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331. (1908) Jean Racine pp. 1-325

C’est un second rôle. […] De ce dernier, notamment, Racine développe et l’on peut dire qu’il invente le caractère et le rôle. […] Au reste, son rôle est, pour une bonne moitié, de l’ironie la plus aiguë. […] Ce rôle si compliqué, si gêné, si peu « avantageux » contient donc plus de tragique peut-être que les grands rôles des héros de tragédie. […] Une singulière volupté se dégage de ce rôle.

332. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Histoire de Louvois et de son administration politique et militaire, par M. Camille Rousset, professeur d’histoire au lycée Bonaparte. (Suite et fin) »

Ayant pris de bonne heure au sérieux, autant et plus que souverain en aucun temps, son rôle et ses attributions de roi, cette idée élevée, ce respect religieux de son état le mena à écrire, à dicter des instructions et des pièces assez nombreuses qui ont été recueillies. […] Son bon esprit et sa fermeté, ajoute le témoin, ne font pas abandonné un instant, et, en parlant avec douceur et bonté à tous ceux à qui il a bien voulu parler, il a conservé toute sa grandeur et sa majesté jusqu’au dernier soupir. » En un mot, Louis XIV s’est montré roi jusqu’à la fin, avec la conscience et le respect de son rôle qui n’était pas un rôle pour lui, mais qui était un ministère.

333. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Ducis épistolaire. »

Villemain, et de rechercher ce qu’il y a de Shakespeare ou plutôt ce qu’il n’y en a pas dans les pièces de Ducis ; il n’a guère emprunté de son original que les titres et une certaine excitation chaleureuse pour se monter l’imagination sur les mêmes sujets ; et il n’a guère fait, à son tour, que fournir des motifs de beaux rôles et de masques tragiques à de grands comédiens comme Brizard, La Rive, Monvel, et en dernier lieu Talma. […] J’ai tâché seulement de faire un rôle intéressant d’une reine parricide et de peindre surtout, dans l’âme pure et mélancolique d’Hamlet, un modèle de tendresse filiale. […] Je n’ai su qu’aimer et me donner sans réserve. » Et comme son ami lui avait écrit qu’il s’était mis à relire l’Ariane de Thomas Corneille, « cette pauvre Ariane abandonnée par un ingrat », Ducis achève, à ce propos, de caractériser la passion chez Racine : « Personne sans doute n’approche de cette pureté élégante et soutenue de Racine ; mais il y a dans ce rôle admirable d’Ariane, où toute la passion de l’amour est rassemblée, un fonds de tendresse, d’abandon d’âme, d’ivresse et de désespoir, qu’on ne trouve point dans Racine, parce que Racine n’est pas très naïf, et qu’il est très possible, je crois, d’être plus tendre encore que lui.

334. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Mémoires de l’abbé Legendre, chanoine de Notre-Dame, secrétaire de M. de Harlay, archevêque de Paris. »

Simple abbé, il se distingua fort par sa parole et sa conduite dans les Assemblées du Clergé ; en une circonstance mémorable où le second Ordre était en conflit avec le premier, il se refusa à un rôle de chef de parti, de chef de file, qu’un ambitieux plus imprudent eut recherché : il aima mieux pousser à un rapprochement. […] L’évêque de Cour entra dans son rôle pour n’en plus sortir. […] C’est dans ce rôle d’archevêque suprême que nous allons le considérer de plus près, en compagnie de l’abbé Legendre, non sans dénoter, quand il le faudra, le côté faible et fragile du beau pasteur trop enclin au sexe, et dont on disait en le voyant arriver parmi ses ouailles : Formosi pecoris custos, formosior ipse.

335. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Marie-Antoinette (suite et fin.) »

On n’a sur le rôle de la reine pendant les dix premiers mois du ministère Necker (août 1788-juillet 1789) que de rares indications, mais non douteuses. […] L’empereur Léopold, prince sage, prudent, peu disposé à intervenir, très occupé à contenir les émigrés, n’était pas toujours bien au fait des dispositions de sa sœur ; il la croyait quelquefois affaiblie, découragée ; il lui écrit un jour en ce sens et lui donne le conseil de quitter la partie, d’échapper à ce rôle de victime. […] L’importance du rôle que remplit le comte de Mercy auprès de la reine, était connue depuis la publication des documents donnés par M. 

336. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Essai sur Talleyrand (suite.) »

» — « Non, mais sur le prince de Talleyrand, sur un homme de cette distinction, de cette importance, qui a joué un tel rôle, qui était si aimable dans la société !… » — « Eh bien, ai-je nié l’importance et le rôle ? […] « À ce moment, l’abbé de Pradt, archevêque de Malines, qui aimait passionnément jouer au moins le rôle de marmiton dans toutes les cuisines politiques, eut vent de l’affaire, et il me conta (c’est Berryer qui parle) l’anecdote en ces termes : « Je voulais savoir (disait donc l’abbé de Pradt) de quoi il était question, et il était impossible de faire parler le prince de Talleyrand entouré de monde et sur ses gardes.

337. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « DISCOURS DE RÉCEPTION A L’ACADÉMIE FRANÇAISE, Prononcé le 27 février 1845, en venant prendre séance à la place de M. Casimir Delavigne. » pp. 169-192

De la pièce si agréable des Comédiens je veux pourtant relever ce personnage de Victor, type du jeune auteur dramatique tel que le rêvait le poëte, et à la faveur duquel il a exprimé, sur le but moral de l’art, sur le rôle du talent dans la retraite, quelques conseils et préceptes d’une justesse appropriée, dont il est demeuré observateur fidèle : Aimons les nouveautés en novateurs prudents… Que le littérateur se tienne dans sa sphère… Crains les salons bruyants, c’est l’écueil à ton âge ; Nous avons trop d’auteurs qui n’ont fait qu’un ouvrage… Et d’autres pareils. […] Talma, après avoir entendu la pièce au Comité, y voulut aussitôt un rôle. […] Je conçois, Messieurs (et d’assez beaux noms autour de moi me le disent), que le divorce entre les différentes applications de la pensée ait cessé de nos jours, qu’un noble esprit habitué à tenter les hautes sphères, à parcourir la région des idées en tous les sens, ne se croie pas tenu à circonscrire son activité sur tel ou tel théâtre, qu’il ne renonce pas à sa part de citoyen, à faire peser ou briller sa parole dans les délibérations publiques, à compter dans l’État ; — je conçois, Messieurs, et même j’admire un tel rôle ; mais ce n’en est pas moins un aimable contraste que cette modération de désirs et, si l’on veut, d’idées, chez un homme aussi distingué, aussi désigné, et qui pouvait espérer beaucoup.

338. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « UN FACTUM contre ANDRÉ CHÉNIER. » pp. 301-324

remy très-digne de ce rôle mixte, à la fois sérieux et point pédant ; il a eu pourtant au début une inspiration malheureuse, selon nous : il y avait peut-être à faire un meilleur usage de ses acquisitions classiques que de commencer par les tourner contre André Chénier, et de venir déclarer en suspicion une muse en qui le parfum antique est universellement reconnu. Je m’étais toujours figuré, je l’avoue, un rôle tout autre pour un homme de l’école moderne, de cette jeune école un peu vieillie, qui se serait mis sur le retour à étudier de près les Anciens et à déguster dans les textes originaux les poëtes : c’eût été bien plutôt de noter les emprunts, de retrouver la trace de tous ces gracieux larcins, et de nous initier à l’art charmant de celui qui se plaisait souvent à signer : André, le Français-Byzantin. […] atin, qui tous les jours, dans son Cours de poésie latine, éclaire le rôle de Catulle ou d’Horace chez les Latins par celui de Chénier parmi nous, tous ces esprits supérieurs ou délicats ont fait fausse route à cet endroit.

339. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Œuvres de Frédéric le Grand. (Berlin, 1846-1850.) » pp. 144-164

Je laisse de côté quelques essais et quelques saillies de Frédéric très jeune et prince royal ; mais, du moment qu’il conçut son rôle de roi, je trouve tout l’homme d’accord avec lui-même, je le trouve vrai. […] Je ne sais pas d’homme qui, plume en main, soit moins charlatan que lui ; il dit ses raisons et ne les colore en rien : « Un rôle d’emprunt est difficile à soutenir, pensait-il ; on n’est jamais bien que soi-même. » En écrivant l’histoire de sa maison sous le titre de Mémoires de Brandebourg, il nous donne le sens, l’inspiration première et la clef de ses actions. […] Il n’était pas d’humeur à jouer le rôle débonnaire d’un Stanislas.

340. (1889) Émile Augier (dossier nécrologique du Gaulois) pp. 1-2

Il a compris et il a dit, en de rudes apostrophes, quel rôle dissolvant l’argent — le nitrate d’argent — jouait dans la désorganisation, dans la désagrégation de la société bourgeoise. […] S’il n’a point l’œil assez vaste, le regard assez puissant, pour voir, d’ensemble, la société qui s’agite à ses pieds, il s’attachera à en étudier la fraction qui, par son importance sociale, son intelligence, son éducation, le rôle qu’elle a joué a le plus d’affinités avec lui-même. […] Rappeler le nom de chacune des œuvres qui suivent, c’est enregistrer un succès : Vaudeville (1859) : les Lionnes pauvres, en collaboration avec Foussier ; Gymnase (1859) : Un beau Mariage ; Comédie-Française (1861) : les Effrontés ; Comédie-Française (1863) : Maître Guérin ; Comédie-Française (1866) : Lions et Renards ; Odéon (1869) : la Contagion, avec Got, de la Comédie-Française, dans le principal rôle ; Vaudeville (1876) : Madame Caverlet ; Comédie-Française (1878) : les Fourchambault, qui furent la dernière œuvre d’Émile Augier et qu’il retoucha, il y a quelques années quand elle fut reprise avec un succès que l’on n’a pas oublié.

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