Ce fond continu de la vieille Rome au sein de la nouvelle s’est empreint jusque dans les formes et dans l’attitude : la pensée du Vatican en a gardé aussi des allures. […] Sans entrer dans le fond du débat, et en laissant aux maîtres le soin, s’il y a lieu, de relever le gant, il faut reconnaître que toute cette forme de discussion est de bonne guerre, de bonne et légitime méthode. […] A une démocratie présente et imminente, dont les États-Unis nous offraient à leur manière l’active, la grandiose, mais assez terne image, il était piquant de restituer pour vis-à-vis l’ancien fond monarchique dans son relief le plus coloré. […] En Grèce, en Italie, telle bourgade, telle petite ville, étaient déjà chrétiennes ; la foule se rendait dans les basiliques transformées en églises ; les préaux, les chemins, étaient semés de croix ; pourtant, au fond du bois, au détour d’un angle caché par les chênes verts, sur le bord du ruisseau ou du lac, on voyait se mirer paisiblement dans l’eau la grotte des Nymphes, grande et grosse roche, ronde par le dehors, au dedans de laquelle se cachaient quelques statuettes en pierre de Naïades ou de Napées, les bras nus,… les cheveux épars sans tresses,… le visage riant et la contenance telle comme si elles eussent ballé ensemble 6.
J’avais pardonné cependant, quand je me rappelai que ce même écrivain, toujours pur selon lui et ses amis, avait fait la cour à l’empereur pour obtenir la place de secrétaire d’ambassade à Rome, sous le cardinal Fesch ; qu’il avait ensuite été le favori de M. de Fontanes, favori lui-même de la princesse Élisa ; qu’il passait son temps à Morfontaine, dans l’intimité de cette famille couronnée ; qu’il avait obtenu par elle l’emploi de ministre plénipotentiaire en Valais ; qu’il avait, il est vrai, donné sa démission après le meurtre du duc d’Enghien ; mais que, dans sa harangue à l’Académie, peu de temps après, il avait proclamé Napoléon le nouveau Cyrus, en termes d’un poétique enthousiasme ; le fond de mon cœur n’était pas sans quelque scrupule sur l’immaculée pureté du bourbonisme de M. de Chateaubriand. […] C’était souvent beau de forme et très-aventuré de fond. […] est comme ces sortes d’arbres qui ne donnent leur baume pour les blessures des hommes, que lorsque le fer les a blessés eux-mêmes. » Et encore, pour exprimer qu’il n’est point de cœur mortel qui n’ait au fond sa plaie cachée : « Le cœur le plus serein en apparence ressemble au puits naturel de la savane Alachua : la surface en paraît calme et pure ; mais, quand vous regardez au fond du bassin, vous apercevez un large crocodile, que le puits nourrit dans ses eaux. » Les funérailles d’Atala sont d’une rare beauté et d’une expression idéale.
Pareils à ces Juifs dont parle Pascal, qui gardaient d’autant plus fidèlement le dépôt des divines promesses, qu’ils en comprenaient moins le sens, les catholiques, du fond de leur ignorance, avaient défendu la tradition sans la comprendre, par les vaines arguties de la scolastique et par la violence. […] Pour le fond des récits, comme pour l’arrangement, Marguerite cherche visiblement à ressembler à Boccace. […] Par un tour d’esprit charmant que rend d’autant plus malin beaucoup de bonté au fond, dame Oysille, après un récit où figure deux cordeliers libertins, s’écrie : « Mon Dieu, ne serons-nous jamais hors de ces contes de moines34 ? […] Aussi, du fond de sa prison fait-il des vers contre ses juges, le front levé, et du ton d’un honnête homme opprimé par les dévots.
La seule différence à remarquer entre La Bruyère et les grands écrivains de son siècle, et qui ne tienne pas à la matière et au dessein de son ouvrage, c’est qu’en certains endroits le fond n’y égale pas le travail de l’expression. Suard dit avec raison « qu’en lisant avec attention les Caractères de La Bruyère, il semble qu’on est moins frappé des pensées que du style, et que les tournures et les expressions paraissent avoir quelque chose de plus brillant, de plus fin, de plus inattendu, que le fond des choses mêmes. » Mais il a tort d’ajouter que c’est moins « l’homme de génie qu’on admire alors que le grand écrivain. » Qu’est-ce donc dans les lettres qu’un grand écrivain qui n’est pas un homme de génie ? Là où le fond des choses n’est pas à la fois juste et relevé, il n’y a pas de grand écrivain ; mais il peut y avoir un très habile homme qui veut cacher aux autres, et peut-être à lui-même, la faiblesse de ses pensées. […] L’art de l’écrivain supérieur est de les aller chercher au fond de nous-mêmes, où elles sont comme étouffées et assoupies par nos besoins et nos passions, et de les exprimer dans le caractère et la sévère beauté de la langue de son pays.
Là encore il est tout entier de sa personne ; mais c’est le plus souvent cette personne par ses beaux côtés, par son bon sens qui est comme le bon sens de la France, par son goût supérieur à son talent, par ce naturel qui nous fait voir le fond de son cœur et nous apprend à lire dans le nôtre. […] Le fond de l’Idylle, qu’il ne faut pas confondre avec sa recette, ce sont ces trois amours qui les premiers s’éveillent dans l’âme du vrai poète : l’amour de la nature, l’amour de la beauté personnifiée dans une femme, l’amour de l’art, qui achève le poète. […] L’impuissance d’idéaliser rend plus choquante la grossièreté du fond. […] Mais dans le fond, c’était le commun succédant au raffiné.
Les Parnassiens ; au fond, étaient parfaitement conscients de leur rôle de continuateurs. […] C’est Baudelaire qui a ciselé, si l’on peut dire, la coupe suprême où but la Muse et c’est José Maria de Heredia qui a fixé au fond la large médaille d’or pur qui l’orne et la parachevé d’une effigie de Beauté. […] C’est cet idéalisme que nous trouvons au fond de l’œuvre de Villiers de l’Isle-Adam comme de celle de Mallarmé. […] La poésie française, au fond, fut descriptive.
Le sujet de Philiberte est le même, au fond, que celui de Cendrillon et de la Petite Fadette. […] Croyant faire peur à l’amour, Tu n’étais qu’une enfant, ma soeur, jusqu’à ce jour, Tu viens, en un instant, de faire un pas immense, Car c’est à la pudeur que la femme commence, Et la pudeur, au fond, n’est que le sentiment Qu’un homme peut nous voir avec des yeux d’amant. […] Mais voilà que ce dialogue nous rappelle, comme un air, joué sur un piano de salon bourgeois, pourrait rappeler quelque idéale mélodie de harpe éolienne suspendue aux branches d’un pin d’Italie dans l’Isola bella, le duo virginal de la Ninon et de la Ninette d’Alfred de Musset : Ninon L’eau, la terre et les vents, tout s’emplit d’harmonies Un jeune rossignol chante au fond de mon cœur. […] Ils admirent, avec des yeux ébahis, comme tout cela brille d’une façon romantique ; ils dressent les oreilles pour entendre la chanson… des moineaux. » Au fond, M.
C’est là un sentiment tiré du fond même de la « caverne », comme un philosophe a appelé l’âme humaine. […] Au fond, c’est le Jésuite que M. […] Sachez donc que M. de Sainte-Agathe, qui assistait à la soirée du géographe, a surpris de son œil oblique l’impression produite sur l’héritière par le voyageur, et que, pour écarter ce dangereux rival, il n’a rien trouvé de mieux que de le renvoyer au plus vite au fond du Soudan. […] Sa pièce, mal conçue et mal faite, dénouée au hasard, violente au fond, faible à la surface, manque surtout de la gravité impartiale qui sied à la polémique religieuse.
Quand un drame glisse sur la pente du faux, avec ce violent parti pris, il roule jusqu’au fond. […] A peine est-il au fond de la chambre, qu’elle saute sur le coffre-fort et y saisit les papiers de Claude. […] Elle le menace, elle l’insulte presque ; puis se radoucit, fond en grosse tendresse : il est son maître, elle l’a dans le sang. […] N’est-ce pas mal faire que de livrer une enfant si tendre, si aimante, à ce père indigne, à cette femme, bonne peut-être au fond, mais emportée et brutale, qui pourra s’en lasser demain, comme elle s’en est engouée tout a l’heure ?
Cette gaudriole qui, au fond et malgré les pensées sérieuses, lui est si naturelle, joue et circule dans toute sa première manière ; elle traverse la seconde ; elle se retrouve jusque dans sa dernière. […] Il n’est pas fâché au fond de donner, par son absence, un petit tort à l’Académie ; l’Académie le lui laisserait. […] Moi aussi, j’ai jugé pour mon plaisir M. de Pontmartin comme j’avais jugé autrefois Béranger, et voici la note, depuis longtemps écrite, que je tire du même cahier familier d’où j’ai extrait quelques-unes de mes impressions de fond sur le poète national. […] C’est facile, coulant ; l’auteur a une fluidité nuancée et spirituelle de détail, mais aucune résistance ni solidité de jugement, aucune proportion dans sa mesure des talents et dans la comparaison des ouvrages, aucune fermeté, aucun fond.