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514. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « La princesse des Ursins. Ses Lettres inédites, recueillies et publiées par M. A Geffrot ; Essai sur sa vie et son caractère politique, par M. François Combes » pp. 260-278

Combes avait trouvées de son côté au Dépôt de la guerre et lui avait communiquées, les a fait précéder d’une introduction, les a entourées de notes, d’éclaircissements de tout genre. […] Combes, repasser sur les différentes phases de la carrière politique de Mme des Ursins pendant ses treize années d’influence ou de domination en Espagne : il a très bien distingué les temps, démêlé les intrigues selon l’esprit de chaque moment, montré Mme des Ursins représentant dès l’abord le parti français, mais le parti français modéré qui tendait à la fusion avec l’Espagne, et combattant le parti ultra-français représenté par les d’Estrées : — ce fut sa première époque : — puis, après un court intervalle de disgrâce et un rappel en France, revenue triomphante et autorisée par Louis XIV, elle dut pourtant, malgré ses premiers ménagements pour l’esprit espagnol, s’appliquer à briser l’opposition des grands et travailler à niveler l’Espagne dans un sens tout monarchique, antiféodal ; c’était encore pratiquer la politique française, le système d’unité dans le gouvernement, et le transporter au-delà des Pyrénées : — ce fut la seconde partie de sa tâche. — Mais quand Louis XIV, effrayé et découragé par les premiers désastres de cette funeste guerre de la succession, paraît disposé à abandonner l’Espagne et à lâcher son petit-fils, Mme des Ursins, dévouée avant tout aux intérêts de Philippe V et du royaume qu’elle a épousé, devient tout Espagnole pour le salut et l’intégrité de la couronne, rompt au-dedans avec le parti français, conjure au dehors la défection de Versailles, écrit à Mme de Maintenon des lettres à feu et à sang, s’appuie en attendant sur la nation, et, s’aidant d’une noble reine, jette résolument le roi dans les bras de ses sujets. […] Combes a trouvé les lettres au Dépôt de la guerre : elles mériteraient d’être publiées.

515. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Mémoire de Foucault. Intendant sous Louis XIV »

Et voilà comment se conduisait et comment finissait gaiement cette boutade de guerre, cette visite à main armée avec ou sans violons, une algarade ! […] Il y en a eu beaucoup qui, à l’approche des gens de guerre, ont abjuré sans les avoir vus. […] J’y ai envoyé des gens de guerre, qui les ont réduits.

516. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Anthologie grecque traduite pour la première fois en français, et de la question des anciens et des modernes, (suite et fin.) »

» Or, on était en 1762, à la fin de la guerre de Sept-Ans. […] Puis, après une pause sérieuse de quelques minutes, il se fit lire le Traité qu’il écouta d’un bouta l’autre avec uns grande attention, et il reprit assez de force pour avoir la satisfaction suprême de donner « l’approbation d’un homme d’État mourant (ce furent ses propres paroles) à la plus glorieuse guerre et à la plus honorable paix que la nation eût jamais vue. » Et c’est ainsi que se révèle dans un noble exemple le commerce familier que l’aristocratie anglaise au dernier siècle n’avait cessé d’entretenir avec l’Antiquité grecque, et aussi la générosité vivifiante de sentiments et de pensées dont Homère est la source. […] Les problèmes en art, en science, en industrie, en tout ce qui est de la guerre ou de la paix, se posent pour nous tout autrement : nous avons l’étendue, la multitude, l’océan, tous les océans devant nous, des nations vastes, le genre humain tout entier : nous sondons l’infini du ciel ; nous avons la clef des choses, nous avons Descartes, et Newton, et Laplace ; nous avons nos calculs et nos méthodes, nos instruments en tout genre, poudre à canon, lunettes, vapeur, analyse chimique, électricité : Prométhée n’a cessé de marcher et de dérober les dieux.

517. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre I. La littérature pendant la Révolution et l’Empire — Chapitre II. L’éloquence politique »

C’est l’idée qui lui a dicté son discours sur le droit de paix et de guerre, le dernier de ses grands triomphes oratoires. […] On peut en prendre une idée dans son Discours sur le droit de paix et de guerre, où il combattait Mirabeau et la prérogative royale : c’est un rappel aux principes, une déduction serrée, sans écarts et sans éclats ; aucune emphase, ni métaphores, ni comparaisons, ni allusions ambitieuses ; seulement parfois il allègue une autorité, telle que « l’autorité bien imposante de M. de Mably ». […] On se sent tout près de Hugo, bien plus près de Hugo que des Montagnards et du Conciones quand on lit des phrases comme celles-ci : « La victoire marchera au pas de charge ; l’aigle… volera de clocher en clocher jusqu’aux tours de Notre-Dame. » Ou bien : « J’en appelle à l’histoire : Elle dira qu’un ennemi qui fit vingt ans la guerre au peuple anglais, vint librement, dans son infortune, chercher un asile sous ses lois… Mais comment répondit l’Angleterre à une telle magnanimité ?

518. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre I — Chapitre quatrième »

Non ; c’est le présent le plus étroit, c’est la vie au jour le jour dans un pays partagé entre cinq ou six peuples qui luttent dans d’interminables guerres contre la force des choses qui veut en faire un seul peuple. […] Elle est ravagée par deux siècles de guerres effroyables, tantôt avec l’Angleterre, qui lui arrache un moment sa nationalité et lui donne pour roi un régent anglais ; tantôt avec son ancienne organisation féodale : elle ne produit point d’homme de génie dans les lettres. Le génie à cette époque se montre là où la France en a le plus besoin : il est dans la politique et dans la guerre.

519. (1886) De la littérature comparée

En effet, Messieurs, il y a presque toujours eu état de guerre entre ce que je nommerai la littérature militante et la haute culture que représente l’enseignement universitaire. […] État de guerre, je le répète, dans tous les pays le même, et partout également fâcheux. […] C’est à travers Benoît de St-More que Henri de Veldeke écrit son Énéide et Herbort de Frizlar sa Guerre de Troie, et vous savez de quelles sources invraisemblables, de quels mystérieux Dictys de Crète et Darès le Phrygien le poète normand tient lui-même ses renseignements.

520. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Monsieur Droz. » pp. 165-184

Cependant la guerre éclatait, et la jeunesse courait aux frontières. […] Bien des iniquités violentes, bien des guerres par exemple, qui étaient très faciles autrefois, deviennent presque impossibles aujourd’hui devant le contrôle du sentiment et de l’intérêt universel. […] » Ce serait trop dire que d’appliquer aujourd’hui cette prophétie qui ferait sourire ; mais, à voir néanmoins les difficultés que les guerres générales éprouvent maintenant à éclater, on doit reconnaître que les doux ont gagné leur part d’influence dans le gouvernement de la terre.

521. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Mémoires et correspondance de Mallet du Pan, recueillis et mis en ordre par M. A. Sayous. (2 vol. in-8º, Amyot et Cherbuliez, 1851.) — II. » pp. 494-514

Exposant dans son Mercure britannique, peu de mois avant sa mort, en janvier de l’an 1800, le caractère de la grande commotion qui allait continuer de peser sur le nouveau siècle et qui ouvrait une époque de plus dans l’histoire des vicissitudes humaines, il y montrait en vrai philosophe que le caractère de cette Révolution portait avant tout sur la destruction de toutes les distinctions héréditaires préexistantes, que c’était au fond une guerre à toutes les inégalités créées par l’ancien ordre social, une question d’égalité, en un mot : « C’est sur ce conflit, ajoutait-il, infiniment plus que sur la liberté, à jamais inintelligible pour les Français, qu’a porté et que reposera jusqu’à la fin la Révolution. » Espérons que, même en tenant moins à la liberté qu’il ne faudrait (ce qui est trop évident), nous la comprendrons pourtant assez pour démentir un pronostic si absolu et si sévère. […] … Votre continent me fait horreur avec ses esclaves et ses bourreaux, ses bassesses et sa lâcheté ; il n’y a que l’Angleterre où l’on puisse écrire, parler, penser et agir : voilà ma place, il n’y en a plus d’autre pour quiconque veut continuer la guerre. […] Il y dressa aussitôt sa batterie de guerre, son Mercure britannique, publication destinée à combattre avec suite, et par des tableaux mêlés de discussions, la politique du Directoire : « L’expérience est perdue, disait Mallet, si on ne la grave pas au moment même par des écrits qui en fixent l’impression. » La passion déclarée et le parti pris de l’attaque n’empêchent point dans ce Mercure la sagacité et, jusqu’à un certain point, l’impartialité des jugements.

522. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Portalis. Discours et rapports sur le Code civil, — sur le Concordat de 1801, — publiés par son petit-fils — II. » pp. 460-478

Il établit les maximes hospitalières consacrées chez tout ce qui n’est point barbare ; il y joint ses aphorismes habituels de justice et de civilisation : « Il faut faire, en temps de paix, le plus de bien, et, en temps de guerre, le moins de mal qu’il est possible. » Il cite à l’appui la belle réponse de ce gouverneur espagnol de La Havane au capitaine de vaisseau anglais, qui, au moment du naufrage, jeté dans le port par la tempête, vient se livrer à lui pendant la guerre de 1746 : « Si nous vous eussions pris dans le combat, en pleine mer ou sur nos côtes, votre vaisseau serait à nous, vous seriez nos prisonniers ; mais, battus par la tempête et poussés dans ce port par la crainte du naufrage, j’oublie et je dois oublier que ma nation est en guerre avec la vôtre.

523. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Les Faux Démétrius. Épisode de l’histoire de Russie, par M. Mérimée » pp. 371-388

Dans l’histoire romaine, il a, pour préluder, choisi La Guerre sociale (1844), et il a présenté par ce côté peu expliqué jusqu’ici le duel gigantesque de Marius et de Sylla. […] Mérimée a de même été très original dans son Essai sur la guerre sociale ; il a été moins heureux, selon moi, pour son Catilina. Dans le premier sujet, plein d’actions coupées et de guerres, il a trouvé des caractères comme il les aime, il a exhumé et peint quelques-uns des défenseurs énergiques des nationalités italiennes : dans le second sujet, où il fallait entrer dans le Sénat et descendre dans le Forum, il a rencontré, en première ligne, le personnage de Cicéron, et c’est ici que, repoussé par le dégoût des lieux communs, il n’a pas rendu assez de justice à cet homme dont on a dit magnifiquement qu’il était le « seul génie que le peuple romain ait eu d’égal à son empire ».

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