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17. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre quatrième. Éléments sensitifs et appétitifs des opérations intellectuelles — Chapitre deuxième. Les opérations intellectuelles. — Leur rapport à l’appétition et à la motion. »

Aucun objet de la pensée ne peut être vraiment général ; mais ce qui est général, c’est le pouvoir d’action et de mouvement dont j’ai conscience comme dépassant l’objet particulier sur lequel j’agis. […] En fait il n’y a ni sujet sans objet, ni objet sans sujet : la pensée complète est à la fois conscience immédiate et représentation, en d’autres termes, conscience et imagination. L’imagination reproductrice ne se distingue pas de la mémoire ; elle reproduit l’image des objets en l’absence des objets mêmes. […] Les images ne sont point aussi complexes que les objets mêmes, elles ne sont point fixes et absolument indépendantes de nous comme les objets extérieurs : elles sont donc des objets intérieurs plus commodes, plus maniables et plus mobiles. […] L’imagination, au lieu de se représenter directement un objet, peut se le représenter indirectement au moyen d’un objet plus ou moins analogue.

18. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre sixième. La volonté — Chapitre troisième. La volonté libre »

Comment la liberté est un objet de désir. […] En même temps, nous avons une tendance à nous rendre indépendants de ces objets internes tout comme des objets externes, et nous formons ainsi l’idée de volonté indépendante. […] Aucune détermination de rapports entre les objets de pensée ne peut nous rendre compte de la pensée qui conçoit et ces objets et ces rapports. […] Nous désirons donc toutes les formes de puissance à leur maximum, y compris la puissance de la volonté sur les objets extérieurs ou même sur ces objets intérieurs qu’on nomme motifs et mobiles. […] La réalité concrète enveloppe à la fois et l’idée de ma puissance et l’idée d’un objet auquel elle s’applique : les deux termes sont inséparablement objets de pensée et de désir.

19. (1896) Matière et mémoire. Essai sur la relation du corps à l’esprit « Chapitre II. De la reconnaissance des images. La mémoire et le cerveau »

La reconnaissance d’un objet présent se fait par des mouvements quand elle procède de l’objet, par des représentations quand elle émane du sujet. […] Il ne contient que l’objet O lui-même avec l’image consécutive qui revient le couvrir. […] Appelons B′, C′, D′ ces causes de profondeur croissante, situées derrière l’objet, et virtuellement données avec l’objet lui-même. […] Dans le cas d’un objet matériel présent, la réponse n’est pas douteuse : ordre et coexistence viennent d’un organe des sens, impressionné par un objet extérieur. […] Ils ne sont pas plus dépositaires des souvenirs purs, c’est-à-dire des objets virtuels, que les organes des sens ne sont dépositaires des objets réels.

20. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre II : M. Royer-Collard »

S’il a quelque passion, c’est le désir d’opérer beaucoup, avec précision, et sur des objets inconnus. […] Les objets rêvés vous sembleront aussi réels et aussi consistants que vous-même. […] À l’occasion d’une sensation naît une idée représentative, ou, en d’autres termes, un simulacre que nous prenons pour l’objet, qui, comme l’objet, nous paraît extérieur et réel, dont la naissance coïncide avec la présence d’un objet réel et extérieur. […] Donc, dans la perception extérieure, il y a en nous le simulacre d’un objet extérieur qui paraît réel. — Au sortir d’une perception extérieure, nous conservons la représentation très-exacte, très-claire, très-complète de l’objet perçu. […] Donc, en tous les cas, il y a un objet apparent, c’est-à-dire un simulacre qui paraît être l’objet réel et ne l’est pas. — La perception extérieure, selon M. 

21. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre cinquième. Principales idées-forces, leur genèse et leur influence — Chapitre sixième. Genèse et action des idées de réalité en soi, d’absolu, d’infini et de perfection »

Donc ces objets sont toujours des phénomènes, des façons d’apparaître, des apparences. […] L’opposition du sujet et de l’objet est la forme même de toute notre connaissance. […] L’idée d’absolu n’est autre que celle d’objet en général, d’existence en général, à laquelle nous ajoutons les attributs en soi et par soi. […] Kant a établi que l’idée d’absolu ne nous donne aucune connaissance de son objet et demeure un problème. […] L’infinité est donc la négation de toute limite comme contradictoire à la définition d’un objet.

22. (1881) La psychologie anglaise contemporaine «  M. Georges Lewes — Chapitre I : L’histoire de la philosophie »

Les voici devant cet objet nouveau. […] c’est la somme des actions des objets sur la conscience. […] Cependant une modification ne peut aucunement être une copie de l’objet qui modifie. […] Pourquoi, avec des jeux, voyons-nous les objets simples ? Pourquoi les images étant renversées sur la rétine, voyons-nous les objets droits ?

23. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Deuxième partie. Invention — Chapitre II. Définition. — Énumération. — Description »

La première question qui se pose sur quelque objet que ce soit, est : Qu’est-ce que c’est ? La réponse est une définition, qui fait connaître l’objet. […] Dans les degrés divers et les mille formes dont elle est susceptible, elle oscille entre deux limites : la recherche du caractère général, qui remet l’objet dans une série, dans un genre, et la recherche du trait particulier, qui l’isole et le pose seul, dans son individualité distincte, en face de tous les objets analogues. […] Pour vous, si vous avez vu l’objet, n’allez pas le revoir ; si vous ne l’avez pas vu, voyez-le, et attendez. […] Mais il faut faire ici une distinction : on peut toujours imaginer les objets matériels et sensibles.

24. (1907) L’évolution créatrice « Chapitre II. Les directions divergentes de l’évolution de la vie. Torpeur, intelligence, instinct. »

L’intelligence n’apporte donc la connaissance innée d’aucun objet. […] Mais, en fait, elle ne s’applique jamais qu’à un objet spécial, et même à une partie restreinte de cet objet. […] D’autre part, les objets sur lesquels notre action s’exerce sont, sans aucun doute, des objets mobiles. […] Mais le mot, en couvrant cet objet, le convertit encore en chose. […] Elle nous donnera, à défaut d’une analyse réelle de l’objet, une traduction de cet objet en termes d’intelligence.

25. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 10, objection tirée des tableaux pour montrer que l’art de l’imitation interesse plus que le sujet même de l’imitation » pp. 67-70

Nous donnons plus d’attention à des fruits et à des animaux répresentez dans un tableau, que nous n’en donnerions à ces objets mêmes. […] Je répons que, lorsque nous regardons avec application les tableaux de ce genre, notre attention principale ne tombe pas sur l’objet imité, mais bien sur l’art de l’imitateur. C’est moins l’objet qui fixe nos regards que l’adresse de l’artisan ; nous ne donnons pas plus d’attention à l’objet même imité dans le tableau, que nous lui en donnons dans la nature. […] Or en distinguant l’attention qu’on donne à l’art d’avec celle qu’on donne à l’objet imité, on trouvera toujours que j’ai raison d’avancer que l’imitation ne fait jamais sur nous plus d’impression que l’objet imité en pourroit faire. […] L’art de la peinture est si difficile, il nous attaque par un sens, dont l’empire sur notre ame est si grand, qu’un tableau peut plaire par les seuls charmes de l’execution, independamment de l’objet qu’il répresente : mais je l’ai déja dit, notre attention et notre estime sont alors uniquement pour l’art de l’imitateur qui sçait nous plaire, même sans nous toucher.

26. (1907) L’évolution créatrice « Chapitre IV. Le mécanisme cinématographique de la pensée  et l’illusion mécanistique. »

Tel sera l’objet du présent chapitre. […] Comparons, en effet, entre elles les deux idées de l’objet A supposé réel et du même objet supposé« inexistant ». […] Si je dis : « l’objet A n’existe pas », j’entends par là, d’abord, qu’on pourrait croire que l’objet A existe : comment d’ailleurs penser l’objet A sans le penser existant, et quelle différence peut-il y avoir, encore une fois, entre l’idée de l’objet A existant et l’idée pure et simple de l’objet A ? […] Et par conséquent dans le jugement l’objet A n’est pas » il y a d’abord une affirmation telle que : « l’objet A a été », ou : « l’objet A sera », ou plus généralement : « l’objet A existe au moins comme simple possible ». […] Quel est l’objet essentiel de la science ?

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