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237. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE STAEL » pp. 81-164

Issue de souche réformatrice par son père, Mme de Staël se rallie par son éducation et sa première jeunesse aux salons de l’ancien monde. […] Ce ne devait être pour Mme de Staël qu’un séjour passager, une saison de sa première jeunesse. […] Heureux trouble, qui nous tente de renaître aux émotions aimantes et à la faculté de dévouement de la jeunesse ! […] La jeunesse d’abord, cette grande et facile consolatrice, s’enfuit. […] Gardons-nous de défaire sans raison et d’aller gâter les justes admirations, les religions bien fondées de notre jeunesse.

238. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Notes et pensées » pp. 441-535

Pasquier et camarade de jeunesse. […] Plus tard, la jeunesse se faisant sérieuse, nous courons encore, mais de manière à ne le devancer que de peu : nous l’accompagnons. […] Sa jeunesse poétique a été malheureusement amoindrie par le pédantisme du parti classique, mais maintenant le voilà qui a Le Globe pour lui : il a donc partie gagnée. » Victor Hugo, étant allé remercier M.  […] Cela n’eût point été en mon pouvoir, et d’ailleurs, dès ma jeunesse, j’avais toujours compris la critique autrement. […] — J’allais oublier le dernier mot qui le résume : l’homme de France le plus ennuyeux t » — On m’assure qu’il n’a pas toujours été tel et que dans sa jeunesse il a pu faire illusion même à de bons juges.

239. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Roederer. — III. (Fin.) » pp. 371-393

On aurait peine à se figurer le désordre et la confusion où était l’enseignement de la jeunesse en 1800 : toutes les méthodes faciles, toutes les fantaisies philosophiques et philanthropiques s’étaient donné carrière sous le Directoire ; il s’agissait de remettre la règle et un peu de sévérité dans cette licence et cette bigarrure. […] Dès sa jeunesse et du temps qu’il était à Metz, il s’était déjà occupé de Louis XII ; il y revient en vieillissant, et il fait de lui son héros de prédilection et son roi. […] Les premières années de la jeunesse de Louis XIV lui causaient un peu de chagrin : on revenait à la méthode de François Ier, aux maîtresses brillantes. […] Dans notre pays d’égalité, et sous cette forme démocratique qui séduit la jeunesse, il s’agit moins encore, selon Roederer, de telles ou telles garanties positives que de chances d’élévation libre et de distinctions accessibles à tous. Ce que rêve et ce qu’ambitionne au fond chaque jeunesse, ce n’est pas un niveau commun qui fasse limite, « c’est une carrière ouverte à l’émulation de tous les talents pour atteindre à toutes les supériorités ».

240. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Œuvres de Louise Labé, la Belle Cordière. »

Il est certain qu’elle eut une jeunesse fort émancipée et à demi virile, et qu’elle trancha de l’amazone ; mais ensuite, et quelles que fussent les chansonnettes et les propos légers, tels que ceux que nous venons de lire, il paraît bien qu’elle vécut à Lyon fort considérée, fort entourée de tout ce qu’il y avait de mieux dans la ville, et de tout ce qui y passait de voyageurs savants et distingués qui se faisaient présenter chez elle : car elle avait une maison, un salon ; on y faisait de la musique, on y lisait des vers, on y causait de sciences et de belles-lettres. […] La Boétie, dans sa première et sa plus verte jeunesse, tout échauffé d’une belle et noble ardeur, et voulant avertir celui qui le lira qu’il n’emprunte à personne, ni à Pétrarque, ni à Properce ni à d’autres, l’expression de ses soupirs, s’écriait de la sorte, avec plus de vigueur et d’âme que d’harmonie : Toi qui oys mes soupirs, ne me sois rigoureux Si mes larmes à part toutes miennes je verse, Si mon amour ne suit en sa douleur diverse Du Florentin transi les regrets langoureux, Ni de Catulle aussi, le folâtre amoureux, Qui le cœur de sa dame en chatouillant lui perce, Ni le savant amour du migrégeois64 Properce : Ils n’aiment pas pour moi, je n’aime pas pour eux. […]   Enfin, il y a ce dernier sonnet d’elle, qui est également un vœu de mort, non plus de mort au sein du bonheur, mais de mort plus triste et plus terne, quand il n’y a plus pour le cœur de bonheur possible, plus un seul reste de jeunesse et de flamme : Tant que mes yeux pourront larmes épandre, A l’heur65 ; passé avec toi regretter, Et qu’aux sanglots et soupirs résister Pourra ma voix, et un peu faire entendre ; Tant que ma main pourra les cordes tendre Du mignard luth pour tes grâces chanter ; Tant que l’esprit se voudra contenter De ne vouloir rien fors que toi comprendre ; Je ne souhaite encore point mourir : Mais quand mes yeux je sentirai tarir, Ma voix cassée et ma main impuissante, Et mon esprit en ce mortel séjour Ne pouvant plus montrer signe d’amante, Prierai la mort noircir mon plus clair jour. Et voilà de ces cris qui font vivre un nom de poète et qui ont leur écho, sans faillir, de génération en génération, tant qu’il y aura recommencement de printemps et de jeunesse ! […] Près de nous la Jeunesse a passé les mains vides, Sans nous avoir fêtés, sans nous avoir souri.

241. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Victor Hugo — Victor Hugo en 1831 »

Certes, plus d’un vieillard sans flamme et sans cheveux, Tombé de lassitude au bout de tous ses vœux, Pâlirait, s’il voyait, comme un gouffre dans l’onde, Mon âme où ma pensée habite comme un monde, Tout ce que j’ai souffert, tout ce que j’ai goûté, Tout ce qui m’a menti comme un fruit avorté, Mon plus beau temps passé sans espoir qu’il renaisse, Les amours, les travaux, les deuils de ma jeunesse, Et quoique encore à l’âge où l’avenir sourit, Le livre de mon cœur à toute page écrit ! […] Longtemps mêlée à ces orages des partis, à ces cris d’enthousiasme ou d’anathème, sa jeunesse n’avait pourtant rien à rayer de son livre ni à désavouer de sa vie ; le témoignage qu’il se rendait dans la pièce citée plus haut, il peut le redire après comme avant ; nul ne lui contestera ce glorieux jugement porté par lui sur lui-même. […] Tout s’embrasa, se tordit, se fondit intimement dans son être au feu vulcanien des passions, sous le soleil de canicule de la plus âpre jeunesse, et il en sortit cette nature d’un alliage mystérieux, où la lave bouillonne sous le granit, cette armure brûlante et solide, à la poignée éblouissante de perles, à la lame brune et sombre, vraie armure de géant trempée aux lacs volcaniques. […] Lebrun, il écrivait : « En général, une chose nous a frappé dans les compositions de cette jeunesse qui se presse maintenant sur nos théâtres ; ils en sont encore à se contenter facilement d’eux-mêmes ; ils perdent à ramasser des couronnes un temps qu’ils devraient consacrer à de courageuses méditations ; ils réussissent, mais leurs rivaux sortent joyeux de leurs triomphes. […] Mais nous avons bientôt pensé que, même au milieu des plus enivrantes acclamations dramatiques, il y aurait toujours dans l’âme de Victor Hugo un lyrisme caché, plus sévère, plus profond peut-être, plus vibrant encore par le refoulement, plus gravement empreint des images dispersées et des émotions d’une jeunesse irréparable.

242. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « Les poètes décadents » pp. 63-99

Les poètes décadents Ce fut à l’hôpital Tenon, où la jeunesse lettrée se rendait, comme en pèlerinage, auprès de Paul Verlaine, que je fis, un dimanche de l’été 1886, la connaissance d’Anatole Baju. […] Sa fréquentation devait me révéler la misère en redingote de ces éducateurs de la jeunesse, instruits, intelligents pour la plupart, insuffisamment rémunérés et que je voyais descendre, en dehors de leur service, à des travaux bas et vulgaires, pour gagner de quoi équilibrer leur maigre budget. […] Il passa un moment, auprès des foules, pour diriger l’élite de la jeunesse. […] Et il rendit coup pour coup. » *** On n’attendait pas d’écrivains, échauffés de leur jeunesse et de leurs convictions, persuadés de leur bon droit, des procédés de polémique d’une courtoisie de talons rouges. […] Cette abondance dans la fantaisie, cette liberté d’allures, ce débordement de malice espiègle et de jeunesse, cette vivacité française, était mal vue des symbolistes pontifiants.

243. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Sainte-Beuve. Les Poésies de Joseph Delorme, Les Consolations, les Pensées d’août. »

Elle est dans Le Soir de la jeunesse, qui est la méfiance de l’amour ; dans La Contredanse, ce dialogue de la tristesse au sein du plaisir ; dans la Promenade, qui est la caractérisation la plus vive et la plus pénétrante de la manière de ce poète pathologique, que M.  […] On pourra dire tout cela, mais moi je dis : C’est le xixe  siècle et sa jeunesse ; c’est le xixe  siècle, non pas pris, — et c’est là l’originalité du Joseph Delorme, — dans les hauteurs sociales où tout s’exceptionnalise, mais dans le niveau commun, dans l’universalité, dans le torrent qui passe à travers la pleine route ! […] Sainte-Beuve, il est un élève en médecine, que parce qu’il avait, malade, comme toute la jeunesse de sa génération, écrit, en vers neufs et surprenants, une cruelle et magnifique nosographie sociale. […] le beau coup de vent de la jeunesse, bouton d’émétique qui se remettait à tacher la tempe ou le front, de son corail enflammé, et qui disait de temps à autre que tout le poison, dont on se croyait débarrassé, n’était pas encore sorti ! […] Sainte-Beuve, romantique de la première heure, aurait dû, s’il avait continué d’aller vaillamment dans le sens de sa jeunesse, monter au plus haut dans l’outrance de ses facultés et de sa manière.

244. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section III. Des ressources qu’on trouve en soi. — Chapitre premier. Que personne à l’avance ne redoute assez le malheur. »

Ce mot terrible, le malheur, s’entend dans les premiers jours de la jeunesse, sans que la pensée le comprenne. […] Des hommes froids, qui veulent se donner l’apparence de la passion, parlent du charme de la douleur, des plaisirs qu’on peut trouver dans la peine, et le seul joli mot de cette langue, aussi fausse que recherchée, c’est celui de cette femme qui, regrettant sa jeunesse, disait : c’était le bon temps, j’étais bien malheureuse.

245. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Rodenbach, Georges (1855-1898) »

. — La Jeunesse blanche (1885). — Du silence (1888). — L’Art en exil (1889). — Le Règne du silence (1891). — Bruges-la-Morte (1892). — Le Voyage dans les yeux (1893). — Le Voile, un acte, en vers (1894). — Musée de béguines (1894) […] Sa fin prématurée, d’ailleurs, vient, témoigner pour lui-même, et aujourd’hui je puis penser qu’après tout j’ai pu mal le comprendre… Toute l’œuvre de Rodenbach atteste sa préoccupation de mourir jeune et la crainte de ne rien laisser de sa vie et de ses émotions. « Seigneur, s’écriait-il déjà aux pages de la Jeunesse blanche, donnez-moi cet espoir de revivre Dans la mélancolique éternité du livre. » [Mercure de France (1898).]

246. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — S — Saint-Georges de Bouhélier (1876-1947) »

Tout un réveil met debout la jeunesse ; elle refuse de s’enfermer davantage dans la tour d’ivoire, où ses aînés se sont morfondus si longtemps, en attendant que sœur Anne, la vérité de demain, parût à l’horizon. […] Gustave Charpentier Je salue le jeune prophète en qui s’affirment les espérances, toute l’âme généreuse et volontaire de la jeunesse présente.

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