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1497. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Comte de Gramont »

Un livre qui a des défauts littéraires d’autant plus grands qu’il est le produit d’un système, mais qui a aussi une valeur absolue, un mérite qui ne passera pas, c’est-à-dire la vérité presque maladive d’une inspiration qui ressemble à un empoisonnement, les Poésies de Joseph Delorme, datèrent bien ce commencement d’une époque traversée par nous maintenant, mais Dieu sait à quel prix !

1498. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Taine — II »

Dans ce temps-là, j’écrivais : « La religion et la philosophie sont produites par des facultés qui s’excluent réciproquement, se déclarent impuissantes… Le système qui essayerait de les réconcilier et de les confondre ne sera jamais qu’un roman. » J’allais même plus loin, et je disais : « Affirmer qu’une doctrine est vraie parce qu’elle est utile ou belle, c’est la ranger parmi les machines du gouvernement, ou parmi les inventions de la poésie3‌. » Eh bien !

1499. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre premier. De la louange et de l’amour de la gloire. »

En mécanique, on préfère les machines qui produisent les plus grands effets par les plus petits moyens.

1500. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre VII. D’Isocrate et de ses éloges. »

Admettez un tiers à cette conversation, il ne concevra point ce que ces mots ont de touchant, ni pourquoi ils excitent une émotion si tendre, et font peut-être verser les plus douces larmes : telle est l’image du différent effet que produisent les beautés accessoires et les finesses d’expression dans une langue vivante ou dans une langue morte ; plus un écrivain a de ce genre de beautés, plus il doit perdre.

1501. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre IV. Que la critique doit être écrite avec zèle, et par des hommes de talent » pp. 136-215

Qu’eût-ce été si le spectre s’était fait voir, dès le premier acte, comme le voulaient, pour produire plus d’effet, les compagnons de Molière ? […] — Et quant à la merveille, à la magie, à la statue, à peine si elle paraissait, deux ou trois fois, pour prononcer quelques rares et terribles paroles qui produisaient l’effet du tonnerre. — Ma foi ! […] D’ailleurs, Molière avait à produire sa plus terrible comédie, son Tartuffe. […] La fantaisie a-t-elle jamais rien produit de plus curieux et de plus étrange que ces fêtes dans lesquelles toute cette jeunesse, qui allait être le grand siècle, jouait son rôle d’esprit, de bonne humeur et de bonne grâce ? […] Bulwer prit l’habitude d’écrire en note, au bas de ses livres, des aménités pareilles à celles-ci : « La France qui a produit Cartouche et Jules Janin, la France qui a produit la Saint-Barthélemy et L’Âne mort. » Voici, pour commencer, le drame de l’Ambigu-Comique.

1502. (1907) L’évolution créatrice « Chapitre IV. Le mécanisme cinématographique de la pensée  et l’illusion mécanistique. »

Ce que nous constatons en nous, ce sont encore des phénomènes qui se produisent, et non pas, évidemment, des phénomènes qui ne se produisent pas. […] Mais on ajoutera que la représentation d’une disparition est celle d’un phénomène qui se produit dans l’espace ou tout au moins dans le temps, qu’elle implique encore, par conséquent, l’évocation d’une image, et qu’il s’agirait précisément ici de s’affranchir de l’imagination pour faire appel à l’entendement pur. […] Ce qu’il noterait à tout moment, ce sont des choses qui existent, des états qui apparaissent, des faits qui se produisent. […] Écartez de sa position d’équilibre un pendule idéal, simple point mathématique : une oscillation sans fin se produit, le long de laquelle des points se juxtaposent à des points et des instants succèdent à des instants. […] Et l’enfant qui travaille ainsi sur les pièces d’un jeu de patience, qui juxtapose des fragments d’image informes et finit par obtenir un beau dessin colorié, s’imagine sans doute avoir produit du dessin et de la couleur.

1503. (1788) Les entretiens du Jardin des Thuileries de Paris pp. 2-212

C’est ainsi qu’un simple épi qu’on cultive dans un petit coin de terre avec le plus grand soin, produit outre mesure, au lieu qu’abandonné en plein champ, & se trouvant moins soigné, il ne rend des grains qu’en petite quantité. […] Du moins cela produisit-il cet effet chez des religieuses, où l’on s’étoit avisé d’en apporter un exemplaire. […] Chaque province a ses usages, ses denrées, ses revenus, & l’on doit pour y faire le bien, avoir égard à sa position, comme à la nature du sol & des récoltes qu’il produit. […] C’est dans les assemblées provinciales qu’on produira les expériences faites à l’avantage de l’agriculture, que les travaux du particulier deviendront ceux du public, & qu’enfin l’oppression n’aura plus lieu. […] lui répliquai-je avec vivacité ; que le souverain prendra ma terre, qu’il percevra le produit de mon emploi ou de mon savoir faire, pour le répandre dans une caisse générale, où l’on mettra toutes les fortunes du Royaume.

1504. (1860) Cours familier de littérature. IX « LIIe entretien. Littérature politique. Machiavel » pp. 241-320

Ces souches toscanes, greffées de sang romain, ont toujours produit des branches prodigieuses de sève et de force dans l’espèce humaine. […] La jalousie entre les papes et ces empereurs produit dans les deux Italies les factions des Guelfes et des Gibelins, si célèbres dans l’histoire ; factions dont l’une est germanique et l’autre papale, mais dont aucune n’est réellement italienne. […] Nous allons l’étudier avec vous dans son histoire récente ; nous allons conjecturer les conseils pratiques que lui donnerait aujourd’hui, s’il pouvait revivre, le plus ferme esprit politique, le plus sain appréciateur des réalités dans les choses, le plus hardi contempteur des chimères, que l’Italie ancienne ou moderne ait jamais produit, son premier patriote enfin.

1505. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre III. Molière »

Une tentative plus originale qu’intéressante se produit à la fin du siècle pour rendre à la comédie la valeur d’une instruction morale : par malheur il n’y a rien de plus contraire au dramatique, et au plaisir, que ce défilé de Fables dont les situations de la pièce ne sont que le prétexte398. […] Dans ses œuvres les plus considérables, dans le Chevalier à la mode et les Bourgeoises de qualité il a plaisamment mis en scène le nivellement social que produit l’argent, en dépit des préjugés héréditaires et des habitudes invétérées : l’équilibre maintenu par le prestige de la qualité, et de ce chef, le mendiant ou l’escroc titré reprenant l’avantage sur la bourgeoisie, qui se demande parfois si ce qu’on lui vend, amour ou nom, vaut bien les bons écus qu’elle lâche ; enfin, l’ascension obstinée de tout ce qui a gagné ou volé, vers la noblesse, vers les offices et les alliances qui décrassent. […] Pendant ces cinq années de lutte, Molière avait produit d’autres œuvres : Don Juan (fevr. 1665), qui donna lieu aux Observations du sieur de Rochemont (attr. à Barbier d’Aucour, janséniste) et fut sans doute interdit par l’autorité ; l’Amour médecin, comédie-ballet (1665) ; le Misanthrope (4 juin 1666) ; le Médecin malgré lui (1666): à la cour, dans le ballet des Muses (2 déc. 1666-16 févr. 1667), Mélicerte, comédie pastorale héroïque, et le Sicilien ou l’Amour peintre, Amphitryon (1668) ; Georges Dandin (juil. 1668 à Versailles ; nov. à Paris) ; l’Avare (sept. 166S).

1506. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre III. La poésie romantique »

De ce vers qui n’était plus qu’un mécanisme, une simple loi de combinaison des mots pour produire, avec des difficultés en plus, les mêmes effets qu’on cherchait dans la prose, de ce vers atone, les romantiques ont fait une volupté de l’oreille. […] Ce vaporeux, cette indétermination, qu’on trouve chez lui, cela vient justement de ce qu’il rend surtout le sentiment, autant que possible épuré des idées, des perceptions, des faits, qui le produisent ou l’accompagnent chez tous les hommes. […] Rolla, mélange de rhétorique juvénile et d’amertume byronienne, qui produit parfois une impression profonde.

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