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416. (1854) Préface à Antoine Furetière, Le Roman bourgeois pp. 5-22

Ce n’est pas sans étonnement que nous voyons, dans le Discours préliminaire de la dernière édition du Dictionnaire de l’Académie française, le secrétaire perpétuel reproduire contre l’auteur du Dictionnaire universel cette vieille accusation d’avoir dérobé le travail de ses confrères. […] V., de l’Académie française et de l’avocat L. […] Titon du Tillet, qui, dans son Parnasse français, a consacré de si pompeuses notices à tant d’écrivains médiocres, se borne à quelques lignes et se met à l’abri derrière les on dit, sans oser remonter aux sources. […] Le roman de Furetière, peinture aussi exacte que vive des habitudes et des travers de toute une classe de la société, est un tableau ; c’est le premier roman d’observation qu’ait produit la littérature française. […] Nous nous féliciterons, quel qu’en soit le succès, d’avoir remis en lumière un des livres les plus curieux, et les plus estimables, comme aussi des plus injustement oubliés, de la littérature française.

417. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Jules Janin » pp. 137-154

Il suffisait tout simplement de dire pour sa gloire la place que Janin a eue et gardera dans la littérature française, et de ne pas le déplacer pour lui donner une autre place qui n’est pas la sienne. […] Cuvillier-Fleury qui parle), — c’est le Roi de la phrase sonore, colorée, aérienne, — c’est le Roi de la phrase pour la phrase, du style pour le style, pour l’amour de la langue française qu’il adorait et qui le lui rendait bien, — le Roi du coloris, mettant sur des riens des touches d’Albane », eh bien, à la bonne heure ! […] Il aurait jugé cette vieille institution, qui n’a plus de sens aujourd’hui — si éventrée qu’on y fourrera des femmes demain — et qui ne tente plus que la petite et sotte vanité française, infatigablement éprise des distinctions, même bêtes, malgré ses affreux mensonges sur l’égalité… Il eût vu cela. […] À cet attardé du xviie  siècle, l’Académie française paraissait le palais des lettres. […] il me plaît tant, cet homme de lettres et d’esprit, et d’esprit français, que j’ai essayé de replacer aujourd’hui dans la lumière de son mérite, qui est immense et qui est charmant, et dont la nature est de passer, — de n’être pas plus immortel que les fleurs qui passent, — il me plaît tant que j’arrête ici mon chapitre !

418. (1936) Réflexions sur la littérature « 1. Une thèse sur le symbolisme » pp. 7-17

Plus spécialement, il fallait ici avoir réfléchi beaucoup sur l’histoire et sur la technique du vers français. […] Les frères Leblond ont pu écrire un livre, l’Histoire de la société française sous la troisième république, d’après les seuls romans. […] Mais un vers français, fût-il régulier, ne se résout plus aujourd’hui en un décompte de syllabes. […] De Souza, dans son livre Du rythme en français, que devrait bien lire M.  […] Le vers libre n’est vers qu’en tant qu’il épouse, par son accentuation ou ses homophonies, des courants naturels et des habitudes ancestrales du français.

419. (1894) Critique de combat

Il nous est présenté en français par un autre professeur de philosophie, M.  […] Ziegler passe absolument sous silence le socialisme français. […] Arrière tous ceux qui tendent à faire du français un grimoire ! […] L’argot de Paris à la rescousse, si le français courant n’y suffit pas ! […] Avoir des idées et des sentiments humains, c’est être Français, essentiellement Français.

420. (1888) Portraits de maîtres

En cette occasion, il vit juste et sut tourner nos regards vers un poète encore mal connu des Français. […] Elle porta sur quelques classiques français et italiens, mais beaucoup aussi sur les pseudo-classiques du siècle dernier. […] Comment comprendre que, jusque vers 1832, le peuple français eût oublié le nom même de la République ? […] Elles décidèrent l’élection de M. de Laprade à l’Académie française où il vint remplacer Alfred de Musset en 1857. […] Et ce que l’histoire a fait de plus grand, la nation française, c’est là ce que l’Allemagne jalouse veut détruire en un jour.

421. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLIIe entretien. Madame de Staël »

Cette renaissance s’appelait la philosophie française ; chacun y empruntait ou y apportait son rayon. […] La révolution française, prête à éclater dans les actes, fermentait déjà partout dans les âmes. […] Elle écrivit sous le voile de l’anonyme une défense de la reine Marie-Antoinette, adressée aux Français. […] Un tel mystère honore le peuple français : on a craint son indignation, on peut donc encore espérer sa justice. […] Son antipathie contre madame de Staël tenait moins à la crainte qu’il avait de son génie qu’à sa haine contre la révolution française.

422. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. Taine » pp. 305-350

Il était peut-être né léger, dans l’acception française et spirituelle du mot, mais l’étude, le travail acharné, l’ambition scientifique, l’ont fait lourd. […] Taine, aux yeux de qui Satan est un fantoche, la très logique Révolution française. […] Taine des Philosophes français, le matérialiste de fond et de la première heure, et cela devait être, du reste. […] Qui donc, parmi les admirateurs de la Révolution française ou parmi ses haïsseurs éternels et implacables, s’attendait à un tel livre, venant d’une telle main ? […] Il est lourd nécessairement, comme toute masse est lourde ; car, de documents et de faits, il en est une qui sera désormais l’assise indispensable de toute histoire qu’on voudra écrire de la Révolution française.

423. (1902) Le critique mort jeune

Le titre seul de son précieux volume sur « l’Esthétique de la langue française » valait tout un programme. […] Un petit essai sur les jésuites dans la littérature française ne laisserait pas d’être piquant. […] De formation purement littéraire, comme les trois quarts des Français « cultivés », M.  […] Or, le conservateur français est un être singulier. […] Et l’athéisme des Français cultivés, l’athéisme classique était conservateur.

424. (1874) Premiers lundis. Tome II « Dupin Aîné. Réception à l’Académie française »

Dupin Aîné Réception à l’Académie française 31 août 1832. […] Cuvier à l’Académie française ; c’était une situation piquante et qui promettait de rompre la monotonie de plus en plus fastidieuse de ces sortes de solennités. […] Ce suffrage libre des égaux auquel il attache, et avec raison, tant de prix, lui a fait dire que les trois honneurs qu’il se glorifiait le plus d’avoir reçus dans sa vie étaient : 1° sa charge de bâtonnier de l’ordre des avocats, après trente ans de profession ; 2° sa mission de député du département qui l’avait vu naître ; 3° sa qualité enfin de membre de l’Académie française. […] Dupin s’est terminé par un avertissement aux gens de lettres et aux artistes de tout espérer d’un prince qui n’a cherché, dans l’exil, d’autre ressource que celle de devenir un modeste professeur ; d’un prince qui sait toutes les langues de l’Europe, et qui pourrait parler à chaque ambassadeur la sienne, s’il n’aimait mieux parler français à tous.

425. (1902) Le culte des idoles pp. 9-94

Ses ennemis étaient ceux du génie français. […] Je ne crois pas qu’il y ait trace dans la pensée moderne française d’une influence pareille. […] Taine comme un esprit français ; il me semble qu’un professeur de Tübingen ne procéderait pas autrement ; c’est même, je crois, la raison pour laquelle on le goûte si fort à l’étranger. […] On peut dire que Flaubert a empoisonné pendant quarante ans la littérature française et des écrivains qui valaient mieux que lui. […] Histoire de l’Esprit Français.

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