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1594. (1817) Cours analytique de littérature générale. Tome II pp. 5-461

Au contraire, si vous parcourez les annales des autres nations, vous y rencontrerez de loin en loin des traces du génie isolé de quelques auteurs inspirés par la nature, et luttant contre la sourde ignorance de leur siècle. […] Le bon curé de Meudon habille plaisamment la raison en masque, et, tel qu’un magicien, il transforme en figures bizarres les principaux personnages de son siècle et les corps les plus vénérés de l’état. […] Quel siècle a vu la comédie attaquer les choses publiques qu’il ose reprendre ? […] À l’exemple de ces illustres auteurs, tous ceux qui leur succédèrent jusqu’au dernier siècle, où Goldoni vint étudier notre théâtre, conservèrent à la comédie intriguée les formes dégénérées de celle des anciens. […] Supposons que les caractères neufs se fussent plus rarement offerts à lui, leurs formes changées avec le siècle, et leurs bizarreries autrement tournées, n’eussent pas échappé à son pinceau.

1595. (1856) Réalisme, numéros 1-2 pp. 1-32

Les chefs-d’œuvre sont les exemplaires radieux des siècles. […] Il vivra aussi dans la mémoire des siècles comme une date ; celle de la fin du règne du romantisme. […] … Parce que les anciens ont fait de grandes choses pour leur temps, faut-il les imiter sans cesse, doit-on être grec jusqu’à la fin des siècles ? […] Les chefs-d’œuvre sont les exemplaires radieux des siècles. […] Il vivra aussi dans la mémoire des siècles comme une date ; celle de la fin du règne du romantisme.

1596. (1860) Cours familier de littérature. IX « Le entretien. Les salons littéraires. Souvenirs de madame Récamier (2e partie) » pp. 81-159

À l’époque où s’ouvrit ce grand concile de la politique moderne, Mathieu de Montmorency, philosophe et novateur comme son maître Sieyès, s’élança sur ses pas et sur les pas de Mirabeau au-devant de toutes les théories de liberté et d’égalité qui allaient être soumises à l’épreuve de l’expérience du siècle futur. […] C’est un des hommes de ce siècle qui m’a inspiré le plus d’éloignement ; sa popularité d’occasion ne fut jamais qu’un mensonge convenu de parti, car il n’y eut jamais de popularité juste et vraie sans vertu publique. […] Madame Récamier habita à Rome la maison de Canova, le grand statuaire de ces deux siècles. […] D’autres qui vinrent selon leur âge dans le siècle.

1597. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXIIIe entretien. La Science ou Le Cosmos, par M. de Humboldt (2e partie). Littérature de l’Allemagne. » pp. 289-364

Il était l’Alexandre le Grand de la science, le plus grand héros de génie de ce siècle, dans la recherche des phénomènes de la nature et des signes sensibles de l’âme. […] Les ouvrages sur les sciences de la nature portent ainsi en eux-mêmes un germe de destruction, de telle sorte qu’en moins d’un quart de siècle, par la marche rapide des découvertes, ils sont condamnés à l’oubli, illisibles pour quiconque est à la hauteur du présent. […] Dix-huit millions d’étoiles, actuellement visibles, étoiles qui chacune sont un soleil et entraînent avec elles des systèmes de planètes et de mondes, en marquent les bords, quelques-unes à de telles distances qu’il faut des milliards de siècles pour que leur lumière parvienne seulement à la terre. […] Il a fondé la terre sur sa propre solidité, en sorte qu’elle ne vacillât pas dans toute la durée des siècles.

1598. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre quatrième »

Dès lors la vérité pour lui fut uniquement dans la révélation, et il entreprit de la prouver, non pas à titre d’autorité transmise par des témoignages, ou d’établissement fondé par les siècles, mais comme une vérité évidente. […] La violence de ses efforts, ses angoisses, ses doutes qui l’épuisent sans le vaincre, parce qu’il sait que, pour l’objet qu’il poursuit, hors de la religion il n’y a qu’impuissance et désespoir, et qu’il faut croire ou mourir ; l’audace même de cette entreprise, qui le mène à rechercher si cette lutte de dix-sept siècles, entre la foi et la raison, ne vient pas de ce que la raison n’a pas été assez haute, ou la foi assez raisonnée, et si la foi n’est pas la perfection même de la raison ; qui donc connaît un emploi plus noble des facultés humaines ? […] Enfin, dans toutes ses pensées mélancoliques, dont quelques-unes semblent capricieuses, et dont aucune n’est indifférente, je reconnais le doute de notre temps, non ce doute des esprits médiocres qui n’est qu’impuissance de penser et de vouloir, mais celui qui est au fond des esprits les plus élevés et des caractères les plus fermes, après deux siècles qui ont vu tant de grandeurs et tant de chutes. […] N’est-ce point pour avoir réuni tous les dons de l’écrivain, à ce point de perfection où aucun n’est dominant, que le style de Pascal est peut-être, de tous les grands styles des dix-septième et dix-huitième siècles, le plus soutenu ?

1599. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre cinquième. De l’influence de certaines institutions sur le perfectionnement de l’esprit français et sur la langue. »

En Portugal, l’Académie du langage est postérieure de plus d’un siècle au seul écrivain de génie de ce pays, le Camoens, dont elle défendit la langue contre l’influence de la littérature espagnole en décadence. […] La proportion qu’il indique, entre ce qui demeure et ce qui change dans la langue, pendant vingt-cinq ou trente ans, n’a pas varié depuis plus de deux siècles. […] « Il y a, dit Pellisson, dans tout le corps de l’ouvrage, je ne sais quoi d’honnête homme, tant d’ingénuité et tant de franchise, qu’on ne saurait presque s’empêcher d’en aimer l’auteur63. » C’est la gloire de Vaugelas qu’un contemporain ait fait de lui un éloge dont, après deux siècles, il n’y a rien à retrancher. […] Peu de noms ont été plus grands dans le siècle qui compte le plus de grands noms, et où la gloire a été le plus exactement mesurée au mérite ; mais ce nom n’est attaché à aucun ouvrage durable, et, chose plus étonnante, aucun des écrits d’Arnauld ne porte son empreinte personnelle.

1600. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre II. Prière sur l’Acropole. — Saint-Renan. — Mon oncle Pierre. — Le Bonhomme Système et la Petite Noémi (1876) »

Jeté ensuite dans le courant de mon siècle, que j’ignorais totalement, je me trouvai en face d’un spectacle en réalité aussi nouveau pour moi que le serait la société de Saturne ou de Vénus pour ceux à qui il serait donné de la voir. […] Il viendra des siècles où tes disciples passeront pour les disciples de l’ennui. […] L’époque de l’émigration galloise (Ve et vie  siècles) était visible dans les campagnes pour un oeil exercé. […] Il était évident qu’il méprisait son siècle.

1601. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Introduction, où l’on traite principalement des sources de cette histoire. »

Les Védas, les anciennes poésies arabes, ont été conservés de mémoire pendant des siècles, et pourtant ces compositions présentent une forme très arrêtée, très délicate. […] Si une telle mention se fût trouvée dans son ouvrage, Eusèbe, qui relève chez lui tout ce qui sert à l’histoire littéraire du siècle apostolique, en eût sans aucun doute fait la remarque. […] Quand on écrira l’histoire des écoles juives aux siècles qui ont précédé et suivi immédiatement la naissance du christianisme, on ne se fera aucun scrupule de prêter à Hillel, à Schammaï, à Gamaliel, les maximes que leur attribuent la Mischna et la Gemara, bien que ces grandes compilations aient été rédigées plusieurs centaines d’années après les docteurs dont il s’agit. […] Le parsisme, l’hellénisme, le judaïsme auraient pu se combiner sous toutes les formes ; les doctrines de la résurrection et du Verbe auraient pu se développer durant des siècles sans produire ce fait fécond, unique, grandiose, qui s’appelle le christianisme.

1602. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 novembre 1885. »

Il semblera juste de comparer à ce résumé de toutes nos connaissances positives, la doctrine artistique la plus générale et la plus fructueuse de ce siècle. […] Spencer fond en une seule et énorme masse, l’infini des notions acquises par des siècles de minutieux travaux, au point d’en figer le sens en une formule de cinq lignes ; Wagner, héritier de deux siècles de musique, résumant la poésie germanique des Minnesanger à Goethe, en forme une double et simple œuvre, qui est comme la contraction d’un immense rhythme dont l’art antérieur serait l’expansion. […] Edouard Schuré (1841-1929) est un philosophe et musicologue français, figure majeure du wagnérisme et de l’ésotérisme fin de siècle.

1603. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Théâtre » pp. 83-168

Deux hommes seulement, dans toute la presse, n’ont pas vu ce soir-là de cabale dans la salle : ce sont M. de Biéville, du Siècle, et M. de Béchard, de la Gazette de France. — Le rapprochement de ces deux extrêmes nous semble assez curieux pour le noter en passant. […] puisque, dans ce moment du siècle, c’est une suspicion et une raison d’ostracisme que l’apparence de la fortune et du bonheur, il nous faut essayer de désarmer l’envie, en la consolant un peu. […] Maintenant, attaqués à droite et à gauche, attaqués en même temps par le Siècle et par l’Union, par l’Avenir national et par la Gazette de France, sans oublier le Monde ; fusillés par un premier Paris de la France, arrêtés par l’administration, — que nous reste-t-il à faire pour une pièce à laquelle les sympathies de la grande critique, les feuilletons de Jules Janin, de Théophile Gautier, de Nestor Roqueplan, de Paul de Saint-Victor, de Louis Ulbach, de Francisque Sarcey, la presse et le public, des recettes de quatre mille francs, une location de huit jours à l’avance, devaient assurer, semblait-il, le droit de vivre ? […] Avec l’évolution des genres qu’amènent les siècles, et dans laquelle est en train de passer au premier plan le roman, qu’il soit spiritualiste ou réaliste ; avec le manque prochain sur la scène française de l’irremplaçable Hugo, dont la hautaine imagination et la magnifique langue planent uniquement sur le terre-à-terre général ; avec le peu d’influence du théâtre actuel en Europe, si ce n’est dans les agences théâtrales ; avec l’endormement des auteurs en des machines usées au milieu du renouveau de toutes les branches de la littérature ; avec la diminution des facultés créatrices dans la seconde fournée de la génération dramatique contemporaine ; avec les empêchements apportés à la représentation de pièces de purs hommes de lettres ; avec de grosses subventions dont l’argent n’aide jamais un débutant ; avec l’amusante tendance du gouvernement à n’accepter de tentatives dans un ordre élevé que de gens sans talent ; avec, dans les collaborations, le doublement du poète par un auteur d’affaires ; avec le remplacement de l’ancien parterre lettré de la Comédie-Française par un public d’opéra ; avec… avec… avec des actrices qui ne sont plus guère pour la plupart que des porte-manteaux de Worth ; et encore avec des avec qui n’en finiraient pas, l’art théâtral, le grand art français du passé, l’art de Corneille, de Racine, de Molière et de Beaumarchais est destiné, dans une cinquantaine d’années tout au plus, à devenir une grossière distraction, n’ayant plus rien de commun avec l’écriture, le style, le bel esprit, quelque chose digne de prendre place entre des exercices de chiens savants et une exhibition de marionnettes à tirades.

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