Supposez l’homme dont parle Lucrèce, et qui, des bords de la mer, contemple un vaisseau qui fait naufrage, et suit de l’œil les mouvements de tant de malheureux qui périssent : si ce tableau a porté le trouble et l’agitation dans son âme ; si ses entrailles se sont émues ; si au moment où le vaisseau s’est enfoncé, il a senti ses cheveux se dresser d’horreur sur sa tête ; en peignant à d’autres le spectacle terrible dont il a été le témoin, cherchera-t-il à le relever par des oppositions et des contrastes étudiés ?
Faudrait-il supposer même que, métropole puissante de l’univers, le sillonnant de ses colonies, l’Europe lui ait envoyé avec son sang une vieillesse anticipée, et que, sur ces territoires de l’Amérique septentrionale qui s’étendent sans cesse, dans ces villes qui poussent si vite, notre civilisation n’ait jeté partout, avec son expérience de plusieurs siècles et ses plus récentes inventions, que le bon sens pratique, l’intelligente âpreté au gain, et cette active distribution du travail, cet emploi technique et pressé de la vie, qui laisse si peu de temps aux plaisirs délicats de l’âme et du goût ?
À supposer même que Dorothée, déjà promise à quelque autre, refuse d’être à lui, il obéira sans murmure à cet arrêt. […] Le philosophe hégélien, lorsqu’il substitue à la personne divine son Dieu-idée, fait-il autre chose que de supposer dans la nature un agent de plus que le physicien, et un agent semblable en tout à ceux que suppose celui-ci ? […] Je suppose en matière de religion et de philosophie un pur sceptique, — c’est une supposition qu’il n’est que trop naturel de faire dans le pays où j’écris ; — que verra-t-il dans les raisonnements de l’athée ? […] Ce terme vague d’Orient laisse beaucoup à supposer. […] Je suppose qu’il aura beaucoup admiré dans sa jeunesse les Jeux de l’Amour et du Hasard et qu’il n’est point fâché de renouveler chez lui la comédie.
En toutes choses il faut traiter les hommes de la sorte, et leur supposer les vertus qu’on veut leur inspirer. […] D’autre part, je ne suppose pas qu’il nourrisse aucune hostilité contre Rome, encore qu’évidemment la véritable place du pape lui semble être plutôt en Avignon. […] Ainsi nous induit-il à supposer que certaines choses étaient écrites par lui en 1883, qui n’ont été introduites qu’en 1899, M. […] Sans doute elle admet aussi le péché en pensée ; mais il suppose une complaisance et un acquiescement. […] Comment supposer qu’il n’eût point charmé par de nouveaux essais poétiques les longs ennuis des solitudes tropicales ?
L’hérédité a ses lois comme la pesanteur. » Voilà qui va fort bien : mais la science démontre, ou à peu près, les lois de la pesanteur ; elle en est encore à supposer celles de l’hérédité. […] Supposez que M. […] C’est lui supposer une patience à toute épreuve ou un excès de naïveté que de croire qu’il y prendra jusqu’à trois fois plaisir. […] Supposez que mademoiselle Rougon-Macquart, ayant épousé M. […] Tout le monde, — je prendrai du moins la liberté de le supposer, — a lu la Foire aux vanités et tout le monde a lu David Copperfield.
Les jeunes filles, je suppose, ne les liront pas. […] Ce sont, je suppose, ces scènes qui doivent le plus surprendre un auditoire français. […] Ce serait de ma part une sorte de trahison que de me taire absolument sur ce qu’il a donné depuis ce temps-là, et de laisser peut-être supposer qu’en voulant acquérir la renommée d’instituteur, dont il est fier, il a cessé d’être poète. […] Mais supposez qu’à vingt ans le jeune homme eût été placé dans un autre milieu que celui où, de vingt à trente, il s’est développé, nous aurions un Bourget tout autre. […] Et si quelqu’un s’est dérobé à l’influence de ces œuvres, ce n’est pas, je suppose, André Beaunier, le romancier du Roi Tobol.
Ces lois du théâtre, dont je vous parlais tout à l’heure, que nous ne connaissons pas encore, mais que nous supposons, il n’est pas probable qu’elles aient rien d’immuable, — ou plutôt, si ! […] Et si j’insiste, Messieurs, c’est que nous voyons poindre ici l’une encore de ces lois du théâtre, — que nous sommes convenus de supposer, en attendant que l’expérience et la critique les aient solidement établies. […] Supposons en effet, pour un moment, qu’il y eût des qualités de premier ordre cachées et comme enfouies dans la Phèdre de Gilbert ou dans l’Iphigénie de Rotrou. […] Car, supposez que je veuille peindre l’ambition, par exemple, ou la cupidité. […] Car pourquoi le suppose-t-on mort ?
Comment ose-t-il supposer qu’un homme, capable de renoncer, même aux bienséances par amour pour la vertu, soit capable de manquera ses devoirs par intérêt ? […] Mais la véritable raison que je suppose qui est celle pourquoi Rousseau a laissé Don Juan de côté est la suivante : Don Juan gêne Rousseau dans sa démonstration contre Molière. […] Dans l’Impromptu de Versailles, Molière suppose qu’un marquis se demande si Molière n’est pas à bout de sujets et il lui fait répondre : « Plus de matière ! […] Il commence par supposer un « public corrompu ». […] — Probablement oui, puisque le principe, c’est que la religion des femmes doit être impersonnelle et dépendre de ceux à qui elles obéissent ; et religion impersonnelle suppose, le cas échéant, religions successives] .
Dès qu’il est devenu conscience, Dieu est né, car la conscience s’appuie sur Dieu comme sur son autorité et le suppose comme son auteur, et la divinité est pour elle comme une conscience universelle. […] La loi de 1901 avait supposé, sans doute, que des congrégations pouvaient être autorisées ; mais elle n’obligeait nullement à en autoriser une seule. […] L’une de ces deux libertés suppose que l’on renonce à l’autre. […] Supposez un député qui étudie une bonne réforme à faire, consciencieusement, sérieusement. […] Reste donc la fixation arbitraire : « Nous supposons que Monsieur un tel est millionnaire.
Mais supposons qu’elle pense autrement, qu’elle veuille à tout prix garder la Savoie et qu’elle y réussisse, que vous arriverait-il pour avoir dit que vous regrettez votre ancien souverain ? […] Or, si l’on suppose M. de Maistre recevant, ainsi qu’il est très-probable, la communication de cette brochure dans le temps où il écrivait son pamphlet de Claude Têtu, mûr comme il était sur la question et tout échauffé par le prélude, il lui suffit d’un éclair, pour l’enflammer ; il dut se dire à l’instant, dans sa conception rapide, que c’était le cas de refaire la brochure de Saint-Martin, non plus avec cette mollesse et cette fadeur à demi inintelligible, non dans un esprit particulier de mysticisme et dans une phraséologie béate qui tenait du jargon, mais avec franchise, netteté, autorité, en s’adressant aux hommes du temps dans un langage qui portât coup et avec des aiguillons sanglants qui ne leur donneraient pas envie de rire. […] Il n’était pas homme, comme les mystiques, comme Saint-Martin et les autres, à supposer je ne sais quelle petite Église secrète et quelle franc-maçonnerie à voix basse, dont le sacerdoce catholique n’eût été qu’un simulacre sans vertu, une ombre dégradée et épaissie. […] Je sais tout ce qu’on peut opposer de front et dans le détail à une pareille théorie et à l’histoire qu’elle suppose et qu’elle impose. […] Vers la fin de décembre 1820, de graves symptômes se déclarèrent ; sa démarche, ordinairement si ferme et si rapide, devint chancelante, et on n’osait plus le laisser sortir seul : « Nous nous apercevions bien qu’il perdait ses forces, écrivait un témoin ami, mais nous étions loin de le croire en danger ; nous supposions plutôt cet affaiblissement dû à l’âge, dont les effets se hâtaient plus que d’ordinaire et s’accumulaient plus rapidement.