J’aurais porté de la terrasse à vos oreilles les cris des femmes éplorées, vous auriez vu sur l’esplanade du château des mains levées vers le ciel, mais il n’y aurait pas eu un mot de vrai. […] S’il n’y avait rien de commun, les hommes disputeraient sans cesse et n’en viendraient jamais aux mains ; s’il n’y avait rien de divers, ce serait tout le contraire. […] Les premiers des sauvages qui virent à la proue d’un vaisseau une image peinte la prirent pour un être réel et vivant ; et ils y portèrent leurs mains. […] N’eussent coupé les mains, fendu la tête, enfoncé le glaive dans la gorge et dans la poitrine, tué, massacré impitoyablement leurs semblables, les compagnons de leur voyage, qui leur tendaient en vain du milieu des flots, des bords de la chalouppe, des mains suppliantes, et leur adressaient des prières qui n’étaient point entendues. […] L’homme prudent entre en méfiance ; le lâche s’arrête, frémit ou s’enfuit ; le brave porte la main sur la garde son épée.
Je me souviens de deux bas-reliefs d’Oudri sur lesquels on portait la main. La main touchait une surface plane, et l’œil toujours séduit voyait un relief ; en sorte qu’on aurait pu demander au philosophe de ces deux sens dont les témoignages se contredisaient, lequel était un menteur.
Mais celui-là m’a emportée qui leva vers moi ses mains fortes et sut vouloir ce qu’il avait rêvé. […] Mais ne vois-tu qu’hélas la Destinée tient l’une de nos mains ? […] un seul être est selon la vie ; sache le connaître : c’est celui qui renonce, et qui remet ses mains aux mains de son destin.
Otsouka, reconnut que c’était une écritoire du xviie siècle — personne au monde n’ayant un soupçon de la main illustre qui avait fabriqué cette curiosité. […] On ne le trouve nulle part, et on désespérait même de le découvrir, quand Kuranosuké, plongeant les mains dans son lit, s’aperçoit que les couvertures sont encore chaudes. […] Et je me mis à fouiller mes albums, et je trouvai le recueil qui porte pour titre : Sei tû Guishi deu (Les Chevaliers du devoir et du dévouement), ou le peintre Kouniyoshi nous représente les ronins dans l’action de l’attaque du yashki de Kotsuké : l’un portant une bouteille d’alcool « pour panser les blessures et faire de grandes flammes afin d’épouvanter l’ennemi », l’autre « tenant deux chandelles et deux épingles de bambou pour servir de chandeliers », celui-ci éteignant avec de l’eau les lampes et les braseros, celui-là ayant aux lèvres le sifflet « dont les trois coups prolongés » doivent annoncer la découverte de Kotsuké ; et presque tous dans des poses de violence et d’élancement, brandissant à deux mains des sabres et des lances, et tous enveloppés d’un morceau d’étoffe de soie bleue, avec leurs lettres distinctives sur leurs uniformes, leurs armes, leurs objets d’équipement, et tous ayant sur eux un yatate, écritoire de poche, et dans leur manche un papier expliquant la raison de l’attaque57. […] … ou plutôt Quengo Tadao… car il y a une défense d’indiquer les vrais noms des ronins, et ils sont représentés avec les noms défigurés qu’ils ont au théâtre. » Et disant cela, Hayashi avait le doigt sur la planche, où est imprimé, en couleur, un guerrier au casque bleu, au vêtement noir et blanc doublé de bleu, la tête baissée, les deux mains sur le bois d’une lance, un pied en l’air, un autre appuyé à plat sur le sol, et portant un furieux coup de haut en bas.
Huc, dans ses voyages comme dans ce livre-ci, ne nous parle que des Chinois et des Tartares ; mais ce qui est vrai de ces deux peuples l’est de toutes les populations de l’Asie, de toutes ces masses de momies peintes qui pourrissent silencieusement sur leurs bases depuis des éternités, et qui y pourriront jusqu’au jour, peu éloigné maintenant, où, touché par la main vivante de l’Occident, s’émiettera définitivement en poussière tout cet amoncellement de sanie ! […] Ils désignent seulement des haches humaines dont le manche est dans la main de Dieu… Témoin plus que personne, par ses voyages et ses études, de cette stérilité historique dont l’Asie est frappée, Huc, qui n’est ni un panthéiste ni un matérialiste, puisqu’il est prêtre, a dédaigné de refaire sur des proportions sans justesse une histoire qu’on pourrait bloquer en quelques pages, tant elle est monotone et bornée, et il a choisi pour nous la raconter la seule chose qui soit vraiment digne d’une histoire, cette transfusion tant de fois essayée du Christianisme dans les veines du monde oriental, cette transfusion qui n’a pas réussi encore, mais qui doit réussir, si l’Asie n’est pas irrémissiblement condamnée ! […] … De tous les peuples connus à qui le Christianisme ait offert sa coupe de rafraîchissement, de lumière et de paix, le peuple chinois est celui qui l’a le plus repoussée, le plus rejetée de ses lèvres, le plus renversée sur les mains des apôtres infatigables à la lui offrir ! […] Cette petite question de l’opium qui doit planter le feu, un de ces matins, aux quatre coins de l’Asie, a dressé déjà la Chine sur ses pieds contrefaits et lui a fait porter avec terreur ses mains pointues à cette hermétique ceinture qu’elle avait trop imprudemment relâchée.
Mais il serait facile de montrer, l’histoire à la main, et ce serait là une étude curieuse et utile, que leurs plus grandes fautes vinrent justement de l’oubli de leur caractère et de leur devoir. […] Une main qui n’est pas espagnole, mais allemande a entrepris de resculpter cette vieille statue, aux traits diminués par le temps et couverts de la poussière des siècles, et de demander à la génération présente un peu d’admiration pour cette grandeur. […] À la Rochelle, Richelieu montait un cheval fougueux ; il portait, tout malade qu’il fût, une cuirasse d’acier et une écharpe feuille-morte, mais en Afrique, commandant aussi à des soldats, Ximénès allait sur une mule et ne tenait que son crucifix à la main. […] Elles sont, de détails épinglés, trop allemandes, et elles attendent la main d’un artiste qui taillera là-dedans quelque grande œuvre pleine d’unité, d’autorité et de mouvement.
On ouvrait, on tendait beaucoup sa main dans la jeunesse ; on la ferme et on la retire en vieillissant. […] Qu’il prenne, s’il veut, Fénelon, l’auteur du Télémaque et le précepteur du duc de Bourgogne, mais qu’il ne mette la main ni sur Suarez, ni sur Bellarmin, ni sur Bossuet lui-même, car Bossuet, comme saint Augustin, n’a pas cessé d’être un évêque, et sa politique n’est point tirée de l’ordre philosophique, mais de l’Écriture Sainte. […] La foi en ces choses que la Philosophie travaille à la main, — les Constitutions, — a incliné M. de Beauverger à une admiration compromettante, parfaitement indigne d’un esprit qui a souvent de la critique et de justes appréciations. […] Elle est restée aussi, comme une sage petite fille, les yeux baissés et les mains jointes sur sa ceinture, dans cette idée prude ou hypocrite d’une vraie liberté, et elle a mis Dieu par-dessus, mais quel Dieu ?
— mais d’un royaliste absolu et incompatible, qui croit à une vérité et qui ne veut pas que jamais — et quelles que soient les circonstances — cette vérité puisse mettre sa main pure dans la main souillée de l’erreur ; ce livre taillé à pic contre la révolution, les révolutionnaires, absolus comme l’auteur du livre est royaliste, le retourneront comme un argument formidable contre cette royauté détestée par eux, et que des secondes vues, aussi incertaines en France qu’en Écosse, croient voir poindre, comme un fantôme qui revient, à travers l’effrayante et vivante réalité que l’on appelle la République. […] En d’autres termes, il a voulu savoir si le comte de Chambord avait en lui l’esprit séculaire et chrétien de l’ancienne monarchie française, et si son éducation, ses idées et ses actes, qui ne sont encore que des paroles et des déclarations brillantes de loyauté, ne brillent pas trop aussi de cet esprit moderne inquiétant pour sa politique dans l’avenir, au cas où la France le reconnaîtrait un jour pour son roi moins pour une loyauté à laquelle elle ne se fierait peut-être pas, si elle était seule, que pour cet esprit moderne qui s’appelle, par duperie ou par trahison, « le libéralisme », mais qui n’est au fond que l’esprit même de la révolution… Recherche douloureuse, dans laquelle l’auteur du livre que voici a tenu le flambeau d’une main ferme ! […] et c’est abdiquer, même avant d’être roi, que de prendre un trône de la main de la révolution, pour l’y faire monter et s’y asseoir avec elle !
Théophile Gautier, dans une préface, mettre la main, — une main presque protectrice, — sur l’épaule du poète inconnu encore, comme si c’était l’un des siens ; et au contraire, M. de Châtillon est un Intime, et sous les descriptions dont il se surcharge, un Idéaliste, un Immatériel ! […] Il est descriptif et chaud dans la description, comme ils disent, et cela explique sur l’épaule la main sympathique de M. […] Lui, fait pour écrire toujours dans cette nuance que nous avons signalée, lui, le doux des doux, le résigné des résignés, dont la Muse aurait pu toujours ressembler à cette touchante image de Shakespeare, la Patience qui sourit longuement à la Douleur, a mieux aimé entrer à la Grand’Pinte et se verser du vin de cabaret de cette blanche main à laquelle on pardonne, car elle tremble, comme s’il savait que ce vin qu’il se verse n’apaisera rien de ce qui a soif dans son cœur.
Méléagre vivait cent ans environ avant Jésus-Christ ; charmant poète lui-même, auteur d’idylles et d’épigrammes amoureuses remplies de grâce ou de flamme, il réunissait toutes les conditions pour réussir à un travail qui demandait une main heureuse. […] On se les passait de main en main ; les La Monnoye, les Bouhier en faisaient leur régal et leurs délices. […] Il chante ou l’aimable Bathylle ou Mégistès, et tient suspendue dans sa main sa lyre aux amours douloureuses. […] Qu’un nid vide te recouvre et t’abrite, une masure que réchauffe un petit feu flambant, quand même tu n’y aurais qu’un pain commun, d’une farine mal blutée, pétrie de tes mains dans une pierre creuse, et pourvu que tu y aies encore et du pouliot, et du thym, et de ce gros sel amer si doux à mêler aux aliments. » Enfin l’on a son Épitaphe, composée par lui en perspective de sa mort prochaine ; on est loin ici du bonheur champêtre de cet autre vieillard de Tarente que nous a montré Virgile. […] Qu’au retour du printemps, dépouillant la prairie, Des dons du villageois ma tombe soit fleurie ; Puis d’une brebis mère et docile à sa main, En un vase d’argile9 il pressera le sein ; Et sera chaque jour d’un lait pur arrosée La pierre en ce tombeau sur mes mânes posée.