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489. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Appendice — I. Sur M. Viennet »

Mais certain bref ou certaine encyclique, lancée, il n’y a pas deux ans, contre la Franc-Maçonnerie dont il est un des chefs et des grands maîtres, lui fit monter la rougeur à la joue, à lui déiste sincère et qui abhorre les doctrines athées.

490. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre quatrième. La propagation de la doctrine. — Chapitre II. Le public en France. »

Un homme ayant dit de mon temps : Je crois cela comme article de foi, tout le monde se mit à rire… Il y a un comité pour considérer l’état de la religion, mais cela est regardé comme ridicule. » Cinquante ans plus tard, l’esprit public s’est retourné ; « tous ceux qui ont sur leur tête un bon toit et sur leur dos un bon habit492 » ont vu la portée des nouvelles doctrines. […] Ils prêchent incessamment, vous ne sauriez croire avec quelle liberté, et leur doctrine avouée est l’athéisme… Voltaire lui-même ne les satisfait plus ; une de leurs dames prosélytes me disait de lui : il est bigot, c’est un déiste. » Ceci est bien fort, et pourtant nous ne sommes pas au bout : car, jusqu’ici, l’impiété est moins une conviction qu’une mode. […] La gravité des anciennes doctrines nous pesait. […] Nous préférions un mot d’éloge de d’Alembert, de Diderot, à la faveur la plus signalée d’un prince… Il était impossible de passer la soirée chez d’Alembert, d’aller à l’hôtel de La Rochefoucauld chez les amis de Turgot, d’assister au déjeuner de l’abbé Raynal, d’être admis dans la société et la famille de M. de Malesherbes, enfin d’approcher de la reine la plus aimable et du roi le plus vertueux, sans croire que nous entrions dans une sorte d’âge d’or dont les siècles précédents ne nous donnaient aucune idée… Nous étions éblouis par le prisme des idées et des doctrines nouvelles, rayonnants d’espérance, brûlants d’ardeur pour toutes les gloires, d’enthousiasme pour tous les talents et bercés des rêves séduisants d’une philosophie qui voulait assurer le bonheur du genre humain.

491. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXXIVe entretien. Considérations sur un chef-d’œuvre, ou Le danger du génie. Les Misérables, par Victor Hugo (2e partie) » pp. 365-432

Ce fut le conventionnel qui le rompit (car évidemment l’évêque, confondu, ne savait plus que dire) ; il se souleva sur un coude, présenta son pouce et son index replié un peu vers sa joue, comme on fait machinalement lorsqu’on interroge et qu’on juge (c’était donc maintenant le conventionnel qui, arrogamment, interrogeait et jugeait l’évêque ; le pénitent intervertissait les rôles, et jetait à ses pieds le confesseur au nom de ses doctrines glorifiées) ; il interpella l’évêque avec un regard plein de toutes les énergies de l’agonie. […] Il serait trop douloureux de laisser au peuple des doctrines paradoxales écrites du style de Pascal ou de Bossuet. […] Le conventionnel a recours lui-même à cet épouvantable mystère de la criminalité abstraite pour justifier et légitimer ses doctrines. […] Ou l’évêque est chrétien selon la lettre et selon l’esprit, et alors pourquoi écoute-t-il avec complaisance et approbation les doctrines très peu chrétiennes du terroriste, et pourquoi, après l’avoir entendu se vanter du sang versé pour le peuple, ne lui propose-t-il aucune bénédiction de sa religion, et, au contraire, lui demande-t-il simplement la sienne ?

492. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLIVe entretien. Madame de Staël. Suite »

« On ne saurait nier, dira-t-on peut-être, que cette doctrine ne soit avilissante ; mais néanmoins, si elle est vraie, faut-il la repousser et s’aveugler à dessein ? […] L’univers ressemble plus à un poëme qu’à une machine ; et s’il fallait choisir, pour le concevoir, de l’imagination ou de l’esprit mathématique, l’imagination approcherait davantage de la vérité. » LI Ses dédains contre la doctrine de la soi-disant vertu, fondée sur l’intérêt personnel, et sa flétrissure de l’égoïsme, s’élèvent jusqu’à la sublimité de l’invective. […] Madame de Staël, élevée à cette école d’où sortit plus tard la secte politique de 1830, qu’on appela doctrinaire, non à cause de ses doctrines, mais à cause de son dogmatisme, ne comprenait pas assez la révolution française pour en écrire. […] Elle ne lui gardait pas de haine dans sa chute ; mais elle haïssait l’autorité de ses exemples, la corruption funeste qu’ils avaient répandue, et cette doctrine de la fatalité, du mensonge et de la force qu’elle sentait et qu’elle prévoyait survivante après lui ; avec quelle admiration curieuse nous l’avions encore entendue remuer tant de questions naguère interdites et comme inconnues en France, les principes de l’ancien droit public de l’Europe, les causes populaires de la victoire actuelle des droits coalisés, le travail tardif et la solidarité pour longtemps indissoluble de la coalition, les instincts différents et pourtant compatibles des monarques héréditaires et des parvenus au trône, d’Alexandre et de Bernadotte ; enfin le génie collectif et pourtant inépuisable de l’Angleterre pouvant au besoin se passer du hasard d’un grand homme pour faire de grandes choses, et, forte d’une institution qui lui fournit toujours à temps des hommes résolus et capables, achevant, par la ténacité de lord Liverpool et de lord Castelreagh, ce qui avait consumé le génie et l’espérance de Pitt !

493. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXVIe entretien. Biographie de Voltaire »

Non, ses calomniateurs seuls ont cherché à déshonorer de ce nom ses doctrines ou plutôt ses négations de doctrines religieuses. […] Son règne est annoncé par la voix des oracles, Son trône est cimenté par le sang des martyrs ; Tous les pas de ses saints sont autant de miracles, Il leur promet des biens plus grands que leurs désirs ; Ses exemples sont saints, sa morale est divine ; Il console en secret les cœurs qu’il illumine ; Dans les plus grands malheurs il leur offre un appui, Et si sur l’imposture il fonde sa doctrine C’est un bonheur encor d’être trompé par lui ! […] Il n’admettait pas cette vérité de convention, admise très-légèrement de nos jours, que les persécutions et les bûchers favorisent les doctrines qu’on tue ou brûle ; l’histoire dément à toutes ses pages ce sophisme de l’impuissance des persécutions pour éterniser ou pour ajourner les philosophies ou les religions nouvelles.

494. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre quatrième. Éléments sensitifs et appétitifs des opérations intellectuelles — Chapitre premier. Sensation et pensée »

Le tort commun des idéalistes et des sensualistes, beaucoup plus voisins les uns des autres qu’ils ne le croient, est d’avoir méconnu le rôle de l’appétition, de la volonté et de l’activité motrice ; rétablir ce rôle, c’est marquer où réside la vraie force des idées et préparer la conciliation des doctrines à ce point de vue supérieur. […] Sur ce point, l’accord est fait aujourd’hui entre la doctrine idéaliste et la doctrine de la sensation. […] Le mélange de deux sentiments simples différents produit un sentiment de différence. » Le sentiment transitionnel entre deux états, ou sentiment relationnel, serait donc, selon cette doctrine, un état composé de conscience consistant dans l’excitation simultanée des deux sensations.

495. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Gui Patin. — II. (Fin.) » pp. 110-133

Cette doctrine est bien dangereuse, et il serait plus à propos de n’en rien écrire. […] Arnauld, et en général tous les écrivains de Port-Royal, non par communion de sentiments ou de doctrine, mais par une sorte de complicité d’esprit et de sympathie morale. […] Plempius, célèbre professeur en médecine, est mort… Adieu la bonne doctrine en ce pays-là !

496. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Œuvres inédites de F. de la Mennais (suite et fin.)  »

La Mennais se déclare contre ceux qu’il appelle « les jacobins ecclésiastiques », et par ce nom il désigne tous ceux qui participent plus ou moins au gallicanisme, et qui ne sont pas pour la doctrine absolue de l’infaillibilité. […] C’était en effet avec quelques anneaux ainsi choisis à distance, et en omettant bien des intermédiaires, que l’on pouvait parvenir, moyennant un peu de bonne volonté, à établir une espèce de chaîne continue dans la doctrine déjà si disparate et à travers la carrière déjà si accidentée de M. de La Mennais ; mais depuis lors la chaîne s’est rompue à trop d’endroits pour qu’on essaye, par aucun artifice, d’en ressouder les fragments et d’en rejoindre les bouts. […] L’abbé Brelucque et l’abbé Perrot ne partagent point, etc. » Et il entre dans le détail des personnes, tout prompt d’ailleurs, selon sa coutume, à tirer des conclusions excessives : « Quiconque voudra faire interdire le genre humain, ne manquera pas de témoins qui déposeront de sa démence. » Et c’est l’homme qui tout à l’heure va soutenir théoriquement dans un gros livre la doctrine du sens commun universel !

497. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre troisième. L’esprit et la doctrine. — Chapitre IV. Construction de la société future »

L’emplacement où nous le bâtissons doit être considéré comme vide ; si nous y laissons subsister une partie des vieilles constructions, ce sera en son nom et à son profit, pour les enfermer dans son enceinte et les approprier à son usage ; tout le sol humain est à lui  D’autre part, il n’est pas, selon la doctrine américaine, une compagnie d’assurance mutuelle, une société semblable aux autres, bornée dans son objet, restreinte dans son office, limitée dans ses pouvoirs, et par laquelle les individus, conservant pour eux-mêmes la meilleure part de leurs biens et de leurs personnes, se cotisent afin d’entretenir une armée, une maréchaussée, des tribunaux, des grandes routes, des écoles, bref les plus gros instruments de sûreté et d’utilité publiques, mais réservent le demeurant des services locaux et généraux, spirituels et matériels, à l’initiative privée et aux associations spontanées qui se formeront au fur et à mesure des occasions et des besoins. […] Au lieu de lui opposer des digues nouvelles, ils ont songé à détruire les vieux restes de digues qui le gênaient encore. « Dans un gouvernement, disent Quesnay et ses disciples, le système des contre-forces est une idée funeste… Les spéculations d’après lesquelles on a imaginé le système des contrepoids sont chimériques… Que l’État comprenne bien ses devoirs, et alors qu’on le laisse libre… Il faut que l’État gouverne selon les règles de l’ordre essentiel, et, quand il en est ainsi, il faut qu’il soit tout-puissant. » — Aux approches de la Révolution, la même doctrine reparaît, sauf un nom remplacé par un autre. […] Sa loi « ne prêche que servitude et dépendance… il est fait pour être esclave », et d’un esclave on ne fera jamais un citoyen. « République chrétienne, chacun de ces deux mots exclut l’autre. » Partant, si la future république me permet d’être chrétien, c’est à la condition sous-entendue que ma doctrine restera confinée dans mon esprit, sans descendre jusque dans mon cœur  Si je suis catholique, (et sur vingt-six millions de Français, vingt-cinq millions sont dans mon cas), ma condition est pire.

498. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CXLVIIe entretien. De la monarchie littéraire & artistique ou les Médicis »

Venez donc, et ne manquez pas d’apporter avec vous la lyre d’Orphée. » Quels que fussent les progrès de Côme dans la doctrine de son philosophe favori, il y a lieu de croire qu’il appliquait à la vie active et réelle les préceptes et les principes qui étaient pour les subtils dialecticiens de son siècle une source si abondante de disputes interminables. […] Le jour suivant, Alberti, continuant de traiter le même sujet, explique à fond la doctrine de Platon sur le but et la véritable destination de la vie humaine, et il s’attache à l’éclaircir par les opinions des plus célèbres sectateurs de ce philosophe. […] Dans ces assemblées, où se rendaient les plus savants hommes de l’Italie, c’était la coutume que quelqu’un s’occupât, après le dîner, de choisir certains passages des ouvrages de Platon, qu’on soumettait à la discussion de la compagnie, et chacun des convives entreprenait d’éclaircir et de développer quelque point important ou douteux de la doctrine de ce philosophe.

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