Car Mirabeau ne donne jamais dans ces métaphysiques de Jean-Jacques Rousseau ; il les laisse jeter au peuple comme des osselets, mais il s’en moque toujours les portes fermées. […] Elle ne se souvenait pas du jeune royaliste inconnu de 1815 qui gardait la porte de son palais ou qui escortait à cheval la fuite nocturne de son oncle sur la route de la Belgique ; mais elle lisait dans les Girondins le 10 août, la tour du Temple, le 21 janvier, le cachot de la Conciergerie, le martyre royal de sa mère disculpée et sanctifiée par les larmes de l’Europe, et le peintre qui avait déversé tant d’horreur sur ces supplices, tant de pitié sur ces victimes, ne lui apparaissait pas comme un sacrilége, mais comme un vengeur. […] Pendant qu’on délibérait dedans, le peuple agissait dehors et frappait aux portes. […] Le peuple devient foule, et se porte sans ordre au danger.
Pourquoi ai-je quitté moi-même les coteaux vineux de mon pays, comme la poussière quitte le sillon, pour aller chercher du bruit, de la vanité, de la popularité plus venteuse que le vent sur la mer ondoyante des opinions humaines, à Paris, à Londres, à Stamboul, à Rome, à Athènes, et pour errer, à la fin de mes jours, exilé par ma faute de la porte fermée de mon propre foyer natal ? […] Sa vieille église, remarquée des voyageurs par son caractère oriental et par ses découpures de pierre, porte l’hiver son linceul de neige, comme une morte attendant le fossoyeur sur la grille du cimetière ; des maisons de paysans isolées ou groupées, une auberge peinte s’ouvrent sur la principale rue ; sa porte est obstruée par une file de ces chariots comtois, attelés d’un seul cheval au collier garni de sonnettes, caravane de montagnes tout à fait semblable aux interminables caravanes de chameaux de Mésopotamie qu’on rencontre dans les défilés de Damas ; de petits champs pierreux ou quelques grasses chènevières, de noir humus tombé des rochers et retenu par des murs de pierres sèches autour de l’étable, voilà Saint-Lupicin. […] XXVII Les diverses terrasses sur lesquelles le donjon grisâtre est élevé ou auxquelles il est adossé, ou dont il est flanqué d’un côté, donnent des places diverses aux chambres : de plain-pied d’un côté, avec les jardins, on est de l’autre au premier étage ; cette disposition de terrain sur les pentes de montagnes donne du mouvement, du pittoresque, des escaliers, des paliers, des rampes extérieures et intérieures aux maisons ; elles semblent, comme un manteau pétrifié, suivre en rampant dans leur inflexion au sol les ondulations de la roche ou du gazon qui les porte.
M. de Surville était, nous disait M. de Davayé, un très-bel homme, jeune encore, d’une taille haute et imposante, d’une physionomie profonde, d’une expression de figure réservée et douce ; on ne lui parlait qu’avec déférence comme à quelqu’un qui porte le respect devant lui. […] Car onc icy n’est propoz de l’armée ; Et maintes fois, durant ces longues nuicts, Du sombre Arcas, quand oy bruyr les tempestes, Ou que d’Oryon tombent les froids torrents, Que toicts, battus de cent coulps différents, Semblent aller s’escroulant sur nos testes : « Où porte-t-il, me dis, ses pas errants ? […] Ainz plus me duict mon doulx lieu Qu’à Lygdamon mourante œillade : Tant seur, après tout, n’est du sien ; Car est Ismene encor malade, Et ma Chloé se porte bien. […] Quant à tout le reste, cela porte avec soi son certificat d’originalité.
L’unité est saisissante : tout porte coup et nous subjugue irrésistiblement. […] Dans la traversée, accablé de chaleur et mourant de soif, il porte à ses lèvres et présente à la jeune Irlandaise une coupe contenant un philtre magique destiné à Marc’h et confié a Brangien, servante d’Iseult : fatale méprise ! […] — Porte-moi de l’autre côté, dit-elle. […] Cédant aux conseils d’un saint ermite, et d’ailleurs, l’effet du philtre étant épuisé, après avoir duré pendant les trois années fatales, Tristan se retire dans la Petite-Bretagne et prend le sage parti de se marier à la fille d’Hoël, roi du pays, qui porte aussi le nom d’Iseult.
Oserai-je ouvrir toutes grandes les portes de la Maison du péché et dévoiler à tous les yeux ce que Gaston Deschamps aime réellement en Marcelle Tinayre ? […] Elle lui porte malheur plus encore qu’à Brunetière. […] Il vaut aussi par l’esprit ingénieux qui s’y déploie, par l’écrivain qui y « porte son manteau avec grâce et en homme libre ». […] Pourvu qu’on triomphe des parties basses de soi, il est presque indifférent de les sacrifier aux autres, ces idoles visibles, ou au Dieu inconnu que chacun porte à son sommet comme une lumière qui n’éclairera point la base de la torche.
Aussi la gloire littéraire force-t-elle quelquefois les portes des académies ; mais elle y entre toute faite, elle n’en vient pas. […] X Aussi ce corps littéraire est-il devenu, malgré les épigrammes qui s’émoussent éternellement contre ses portes, une habitude qu’il est presque impossible de décréditer et de déraciner dans notre pays. […] La plus réellement républicaine des institutions françaises sous la monarchie, c’était peut-être l’Académie, la république des lettres. » Seulement, je l’avoue, si le temps avait été donné à la république, je voulais enfoncer les portes de l’Académie française pour faire entrer en plus grande proportion et pour de plus dignes rémunérations l’armée des lettres, de la science, des arts dans cette vétérance du travail intellectuel, le plus mal rémunéré et souvent le plus indigent des travaux humains. Je voulais que la France créât le budget des lettres ; je voulais que l’écrivain, le savant, l’artiste de tous les genres de culture d’esprit, après avoir consacré onéreusement sa vie à l’utilité ou à la gloire, cette utilité suprême de son pays, ne reçût pas pour tout salaire de cette noble abnégation de vie, un misérable subside de douze cents francs, inférieur aux gages d’un mercenaire, et distribué parcimonieusement à quarante privilégiés de la détresse à la porte d’une académie ouverte de temps en temps par la mort.
— La pièce d’Adolphe Dumas à la Porte Saint-Martin (Mademoiselle de La Vallière) réussit comme mélodrame ; c’est le siècle de Louis XIV traduit à l’usage des faubourgs.
Strasbourg porte malheur à l’éditeur. […] La porte est dans le château… » Ce n’est point seulement la porte (il en faut bien une), c’est la poste qui, étant dans le château, y amenait tout naturellement les visiteurs.
Je conçois, lui écrivait Jean-Jacques Rousseau (13 octobre 1738), les inquiétudes que vous donne le dangereux métier de M. votre fils, et tout ce que votre tendresse vous porte à faire pour lui donner un état digne de son nom ; mais j’espère que vous ne vous serez point ruinée pour le faire tuer : au contraire, vous le verrez vivre, prospérer, honorer vos soins, et vous payer au centuple de tous les soucis qu’il vous a coûtés. […] Au sujet de ces agitations, de ces énergies de cœur et d’esprit qu’elle lui marquait, il lui disait encore : « Votre âme se porte trop bien, elle vous use ; vous n’aurez jamais un corps sain. » — À la paix, après quelques années passées à observer les riches héritières, le marquis de Créqui se maria avec Mlle du Muy ; cette union, tout en vue de la fortune, fut sans bonheur, et les zizanies, les chicanes qu’elle engendra rejaillirent jusqu’à Mme de Créqui, et lui causèrent bien des ennuis et même des pertes d’argent considérables ; mais ce qui l’atteignait plus que tout, c’était l’indifférence et l’ingratitude de cœur de son fils, qui ne parut jamais s’apercevoir des sacrifices et de l’affection de sa mère. […] La considération de l’éternité forme la limite habituelle et assez rapprochée de son horizon ; c’est là qu’elle porte les yeux dès qu’elle veut anéantir le présent et amortir en elle quelque peine, quelque regret qui remue encore : « Ce ne sont là que des dégoûts, se dit-elle en songeant aux procédés de son fils ; le détachement suit, et alors l’éternité paraît et absorbe tout. » Elle ne nous dit jamais comment elle anime et elle éclaire cette éternité.
Un jour ce même Jean Rou, qui nous introduit si bien dans l’intimité du grand homme, comme il l’appelle rondement (on est toujours le grand homme de quelqu’un), Jean Rou passait à quatre heures du matin, au mois de mai, proche le quai des Quatre-Nations, devant la porte de Marolles33 ; il voit son domestique déjà habillé, debout, droit comme un cierge sur le seuil, et qui l’invite à monter chez son maître, lequel est, assure-t-il, encore plus matineux que lui. […] Selon cette chronique dont il se porte garant, les deux personnes qui passaient pour être filles de l’intendant et fidèle domestique de Marolles auraient tenu de plus près à ce dernier ; les gens soi-disant bien informés prétendaient qu’il était le vrai père. […] [NdA] L’endroit précis de la demeure de Marolles était sur le fossé de la porte de Nesle, vis-à-vis les salles du collège des Quatre-Nations.