Junon chez lui, à l’occasion, parle en marchande et compare la queue du paon « à la boutique d’un lapidaire. » Il tourne volontiers au style trivial que sa trivialité rend narquois ; son amoureux est tiraillé entre deux veuves, « l’une encore verte, et l’autre un peu bien mûre » ; il est de moyen âge et « tire sur le grison », mais « il a du comptant, et partant de quoi choisir. » Ailleurs la goutte plante le piquet sur l’orteil d’un pauvre homme, pendant que l’araignée « se campe sur un lambris, comme si de ces lieux elle eût fait bail à vie. » Tout son style est composé ainsi de familiarités gaies ; rien n’est plus efficace pour mettre en notre cerveau l’image des objets ; car en tout esprit les images familières se réveillent plus aisément que les autres, et les images gaies naissent plus promptement que toutes les autres dans l’esprit des Français. […] Un homme au collège s’est laissé dire qu’un vers est une ligne de douze syllabes sans élisions, laquelle finit par un son pareil à celui de la ligne voisine ; tout le monde peut fabriquer des lignes semblables, c’est affaire de menuiserie ; d’ailleurs il se souvient qu’il en a fait en latin, presque aussi bien que Claudien, bien plus joliment que Virgile ; maintenant que le voilà inspecteur des douanes, officier en retraite, il rabote et aligne des vers, compose des fables, traduit Horace, exactement comme d’autres, ses confrères, confectionnent des boîtes et des bilboquets avec un tour. Pour moi, j’aimerais mieux être obligé de commander une armée, que d’écrire ces terribles lignes non finies ; je trouve plus difficile de composer six beaux vers que de remporter une victoire ; en pareil cas du moins j’aurais la chance d’avoir un imbécile pour ennemi ; mes généraux me remplaceraient ; et il y a telle occurrence où les soldats tout seuls ont gagné la bataille. […] Son chant soutenu rassemble les impressions que ses accents imitatifs ont produites, et de toutes les sensations notées une à une elle compose un air. — Les gens d’esprit et savants s’y sont trompés.
elle vient voir ce qu’elle pourra recueillir de mon inventaire. » Cet inventaire en valait la peine, puisqu’il se composait tout d’abord de Fontenelle, de Montesquieu, de Mairan. […] Le soir, la maison de Mme Geoffrin continuait d’être ouverte, et la soirée se terminait par un petit souper très simple et très recherché, composé de cinq ou six amis intimes au plus, et cette fois de quelques femmes, la fleur du grand monde. […] Vers la fin ce salon voit se former, en émulation et un peu en rivalité avec lui, les salons du baron d’Holbach, de Mme Helvétius, en partie composés de la fleur des convives de Mme Geoffrin, et en partie de quelques têtes que Mme Geoffrin avait trouvées trop vives pour les admettre à ses dîners. […] Mme Geoffrin, bien observée, me paraît avoir été, par la nature de son esprit, par la méthode de son procédé, et par son genre d’influence, le Fontenelle des femmes, un Fontenelle plus actif en bienfaisance (nous reviendrons tout à l’heure sur ce trait-là), mais un vrai Fontenelle par la prudence, par la manière de concevoir et de composer son bonheur, par cette manière de dire, à plaisir familière, épigrammatique et ironique sans amertume.
C’est là, ou tout au sortir de là, que, profitant des loisirs forcés que lui avait faits la Terreur, il composa son Caton d’Utique, sa première tragédie, qu’on dit tirée à très peu d’exemplaires. […] Tout cela dit, et quand on a ajouté que la trame de ce style est sans véritable éclat et sans nouveauté, composée à satiété de tous les mots vagues, communs, déclamatoires (ignominie, vertu, gloire, victoire, des proscrits vertueux, etc. […] Chaque paragraphe est composé presque invariablement d’une seule phrase. […] Quand il composera des ouvrages en prose, tels que son Histoire du droit municipal en France (1829), il ne fera guère autre chose que de mettre en ordre et de classer chronologiquement les notes recueillies dans ses recherches, que de vider ses sacs et de ranger ses matériaux par chapitres avec aussi peu de lien que possible.
Michaud et qui ont joui à quelque degré de son entretien, doivent quelque chose à sa mémoire : il était de ces esprits dont l’accent ne se fixe pas tout à fait dans les ouvrages qu’ils composent, et dont la parole a un agrément fin qui s’évapore. […] Son père, obligé de s’expatrier à la suite d’un malheur causé par une imprudence généreuse, s’était établi près de Bourg-en-Bresse ; c’est là que Joseph Michaud, l’aîné des enfants, fit ses études : « Il fut, selon le témoignage de son frère, un excellent rhétoricien : son style avait l’abondance, la solennité semi-poétique, si recommandées par les professeurs aux élèves ; il composait des vers français avec facilité. » Son père mort, et sa mère n’ayant que peu de bien avec beaucoup de famille, il entra dans une maison de librairie à Lyon. […] Bien des documents ne lui étant survenus que pendant qu’il composait, l’auteur n’a été maître de son sujet que successivement. […] Il assistait avec sourire à ces excès de passion de ses amis ; même quand il les servait dans l’attaque, il choisissait entre les traits, il s’était fait un cercle à son image, en partie composé d’hommes jeunes que le libéralisme repoussait par ses lieux communs et qui n’étaient royalistes que par préférence politique.
Ce petit traité est une piéce échappée du naufrage de plusieurs autres livres que cet illustre auteur avoit composés. […] L’auteur traite dans le premier de l’invention oratoire, c’est-à-dire, de cette partie de l’art de l’éloquence qui donne des préceptes pour aider à trouver les pensées qui doivent composer le discours. […] Mais j’ai encore moins composé mes Réfléxions d’après mes Panégyriques, que mes Panégyriques d’après mes Réfléxions ; & j’ose espérer qu’on ne trouvera rien dans celles-ci qui ait été dicté au Rhéteur par l’intérêt personnel de l’Orateur ; rien qui décéle l’intention de justifier par des principes particuliers une maniere qui me seroit particuliére. […] L’auteur entre dans le détail de tout ce qui doit composer un bon plaidoyer, & des talens extérieurs de l’Avocat.
On lit dans Le Moniteur du 27 février 1853 : La Commission des primes à décerner aux ouvrages dramatiques, composée de MM. […] Cette pièce, d’un comique aimable, se compose de tableaux vrais empruntés à la société de nos jours ; deux familles y sont en présence : l’une toute mondaine, dans laquelle la discorde et le désordre se sont glissés, ne sert qu’à faire ressortir les mœurs unies et simples d’une autre famille toute laborieuse et restée patriarcale : deux jeunes cœurs purs, épris d’une passion mutuelle, sont le lien de l’une à l’autre.
Shéridan a composé en anglais quelques comédies où l’esprit le plus brillant et le plus original se montre presque à chaque scène ; mais outre qu’une exception ne changerait rien aux considérations générales, il faut encore distinguer la gaieté de l’esprit, du talent dont Molière est le modèle. […] Mais comme les antithèses ne composent pas seules l’éloquence, les contrastes ne sont pas les seuls secrets de la gaieté ; et il y a, dans la gaieté de quelques auteurs français, quelque chose de plus naturel et de plus inexplicable : la pensée peut l’analyser, mais la pensée seule ne la produit pas ; c’est une sorte d’électricité communiquée par l’esprit général de la nation.
De même on avait dissocié les éléments qui composent l’idée du moi afin de la discréditer en la montrant illusoire. […] Mais le sentiment même de cette liberté originelle, lorsqu’elle apparaît en quelques individualités héroïques, les condamne à connaître en même temps la minutieuse fatalité qui les contraint à jouer leur rôle individuel, tel qu’ils se rappellent l’avoir eux-mêmes composé naguère, strictement délimité par le rôle précis d’une infinité d’autres personnages et par le contour inflexible des décors.
Cet écrivain, naturellement audacieux & républicain, échauffé par l’esprit du temps & la fureur des guerres civiles, composa son livre sur le Droit des rois & des magistrats. […] Quoique tous les livres en faveur des parlementaires rebèles eussent été composés par des écrivains plus factieux encore, & que l’esprit seul qui dictoit ces ouvrages dût les rendre méprisables, ils ne laissoient pas de faire des impressions profondes dans les têtes même les mieux organisées.
Toutefois on aurait dû remarquer qu’il y a deux sortes de clartés : l’une tient à un ordre vulgaire d’idées (un lieu commun s’explique nettement) ; l’autre vient d’une admirable faculté de concevoir et d’exprimer clairement une pensée forte et composée. […] Cependant il est vrai que la majeure partie du génie se compose de cette espèce de souvenirs.