Puisque ces ennemis, hier encor nos hôtes, Sont chez nous, J’irai, je me mettrai, France, devant tes fautes À genoux !
Un sauvage prendrait cela pour les têtes d’une douzaine d’ennemis appliquées l’une sur l’autre.
Les Meilhan de Rome ou de Byzance auraient pu nous dire quelque chose de ce caractère sexagénaire du monde grec ou romain, de l’ennui, « ce cruel ennemi de l’homme policé », et de tous les raffinements de vices et de folies qu’il entraîne. […] L’heure d’Aladin a sonné ; il est appelé par le Sultan, il sauve l’État, il repousse l’ennemi par son habileté et même sans livrer de bataille, puis il se retire à temps loin de la ville et de la Cour, au sein de l’amitié et des lettres : « Les grands hommes sont comme les remèdes actifs, qu’il ne faut employer que dans les grandes occasions. » M. de Meilhan tarda peu à émigrer. […] Quant aux idées philosophiques ou politiques renfermées dans des écrits antérieurs, une fois la tranchée ouverte et l’ennemi introduit dans la place, on y recourut, mais comme on s’adresse à un avocat pour fournir des motifs à l’appui d’une cause, d’un acte qu’on veut colorer : C’est quand la Révolution a été entamée, dit M. de Meilhan, qu’on a cherché dans Mably, dans Rousseau, des armes pour soutenir le système vers lequel entraînait l’effervescence de quelques esprits hardis.
La nouvelle de la victoire de Fleurus par Jourdan (26 juin 1793) le comble de joie, et il en consigne l’expression dans son Journal en homme qui, à cette date déjà bien sanglante, était pour la Révolution tout entière, sans marquer ses réserves : De même qu’on a fait apporter aux prêtres leurs lettres de prêtrise, et aux nobles leurs lettres de noblesse, de même nous ne devrons accorder la paix à nos ennemis qu’autant que tous les rois faux auront apporté leurs lettres de royauté. […] Il hésitait d’abord à accepter, craignant que cela ne le dissipât et ne le jetât, comme il disait, dans l’externe, tandis qu’il sentait de plus en plus le goût des voies intérieures et silencieuses ; puis il pensa qu’il était peut-être appelé par là à rendre témoignage de sa doctrine et à briser quelque lance contre l’ennemi : Il est probable, pensait-il, que l’objet qui m’amène à l’École normale est pour y subir une nouvelle épreuve spirituelle dans l’ordre de la doctrine qui fait mon élément… Je serai là comme un métal dans le creuset, et probablement j’en sortirai plus fort et plus persuadé encore qu’auparavant des principes dont je suis imprégné dans tout mon être. […] — Qu’il y ait en tout ceci une pointe exagérée de polémique et d’insulte à l’égard de Condillac, on le voit sans peine, mais elle était de bonne guerre et de généreuse audace en plein camp ennemi.
Si on lit les pièces et relations dans le Recueil de Grimoard, on est frappé du résultat peu décisif de trois attaques meurtrières : on ne délogea l’ennemi qu’à la quatrième. […] Le prince de Conti, disait-on tout haut, le rival humilié, l’envieux et l’ennemi du héros, l’avait blessé mortellement en duel dans le parc même de Chambord, et le maréchal de Saxe était mort de cette blessure que, par générosité, il avait tout fait pour cacher. […] C’est Napoléon qui est censé parler et qui explique comment, en quittant l’Egypte, il avait laissé le commandement en chef de l’armée à Kléber : « Kléber, dit-il, était capable de lutter contre tous les ennemis alors existants dans ces contrées.
Le sénat, c’était l’ancien ordre païen au complet, politique à la fois et religieux, la religion d’État par excellence, un Capitole ennemi et inexpugnable. […] Je ne vois point, par exemple, pourquoi, indépendamment de toute idée d’hérédité ou de non-hérédité, la nature grossière, cruelle et superstitieuse de Galère, n’aurait pas arraché l’édit de persécution au caractère affaibli et vieilli de Dioclétien ; il ne m’est pas très-prouvé non plus que celui-ci ait eu des engagements secrets avec les chrétiens, et qu’il ait dû paraître ensuite à leur égard non-seulement un ennemi, mais un traître. […] Mais saint Colomban, arrivé tout exprès d’Irlande en France, y saisit en main l’influence religieuse, contrarie les directions romaines et se pose en ennemi mortel de Brunehaut.
Renart seul fait exception, l’impudent personnage, et c’est bien son appétit glouton qui en fait l’éternel ennemi de Chantecler le coq, de Pinte la poule, et de toute leur noble parenté, comme de la gent vulgaire qui picore sur le fumier des vilains. […] Mais tous les autres, ses victimes et ses ennemis, tous sont trompeurs, au moins d’intention. […] Car, en passant des bords du Gange aux rives de la Marne ou de la Somme, ils perdaient leur sens religieux, leur haute et ascétique moralité ; les peintures vengeresses et salutaires des tours malicieux de l’éternelle ennemie, de la femme, piège attrayant de perdition, devinrent dans la bouche de nos très positifs bourgeois une licencieuse dérision de leurs joyeuses commères et de la vie conjugale.
Si la tragédie morale semble souvent continuer un roman ou s’y superposer, et si son action semble parfois, soit au début, soit dans le cours des pièces, recevoir l’impulsion du dehors, c’est qu’il peint des volontés, comme nous le verrons, et que ces volontés, sûres et constantes, ne changeraient point d’état ou de posture, ne livreraient point de combat, si des accidents de fortune ne leur suscitaient des ennemis dans le moi ou hors du moi. […] Il n’est pas besoin qu’elle s’arme, pour écraser les petits ennemis qui la menacent : le mépris suffit. […] D’autre part, ne voit-on pas de Lyonne offrir à Louis XIV de le débarrasser par l’assassinat d’un ennemi politique (cf.
Il n’y parle que de ses ennemis ; est-ce pour détourner de nous l’idée que le pire de ses ennemis, c’était lui-même ? […] On lisait la Henriade, il y a un siècle, les amis de Voltaire pour le plaisir qu’ils y prenaient, ses ennemis pour y trouver des raisons de ne pas l’aimer.
L’Église est vaincue par les novateurs : à chaque assaut elle abandonne aux mains de l’ennemi quelqu’une de ses positions. […] Si le théâtre par une revanche imprévue fait à son tour la guerre à la religion, la philosophie, elle aussi, se pose en ennemie de la foi. […] Bossuet, dans ses Oraisons funèbres, représente comme des ennemis du Tout-Puissant, comme des rebelles à l’autorité divine, tous ceux-qui en Angleterre ont ébranlé et renversé le trône des Stuarts, tous ceux qui en France ont, au temps de la Fronde, réclamé tumultueusement des libertés ; Dieu apparaît ainsi comme le garant de l’ordre social, comme le protecteur particulier de la royauté de droit divin.