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760. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre I — Chapitre troisième »

Le plus grand nombre se contentait de rimer l’histoire contemporaine. […] Aussi, pour trouver quelque variété et une langue déjà expressive, il faut descendre des merveilles des romans dans ces petits poëmes qui, sous les noms de fabliaux, de sirventes, de tensons, de jeux-partis, de chansons, ont pour sujet quelque anecdote graveleuse, quelque particularité des mœurs contemporaines, la satire des abus, et l’amour, tel qu’on le faisait alors, sans cette fausse délicatesse qui lui venait de l’imitation. […] On sait seulement, par un passage du Testament de Jean de Meung, que Dieu lui donna de servir les plus grandes gens de la France, et, par une préface au roi Philippe le Bel, qu’il avait traduit du latin un livre de Végèce, les lettres d’Héloïse et d’Abailard, et le livre, de la Consolation de Boëce, « que j’ai translatée en français, dit-il au roi, jaçoit qu’entendes bien latin. » Jean de Meung vécut jusque vers l’an 132O : il était contemporain du Dante. […] Les uns n’ont pu lui pardonner de s’être ennuyés à le lire ; les autres lui ont fait un grief du plaisir que leur a donné la lecture de quelques poèmes antérieurs ou contemporains.

761. (1909) De la poésie scientifique

Origines de la poésie moderne A lire l’extraordinaire mélange de noms et de théories, sous prétexte de les classer, qu’osent encore de temps à autre des auteurs d’Etudes sur la Poésie contemporaine  l’on se demande s’il est vraiment si malaisé de réunir le document précis sur ses origines et son évolution…. […] René Ghil proclame qu’il a déterminé tous les mouvements contemporains de la poésie, sinon de la littérature entière), nous pensons avoir déterminé des choses  et que quelque chose de nouveau est né de moi. […] En Russie où deux grands noms commandent la poésie contemporaine, ceux de Constantin Balmont et de Valère Brussov  M.  […] La littérature contemporaine (Enquête de MM. 

762. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Troisième Partie. De la Poësie. — III. Le Poëme épique, ou l’Épopée. » pp. 275-353

Quel autre but, disoit l’abbé De Pons, ont pu se proposer le Tasse, Milton, le Camoens, si ce n’est d’amuser leurs contemporains, de se faire lire des gens frivoles & désœuvrés. […] L’idée de servir sa patrie, & ses contemporains le flatta. […] Encore, si, dans ce projet d’élever jusqu’aux nues ses contemporains, il avoit eu l’art de louer & de gagner les plus illustres, peut-être eut-il trouvé le public disposé à le croire : mais ou il ne parla point d’eux dans son Parallèle, ou il n’en dit que des choses qu’ils trouvèrent choquantes. […] L’abbé de Marolles a soutenu, contre tous les historiens, que cet anachronisme n’en est pas un, qu’Énée a été contemporain de Didon.

763. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Massillon. — I. » pp. 1-19

J’ai sous les yeux son Oraison funèbre du prince de Conti publiée en 1709, et avec des notes critiques, écrites à la main en marge par un contemporain qui avait assisté à la cérémonie même et qui marque les différences entre le morceau imprimé et le morceau débité8. […] Il serait précieux de retrouver quelque témoignage tout à fait contemporain.

764. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Œuvres complètes de Buffon, revues et annotées par M. Flourens. » pp. 55-73

Cuvier, dont le jugement a fait loi pour les zoologistes contemporains, semble lui-même placer le mérite le plus réel de Buffon dans ses droits au titre d’auteur fondamental pour l’histoire des quadrupèdes. […] La gloire de Buffon ne saurait être dans ce qu’il a fait faire, mais dans ce qu’il a fait lui-même, dans ce qu’il a créé ; j’ajouterai qu’elle est moins encore dans ce qu’il a fait pour ses contemporains, que dans ce qu’il a préparé pour nous.

765. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Ramond, le peintre des Pyrénées — III. (Fin.) » pp. 479-496

Il n’avait que dédain pour ceux qui rapportaient l’origine d’une si grande secousse à tel objet particulier de leur dépit ou de leur aversion : L’heure des révolutions sonne, messieurs, disait-il (et c’est dans un discours qu’il eut à prononcer comme préfet à l’ouverture du lycée de Clermont sous l’Empire), — l’heure des révolutions sonne quand la succession des temps a changé la valeur des forces qui concourent au maintien de l’ordre social, quand les modifications que ces forces ont subies sont de telle nature qu’elles portent atteinte à l’équilibre des pouvoirs ; quand les changements, imperceptiblement survenus dans les mœurs des peuples et la direction des esprits, sont arrivés à tel point qu’il y a contradiction inconciliable et manifeste entre le but et les moyens de la société, entre les institutions et les habitudes, entre la loi et l’opinion, entre les intérêts de chacun et les intérêts de tous ; quand enfin tous les éléments sont parvenus à un tel état de discorde qu’il n’y a plus qu’un conflit général qui, en les soumettant à une nouvelle épreuve, puisse assigner à chaque force sa mesure, à chaque puissance sa place, à chaque prétention ses bornes… Cette manière élevée de considérer les choses contemporaines comme si elles étaient déjà de l’histoire, dispense de bien des regrets dans le passé et de bien des récriminations en arrière. […] Faisant allusion à certains termes assez impératifs de la lettre de nomination et qui laissaient peu la liberté du refus, Ramond aurait dit en riant : « Je suis préfet par lettre de cachet. » Cuvier n’a pas dédaigné d’égayer sa Notice de ces traits malins et de quelques autres qu’il faudrait avoir été contemporain pour accueillir et présenter dans leur juste mesure, sans rien exagérer ni forcer en les rapportant. — Cuvier et Ramond n’étaient pas au mieux ensemble ; ils avaient été en compétition pour la place de secrétaire perpétuel de l’Académie des sciences.

766. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Préface pour les Maximes de La Rochefoucauld, (Édition elzévirienne de P. Jannet) 1853. » pp. 404-421

Tous les contemporains sont d’accord là-dessus, M. de La Rochefoucauld était un des hommes qui causaient le mieux ; et il causait d’autant mieux qu’il n’avait rien de l’orateur. […] Nos deux célèbres contemporains, par ces oppositions manifestes, ne font que déclarer leur propre nature, proclamer ce qui leur manque, et deviner dans le passé ceux qui les auraient finement pénétrés et raillés avec sourire, ou simplement critiqués par leur exemple.

767. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Entretiens de Gœthe et d’Eckermann (suite) »

Ce qu’il était permis de dire aux anciens Grecs ne nous semble plus, à nous, convenable, et ce qui plaisait aux énergiques contemporains de Shakspeare, l’Anglais de 1820 ne peut plus le tolérer, à tel point que dans ces derniers temps on a senti le besoin d’un « Shakspeare des familles. » Nous connaissons, sans sortir de chez nous, de ces pruderies et de ces arrangements-là, mais bien vite nous en rions ; — nous en souffrons aussi. […] Je mets tous mes soins à me faire une idée nette de l’état de la littérature française contemporaine, et si je réussis, je veux un jour dire ce que j’en pense.

768. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Salammbô par M. Gustave Flaubert. Suite et fin. » pp. 73-95

Mais, en attendant, et à part toute discussion, pourquoi, dans ce ramas d’hommes de guerre et d’assiégeants, l’auteur n’a-t-il pas eu l’idée de nous faire rencontrer un Grec, un seul, animé de l’esprit de Gélon, un disciple, par la pensée, des Xénophon, des Aristote, des anciens sages de son pays, un jeune Achéen contemporain d’Aratus, ayant déjà en soi le germe des sentiments humains de Térence, ayant lu Ménandre, et qui, fourvoyé dans cette affreuse guerre, la jugeant, sentant comme nous et comme beaucoup d’honnêtes gens d’alors en présence de ces horreurs, nous aiderait peut-être à les supporter ? […] Peu d’années fécondes sont accordées aux hommes, et même aux plus vrais talents : il faut en savoir user pour se loger à temps et s’ancrer au cœur et dans la mémoire des hommes nos contemporains : c’est encore le plus sûr chemin pour aller à la postérité.

769. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Mémoires de Malouet »

Nommé commissaire général de la marine et membre du Comité de législation pour les colonies, son avis était fort demandé sur toutes les questions de sa compétence ; et quand un homme à projets, un aventurier utopiste, le baron de Bessner (un digne contemporain de Mesmer), proposa un établissement chimérique à la Guyane et en présenta à l’avance les plans réalisés et dessinés aux yeux sur le papier, on voulut bien consulter tout particulièrement Malouet ; on se décida même à l’envoyer sur les lieux, sauf ensuite à faire tout le contraire de ce qu’il aurait dit et observé. […] « Il m’avait reçu d’abord avec de grandes démonstrations de joie ; mais, lorsque je fus près de le quitter, son visage vénérable se couvrit de larmes ; il me retint par mon habit, et prenant ce ton de dignité qui sied si bien à la vieillesse, s’apercevant, malgré sa cécité, de ma grande émotion, il me dit : « Attendez » ; puis il se mit à genoux, pria Dieu, et, m’imposant ses mains sur la tète, il me donna sa bénédiction. » Ce vieux soldat, Jacques Des Sauts, comme on l’appelait (probablement parce qu’il habitait près de la chute de l’Oyapock), est-il réellement l’original qui a suggéré l’idée de Chactas, également aveugle, également contemporain du siècle de Louis xiv, et qui se souvenait toujours de Fénelon, « dont il avait été l’hôte ? 

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