Un poëte comique ne dépeint pas aux spectateurs des heros, ou des caracteres qu’ils n’aïent jamais connus que par les idées vagues que leur imagination peut en avoir formées sur le rapport des historiens : il n’entretient pas le parterre de conjurations contre l’état, d’oracles ni d’autres évenemens merveilleux, et tels que la plûpart des spectateurs, qui jamais n’ont eu part à des avantures semblables, ne sçauroient bien connoître si les circonstances et les suites de ces avantures sont exposées avec vrai-semblance.
Certes un si beau fait, qui ne put avoir d’autres circonstances, est réellement merveilleux, mais non faussement miraculeux, et ne devait pas essuyer les sarcasmes d’un écrivain national. […] Qu’ils réfléchissent au parti qu’a su tirer le talent de Virgile des minutieuses circonstances qui occasionnèrent l’établissement des petites peuplades d’où la puissance romaine devait sortir. […] Mais quel intérêt positif résulte des circonstances recueillies et décrites avec soin ! […] Une quantité de circonstances et d’actions particulières influe sur le résultat général, et souvent le prépare et le produit. […] Quant à la multitude des combats, n’oublions pas que le poète n’en trace pas un dont les circonstances se ressemblent, et qu’il peint une action guerrière dans tous ses modes et dans tous ses hasards.
Il nous a semblé de plus que si cette circonstance nouvelle, si précieuse à nos yeux, en venant certainement compliquer pour nous les difficultés et multiplier les convenances, devait avoir un effet rétroactif et allait jusqu’à nous obliger à rétracter, à modifier les jugements du passé, il n’y aurait ni fond ni base solide à notre travail critique : nous n’avons donc pas hésité à maintenir dans presque tous les cas ce qui est écrit.
Chaix d’Est-Ange, a bien voulu alléguer, en faveur de Broussais, de Bichat et de Cabanis, qui ont pu être téméraires, a-t-il dit, et s’égarer par moments, des excuses et, pour ainsi dire, des circonstances atténuantes ; mais je ne crois pas (j’en demande pardon à notre très-spirituel et éloquent collègue), je ne pense pas que ce doive être là le vrai rôle actuel de l’homme politique lui-même et de l’homme d’État en présence de la science. […] Cette circonstance, pourtant, de n’être point agrégé, avait éveillé la susceptibilité d’une partie des élèves, et une autre partie lui était peu favorable pour d’autre raisons. […] Et en le nommant ainsi je voudrais éviter, quoique cela soit bien difficile, de nommer et d’indiquer l’Église spirituelle ; je voudrais séparer tous ces esprits, toutes ces âmes respectables et intérieures, tous ces croyants qui ne vivent que du suc intime du christianisme et dont la vie est soumise à des préceptes de douceur et de charité ; — et ce n’est pas ici un hommage d’apparat que je leur rends : j’ai le bonheur d’en compter plusieurs pour amis, et à travers les dissidences de la pensée, je n’ai jamais cessé de sympathiser avec eux par le cœur ; — mais il faut bien le dire, des circonstances récentes, des déterminations politiques qui étaient peut-être nécessaires, ont donné aux hommes actifs et d’humeur ingérante, aux meneurs politiques qui dirigent le parti, des encouragements et des espérances qui, dans leur exaltation bruyante et leur redoublement fiévreux, sont faits pour inspirer des craintes, — non pas de l’effroi, — et pour inquiéter du moins ceux de mon âge, qui, se souvenant des misérables luttes du passé, voudraient en prévenir le retour. […] — Je sais qu’on établit des distinctions entre doctrine et doctrine, et qu’il s’est élevé, depuis une quarantaine d’années, une sorte de philosophie dont j’ai déjà indiqué le caractère, philosophie à double fin, en quelque sorte bâtarde et amphibie, tantôt dénoncée elle-même par le clergé, tantôt, selon les circonstances, accueillie par lui comme alliée et auxiliaire, laquelle prétend établir un moyen terme entre le symbole religieux et la recherche rigoureusement philosophique et scientifique, avec ses résultats quels qu’ils puissent être.
Si l’on excepte la tragédie, qui sera la première prête et la première féconde, il faudra laisser écouler la moitié du siècle pour atteindre un chef-d’œuvre authentique ; et ce sera la prose qui le fournira, dans une œuvre de circonstance, dans les Provinciales de Pascal. […] Il monte en perfection les lieux communs de l’amour, de la mort et de la fortune, il frappe excellemment les petites pensées de circonstance. […] Il vivait dans l’intimité de la marquise de Rambouillet, et il savait toujours faire jaillir quelques rimes ou quelques pointes, de toutes les circonstances qui intéressaient le petit cercle. […] L’horreur du vulgaire naturel qui, appliquée aux menues circonstances de la vie sociale, produisait la recherche spirituelle des petits vers, tourne en passion du romanesque quand il s’agit de former une conception générale de la vie.
Mais par manque de souplesse, par distraction ou obstination du corps, par un effet de raideur ou de vitesse acquise, les muscles ont continué d’accomplir le même mouvement quand les circonstances demandaient autre chose. […] Toutefois, dans les deux cas, c’est une circonstance extérieure qui a déterminé l’effet. […] Il faudra que la raideur mécanique n’ait plus besoin, pour se révéler, d’un obstacle placé devant elle par le hasard des circonstances ou par la malice de l’homme. […] Et nous ne l’acceptons que parce qu’il nous paraît ou sortir d’un état d’âme ou s’encadrer dans les circonstances.
Même arrangement encore dans certaines scènes de Don Quichotte, par exemple dans celle de l’hôtellerie, où un singulier enchaînement de circonstances amène le muletier à frapper Sancho, qui frappe sur Maritorne, sur laquelle tombe l’aubergiste, etc. […] I. — La répétition. — Il ne s’agit plus, comme tout à l’heure, d’un mot ou d’une phrase qu’un personnage répète, mais d’une situation, c’est-à-dire d’une combinaison de circonstances, qui revient telle quelle à plusieurs reprises, tranchant ainsi sur le cours changeant de la vie. […] Une des plus connues consiste à promener un certain groupe de personnages, d’acte en acte, dans les milieux les plus divers, de manière à faire renaître dans des circonstances toujours nouvelles une même série d’événements ou de mésaventures qui se correspondent symétriquement. […] Elle consiste à disposer les événements de manière qu’une scène se reproduise, soit entre les mêmes personnages dans de nouvelles circonstances, soit entre des personnages nouveaux dans des situations identiques.
Il retient de leur bouche et consigne mot à mot chaque circonstance. […] Rien n’est plus largement conté, plus clair, plus circonstancié que cette bataille, mieux suivi dans ses moindres circonstances en même temps que posé dans son ensemble et couronné par une fin vraiment touchante. […] Ces menues circonstances toutes naturelles ajoutent au tragique de la catastrophe et à la leçon que va donner la fortune.
Il varie dans son langage selon les circonstances. […] Le dernier tome contient la mort du cardinal Mazarin et celle de la reine avec des circonstances très particulières. […] Fontenelle se conduisit dans cette circonstance en homme d’esprit qu’il était : il laissa l’épigramme faire son chemin, et il en était peut-être chatouillé au fond.
Lorsqu’on commença, dans ce siècle-ci, à contester les théories jusque-là régnantes, la critique s’appliqua, en sens inverse, à ces chefs-d’œuvre, et l’on s’efforça d’y démontrer certaines lacunes et défectuosités qui tenaient aux circonstances de l’époque, au cadre de la société. Durant cette phase, qui est la seconde de la critique française, et qui se produit par madame de Staël, Benjamin Constant et leur école, le caractère de la critique, tout en gardant son but de théorie et son idée, devient déjà historique, elle s’enquiert et tient compte des circonstances dans lesquelles sont nées les œuvres. […] Il y aurait beaucoup à dire en leur faveur, à leur décharge et à titre de circonstances très-atténuantes.