/ 1900
559. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Émile Augier »

Un marquis tarte à la crème, deux caillettes, dont l’une n’est que la Bélise de Molière servilement copiée, et un type d’Henri Monnier, à présent commun comme la borne, voilà les épouvantables éléments dont se compose le cléricalisme qui fait trembler, et auquel Augier, cette tête de linotte dramatique, oppose, pour l’aplatir, Giboyer le vénal, monsieur son bâtard et la demoiselle Fernande, née de l’adultère… La critique, cette courtisane de tous les publics dont elle devrait être l’institutrice, a battu des mains comme un simple Gringalet du lustre, et fait ensuite, sur le tremplin du lieu commun, sa pirouette mélancolique en l’honneur des partis vaincus.

560. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre V. Swift. » pp. 2-82

C’est qu’il n’y a que deux façons de s’accommoder au monde : la médiocrité d’esprit et la supériorité d’intelligence ; l’une à l’usage du public et des sots, l’autre à l’usage des artistes et des philosophes ; l’une qui consiste à ne rien voir, l’autre qui consiste à voir tout. […] Élevé au-dessus de l’une, abaissé au-dessous de l’autre, voyant le mal et le désordre, ignorant le bien et l’harmonie, exclu de l’amour et du calme, livré à l’indignation et à l’amertume, Swift ne rencontre ni une cause qu’il puisse chérir, ni une doctrine qu’il puisse établir967 ; il emploie toute la force de l’esprit le mieux armé et du caractère le mieux trempé à décrier et à détruire : toutes ses œuvres sont des pamphlets. […] Pour comprendre ce que devint l’une, il faut comprendre ce qu’était l’autre : l’art dépendit des affaires, et l’esprit des partis fit l’esprit des écrivains. […] Le hêtre a sur la tête une très-galante perruque, et il n’y a pas de plus joli justaucorps blanc que celui du bouleau. » De même pour les qualités de l’âme : « la religion n’est-elle pas un manteau, et la conscience une culotte, qui, quoique employée à couvrir la saleté et l’impudicité, se met bas très-aisément pour le service de l’une et de l’autre ? […] Ici, son mathématicien, qui, pour enseigner la géométrie, fait avaler à ses élèves des gaufres où il a écrit ses théorèmes ; là, son moraliste, qui, pour mettre d’accord les partis politiques, propose de fendre les cervelles ennemies et de recoller la moitié de l’une avec la moitié de l’autre ; plus loin, son économiste qui distille les excréments pour les ramener à l’état nutritif !

561. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre II. L’Âge classique (1498-1801) — Chapitre premier. La Formation de l’Idéal classique (1498-1610) » pp. 40-106

Si le mouvement n’a pas éclaté plus tôt, l’une des raisons en est probablement que le latin n’y pouvait suffire. […] De même encore, dans l’Heptaméron, — qui est bien d’ailleurs l’une des lectures les moins divertissantes que l’on sache, — c’est son expérience personnelle de la vie, et des hommes, ce sont même quelquefois ses propres aventures que Marguerite met en anecdotes. […] Rien ne saurait être plus erroné ni d’une philosophie plus superficielle, que de se représenter la Réforme comme analogue en son principe à la Renaissance ; elle en est précisément le contraire ; et le seul point qu’elles aient eu de commun c’est d’avoir, un court moment, travaillé l’une et l’autre à l’émancipation de l’individu. […] Disons encore, si l’on le veut, que, pour détruire un état de choses abhorré, l’une et l’autre, et l’une après l’autre, elles ont pris ou cherché leur point d’appui contre le présent dans le passé. […] 3º Le caractère de l’Astrée. — Aspect général de l’œuvre ; — et que, bien loin que les épisodes y soient, comme dans d’autres romans de la même forme, des hors-d’œuvre par rapport au récit principal, c’est le récit principal qui n’est que le prétexte ou l’occasion des épisodes. — Diversité d’intérêt qui en résulte : — 1º Episodes historiques [Eudoxe et Valentinian, IIe partie, livre 12] ; — 2º Allusions contemporaines [Euric, Daphnide et Alcidon, IIIe partie, livre 3] ; — 3º Inventions personnelles [Damon et Madonthe, IIe partie, livre 6]. — La forme des récits n’est pas moins variée : — descriptions [IIe partie, livre 5] ; — conversations [IIe partie, livre 12] ; — narrations [IIIe partie, livre 7], on y trouve des modèles de tout, de lettres encore et de sonnets d’amour ; — sans compter quelques pages d’une touche plus réaliste ou plus brutale. — Du style de l’Astrée : — son élégance et sa clarté ; — sa douceur et sa fluidité ; — sa justesse dans l’abondance, — sa valeur psychologique ; — et, comme conséquence, de la peinture des variétés de l’amour dans l’Astrée. — L’amour sensuel et brutal [Eudoxe et Valentinian, IIe partie, livre 12] ; — l’amour volage et capricieux [Hylas, Ire partie, passim] ; — l’amour jeune et passionné [Chryséide et Arimant, IIIe partie, livres 7 et 8] ; — l’amour chevaleresque [Rosanire, Céléodante et Rosiléon, IVe partie, livre 10] ; — l’amour mystique [Céladon et Astrée]. — Variété des caractères. — Qu’il ressort enfin de l’ensemble du livre une impression de charme et d’apaisement sans analogue jusqu’alors dans la littérature ; — qui explique sa fortune, l’une des plus prodigieuses qu’il y ait dans l’histoire littéraire : — et sa longue influence.

562. (1911) Études pp. 9-261

Claudel a compris l’union étroite, l’interpénétration de l’âme et du corps, et il a trouvé le rythme dont ils sont, l’une et l’autre, en même temps animés. […] Bach prend les idées l’une après l’autre. […] Ses différentes parties peuvent se rejoindre pour un instant ; mais leur mélange n’est qu’accidentel ; elles ne s’unissent que parce qu’elles sont nées séparées ; jamais l’une ne dérive de l’autre, ne s’en détache. […] Il est tout entier de front ; il ressemble à l’une de ces phrases pleines de division, où s’exprimait l’hésitation du désir. […] Elles ont l’une et l’autre je ne sais quelle maladresse native aux choses de la vie, elles ne savent pas les prendre, elles sont frappées d’une sorte de pudeur qui est leur essence même, si bien qu’elles ne goûtent d’aise véritable qu’éloignées l’une de l’autre326.

563. (1939) Réflexions sur la critique (2e éd.) pp. 7-263

Faguet dans l’une de ses Histoires de la littérature française (elles ne sont pas encore numérotées). […] Flaubert, comme tout écrivain, emploie l’une et l’autre. […] J’appellerais l’une la critique parlée et l’autre la critique d’artiste. […] Massis comme principal bénéfice deux fiches toutes subjectives, l’une et l’autre intéressantes et dignes d’être classées, celle-ci sur M.  […] Et si l’une des deux familles existait seule, la critique n’irait évidemment que sur une jambe.

564. (1909) Nos femmes de lettres pp. -238

Il y a ainsi des voix littéraires qui s’appellent et se répondent l’une à l’autre, comme un écho dans la forêt. […] Ainsi toute l’émotion, tout le pathétique du drame, c’est de savoir ce qu’il adviendra du conflit passionnel où sont engagés Augustin et Fanny, âmes adverses, toutes passionnées qu’elles soient l’une de l’autre : en voilà assez pour créer un intérêt d’intrigue qui nous tient en haleine. […] Il peut advenir alors que, cédant à ces tentations qui suivent les trouvailles du pinceau, il s’attache à l’une d’elles plus qu’il ne conviendrait, quand elles seront reportées au plan qu’exige leur valeur propre. […] de l’une à l’autre moins grande est la distance que de la coupe aux lèvres pour les autres mortels qui s’acharnent à la poursuite du bonheur ? […] Elles ne sauraient voir deux personnes qui sont mal ensemble sans prendre parti dans leur cœur pour l’une ou contre l’autre. » Ah !

565. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « La réforme prosodique » pp. 120-128

Anatole France a noté que le charme de certains noms de femme : Pholoë, Chloë, Pasiphaë, provenait justement de ce glissement de deux voyelles l’une sur l’autre.

566. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « Hartley »

Cette doctrine peut se ramener à deux propositions principales, dont l’une est le fondement de la physiologie, l’autre, le fondement de la psychologie.

567. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des recueils poétiques — Préfaces des « Odes et Ballades » (1822-1853) — Préface de 1826 »

Ces deux qualités si diverses dans leur essence marchent fréquemment l’une sans l’autre.

568. (1900) Quarante ans de théâtre. [II]. Molière et la comédie classique pp. 3-392

Les scènes tombent les unes par-dessus les autres, sans qu’aucun lien les rattache l’une à l’autre. […] Don Juan va de l’une à l’autre, et Molière suppose qu’elles ne s’aperçoivent ni l’une ni l’autre de ce manège, qui se fait à leur nez, parce qu’il supprime toutes les circonstances intermédiaires qui le couvriraient dans la vie réelle. […] L’une est de 1667, l’autre de 1668. […] Les deux sœurs de Psyché enragent de ses succès ; elles se confient l’une à l’autre leurs jalousies et leurs rancunes. […] Ne me pressez pas : je dirais qu’elles sont excellentes l’une et l’autre.

/ 1900