On signale partout des libres penseurs, des audaces et des imaginations effrénées. […] L’imagination vigoureuse suppose le faible jugement ! […] L’imagination, parmi nous, a d’autres ennemis à redouter que ses propres excès. […] L’imagination du poète suppose une forte intuition de l’absolu. […] Or l’imagination est plus voisine du cœur que le pur entendement.
L’imagination ne se salit pas avec lui, elle s’enjoue, si le seigneur français me permet cette mauvaise expression dans sa langue. […] L’Arioste abuse de la complaisance de l’imagination qui le possède, et risque d’impatienter la complaisance de son lecteur. […] Nous voici arrivés au cinquième chant ; c’est, selon, moi le chef-d’œuvre de l’imagination de l’Arioste. […] Ce nom l’a inspiré, c’est l’amour qui a tenu sa plume ici, ce n’est plus seulement sa belle imagination. […] Il faut vous laisser ces charmants bocages et ces charmants fantômes dans l’imagination pour enchanter cette nuit vos rêves de quinze ans !
Elle reçoit des idées de l’imagination et des sens, elle en contrôle la valeur, elle en arrête définitivement l’expression. […] Notre imagination, à force d’être subordonnée, est quelquefois timide. […] Si l’imagination, dans notre pays, changeait de rôle, et si d’auxiliaire de la raison elle devenait maîtresse, nous perdrions la raison de Descartes et de Pascal, sans acquérir les grâces de l’imagination de Platon. […] L’inversion sied bien aux peuples chez qui l’imagination et la sensibilité dominent la raison. […] La raison, qui est le lien commun de tous les hommes, est estimée au-dessus de l’imagination, qui les disperse et les isole à l’infini.
Ils se sont surtout appliqués à défendre les droits de l’imagination et l’initiative du génie. […] Il a cherché dans les œuvres des grands écrivains les beautés durables de préférence aux beautés passagères, les vérités du bon sens de préférence aux hardiesses de l’imagination, des modèles et des règles plutôt que des curiosités piquantes, le vrai plus que l’agréable, le certain plus que le nouveau. […] Il résulte de ces principes que tout ce qui est mode, caprice, tournure particulière d’imagination, esprit d’un temps, imitation factice, que tous ces éléments étrangers au beau, qui l’imitent ou qui le masquent, doivent être écartés par la critique littéraire, celle-ci ne devant s’attacher qu’à ce qui est humain, général et vrai. […] Peut-être pourrait-on lui reprocher de ne pas faire la part assez grande à l’imagination dans les ouvrages d’esprit. […] L’imagination (et j’entends par là tout mouvement donné à la pensée) n’est donc pas une condition accessoire ou subordonnée dans les œuvres littéraires : elle y est essentielle, comme la couleur en peinture.
Mais les retours que les interlocuteurs font sur leurs sentimens et sur ceux des autres, les reflexions du poëte, les recits, les descriptions, en un mot tout ce qui n’est pas sentiment, veut autant que la nature du poëme et la vrai-semblance le permettent, nous être répresenté sous des images qui forment des tableaux dans notre imagination. […] Mais, comme je viens de le dire, il faut qu’hors de ces deux occasions le stile de la poësie soit rempli de figures qui peignent si bien les objets décrits dans les vers, que nous ne puissions les entendre sans que notre imagination soit continuellement remplie des tableaux qui s’y succedent les uns aux autres, à mesure que les periodes du discours se succedent les unes aux autres. […] Ces vers tracent cinq tableaux dans l’imagination. […] Un des plus grands partisans du raisonnement severe que nous aïons eu, le pere Mallebranche, a écrit contre la contagion des imaginations fortes, dont le charme pour nous séduire consiste dans leur fécondité en images, et dans le talent qu’elles ont de peindre vivement les objets. […] Ce discours est rempli d’images et de peintures, et c’est à notre imagination qu’il parle contre l’abus de l’imagination.
Quel ébranlement n’en dut pas recevoir l’imagination de Shakespeare ! […] Quel éclat d’esprit, d’imagination, de poésie, employé à faire oublier la monotonie de ces cadres romanesques ! […] Émus à l’aspect de ce que nous serions capables d’éprouver, nous y livrons notre imagination sans avoir rien à demander à notre volonté. […] Alors l’imagination est refroidie et troublée ; le spectateur se refuse à un mouvement dont on le détourne après lui avoir demandé de s’y livrer. […] Il faut que la raison soit contente en même temps que l’imagination sera occupée.
C’est un esprit de bon sens, mais de gros sens ; de main rude, de force réelle, mais commune, qui a du tempérament et quelquefois de la chaleur, mais sans aucune délicatesse, sans aucune nuance et sans aucune imagination dans le style, ce Boccace à revers… Ah ! Boccace, l’autre Boccace, c’est-à-dire le vrai, est, lui, l’imagination la plus italienne qui ait jamais existé parmi les plus fines imaginations d’Italie, ces rosés de l’Arno ! Fleur intarissable de fraîcheur et de parfum, dont La Fontaine fut l’abeille, Boccace est une imagination d’une telle légèreté, dans le sens de l’air et de la lumière, que La Fontaine, son imitateur, le buveur en cette coupe diaphane, que notre incomparable La Fontaine, malgré ses dons souverains de grâce et de langage, semble grossier dans sa gaieté charmante, quand on entend son rire gaulois et qu’on le compare au sourire éthéré de la fantaisie de Boccace ! […] Ajouter des faits à des faits, ce n’est pas plus de l’imagination que d’ajouter des zéros à des zéros. […] IV Il est donc évident qu’il n’est point un Boccace, qu’il n’a aucun des dons exquis de ce roi des conteurs dont le style tient de la musique et l’imagination de l’arc-en-ciel.
La raison doit en être que l’esprit humain, infini de sa nature, étant resserré dans la grossièreté de ses sens, ne peut exercer ses facultés presque divines qu’en étendant les idées particulières par l’imagination. […] Dans ce travail de l’esprit, les peuples, qui à cette époque étaient pour ainsi dire tout corps sans réflexion, furent tout sentiment pour sentir les particularités, toute imagination pour les saisir et les agrandir, toute invention pour les rapporter aux genres que l’imagination avait créés (generi fantastici), enfin toute mémoire pour les retenir. […] Chez les Latins, mémoire est synonyme d’imagination (memorabile, imaginable, dans Térence) ; ils disent comminisci pour feindre, imaginer ; commentum pour une fiction, et en italien fantasia se prend de même pour ingegno. La mémoire rappelle les objets, l’imagination en imite et en altère la forme réelle, le génie ou faculté d’inventer leur donne un tour nouveau, et en forme des assemblages, des compositions nouvelles.
La vie d’imagination, disait-elle, avait été toute sa vie d’enfant. […] C’est là que se révélerait le grand défaut de cette belle imagination créatrice. […] Il en était de même dans le domaine de son imagination. […] Elle en a été heureuse, comme du succès d’un fils chéri de son imagination. […] C’était une âme bourgeoise avec une imagination byronienne.
Les deux langues ne sont donc pas faites pour se traduire réciproquement ; ce n’est pas le même naturel, ni le même tour d’imagination. […] Il y avait encore de l’élévation dans les esprits ; et l’imagination se complaisait sans péril aux souvenirs du passé. […] L’imagination toujours mélancolique des Anglais retenait ces fables du Nord comme un souvenir national. […] Enfin il est d’autres pièces qui sont comme les Saturnales de cette imagination si désordonnée et si libre. […] Jamais poète n’a osé, dès l’abord, saisir l’imagination par de si grandes fictions.