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1512. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « I — L’art et la sexualité »

La terreur de l’étreinte naturelle des sexes ne peut provenir que de la pauvreté du sang, car l’être sain et puissant désire et se satisfait. […] Rien ne peut remplacer l’audace et la franchise de vivre : aucune vertu ni aucun vice, aucune patience ni aucune finesse, aucune intelligence ni aucune délicatesse ne peuvent valoir le clair et libre accomplissement d’un acte naturel et libre, pas même l’art prodigieusement esthétique et raffiné auquel peut parvenir l’égotisme dans tous les mondes, et spécialement — selon l’intention de cet article — dans une partie de la jeunesse littéraire moderne. […] 22 Pour nous, les facultés intellectuelles plongent leurs racines profondes dans la vie sexuelle, dans la vie végétative et animale ; et dès lors, les actes de la vie naturelle, loin d’affaiblir ou de ruiner celles-ci, contribuent sans cesse à les enrichir et à les féconder.

1513. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXVIII. Des obstacles qui avaient retardé l’éloquence parmi nous ; de sa renaissance, de sa marche et de ses progrès. »

L’éloquence de la chaire avait des défauts presque semblables ; affectation, exagération, pointes ridicules, entassement de métaphores, mélange du profane et du sacré, citations éternelles de grec, de latin, d’hébreu, et un peu plus d’Ovide ou d’Horace que des pères ; enfin, multitude d’idées empruntées des erreurs et des préjugés du temps sur la physique, sur l’histoire naturelle, sur l’astronomie, sur l’astrologie, sur l’alchimie ; car alors on prodiguait tout, et on faisait étalage de tout ; tel était le goût des orateurs sacrés sous Henri IV et sous Louis XIII. […] Le mauvais goût ne peut guère exister que chez un peuple réuni en corps de société, où l’esprit naturel est gâté par le luxe, par les vices, par l’excès de la vanité, et le désir secret d’ajouter à chaque objet ou à chaque idée, pour augmenter l’impression naturelle que cet objet doit faire.

1514. (1902) Le problème du style. Questions d’art, de littérature et de grammaire

Albalat ; l’art est l’exercice spontané et ingénu d’un talent naturel. […] Les sens se développent par cette éducation naturelle que donne la vie. […] Le naturel de Voltaire est fait de grimaces, pénibles quand elles n’amusent pas. […] Pour la violette, il a fallu agrandir démesurément la fleur naturelle, et cela est louche ; pour le fuchsia, cela donne de lourds pendants d’oreille. […] Mais il faut laisser faire, sans conseils, sans ordres surtout, de crainte de gauchir un geste naturel.

1515. (1891) Impressions de théâtre. Cinquième série

c’est chose si naturelle !  […] Cela me paraît tout naturel à moi. […] Je crois qu’il tient à ce qu’on le sache, et ce désir est assez naturel. […] Manuel pouvait sans inconvénient s’abandonner à la bonté naturelle de son cœur. […] Est-ce pitié naturelle ?

1516. (1928) Quelques témoignages : hommes et idées. Tome I

Le ton épique lui devient aussi naturel qu’à Scott. […] Avant la loi, il n’y avait de naturel que la force du lion, que le besoin de l’être qui a faim, qui a froid, que le besoin ». […] Or, l’esprit d’un homme, qu’est-ce autre chose que ses façons habituelles, donc naturelles, de réfléchir et de raisonner ? […] Il est vrai aussi dans le domaine des réalités naturelles. […] Le naturel, c’est le charme divin de ses poèmes.

1517. (1902) La poésie nouvelle

Celle-ci n’a pas seulement une raison d’être comme représentation provisoire du réel inexploré, mais elle doit s’unir intimement au positivisme le plus précis afin d’exprimer l’indéfectible union du naturel et du surnaturel.‌ […] Le poète primitif se sentait en contact perpétuel avec le surnaturel, tandis que le poète d’aujourd’hui proteste contre l’opinion de ce temps que les choses sont « toutes naturelles ». […] Le respect des traditions artistiques ne peut avoir que ce fâcheux effet de retarder l’œuvre de la sélection naturelle, qui élimine tout le caduc et l’abolit… Il n’y a d’art que du Nouveau. […] Il se défie des formes consacrées et du langage noble et il ne s’applique, au contraire, qu’à être simple et naturel. […] Il est assez naturel qu’en ce livre, que le poète lançait comme le premier manifeste de l’école, il ait un peu outré la démonstration.

1518. (1863) Histoire de la vie et des ouvrages de Molière pp. -252

Quoi qu’il en soit, il paraît constant qu’il succéda dans les bonnes grâces de cette comédienne au comte de Modène, qui avait eu d’elle, en 1638, une fille naturelle. […] L’impatience naturelle de M. le prince de Conti et les présents que fit cette dernière troupe à madame de Calvimont engagèrent à les retenir. […] Les suppôts de la ligue contre le naturel y assistaient pour la plupart, et, malgré le nombre des spectateurs à la fois juges et parties, la vérité du tableau força tous les suffrages. […] En même temps, au milieu de vingt jets d’eau naturels, un rocher se changea en une coquille, d’où sortit bientôt après la naïade Béjart, chargée de débiter le prologue de Pellisson. […] Mais, soit froideur naturelle, comme le fait entendre un historien, soit qu’il fût occupé par une autre passion, le comte de Guiche ne répondit pas aux avances de mademoiselle Molière.

1519. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « APPENDICE. — LEOPARDI, page 363. » pp. 472-473

Je disais que j’aurais aimé à mettre en regard des poésies si senties mais si funèbres de Leopardi, et qui serrent le cœur, quelques poésies naturelles et également vraies qui le dilatent et le consolent.

1520. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — F — Faramond, Maurice de (1862-1923) »

Lo poète nous les montra dans leurs occupations quotidiennes, dans leurs ordinaires joies, dans leurs naturelles douleurs.

1521. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — G — Guérin, Maurice de (1810-1839) »

Pour nous, elles ont un caractère plus sacré encore, car c’est le secret d’une tristesse naïve sans draperie, sans spectateurs et sans art ; et il y a là une poésie naturelle, une grandeur instinctive, une élévation de style et d’idées, auxquelles n’arrivent pas les œuvres écrites en vue du public et retouchées sur les épreuves d’imprimerie… Il a été panthéiste à la manière de Goethe sans le savoir, et peut-être s’est-il assez peu soucié des Grecs, peut-être n’a-t-il vu en eux que les dépositaires des mythes sacrés de Cybèle, sans trop se demander si leurs poètes avaient le don de la chanter mieux que lui.

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