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532. (1890) Les princes de la jeune critique pp. -299

Il parle du prêtre avec une sympathie tendre. […] Il a voulu que son analyse fût tendre, tout en restant lucide. […] Bourget est de pâte trop tendre pour rechercher les âpres émotions du combat. […] « Une femme délicate et tendre se trouve seule dans son salon intime par une après-midi voilée d’hiver. […] Qu’on me pardonne de répéter sans cesse ces mots tendre et délicat !

533. (1874) Premiers lundis. Tome II « X. Marmier. Esquisses poétiques »

Ceci est bien : les jeunes cœurs tendres et ouverts aux sympathies ont dû passer par cette phase mélancolique à leur entrée dans un monde égoïste et oisif ; livrés à des occupations sans rapport avec leur vocation secrète, ils ont dû placer leur idéal dans cette vie opulente et facile dont ils sont les témoins un peu jaloux : ils rêvent un véritable paradis à deux, dans le parc de quelque vieux château, à l’ombre des hautes futaies ou des charmilles.

534. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — F. — article » pp. 334-336

Qu’on les lise donc, si l’on veut juger sainement du véritable esprit du Christianisme, & des devoirs de la tendre & solide piété.

535. (1864) Corneille, Shakespeare et Goethe : étude sur l’influence anglo-germanique en France au XIXe siècle pp. -311

Son caractère est de subordonner les sens à l’esprit, et de tendre, pair tous les moyens que la raison avoue, à élever et à grandir l’homme. […] Cousin me remercia, me tendit la main, et m’invita sans m’avoir demandé mon nom à aller le voir de temps en temps. […] Ce livre qui tendait à faire connaître l’Allemagne par ses mœurs, et à expliquer par le caractère des habitants celui de la littérature, ne resta pas isolé. […] Vinet disait de Nodier : « Tout vit, tout palpite dans son langage ; jamais l’hymen d’un homme avec sa parole ne fut plus tendre et plus étroit. […] Vos pieds tendres et purs n’ont point l’âge où l’on marche ;           Vos ailes sont d’azur.

536. (1893) Du sens religieux de la poésie pp. -104

Depuis que tout le monde s’en mêle, c’est une profession qui tend à disparaître : car à propos d’art, et d’art littéraire surtout, chacun se réserve le droit de juger en dernier ressort. […] Quand il inspira au grand Goethe son immortel Faust, il n’était déjà plus adolescent, l’esprit critique ; il avait assez tourmenté déjà tout ce tendre et féroce moyen âge en dépit de ses naïvetés rouges et bleues ; il avait assez longtemps grimacé aux gargouilles des cathédrales et ricané dans les contes. […] Ces habitants d’un infini qui ne saurait se déplacer ont souvent le tort de ne pas comprendre que l’humanité, dans sa vie active et pensive hors de l’art, s’efforce de rejeter une à une ses douloureuses contingences, — de ne pas comprendre qu’en s’élevant d’âge en âge vers plus de bonheur, c’est-à-dire vers plus de vérité, l’humanité s’élève aussi vers plus de beauté et tend les bras aux poètes. […] Eh bien, rien n’est aussi éloigné de cet idéal que la conception de la vie moderne en général, conception d’après laquelle la vie animale tend toujours davantage à gouverner la vie raisonnable. […] En divisant le monde religieux, ils le reconstituent, — d’une part fondant une doctrine plus grave, moins tendre et moins humaine, mais peut-être mieux faite pour satisfaire les besoins d’une pensée plus spéculatrice, — et d’autre part obligeant à plus de sagesse et de prudence l’ancienne foi : ils l’avaient reniée parce qu’elle était devenue indigne et voilà qu’elle se relève, se réforme elle-même pour tenir tête au nouvel adversaire.

537. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome I « Bibliotheque d’un homme de goût. — Chapitre I. Des poëtes anciens. » pp. 2-93

Sapho, la tendre Sapho, montra dans ses Odes beaucoup de douceur & de finesse ; on lui doit l’invention de ce vers si coulant qui porte son nom. […] C’est le Poëte des cœurs tendres & sensibles. […] Ce tendre ami de Virgile, l’est aussi de tous les lecteurs d’un goût délicat. […] Il chante, à l’exemple de Pindare, les Dieux, les Héros & les Combats ; il badine avec Anacréon, ou emprunte de la lyre de Sapho, des sons tendres & touchans pour célébrer les charmes de Glycere & les douceurs de la vie champêtre. […] Tibulle est tendre & naturel, passionné, délicat, noble sans faste, simple sans bassesse, élégant sans affectation.

538. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre V : Lois de la variabilité »

— Les faits rapportés dans le premier chapitre suffisent, je pense, à établir que, chez nos animaux domestiques, l’usage fréquent ou continuel de certains organes tend à les développer ; tandis que le défaut d’exercice produit au contraire leur diminution et peu à peu leur atrophie. […] D’autre côté, je ne vois aucune raison de douter que la sélection naturelle ne tende continuellement à protéger et à conserver tous les individus dont la constitution est le mieux adaptée à leur contrée naturelle. […] Les parties homologues tendent à varier de la même manière. […] Quand un organe est bien développé, il tend peut-être à absorber la nourriture des organes voisins ; et la nature épargne sans cesse sur chaque partie de l’organisation tout entière, toutes les fois qu’elle peut le faire sans nuire à l’individu. […] Les espèces descendues d’un parent commun, héritant presque de la même constitution, doivent tendre naturellement, lorsqu’elles sont exposées à des influences semblables, à présenter des variations analogues, et quelques-unes d’entre elles peuvent accidentellement revenir à quelques-uns des caractères de leur ancien progéniteur.

539. (1889) Essai sur les données immédiates de la conscience « Chapitre I. De l’intensité des états psychologiques »

On sait que les théories mécaniques, et surtout cinétiques, tendent à expliquer les propriétés apparentes et sensibles des corps par des mouvements bien définis de leurs parties élémentaires, et que certains prévoient le moment où les différences intensives des qualités, c’est-à-dire de nos sensations, se réduiront à des différences extensives entre les changements qui s’exécutent derrière elles. […] Mais on pourrait se demander si le plaisir et la douleur, au lieu d’exprimer seulement ce qui vient de se passer ou ce qui se passe dans l’organisme, comme on le croit d’ordinaire, n’indiqueraient pas aussi ce qui va s’y produire, ce qui tend à s’y passer. […] Mais les mouvements automatiques qui tendent à suivre l’excitation subie, et qui en constitueraient le prolongement naturel, sont vraisemblablement conscients en tant que mouvements : ou bien alors la sensation elle-même, dont le rôle est de nous inviter à un choix entre cette réaction automatique et d’autres mouvements possibles, n’aurait aucune raison d’être. […] À mesure, en effet, qu’une sensation perd son caractère affectif pour passer à l’état de représentation, les mouvements de réaction qu’elle provoquait de notre part tendent à s’effacer ; mais aussi nous apercevons l’objet extérieur qui en est la cause, ou, si nous ne l’apercevons pas, nous l’avons aperçu, et nous y pensons. […] A mesure que la source lumineuse se rapproche, le violet prend une teinte bleuâtre, le vert tend au jaune blanchâtre et le rouge au jaune brillant.

540. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « LOUISE LABÉ. » pp. 1-38

Léon Boitel, vient de faire pour sa tendre compatriote, la Sapho du xvie  siècle, ce que M. […] Je suis obligé, bien qu’à regret, d’y renvoyer le lecteur curieux, pour ne pas trop abonder ici en ces sortes d’images12 ; mais j’oserai citer au long le sonnet xiv, admirable de sensibilité, et qui fléchirait les plus sévères ; à lui seul il resterait la couronne immortelle de Louise : Tant que mes yeux pourront larmes espandre, A l’heur passé avec toi regretter ; Et qu’aux sanglots et soupirs résister Pourra ma voix, et un peu faire entendre ; Tant que ma main pourra les cordes tendre Du mignard luth, pour tes grâces chanter ; Tant que l’esprit se voudra contenter De ne vouloir rien fors que toi comprendre ; Je ne souhaite encore point mourir. […] Une muse tendre qui a vécu quelque temps sous le même ciel et qui en a respiré l’influence, Mme Valmore, s’est rendue l’écho de cette tradition vaguement charmante sur elle dans les vers suivants, qui sont dignes de toutes deux : …………….. […] De la foule qui passe évitant la faveur, Inclinant sur ton fleuve un front tendre et rêveur, Louise, tu chantas !

541. (1860) Cours familier de littérature. X « LVIIe entretien. Trois heureuses journées littéraires » pp. 161-221

» Le cœur se serre à ces justes et tendres reproches du paysage et de la maison qu’on va quitter, à ses plus beaux jours d’été, et l’on se dit avec une certaine hésitation intérieure : Trouverai-je mieux ailleurs ? Et suis-je bien sage en effet d’aller chercher si loin ce que j’ai sous mes pas, et ce que j’ai avec ce bien inestimable que je n’aurai pas ailleurs : la douce habitude, l’ombre du toit paternel sur ma tête, les tendres souvenirs de l’enfance et de la famille autour de moi ? […] Il était bon, spirituel, lettré, tendre jusqu’au dévouement pour ceux qu’il aimait, courageux contre l’iniquité, laborieux comme la charité filiale qui gagne le pain d’autrui avec plus d’assiduité que son propre pain. […] Les montagnes du Forez, cette Auvergne du Midi, berceau de son enfance, les scènes de la vie agricole, vrai cadre de toute poésie, les fenaisons, les moissons, les vendanges, les semailles, les mille impressions douces, fortes, tendres, tristes, rêveuses, qui montent au cœur de l’homme agreste dont le goût n’est pas encore blasé par la vie artificielle des cités, tous ces évangiles des saisons qui chantent Dieu par ses œuvres dans le firmament comme dans l’hysope, sont les textes de ces délicieuses compositions.

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