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17. (1857) Cours familier de littérature. IV « XXIIIe entretien. I. — Une page de mémoires. Comment je suis devenu poète » pp. 365-444

Il a, de plus encore, sa présence perpétuelle devant les yeux et dans l’âme de l’adorateur. […] Jeune fille aux longs yeux, sais-tu ce que je pense ? […] Jeune fille aux longs yeux, sais-tu ce que je pense ? […] Jeune fille aux longs yeux, sais-tu ce que je pense ? […] Jeune fille aux longs yeux, sais-tu ce que je pense ?

18. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxiiie entretien. Littérature russe. Ivan Tourgueneff »

La petite fille jeta les yeux sur moi, et rentra dans l’isba : je la suivis. […] À ces mots la petite fille baissa les yeux. […] Le paysan se redressa subitement ; ses yeux s’animèrent et ses joues se colorèrent […] Vous promenez les yeux autour de vous. […] Mais le nuage grandit à vue d’œil… il s’allonge par-devant et s’avance comme une voûte.

19. (1860) Cours familier de littérature. X « LVIIIe entretien » pp. 223-287

Son père nous l’avait amené un jour à Paris : bien que nous fussions resté plusieurs années sans le revoir, sa figure nous était demeurée gravée dans la mémoire de l’œil, comme un de ces songes qui passent devant notre esprit dans la nuit, et qu’on ne peut chasser de ses yeux après de longs jours écoulés. […] On verra l’œil du lynx sous cette lourde paupière du vieillard. […] La chapelle des morts, l’église du village Montent devant ses yeux, au-dessus du feuillage. […] Or l’expression du génie, dans des yeux de femme, savez-vous ce que c’est ? […] Je méditais, les yeux baissés, en silence, mon étonnement, bien plus étonné encore lorsqu’en relevant les yeux je me trouvais en face d’une enfant de seize ans, pâle comme un spasme, calme comme l’héroïsme, belle comme l’idéal traversant la sombre réalité du temps.

20. (1899) Esthétique de la langue française « Le cliché  »

Si l’on franchit quinze cents colonnes, voici « les bras — la coupe — les pièges — le siège — le trône de la volupté ; voici des yeux noirs comme du jais — des yeux à demi-voilés par de longues paupières — des yeux dont on arrache le bandeau fatal — des yeux qui se détachent — des yeux qui se repaissent — des yeux qui se fondent en pleurs — des yeux qui lancent des éclairs », et plusieurs de ces images furent belles, mais elles ne le sont plus, puisqu’elles ne sont pas nouvelles. […] Des hommes voient avec génie : rien de ce qui a passé sous leurs yeux ne leur est impossible à évoquer. […] La poésie, en somme, et l’art, quel qu’il soit, a pour outil premier l’oeil. Sans l’oeil, il n’y a que des raisonneurs. […] On n’enseigne pas à regarder, mais à écouter ; il semble que les enfants ne devraient avoir des yeux que pour lire, des yeux postiches qu’ils remettraient dans leur poche, la leçon sue, comme le professeur, ses lunettes.

21. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXIIe entretien. Vie et œuvres de Pétrarque (2e partie) » pp. 81-155

« Et ces concerts d’oiseaux, et ces floraisons des plages, et ces belles honnêtes femmes, les grâces, les douceurs et les enjouements, tout cela n’est à mes yeux qu’un désert peuplé de bêtes féroces et sauvages dont je détourne avec effroi les yeux !  […] Je me trouve assez riche ; faut-il encore que je paraisse tel aux yeux des autres ? […] L’unité de l’Italie était à ses yeux dans l’empereur ; il cite pour exemple Rienzi lui-même à Charles VI. […] Il lève les yeux dans un moment de distraction ; son regard tombe, par hasard ou par prédestination, sur une jeune femme en robe de velours vert brodée d’or. […] Son âme s’échappe tout entière par ses yeux et se répand comme une atmosphère de flamme autour des traits de cette charmante apparition.

22. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre neuvième. Les idées philosophiques et sociales dans la poésie (suite). Les successeurs d’Hugo »

Les nuits, plus douces que les jours, Ont enchanté des yeux sans nombre ; Les étoiles brillent toujours Et les yeux se sont remplis d’ombre. […] Nulle part le rayon éblouissant, qui parfois même blesse l’œil, droit et dur comme une flèche, ne la déchire, cette brume de la pensée flottante. […] Il fut un temps, avant que les êtres animés eussent des yeux, où pesait sur le monde physique une nuit aussi sombre et aussi lourde que celle qui pèse aujourd’hui sur le monde moral. Au-dessus de cette nuit pourtant, la lumière planait, mais il n’y avait point d’œil pour la voir. […] Oui, c’est sa promenade dans Paris, dans la vie, si vous aimez mieux, qu’il nous peint avec ses yeux de poète.

23. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 49, qu’il est inutile de disputer si la partie du dessein et de l’expression, est préferable à celle du coloris » pp. 486-491

Les hommes ne sont pas affectez également par le coloris ni par l’expression, il en est, qui pour ainsi dire, ont l’oeil plus voluptueux que d’autres. Leurs yeux sont organisez, de maniere que l’harmonie et la verité des couleurs y excite un sentiment plus vif que celui qu’elle excite dans les yeux des autres. Un autre homme, dont les yeux ne sont point conformez aussi heureusement, mais dont le coeur est plus sensible que celui du premier, trouve dans les expressions touchantes un attrait superieur au plaisir que lui donnent l’harmonie et la verité des couleurs locales. […] Le partisan du Titien de son côté, plaint le partisan du Poussin, de préferer au Titien un peintre, qui n’a pas sçû charmer les yeux, et cela pour quelques inventions dont il juge que tous les hommes ne doivent pas être beaucoup touchez, parce que lui-même il ne l’est que médiocrement. […] L’homme dont je parle aimera mieux à soixante ans les comédies de Moliere, qui lui remettront si bien devant les yeux le monde qu’il a vû, et qui lui fourniront des occasions si fréquentes de faire des refléxions sur ce qu’il aura observé dans le cours de sa vie, qu’il n’aimera les tragédies de Racine, pour lesquelles il avoit tant de goût, lorsqu’il étoit occupé des passions que ces pieces nous dépeignent.

24. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxvie entretien. L’ami Fritz »

» le tira de son sommeil et lui fit venir les larmes aux yeux. […] dit le vieux rebbe en attachant sur Kobus son œil gris ; tiens ! […] » Tout cela lui passa devant les yeux, et bien d’autres choses encore. […] » il la vit ainsi soupirant tout bas, les mains sur ses genoux, les yeux baissés. […] Fritz, la face épanouie et les yeux au ciel, rêvait à Sûzel.

25. (1903) Considérations sur quelques écoles poétiques contemporaines pp. 3-31

B. — Inobservance de la rime aux yeux. […] Cette coutume dura jusqu’à Malherbe, qui, sans se préoccuper de la non-prononciation des consonnes finales, posa le principe de la rime aux yeux. […] Toutefois, depuis Malherbe, il fut donc décrété, malgré qu’on eût cessé dès longtemps de prononcer les consonnes finales, que l’identité de la consonne muette suffirait pour constituer la rime aux yeux, l’identité de la consonne qui la précède n’étant point exigée. […] Et je ne vois pas pourquoi l’on n’abandonnerait point, de temps en temps, la rime à l’œil. […] Ferme tes yeux à demi, Croise tes bras sur ton sein, Et de ton cœur endormi Chasse à jamais tout dessein.

26. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre cinquième. Le réalisme. — Le trivialisme et les moyens d’y échapper. »

Les yeux sont de grands questionneurs : ils interrogent chaque chose : qu’es-tu ? […] Il n’est pas dans leurs œuvres un seul portrait, une seule copie exacte d’un individu réel vivant sous leurs yeux. […] Au contraire, une âme vulgaire aura un œil vulgaire et un art banal. […] Son œil se fait à la lumière assourdie des profondeurs. […] Aussi, quand il veut transcrire un tableau de la nature, il peut choisir à son gré son centre de perspective ; il n’a pas, comme le peintre, son point de vue déterminé par la nature même des lieux, mais bien plutôt par la nature et les tendances de son esprit personnel : c’est la disposition de son œil qui fournit le plan du paysage, et il ne s’agit pas seulement de l’œil physique, mais encore et surtout de l’œil intérieur.

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