Cela dérange les théories naïves de la réserve qu’on croit féminine ; mais les femmes ne craignent qu’une chose, d’être mal jugées ; mal jugées par les hommes. […] Il suffisait d’imaginer les grands hommes ordinaires, purs de leur première erreur, ou de s’appuyer sur cette erreur même pour concevoir un degré de conscience plus élevé, un sentiment de la liberté d’esprit moins grossière. » Je crains qu’Amiel et Teste ne soient dupes d’une illusion.
On craignait moins la mort que la privation de sépulture. […] Le plus grand malheur que sa piété ait à craindre est que sa lignée s’arrête. […] Il n’était même pas nécessaire d’avoir été un grand homme ou un bienfaiteur ; il suffisait d’avoir frappé vivement l’imagination de ses contemporains et de s’être rendu l’objet d’une tradition populaire, pour devenir un héros, c’est-à-dire, un mort puissant dont la protection fût à désirer et la colère à craindre. […] Même ses dieux domestiques ou nationaux, il les redoutait, il craignait d’être trahi par eux. […] Assurément on ne craignait pas que dans les assemblées politiques son vote fit pencher la balance.
En un mot, ni Beauté, ni Midi, rien de la fine clarté du ciel méridional, rien qui rappelle la grâce, point de dunes, à peine une volonté de logique ; une certaine lourdeur même, qui est encore soulignée, comme si l’artiste voulait nous dire : “Elle fait partie de mes intentions” ; un manteau pesant, quelque chose de volontairement barbare et solennel, un clinquant de dentelles et de préciosités savantes et surannées, quelque chose d’allemand, dans le meilleur et dans le plus mauvais sens du mot, quelque chose de germaniquement multiple, d’informe et d’inépuisable ; une certaine puissance et une plénitude d’âme allemande qui ne craint pas de se dérober sous les raffinements de la décadence, — qui peut-être s’y plaît mieux ; la véritable marque de l’âme allemande, en même temps jeune et démodée, trop faible encore et trop riche d’avenir ; ce genre de musique exprime le mieux ce que je pense des Allemands ; ils sont d’avant-hier et d’après-demain, — ils n’ont pas encore d’aujourd’hui16. » Voilà une page d’admirable critique en dépit du parti pris de Nietzsche contre son auteur, d’où résultent certaines appréciations inexplicables. […] Il a peur de la pétrification, de la cristallisation de la musique, il craint de la voir verser dans l’architectonique, — et c’est pourquoi il oppose le rythme binaire au ternaire, introduit fréquemment la mesure à cinq et à sept temps, répète la même phrase, mais avec un élargissement qui prolonge sa durée du double ou du triple. […] Elles sont si précises qu’il pouvait se passer de toute indication de mouvement et de caractère en tête de ses vastes architectures sonores, sans craindre d’être mal compris.
Je pourrais ajouter encore bien des choses, si je ne craignais, dans ta disposition, de t’offenser plutôt que de t’apaiser. […] Quelques nuages glissaient dans cet Olympe : le principal, une fois passé l’orage qu’on pouvait craindre des ressentiments de Mme de Stein, ce furent les rumeurs publiques, les jugements sévères, la tyrannie du qu’en-dira-t-on : car « la Renommée, je le sais, est en guerre avec l’Amour ». […] Les premiers temps, elle craignait peut-être un abandon qu’elle aurait certainement subi avec résignation ; elle n’espéra point d’abord que sa situation dût être un jour régularisée, sans que pour cela son dévouement fût moindre, et si, plus tard, après qu’elle lui eut sauvé la vie par son courage et son sang-froid, Goethe se décida enfin à « reconnaître pleinement et bourgeoisement comme sienne sa petite amie49 », ce fut par reconnaissance ou parce qu’elle lui était devenue tout à fait indispensable. […] Mais Goethe n’a jamais craint de se contredire.
« Aux bonnes mœurs », c’est tout. « Leur faire craindre Dieu » ou « leur faire aimer Dieu », ce qui serait si naturel dans la bouche d’un bourgeois du xviie siècle, non. « Les bonnes mœurs » ; c’est tout. […] Elle est née de la croyance aux dieux, de la crainte des dieux, et de cette tendance bien naturelle d’imaginer les dieux semblables à des hommes, et de ce raisonnement élémentaire qu’ils doivent commander aux hommes ce que les hommes commandent à ceux qu’ils dominent et qui les craignent. […] C’est ce que, selon le parti dont on est, il est possible, d’après cette loi, ou d’espérer ou de craindre. […] Non sans doute que vous pensiez que l’Église a une grammaire ou une arithmétique différentes de celles des écoles de l’État, mais parce que vous craignez que, à la faveur de la grammaire et de l’arithmétique, ou concurremment avec elles, l’Église ne glisse son enseignement religieux.
Ils l’avaient connue femme d’un homme honorable et assez élevé en rang et en dignité militaire, l’infortuné Beauharnais, mort sur l’échafaud révolutionnaire ; ils la trouvaient l’épouse d’un parvenu, mais d’un parvenu plus puissant qu’aucun prince de l’Europe ; ils ne craignaient pas de venir lui demander des faveurs, tout en affectant de la dédaigner.
Qu’aurait-on désormais à craindre d’inconnu et de pire ?
Je crois que l’enfant ayant porté le nom de roi, mon rêve, en ce qui le concerne, est accompli et qu’il n’est plus à craindre.
Je veux savoir et je crains d’apprendre.
C’est pourquoi je crains les ouvrages en plusieurs volumes.