieurs personnages qui avaient beaucoup aimé Jésus et fondé sur lui de grandes espérances, comme Joseph d’Arimathie, Lazare, Marie de Magdala, Nicodème, n’entrèrent pas, ce semble, dans ces églises, et s’en tinrent au souvenir tendre ou respectueux qu’ils avaient gardé de lui.

1431. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. John Stuart Mill — Chapitre III : Théorie psychologique de la matière et de l’esprit. »

Mais la théorie qui résout l’esprit, en une série de sentiments actuels, avec une base de sentiments possibles, contient des difficultés intrinsèques qu’il ne semble pas, dit M.  […] Le voici : l’une réduisant la matière à n’être qu’une collection d’attributs ; l’autre réduisant l’esprit, en apparence au moins, à n’être qu’une collection d’états de conscience, il semble que toute idée de substance disparaisse. […] Notre auteur semble admettre que le lien, « l’union organique », qui existe entre la conscience présente et la conscience passée, en constituant la mémoire, constitue aussi le moi.

1432. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1854 » pp. 59-74

J’entends le bercement nasillard de la musique, je regarde les plis des burnous ; lentement le « Bois en paix » de l’Orient me descend de la petite tasse jusqu’à l’âme ; j’écoute le plus doux des silences dans ma pensée et comme un vague chantonnement de mes rêves au loin, — et il me semble que mon cigare fait les ronds de fumée de ma pipe sous le plafond du Café de la Girafe. […] Il me semblait que cette femme devait adorer les singes… Cette nuit, ce fut comme un déshabillé d’âme. Elle me conta sa vie, mille choses tristes, sinistres, qu’elle coupait par un zut qui semblait boire des larmes… Il m’apparut dans cette peau de voyou, je ne sais quelle petite figure attristée, songeuse, rêveuse, dessinée sur l’envers d’une affiche de théâtre.

1433. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Troisième Partie. De la Poësie. — La déclamation. » pp. 421-441

« Il n’y a que le corps qui prêche ; la mémoire seule dirige la langue, les yeux, les bras : l’esprit & le cœur semblent absens. […] Ils s’étendent, ils s’agitent, ils se tourmentent, ils poussent des hurlemens, & semblent jouer de pieuses comédies. […] « Il semble le voir, disent ses admirateurs, dans nos chaires avec cet air simple, ce maintien modeste, ces yeux humblement baissés, ce geste négligé, ce ton affectueux, cette contenance d’un homme pénétré, portant dans les esprits les plus brillantes lumières, & dans les cœurs les mouvemens les plus tendres. » Baron l’ayant rencontré dans une maison ouverte aux gens de lettres, le lendemain d’un jour qu’il avoit été l’entendre, lui fit ce compliment : « Continuez, mon pere, à débiter comme vous faites : vous avez une manière qui vous est propre, & laissez aux autres les règles. » Cet avis se ressent du caractère de Baron, le plus fier des hommes.

1434. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre IV : La philosophie — I. La métaphysique spiritualiste au xixe  siècle — Chapitre III : Le présent et l’avenir du spiritualisme »

Tous les spiritualistes sans exception croient à la fois à la nécessité de l’esprit d’examen ; mais il semble que les uns attachent plus d’importance à la doctrine qu’à la liberté, aux conclusions déjà trouvées qu’à la recherche de vérités nouvelles, à la défense qu’à la découverte, à l’intérêt moral et pratique qu’à la pure science et à la libre spéculation, au repos qu’au mouvement, à la tranquillité d’une conviction satisfaite qu’aux ardeurs toujours anxieuses et dangereuses d’une pensée en travail. […] Or il me semble que le spiritualisme du xix e siècle a été trop préoccupé de l’un des deux termes du problème, de la distinction, qu’il a négligé le point de vue de l’union. […] Pour reprendre sa marche ascendante, il faut qu’elle ose, il faut qu’elle travaille à s’enrichir et à se compléter, il faut qu’elle s’assimile ce qu’il y a de bon dans les écoles adverses, il faut qu’elle ne craigne pas trop une certaine division dans son propre sein, car la diversité des points de vue semble être un des caractères essentiels de l’esprit philosophique ; il faut enfin qu’elle prépare des matériaux à la reconstruction d’une philosophie nouvelle.

1435. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XX. Mme Gustave Haller »

L’incohérence est comme le caractère de ce livre, écrit, à ce qu’il semble, pour être publié en feuilletons. […] L’œuvre confuse semble inachevée partout. […] Ce livre de « Vertu » dont le titre est un titre à la manière anglaise (les Anglais seuls ont de ces livres abstraits qui disent l’idée de leurs livres), ce livre dont les mœurs sont anglaises, semble avoir été écrit par un bas-bleu anglais.

1436. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « M. Ernest Hello » pp. 389-403

Indépendamment de sa Physionomie de saints, des Paroles de Dieu et des Contes extraordinaires que je viens de rappeler, il a publié les deux traités : L’Homme et le Style, Le Jour du Seigneur ; Renan, l’Allemagne et l’athéisme au xixe  siècle ; les Œuvres choisies, mises en ordre et précédées d’une Introduction, de Jeanne Chezard de Martel ; La bienheureuse Angèle de Foligno et Rusbrock l’admirable, et tout cela, qui mériterait pourtant de retentir, n’a pas rompu le silence étendu autour de cet harmonieux nom d’Hello, si bien fait, à ce qu’il semble, pour résonner comme un clairon d’or sur les lèvres de la gloire ; tout cela n’a pas mordu sur l’esprit d’un temps éperdument sorti des voies où la pensée et la piété de M.  […] Et en le lisant, ce chapitre, on comprendra enfin que ce qui semblait un vulgaire sentiment humain, traînant encore dans une grande âme dévorée de Christianisme, était, au contraire, tout ce qu’il y avait au monde de plus chrétien, puisque c’était le sentiment exaspéré d’un apostolat impossible ! […] Hello, même dans les sujets, à ce qu’il semble, le moins mystiques, il ajoute : « La faim et la soif courent où elles veulent, et je les ai laissées courir.

1437. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Les Césars »

C’était aisé pourtant, à ce qu’il me semble. […] L’Empire avait des raisons d’être intimes et profondes… Il était le développement définitif, et auquel la République avait travaillé, d’une loi plus haute que les ambitions et plus impérieuse que les volontés humaines, à savoir : que toute victoire pour Rome s’était changée en nécessité de gouverner les peuples conquis, et que cette nécessité de gouverner le monde méditerranéen avait fini, en grandissant les vices de l’élection, par la rendre complètement impossible. — Le travail de Champagny nous semblait digne de cette imposante conclusion. […] Tels sont, en résumé, les observations et les reproches que la Critique nous semble avoir le droit d’adresser à Champagny et à son œuvre.

1438. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Les Femmes d’Amérique » pp. 95-110

Car le livre semble porter la marque de ces trois charmantes individualités. […] Et ce n’est que le début, cela, de toutes les admirations étranges dont le livre est plein, de ces admirations qui, pour nous, Européens, semblent s’exclure ou se suicider. […] n’a rien de commun avec Alcibiade, semble, comme Alcibiade, avoir voulu couper la queue de son chien dans son petit livre à outrance sur les Femmes d’Amérique.

1439. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XI. MM. Mignet et Pichot. Charles Quint, son abdication, son séjour et sa mort au monastère de Yuste. — Charles V, chronique de sa vie intérieure dans le cloître de Yuste » pp. 267-281

C’est que ces deux livres nous transmettent la lumière inattendue qui vient de frapper l’un des faits de l’Histoire moderne qui semblait le plus devoir se passer de lumière, l’événement classique, à force d’être fameux, qu’on pouvait appeler le grand lieu commun de la rhétorique de l’Histoire. […] … On a parlé de la douleur d’avoir perdu l’Impératrice, de cette affection blessée par la mort et qui saigna toujours dans l’âme de ce fils de Jeanne-la-Folle, en qui l’amour conjugal semblait une passion héréditaire, mais la Douleur a son idée fixe et ne revient pas toucher, de ses mains préoccupées, les amusettes de l’Ambition. […] quand on l’a évoquée et quand on l’a regardée à son tour, après avoir interrogé la physionomie ambiguë de son César anachorète, ne semble-t-il pas, à l’instant, que cette indication, qui n’en fut pas une, et que ce séjour à Yuste, qui fut moins une retraite qu’une résidence, prennent leur véritable caractère ?

1440. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XIII. M. Nicolardot. Ménage et Finances de Voltaire » pp. 297-310

À plus forte raison, sans doute, devons-nous, dans la mesure de nos forces, provoquer la publicité d’un ouvrage qui semble avoir épuisé et centralisé tous les documents sur les choses et les hommes du xviiie  siècle, et qui, de fait comme de visée, atteint enfin cette époque au milieu du cœur, en traversant le cœur de Voltaire. […] Certes, quand les choses en sont là dans les esprits, on a le droit de conclure, ce semble, sans manquer de respect au xixe  siècle, que son originalité n’est pas sortie du limon qu’elle doit empreindre de son cachet, et qu’il n’est encore jusqu’ici qu’une variante prolongée du xviiie  siècle. […] En effet, il y a dans l’esprit de Voltaire une telle complexité de puissances, qu’on n’arrive jamais, à ce qu’il semble, malgré la clarté qu’elles répandent, à débrouiller entièrement tout cet écheveau de facultés diverses qui mêlent leurs nuances et leurs trésors.

1441. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « André Chénier »

À ce qu’il me semble, cela suffisait bien ! […] Et cependant, pour toute Critique virile, et qui s’attache surtout dans l’appréciation des œuvres fortes à la profondeur de l’accent qui y retentit et qui semble venir de si avant dans l’âme humaine qu’on dirait qu’il en est littéralement arraché, rien de l’exécution la plus savante, la plus pondérée, la plus précise et tout à la fois la plus pittoresque et la plus musicale, ne vaut ce rugissement de l’âme élevée à sa plus haute puissance et qui rencontre un mouvement et une expression en équation avec sa foudroyante énergie ! […] Il me semble que je l’entends !

1442. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Agrippa d’Aubigné »

Il fut troué dix-sept fois à la poitrine, et il aurait pu y être troué quarante, au jeu qu’il jouait, à cette époque inouïe où tous les hommes, jusqu’aux pâles mignons, semblaient amoureux de la mort, et, comme des valets dans les bras de leurs maîtresses, faisaient les insolents avec elle ! […] dans l’Hécatombe à Diane, en ces cent sonnets qui se suivent sous le titre de Printemps, lequel semble vouloir leur donner l’unité d’un poème, savez-vous combien j’en ai compté dignes d’être repêchés au fil du torrent qui les emporte et mis à l’écart et gardés comme les épaves d’un génie écumant, mais qui s’est noyé dans sa propre écume ? […] et voyez si le ton de l’un ne semble pas un écho de l’autre, dans ces deux magnifiques et majestueux railleurs ?

1443. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Honoré de Balzac » pp. 1-15

Plus la gloire et le talent semblent de bon aloi, plus le peseur de tout cet or fin doit avoir la main sûre et le tact exquis. […] Là où il avait percé l’horizon, à ce qu’il semblait, jusqu’à sa dernière limite, il en creusait un autre encore qui s’ouvrait dans les profondeurs du premier. […] Poitou dépense-t-il tout son temps et tout son effort à chicaner stérilement les détails qui se heurtent, à ce qu’il semble, quand on les voit pièce à pièce, et qui se fondent et s’harmonisent, quand on les regarde de loin et de haut.

1444. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Raymond Brucker » pp. 27-41

Lorsque les Champis triomphent sur toute la ligne, lorsque des paysans et des ouvriers de fantaisie, aussi faux que ceux de Watteau et moins jolis, ont, grâce à une plume qui n’est pas pourtant une baguette de fée, le privilège de tourner la tête à l’Opinion superstitieuse, le moment n’est pas mal choisi, ce nous semble, pour nous rappeler à la réalité de cette nature populaire qu’il n’est pas besoin de flatter pour qu’elle intéresse, et pour nous la montrer éloquemment et simplement, dans tous les plis de sa forte étoffe, ample et sincère, — parlant français et non faux patois ! […] Il n’y en avait pas dans ce livre où plus d’une page semblait l’écho de celle théologie de cabaret qui inspira Le Dieu des bonnes gens au poëte le plus sottement vanté de cette époque. […] Géométriquement, l’angle facial de ces deux hommes semble avoir les mêmes dimensions.

1445. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Prosper Mérimée. » pp. 323-336

Prosper Mérimée a eu le bonheur de naître à la littérature en cet instant, qui sera probablement unique dans l’histoire du dix-neuvième siècle, où la France, lasse de guerre et de politique, sembla vouloir changer de gloire, et se retourna vers les choses de l’esprit avec cette furie française qui n’a d’égale que les mollesses qui la suivent. […] Mérimée, qui n’avait pourtant pas à craindre l’embonpoint intellectuel, semblait appliquer à son esprit et à son style les expériences et le système de lord Byron… Si les sociétés de tempérance étaient possibles en littérature, M.  […] Rien, pourtant, ne semble avoir manqué à M. 

1446. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XVI. Des sophistes grecs ; du genre de leur éloquence et de leurs éloges ; panégyriques depuis Trajan jusqu’à Dioclétien. »

Cet art était né dans les plus beaux siècles de la Grèce, et convenait à l’imagination ardente et légère d’un peuple que le sentiment et la pensée frappaient rapidement, et dont la langue féconde et facile semblait courir au-devant des idées. […] Dans ces sortes de discours, il était, dit-on, plein de chaleur et de génie et semblait inspiré comme le prêtre qui rendait les oracles. […] Il semble que cette espèce de vigueur qui donne un mouvement rapide à l’esprit et du nerf aux idées, ait toujours manqué à l’Asie.

1447. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXVI. Des éloges académiques ; des éloges des savants, par M. de Fontenelle, et de quelques autres. »

Tous ceux qu’on loue semblent les reculer d’un rang, ou les heurter en les approchant de trop près. […] Il semble qu’on soit admis dans l’atelier du génie, qui travaille en silence à perfectionner la société, l’homme et la terre. […] D’abord elle donne le plaisir de la surprise par le contraste et par les nouveaux rapports qu’elle découvre ; ensuite on aime à voir un homme qui n’est pas étonné de grandes choses ; ce point de vue semble nous agrandir.

1448. (1878) Leçons sur les phénomènes de la vie communs aux animaux et aux végétaux. Tome I (2e éd.)

C’est ce qui a semblé parfois résulter de ce qu’on a appelé le bilan nutritif des animaux et des végétaux. […] Une expérience curieuse d’Engelmann semble jeter quelque lumière sur ce rôle d’excitant qu’aurait l’oxygène. […] Ranvier, rapprochait du type cellulaire un élément qui semblait y échapper, la fibre nerveuse. […] Il semble en être autrement. […] La nature semble procéder par de tout autres voies.

1449. (1939) Réflexions sur la critique (2e éd.) pp. 7-263

Elle ne semble pas inexacte et sert encore à nous instruire. […] Il m’a semblé que sa solution mécaniste était un peu courte, son sensualisme et son déterminisme un peu sommaires. […] Il m’avait semblé un jour voir une figure de Flaubert dans le Dr Larivière. […] La distinction me semble fondée, j’en donne acte en gros à M.  […] Il a semblé d’abord que Mallarmé, le symbolisme, ce fussent des vieilles lunes du temps des robes longues.

1450. (1875) Premiers lundis. Tome III « Du point de départ et des origines de la langue et de la littérature française »

Cependant, nous ne pouvons ouvrir tout d’abord ces écrits des XIIe et XIIIe siècles, ces vigoureuses ébauches marquées d’une touche déjà puissante, sans nous être posé auparavant plus d’une question, sans nous demander d’où elles sortent, elles et la langue qui nous y semble parfois si heureusement balbutiée […] Marc-Aurèle avait dit dans ses Pensées : « Il faut passer cet instant de vie conformément à notre nature et nous soumettre à notre dissolution avec douceur, comme une olive mûre qui, en tombant, semble bénir la terre qui l'a portée et rendre grâce au bois qui l’a produite. » L’esclave Blandine faisait ce qu’a dit Marc-Aurèle, et elle le faisait au milieu des tortures subies au nom de Marc-Aurèle. […] Dans ce grand choc que les invasions multipliées donnèrent à l’édifice île la langue latine comme à tout le reste, et qui semblait d’abord devoir tout confondre, il estime qu’après tout les influences destructives et dispersives ne prévalurent pas. […] Littré, j’ai bon espoir ; il me semble que c’est d’un concours et non d’un conflit que sortira le progrès désiré, et que l’expérience, l’esprit philosophique, la méthode philologique et la pratique consommée des textes s’appuient de tous côtés, se corrigent et se complètent : ……………………. […] Ce facilius pourtant semblerait indiquer un reste d’intelligence du latin.

1451. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Deuxième partie. — L’école critique » pp. 187-250

J’avoue que dans L’École des femmes tout est récit ; mais avouez que tout paraît action, ou plutôt avouez que tout est action, bien que tout semble être en récit307. […] Elle découvre en un clin d’œil une foule d’aperçus, dont la piquante variété ne semble point impliquée dans la sensation simple du comique ou du beau, et l’on ne conçoit pas par quelle mystérieuse analyse elle a su tirer tant de choses, du fait d’être émue et d’admirer. […] Non contente de mépriser ces poêles, elle exigeait, dans l’intolérance de sa passion, que ce mépris fût universel, et semblait le regarder vraiment comme aussi nécessaire qu’une des lois qui régissent le monde. […] — C’est que la rhétorique me semble une profession du même genre que la cuisine. […] La propédeutique de tous les beaux-arts ne semble pas consister dans des préceptes, mais dans la culture des facultés de l’esprit par ces connaissances préparatoires qu’on appelle humaniora.

1452. (1863) Cours familier de littérature. XV « LXXXVIIIe entretien. De la littérature de l’âme. Journal intime d’une jeune personne. Mlle de Guérin » pp. 225-319

Il me semble admirable, ce Platon : mais je lui trouve une singulière idée, c’est de placer la santé avant la beauté dans la nomenclature des biens que Dieu nous fait. […] Ces figures d’autrefois font plaisir, il semble qu’elles ramènent la jeunesse. » Le 6 décembre. […] Son visage ne perdit jamais sa sérénité, et jusque dans son agonie elle semblait penser à une fête. […] Encore parfois le jour me semble long. […] Je les plaignais ou peu s’en faut ; il me semble que tout ce qui paraît souffrir a une âme. » Le 30 mai.

1453. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « IX »

. — Il me semblerait donc bien puéril de prétendre suivre pas à pas la genèse de la musique de l’Anneau du Nibelung. […] Il semble qu’il y eut une interruption complète dans la composition de l’Anneau du Nibelung pendant huit ans. […] La Goetterdammerung. semble avoir été commencée cette même année, 1869. […] La France me semble bien située, quoi qu’on en dise, pour pouvoir profiter dans une large mesure de l’influence de Wagner. […] maintenant je puis mourir, tout ce que je ferai de plus me semble être un pur luxe », dit Wagner, dans une lettre de février 1855.

1454. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre cinquième. Principales idées-forces, leur genèse et leur influence — Chapitre cinquième. Genèse et action des principes d’identité et de raison suffisante. — Origines de notre structure intellectuelle »

Ce qui semble certain, c’est que l’action des habitudes acquises sur l’espèce (nous ne disons pas sur l’individu) a été notablement exagérée par Lamarck et Spencer ; autant l’hérédité des caractères congénitaux est certaine, autant celle des caractères acquis est douteuse. […] Si, pour faire une hypothèse plus plausible, tout semble se ramener à la volonté de l’être et du bien-être, ou, pour parler comme Schopenhauer, au vouloir-vivre, la volonté sera le véritable radical et, en voulant, en désirant, nous aurons une conscience sourde de ce qui est en tout, de ce qui est partout. […] De même pour le changement agréable et, par une évolution naturelle, pour tout changement, même celui qui semble indifférent. […] Le principe d’intelligibilité universelle semblait subordonner le réel à l’intelligible, le principe de causalité subordonne l’intelligible au réel. […] Il ne le semble pas.

1455. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Conclusions »

Il semble résulter de l’examen de ses contes que l’auteur en tenait exprès sa sensibilité à l’écart, pour les combiner mieux, ainsi, la tête plus froide et plus reposée que s’il eût éprouvé les terreurs et les angoisses qu’il s’entend à susciter. […] Comme il n’est pas nécessaire à un professeur pour inventer un problème de ressentir l’embarras qu’il causera à ses élèves, qu’un acteur sait simuler la joie et la douleur sans l’éprouver, ou qu’un fabricant de jouets n’a pas à prendre plaisir à ses toupies et à ses cerceaux pour que ceux-ci amusent des enfants, il semble qu’aux artistes que leurs œuvres ont émus, peuvent succéder des artistes passionnants non passionnés, réfractaires à tout sentiment artistique, fournissant, intacts d’émotions fictives, leur génération. […] En analysant la manière dont il figure ses personnages, nous avons détruit ce qui nous semble être la loi suprême de la personation littéraire qui serait le maintien d’un équilibre délicat entre ce qu’il y a de constant, de personnel dans chaque caractère, et ce qu’il subit de variations au cours des circonstances, du temps. […] Il semble qu’il y ait proportion directe entre la violence de l’acte et le passage fugace de la sensation, nos plus formidables mouvements d’âme étant les moins réfléchis ; il en est ainsi d’un accès de colère ou d’un élan de courage. […] Cependant, il nous semble que les Intimités laissent au souvenir une émotion parente et celle qu’on éprouve en lisant l’Intermezzo.

1456. (1885) La légende de Victor Hugo pp. 1-58

Dans son autobiographie il déclare explicitement que « la forme du gouvernement lui semblait la question secondaire ». […] Les chenapans qui, à l’improviste, s’étaient emparés du gouvernement, étaient si tarés, leur pouvoir semblait si précaire, que les bourgeois républicains balayés de France, ne crurent pas à la durée de l’Empire. […] Massacrer les socialistes en blouse, lui semble dans l’ordre des choses, mais charger sur le boulevard Montmartre, emporter d’assaut la maison Sallandrouze, canarder quelques bourgeois en frac et chapeau gibus ! […] Dans son livre l’événement semble n’être qu’un coup de foudre dans un ciel serein, que l’acte de violence d’un seul individu. […] Victor Hugo, lui-même, semble, avoir été intimidé par les expressions révolutionnaires qu’il maniait et dont il ne comprenait pas exactement le sens.

1457. (1896) Matière et mémoire. Essai sur la relation du corps à l’esprit « Chapitre III. De la survivance des images. La mémoire et l’esprit »

Et tandis que la réalité, en tant qu’étendue, nous paraît déborder à l’infini notre perception, au contraire, dans notre vie intérieure, cela seul nous semble réel qui commence avec le moment présent ; le reste est pratiquement aboli. […] Ils ne semblent retenir avec plus de facilité que parce qu’ils se rappellent avec moins de discernement. […] La généralisation ne va donc pas, semble-t-il, sans la considération abstraite des qualités communes, et, de degré en degré, le nominalisme va être amené à définir l’idée générale par sa compréhension, et non plus seulement par son extension comme il le voulait d’abord. […] Dans ces maladies de la personnalité, il semble que des groupes de souvenirs se détachent de la mémoire centrale et renoncent à leur solidarité avec les autres. […] La vérité est qu’il y a un cas, un seul, où l’observation semblerait d’abord suggérer cette vue : nous voulons parler de l’aphasie, ou plus généralement des troubles de la reconnaissance auditive ou visuelle.

1458. (1903) La renaissance classique pp. -

Nous recommencerions ces œuvres bâtardes qui semblent bien plutôt des monographies extraites des mémoires d’une académie ou d’une gazette médicale que des romans ou des drames. […] Nous accusera-t-on d’injustice si nous affirmons que, depuis l’auteur de la Tentation de saint Antoine, le secret de la composition semble perdu ? […] Chaque partie est tellement complète en soi et la somme des parties conspire en un organisme tellement parfait que l’œuvre entière semble isolée et suspendue dans le vide comme la terre dans l’espace. […] Une véritable folie de conquête semble sur le point de s’emparer du globe. […] Or jusqu’ici nos littérateurs semblent avoir confondu l’idée de race avec l’idée d’hérédité.

1459. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. Daru. Histoire de la république de Venise. — III. (Suite et fin.) » pp. 454-472

Dans mon dessein de montrer de tout temps en lui l’homme de travail et d’étude, je noterai, à cette date de 1812, une seule particularité qui me semble caractéristique. […] Lue de suite, cette Histoire est d’un grave et sérieux intérêt : Il me semble, écrivait à l’auteur un critique un peu sec, mais judicieux et nullement méprisable (M. Auger), il me semble que cette Histoire de Venise vous offrait tous les avantages que peut souhaiter un écrivain. […] Sur la liberté de la presse, une ou deux fois peut-être, il introduit des réflexions qui semblent plutôt se rapporter à la France de 1819 qu’au gouvernement vénitien en aucun temps (t. 

1460. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Chateaubriand. Anniversaire du Génie du christianisme. » pp. 74-90

Et pourtant à pareil jour, à cinquante-deux ans d’intervalle, il m’a semblé que bien des pensées aussi se présentaient. […] Au moment où le Génie du christianisme parut, Ginguené, qui rendit compte du livre dans La Décade, marqua dès le début de ses articles qu’il ne se tenait point pour satisfait de l’explication vague et générale que l’auteur donnait de sa conversion : il semblait même dénoncer quelque inexactitude dans le récit, et, sans trahir le secret de conversations confidentielles qu’il avait eues avec Chateaubriand, il y faisait allusion de manière à inspirer des doutes au lecteur. […] Maintenant nous sommes tranquilles, ce me semble. […] C’est une grande gloire pour un écrivain que, cinquante-deux ans après la publication d’un de ses ouvrages, il soit possible d’en parler ainsi, dans le même journal qui l’avait annoncé le premier jour, et que, loin de sembler un hors-d’œuvre, cette attention ramenée de si loin puisse paraître encore un à-propos.

1461. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Maucroix, l’ami de La Fontaine. Ses Œuvres diverses publiées par M. Louis Paris. » pp. 217-234

Voyez-vous, le corps est si près de l’esprit, on ne saurait quasi les séparer… Voilà du La Fontaine en prose, mais Maucroix ajoutait comme correctif (et il semble tout à fait au ton de sa lettre qu’on l’entend causer) : Mais là, là, voici bien de quoi convaincre toutes celles qui voudraient m’accuser de légèreté. […] Ici le nonchaloir et la philosophie sembleraient aller jusqu’à une égoïste indifférence pour les maux de tous : avec un peu de travail, Maucroix aurait rendu sa pensée sans prêter à ce reproche. […] Ce dernier vers est plus philosophique, ce semble, qu’il n’appartient à Maucroix ; il lui est venu plutôt ici par imitation de l’Antiquité, et il n’y mettait pas, on peut le croire, la force de sens et toute l’intention épicurienne qu’y aurait données Chaulieu. […] Cette fâcheuse fin de son voyage à Rome lui en gâta tout le plaisir s’il en eut, et on ne le voit jamais revenir ensuite sur ses impressions d’Italie ; il semble n’avoir nullement rempli la recommandation de La Fontaine, qui lui écrivait à la fin de sa lettre sur les Fêtes de Vaux : « Adieu, charge ta mémoire de toutes les belles choses que tu verras au lieu où tu es. » Malgré son vœu d’être en repos, Maucroix eut quelques devoirs à remplir pendant certaines années : le chapitre le choisit pour l’un de ses deux sénéchaux, et le chargea de défendre ses intérêts, ses prérogatives.

1462. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Journal du marquis de Dangeau — II » pp. 18-35

Les comédiens du roi étaient alors sous la surveillance directe de la Cour, et, ce semble, de Mme la Dauphine elle-même : « Dimanche, 22 avril 1685, à Versailles. — Mme la Dauphine, mécontente de quelques sots procédés des comédiens, pria le roi de casser Baron et Raisin, les deux meilleurs comédiens de la troupe, l’un pour le sérieux et l’autre pour le comique. » Et, 3 novembre 1684 : « On choisit trois nouvelles comédiennes pour être mises dans la troupe du roi, et Mme la Dauphine leur fit une exhortation sur leur bonne conduite à l’avenir. » Une des affaires qu’il est le plus intéressant de suivre chez Dangeau, qui ne fait de rien des affaires, mais de simples nouvelles, c’est la révocation de l’Édit de Nantes et ses suites. […] Cela paraissait tout simple et au roi et aux courtisans, et à Dangeau qui enregistre ces succès avec une parfaite bonne foi, de telle sorte que lorsqu’il écrit dans son journal, à la date du 19 octobre de cette année 1685 : « Outre la cassation de l’Édit de Nantes de 1598, on casse l’édit de Nîmes de 1629, et tous les édits et déclarations donnés en faveur de ceux de la religion prétendue réformée ; ordre à tous les ministres de sortir du royaume dans quinze jours ; les enfants qui naîtront seront baptisés et élevés dans la religion catholique, etc., etc. » ; et que lorsqu’à la date du 22, il ajoute : « Ce jour-là on enregistra dans tout le royaume la cassation de l’Édit de Nantes, et l’on commença à raser tous les temples qui restaient » ; en prenant note de ces actes considérables, il semble ne faire que constater un fait accompli et que rendre compte d’une formalité dernière. […] Loin de là, il semble qu’on n’ait conquis des places à la précédente campagne que pour se mettre en état de les rendre de sang-froid à la campagne suivante (1689). […] Monseigneur semble avoir épuisé tout son feu l’année précédente, et il n’en veut plus qu’au sanglier et au loup.

1463. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Le duc de Rohan — III » pp. 337-355

La prise de La Rochelle, qui semblait devoir ôter tout espoir au parti, fut pour Rohan une raison de redoubler d’efforts et de zèle. […] Il avait par avance quelque chose des héros de Corneille, et semblait s’être dit : Lorsque deux factions divisent un empire, Chacun suit au hasard la meilleure ou la pire ; Mais quand ce choix est fait, on ne s’en dédit plus. […] Il semblait qu’il n’y eût plus qu’à agir ; mais ce ne fut qu’au commencement de 1635, c’est-à-dire après trois ans de retards et d’ambiguïtés et quand la France enfin se décida ouvertement à la guerre, que Rohan fut mis à même de se distinguer. […] Le duc de Rohan, dans ses apologies, semble avoir de fortes raisons à opposer à une condamnation si dure.

1464. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Madame Bovary par M. Gustave Flaubert. » pp. 346-363

L’auteur ne semble pas s’être posé cette question ; il ne s’est demandé qu’une chose : Est-ce vrai ? […] on est, en la considérant bien, plus indulgent qu’il ne semble l’être à son égard. […] Le soleil se couchait ; le ciel était rouge entre les branches, et les troncs pareils des arbres plantés en ligne droite semblaient une colonnade brune se détachant sur un fond d’or : une peur la prenait, elle appelait Djali, s’en retournait vite à Tostes par la grande route, s’affaissait dans un fauteuil, et de toute la soirée ne parlait pas. […] Ce sont les caractères que semblent affecter les chefs de file des générations nouvelles.

1465. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Mémoires de Mme Elliot sur la Révolution française, traduits de l’anglais par M. le comte de Baillon » pp. 190-206

Elle a été galante, elle a été légère, elle a ébloui les yeux des princes et de ceux qui sont devenus rois ; elle n’a pas cru qu’on dût résister à la magie de sa beauté ni qu’elle dût y résister elle-même ; elle a tout naturellement cédé et sans combat, elle a triomphé des cœurs à première vue et n’a pas songé à s’en repentir ; elle a obéi à cette destinée d’enchanteresse comme à une vocation de la nature et du sang ; il lui a semblé tout simple de jouer tantôt avec les armes royales de France, et tantôt avec celles d’Angleterre qu'elle écartelait à ses panneaux : mais tout cela lui a été et lui sera pardonné, à elle par exception ; tous ses péchés lui seront remis, parce qu’elle a si bien pensé, parce qu’elle a si loyalement épousé les infortunes royales, comme elle en avait naïvement usurpé les grandeurs ; parce qu’elle est entrée dans l’esprit des vieilles races à faire honte à ceux qui en étaient dégénérés ; parce qu’elle a eu du cœur et de l’honneur comme une Agnès Sorel en avait eu ; parce qu’elle a eu de l’humanité au péril de sa vie, parce qu’elle a confessé la bonne cause devant les bourreaux, et qu'elle a osé leur dire en face : Vous êtes des bourreaux ! […] Parfois il semblait les reconnaître, et je me flattais qu’il allait changer de voie ; mais il me quittait pour aller chez Mme de Buffon dont il s’était fort épris, et dont la politique, je suis fâchée de le dire, était celle de Laclos et de Merlin, qu’il trouvait toujours chez elle et avec qui il dînait tous les jours. […] Tout cela, me dit-il, semble facile à faire dans votre salon ; je voudrais bien que cela le fût autant en réalité ; mais je suis dans le torrent, je dois m’élever ou tomber avec lui. […] Quand ma voiture vint, je retournai chez moi, mais tout me semblait affreux et sanglant.

1466. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Journal de la santé du roi Louis XIV »

Il faudrait, pour parler dignement de ce livre, un critique qui eût pris d’avance une potion de Rabelais ou de Molière ; le génie qui a inspiré la cérémonie du Malade imaginaire semble, à première vue, le seul esprit dans lequel il conviendrait de deviser d’un pareil Journal. […] Les médecins liront avec intérêt toute cette description mémorable en son genre, et même, quand on est à demi profane, on partage presque l’enthousiasme du savant et pieux Vallot qui dit en finissant : « Cette évacuation (une très abondante sécrétion finale par les voies urinaires) continua neuf jours de cette même force, et fut tellement avantageuse qu’elle acheva ladite guérison de Sa Majesté, sans aucun accident et sans aucune rechute, et même sans aucun ressentiment de la moindre incommodité du monde ; de manière qu’après cette parfaite guérison, le roi s’est trouvé beaucoup plus fort, beaucoup plus vigoureux et plus libre de toutes ses actions, tant du corps que de l’esprit, et l’on peut dire avec vérité que Dieu a conduit cet ouvrage par des voies si extraordinaires et par des secours et des grâces si particulières, s’étant servi des causes secondes en une conjoncture qui semblait devoir être plutôt destinée au miracle qu’à l’industrie et l’expérience des médecins. » Vallot ne fait là que délayer le mot d’Ambroise Paré : « Je le traitai, Dieu le guarit. […] N’était-ce pas plutôt ébranlement nerveux et menace d’épilepsie, comme semblerait l’indiquer la description suivante, qui fait type en quelque sorte : « Le roi (c’est d’Aquin qui parle) fut assez fortement attaqué d’étourdissement le premier jour de janvier (1674), et fut contraint de chercher où se prendre et où s’appuyer un moment pour laisser dissiper cette fumée qui se portait à sa vue et affaiblissait les jarrets, par sympathie, en attaquant le principe des nerfs. […] Les bains, les demi-bains, cette idée, ce semble, toute naturelle et de bon sens, cette chose si salutaire et si adoucissante, ne lui en parlez pas : on en prenait peu alors, et lui moins que personne.

1467. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Lettres inédites de Jean Racine et de Louis Racine, (précédées de Notices) » pp. 56-75

Les communications semblent même avoir été interrompues entre elle et lui pendant tout le temps de sa carrière au théâtre ; il y a une lacune de dix-huit ans dans ces lettres. […] Cette sœur de Racine semble avoir boudé son illustre frère dans sa gloire et n’avoir voulu de lui que sa régularité et ses vertus14. […] On s’explique difficilement que l’Académie française, qui devait être, ce semble, « l’asile naturel d’un Racine », l’ait repoussé vers le même temps, ou du moins lui ait fait un petit signe de tête négatif et très-significatif, et cela pour la seconde fois : il dut renoncer à l’idée de s’y voir admis. […] Son fils unique, qui semblait destiné, si l’on en juge par les éloges et les regrets qu’il inspira, à faire refleurir la tige poétique des Racine, périt dans un voyage, victime du tremblement de terre de Lisbonne, à l’âge de vingt et un ans (1755).

1468. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Mémoire de Foucault. Intendant sous Louis XIV »

Qu’y est-il sur cette partie si peu aisée à traiter, ce semble, de sa vie publique ? […] Cousin, qui traite avec tant de dédain les Relations d’Elie Benoît pour des époques antérieures, et qui, du haut de son esprit, a déclaré cet utile et modeste historien « une très-médiocre intelligence », serait obligé ici de convenir qu’il doit y avoir quelque chose de très-vrai dans ce fonds d’horreurs où un intéressé seul pouvait nous faire pénétrer77 : c’est chose si désagréable en effet que d’avoir à s’appesantir sur des atrocités ; cela même semble contraire au bon ton et au respect qu’on a pour soi et pour ses lecteurs. […] Celui-ci, par moments, semble tenté de redevenir modéré : c’est qu’il a à ses côtés un plus violent que lui et qui en a l’honneur. […] Cependant l’ensemble, l’air de la physionomie semble assez riant.

1469. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Ducis épistolaire (suite) »

Aucun grand homme, aucun grand esprit ou talent, si singulier ou original qu’il semble, n’est seul de son espèce. […] Dans son mélange de rêverie et d’épreuve, de réalité et de chimère, il songeait par moments à la Corse dont Rousseau était censé faire la Constitution et qui semblait sur le point de se régénérer : « En un mot, cher ami, je cherche un pays où je n’entende point le peuple se plaindre du gouvernement, où l’on puisse parler avec plaisir et des lois et de leur exécution, où l’étranger n’ait rien à craindre des citoyens, ni ceux-ci de leurs régisseurs. […] Je donnerai ce préambule ; mais qu’on veuille bien distinguer et dégager la vérité de l’accent, sous ce qui nous semble aujourd’hui un peu déclamatoire et qui appartient au langage du siècle ; il n’est pas mal, d’ailleurs, de voir le sentiment des malheurs publics se mêler si intimement aux infortunes personnelles du rêveur ; les générations qui souffraient ainsi, et dont les âmes se soulevaient avec de tels gémissements sous toutes les sortes d’oppressions, méritaient de vivre assez pour assister et coopérer à la délivrance de 89. […] Elle perdra la cruelle habitude de la terreur ; ses enfants, à votre vue, ne courront, plus vers elle comme des colombes effrayées, et vos larmes ne couleront plus en silence pour expier les torts de votre complexion. » L’ayant, un jour, emmené chez lui à Marly, il l’observe et l’étudie sans en avoir l’air et sans lui porter ombrage ; il essaye de lui insinuer sous toutes les formes l’apaisement et la douceur, et plus content il fait part à Mme Deleyre du résultat obtenu : « Si j’en juge bien par les apparences, il me semble que son âme est plus tranquille.

1470. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Méditations sur l’essence de la religion chrétienne, par M. Guizot. »

S’emparant des doutes de la science, des incertitudes qui semblent la partager encore, se donnant pour auxiliaires les illustres naturalistes qui, soit par conviction, soit par prudence, ont biaisé ou qui même ont nié absolument la réalité et la possibilité de la transformation des espèces, M.  […] Sa pensée va plus loin, mais il ne s’y livre point avec trop de promptitude, il ne s’y obstine pas : il sait que rien n’est sûr, qu’indépendamment de la rareté de ces débris qui peuvent sembler les témoins d’un des états du monde disparus, sa pensée à lui-même est un instrument bien imparfait, qu’il lui suffirait d’un sens de plus ou de moins, ou du moindre degré changé dans la perspicacité de l’un des cinq sens, pour que tout lui parût sous un jour tout autre. […] Ce qu’on appelle instinct et qui semble à d’autres d’une portée infaillible ne trompe pas mon sage ; il y applique son analyse ; il en démêle le principe et le jeu ; il s’en rend compte d’après les lois de l’optique morale. […] Le genre humain, depuis qu’il est sorti des forêts, n’a plus envie de loger en plein vent ni de dormir à la belle étoile : aucune demeure ne lui semble assez magnifique pour lui.

1471. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Marie-Thérèse et Marie-Antoinette. Leur correspondance publiée, par M. le chevalier Alfred d’Arneth et à ce propos de la guerre de 1778 »

Pour qui ne lirait que ces lettres de Marie-Thérèse à sa fille, il semblerait en ressortir clair comme le jour que le roi de Prusse, « ce mauvais voisin », ainsi qu’elle l’appelle, a tous les torts dans cette affaire de la succession bavaroise, qu’il se conduit en despote et en astucieux politique qui n’aspire qu’à semer la zizanie en Europe et à tout brouiller pour pêcher en eau trouble. […] Il ne semble pas qu’elle en eût soupçon encore, lorsqu’elle écrivait le 14 mars 1778 : « Madame ma chère fille, le courrier nous est revenu hier du 2, et nous a un peu rassurés sur les intentions du roi. […] Toute ma constance m’abandonne à ce souvenir… » Elle semble avoir eu vent de la note désapprobative, et des effets qu’elle a produits, lorsqu’elle écrit le 6 avril : « Je vous suis tendrement obligée de l’intérêt que vous prenez à ma situation. […] Il semble que ces vieux rivaux de la guerre de Sept Ans, Frédéric, le prince Henri, Laudon, Lascy, se retrouvant en face les uns des autres, aient craint de tenter de nouveau la fortune et de remettre leur glorieux renom au hasard d’une grande mêlée.

1472. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Histoire des cabinets de l’Europe pendant le Consulat et l’Empire, par M. Armand Lefebvre (suite et fin.) »

La Restauration, un régime contraire et ennemi, avait d’abord succédé, avec des théories constitutionnelles qu’avaient sucées de nouvelles générations libérales, et, comme telles, encore moins favorables qu’opposées à l’idée impériale ; on semblait ne se rallier à ce passé récent que par la religion de la gloire et du malheur. […] On peut trouver, d’ailleurs, en ce qui est de l’explication individuelle et de la psychologie du héros, que l’historien lui-même a hésité, a varié en plus d’un endroit ; il a introduit des divisions plus commodes sans doute que réelles dans l’analyse du génie et du caractère : il semble tout accorder d’abord au Consul, même à l’Empereur, et ensuite, dans quelques-uns des avant-derniers volumes, il paraît vouloir revenir sur ses premiers jugements ; il lui retire beaucoup, pour tout lui rendre encore une fois au dernier moment, aux heures du suprême effort et de l’adversité. […] La nature, en livrant à l’historien ce personnage nouveau de sa plus haute invention et en qui elle s’est visiblement complu, en le remettant, pour ainsi dire, entre ses mains pour le raconter et le peindre, semble lui dire comme Horace au poëte : « Regardez-y bien ! […] « Le moment semblait donc venu pour le premier Consul de se recueillir dans sa pensée, de s’entourer de toutes les lumières de son vaste esprit, et d’éviter à son pays des chances si redoutables.

1473. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « La Fontaine »

Mais ces redites pourtant, dût la forme seule les rajeunir, ne nous ont pas semblé inutiles, ne serait-ce que pour montrer que nous aussi, le dernier venu et le plus obscur, nous savons au besoin et par conviction nous ranger à la suite de nos devanciers dans la carrière. […] Aussi ces admirables Mémoires, qui jusqu’ici ont été envisagés surtout comme ruinant le prestige glorieux et la grandeur factice de Louis XIV, nous semblent-ils bien plutôt restituer à cette mémorable époque un caractère de grandeur et de puissance qu’on ne soupçonnait pas, et devoir la réhabiliter hautement dans l’opinion, par les endroits mêmes qui détruisent les préjugés d’une admiration superficielle. […] Mais, pour lui, les causes du retard nous semblent différentes, et les jours du silence ont été tout autrement employés. […] vous pouvez nous l’apprendre ; Votre réponse est prête, il me semble l’entendre : C’est jouir des vrais biens avec tranquillité, Faire usage du temps et de l’oisiveté, S’acquitter des honneurs dus à l’Être suprême, Renoncer aux Phyllis en faveur de soi-même, Bannir le fol amour et les vœux impuissants, Comme Hydres dans nos cœurs sans cesse renaissants.

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