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636. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 133-139

On a reproché à Rousseau de s'être trop livré, dans ses Epîtres, à un ton de misanthropie qui les dépare quelquefois, d'y ramener trop souvent ses ennemis, d'y établir des principes qui portent moins sur la vérité que sur les ressentimens qui l'aigrissoient.

637. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre troisième. »

J’en conviens ; mais de quoi sert-elle, Avec des ennemis sans foi ?

638. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 31, de la disposition du plan. Qu’il faut diviser l’ordonnance des tableaux en composition poëtique et en composition pittoresque » pp. 266-272

Les regles de la peinture sont autant ennemies de la duplicité d’action que celles de la poësie dramatique.

639. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre troisième. Découverte du véritable Homère — Chapitre I. De la sagesse philosophique que l’on a attribuée à Homère » pp. 252-257

Passons-lui donc d’avoir présenté la force comme la mesure de la grandeur des dieux ; laissons Jupiter démontrer, par la force avec laquelle il enlèverait la grande chaîne de la fable, qu’il est le roi des dieux et des hommes ; laissons Diomède, secondé par Minerve, blesser Vénus et Mars ; la chose n’a rien d’invraisemblable dans un pareil système ; laissons Minerve, dans le combat des dieux, dépouiller Vénus et frapper Mars d’un coup de pierre, ce qui peut faire juger si elle était la déesse de la philosophie dans la croyance vulgaire ; passons encore au poète de nous avoir rappelé fidèlement l’usage d’empoisonner les flèches 83, comme le fait le héros de l’Odyssée, qui va exprès à Éphyre pour y trouver des herbes vénéneuses ; l’usage enfin de ne point ensevelir les ennemis tués dans les combats, mais de les laisser pour être la pâture des chiens et des vautours.

640. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre II. Dryden. »

Le duc de Buckingham écrit une parodie de Dryden, le Rehearsal, et prend une peine infinie pour faire attraper au principal acteur le ton et les gestes de son ennemi. […] S’il est mon ennemi, qu’il triomphe ; s’il est mon ami (et je ne lui ai donné aucune occasion personnelle d’être autrement), il sera content de mon repentir763. » Une telle pénitence relève ; pour s’abaisser ainsi, il faut être grand. […] Ce sont des opprimés, à peine soulagés depuis un instant d’une persécution séculaire, attachés à leur foi par leurs souffrances, respirant à demi parmi les menaces visibles et les haines grondantes de leurs ennemis contenus. […] Au milieu de ses combats publics, Dryden s’abattit sur un ennemi privé, Shadwell, et l’accabla d’un immortel mépris775. […] Ses ennemis le persécutaient de pamphlets ; le puritain Collier flagellait brutalement ses comédies ; on le damnait sans pitié et en conscience.

641. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxviiie entretien. Littérature germanique. Les Nibelungen »

Il dit à Kriemhilt de le protéger contre ses ennemis. […] « Je crains fortement des machinations ennemies. […] Elle pensait : « Je suis si puissante et je possède tant de richesses que je pourrais bien faire pâtir mes ennemis. […] L’illustre reine se prit à penser à ses ennemis. […] Vous êtes à l’abri de tous vos ennemis.

642. (1814) Cours de littérature dramatique. Tome III

Comme lui, Racine n’avait que vingt-un ans quand il donna Les Frères ennemis ; mais Œdipe est aussi supérieur aux Frères ennemis que Racine lui-même est supérieur à Voltaire. […] Alzire épouse par faiblesse un homme qu’elle n’aime pas ; elle viole ensuite ses serments par l’intérêt qu’elle prend au plus mortel ennemi de son mari. […] Mahomet devait connaître Zopire, et ne pas risquer une négociation dont l’unique effet devait être de se démasquer sans fruit devant un ennemi. […] La tragédie et le roman sont essentiellement ennemis, quoique trop souvent on essaie de les réconcilier. […] ô vieillesse ennemie !

643. (1883) Essais sur la littérature anglaise pp. 1-364

Ils se battent bravement avec des ennemis muets, avec des bancs de glace, avec des crocodiles et des alligators, avec des serpents et des tigres. […] Et telle est la raison pour laquelle, malgré tout ce qu’elles ont de contraire et d’ennemi, les deux nations sont invinciblement attirées l’une vers l’autre, car elles sont les deux pôles d’un même aimant dont le nom est civilisation. […] Bien mieux, s’il a des préférences littéraires, philosophiques ou politiques, ces préférences sont pour les doctrines les plus ennemies de la race et du génie purement saxons. […] Un matin, on voit arriver au camp un trompette de l’armée ennemie, porteur d’un défi envoyé par un cavalier espagnol qui proposait à qui voudrait l’accepter un combat en l’honneur de sa maîtresse. […] Heureusement le général en chef de l’armée ennemie était ce célèbre Génois Spinola, qui, au dire des meilleurs juges, n’eut d’égal dans ce siècle, pour la rapidité des conceptions militaires, que Gustave-Adolphe et le prince de Condé.

644. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Molière »

Non ; Molière, le sage, l’Ariste pour les bienséances, l’ennemi de tous les excès de l’esprit et des ridicules, le père de ce Philinte qu’eussent reconnu Lélius, Érasme et Atticus, ne devait rien avoir de cette forfanterie libertine et cynique des Saint-Amant, Boisrobert et Des Barreaux. Il était de bonne foi quand il s’indignait des insinuations malignes qu’à partir de l’École des Femmes ses ennemis allaient répandant sur sa religion. […] On conçoit jusqu’à cet effroi naïf du janséniste Baillet qui, dans ses Jugements des Savants, commence en ces termes l’article sur Molière : « Monsieur de Molière est un des plus dangereux ennemis que le siècle ou le monde ait suscités à l’Église de Jésus-Christ, etc. » Il est vrai que des religieux plus aimables, plus mondains, se montraient pour lui moins sévères. […] Molière y laissait les canevas italiens et les traditions de théâtre pour y voir les choses avec ses yeux, pour y parler haut et ferme selon sa nature contre le plus irritant ennemi de tout grand poëte dramatique au début, le bégueulisme bel-esprit, et ce petit goût d’alcôve, qui n’est que dégoût. […] Ses ennemis lui reprochaient de voler la moitié de ses œuvres aux vieux bouquins.

645. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLIIIe entretien. Vie et œuvres du comte de Maistre (2e partie) » pp. 5-80

Un grand ennemi de la foi, en rapportant ces faits, déclare qu’il ignore par quel concours de circonstances heureuses le Panthéon fut conservé jusqu’au moment où, dans les premières années du septième siècle, un souverain pontife le consacra à tous les saints. […] Je vois le Christ entrer dans le Panthéon, suivi de ses évangélistes, de ses apôtres, de ses docteurs, de ses martyrs, de ses confesseurs, comme un roi triomphateur entre, suivi des grands de son empire, dans la capitale de son ennemi vaincu et détruit. […] Tu ne saurais croire combien je me suis fait d’ennemis jadis pour avoir voulu en savoir plus que nos chers Allobroges. » « Le chef-d’œuvre des femmes, écrit-il ailleurs à sa seconde fille Constance, c’est de comprendre ce qu’écrivent les hommes. » Il y a dans ses œuvres un volume entier de ces tendresses, de ces conseils et de ces badinages de cœur et de plume avec ses chères filles, et ce volume n’a point de paradoxe parce que le sentiment n’en a pas. […] On peut le réfuter, on ne peut le mépriser ; il force à l’admiration même ses ennemis.

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