Les temps se répètent plus qu’on ne croit ; le monde tourne, mais ne change pas. […] Vicovaro ; le torrent de la Digentia qui écume encore sous les chênes disséminés au fond de la vallée d’Ustica ; le site parsemé de débris de briques de la maison rurale du poète ; Rocca-Giovanni qui s’élève avec ses ruines de forteresse féodale comme une sentinelle à l’ouverture de la vallée ; la plaine de Mandéla fumante çà et là au soleil ; des feux d’herbes sèches allumés et oubliés par les bergers ; la grotte des nymphes au bord de laquelle rêve le poète endormi dont on voit danser les songes sous la figure des femmes qu’il aima ; la fontaine de Blandusie en Calabre, qui a changé tant de fois de nom depuis Horace, et à laquelle un vers du lyrique rend éternellement son premier nom ; la barque pleine de musique et pavoisée de voiles qui portait Mécène, Horace et leurs amis pendant le voyage de Brindes ; la treille de Tibur entre deux colonnes à l’ombre desquelles le nonchalant ami de Mécène écrit une strophe entre deux sommeils ; l’entretien du maître d’Ustica avec son métayer, au milieu de ses troupeaux de chèvres ; Horace, ses tablettes sur ses genoux dans sa bibliothèque de Tibur, écrivant au milieu de ses rouleaux de livres grecs les préceptes de son épître aux Pisons, chacun de ces tableaux est une évocation vivante d’un passé de deux mille ans, mais auquel ces deux mille ans n’ont enlevé ni un rocher, ni une source, ni un arbre aux paysages, ni un vers au génie aimable du poète. […] Ses travaux cependant avaient altéré sa santé naturellement maladive ; il éprouvait le besoin de changer l’air épais de Rome contre l’air vital et léger d’Athènes ; il voulait surtout voir de ses yeux, avant de les décrire, les mers et les rivages d’Ilion : Campos ubi Troia fuit ! […] » Plus loin le ton change ; c’est une invocation martiale à la Fortune en faveur d’Auguste et des Romains qui vont combattre en Asie les Parthes. […] Ils changent de ciel, et non d’âme, ceux qui naviguent au-delà des mers ; ce que tu vas chercher si loin, le bonheur, est ici : il est même à Ulubria. » XIX « Celui-là n’est jamais pauvre qui ne manque pas des choses nécessaires à la vie, continue-t-il dans la petite lettre en vers à Iccius.
Il lui fit offrir de se changer en une académie, et de préparer la forme et les lois qu’il serait bon qu’elle reçût à l’avenir52. » Ils y résistèrent d’abord, par l’esprit d’indépendance propre aux gens de lettres, et par crainte de se mettre en servitude en s’agrandissant. […] Le grand ministre en sentit lui-même les effets tout le premier, alors qu’ayant changé quelques phrases dans la lettre que lui avait adressée, sur son invitation, la société Conrart, il lui fut dit que si ces changements étaient un ordre, la compagnie y déférerait ; mais que les phrases, dans leur première rédaction, avaient paru à tous les membres assez nobles et assez françaises. […] L’usage changeait, disait-il, dans le moment même que Vaugelas cherchait à le constater. […] Quand on changera quelque chose de l’usage que j’ai remarqué, ce sera encore selon les mêmes remarques que l’on écrira autrement… Il sera toujours vrai aussi que les règles que je donne pour la netteté du langage ou du style subsisteront sans jamais recevoir de changements61. » Il n’y a rien d’outrecuidant dans ce noble témoignage que se rend Vaugelas, sous l’autorité du sentiment général qu’il avait cherché toute sa vie. La proportion qu’il indique, entre ce qui demeure et ce qui change dans la langue, pendant vingt-cinq ou trente ans, n’a pas varié depuis plus de deux siècles.
Ce n’est pas qu’il eût changé le fond pessimiste assez noir de sa philosophie. […] Car insensiblement les voûtes de la forêt se changent en masses montagneuses. […] À partir de ce moment, les rôles changent. […] Kundry pousse un grand cri et tombe sur le sol changé en désert aride. […] Mon espérance d’autrefois se change donc en certitude.
Même dans une aire très étendue, restée continue pendant une longue période, mais dont le climat et les autres conditions de vie changent insensiblement en allant d’un district habité par une espèce à un autre district occupé par des espèces étroitement alliées, nous ne pouvons prétendre que rarement à trouver les variétés moyennes dans les zones intermédiaires. […] Parmi les espèces qui varient, un petit nombre seulement dans la même contrée changent en même temps, et toutes leurs modifications s’effectuent avec lenteur. […] Si l’on considère des périodes suffisamment longues, la géologie prouve clairement que toutes les espèces ont changé, et qu’elles ont changé comme le requiert ma théorie : car elles ont changé lentement et graduellement. […] L’extension graduelle des formes dominantes et les lentes modifications de leurs descendants font qu’après de longs intervalles de temps les formes de la vie semblent avoir changé simultanément dans le monde entier.
la condition de l’homme de lettres, comme tant d’autres conditions dans notre société, a changé, et probablement changera de plus en plus ; elle est soumise bien autrement qu’elle ne l’a jamais été à ces grandes lois de l’égalité, de l’émulation, de la libre concurrence. […] En fait, la condition de l’homme de lettres a changé ; le nombre est de plus en plus grand de ceux qui, ne pouvant s’assujettir à ce qui fait l’objet de la plupart des ambitions, à ce qu’on appelle une place, sont prêts à se confier tout entiers, eux et les leurs, à leur plume, à leur plume seule.
Quand il arrive pour prendre en main le commandement qui lui est déféré, les dispositions de crainte et d’alarme qui l’avaient fait paraître nécessaire sont déjà changées par suite d’un grand succès obtenu devant Perpignan, la victoire de Peyrestortes, remportée d’élan et comme de hasard, par un enthousiasme héroïque. […] C’étaient, on commençait à le reconnaître, les intrépides soldats d’une Révolution qui allait changer la face du monde… Il y avait un an, à pareille époque, que le roi de Prusse repliait vers le Rhin une armée qui sortait formidable encore des plaines de la Champagne. […] Mais craignant d’être laissés en arrière, les soldats à l’instant découpent leurs havre-sacs, s’en enveloppent les pieds, et courent supplier leur chef de leur permettre « d’aller changer de chaussure avec les Espagnols ».
De même qu’on peut changer d’opinion bien des fois dans sa vie, mais qu’on garde son caractère, de même on peut changer de genre sans modifier essentiellement sa manière. […] Changez les noms, et mettez-en de plus modernes, si vous le voulez : l’épigramme est éternelle.
Je crois au contraire que, dans une certaine classe surtout, il en est si peu d’heureux, que s’il m’était proposé de changer mon sort pour le sort de celui qu’après un mûr examen je croirais le plus heureux d’entre dix hommes pris au hasard dans le nombre de ceux qui ont l’avantage, inappréciable parmi nous, de réfléchir, je refuserais sans hésiter cet échange : et je ne sais si j’accepterais cette proposition, ayant le choix dans vingt, dans cinquante. […] Beaucoup d’hommes paraissent assez heureux ; mais ce qu’ils se disent à eux-mêmes est fort différent de ce qu’ils disent aux autres : et s’il ne fallait que changer de misères, celles dont on a quelque habitude doivent être les moins pesantes. […] Mon mariage n’eût pas eu lieu ; et même à toute époque j’eusse pu changer les choses.
Deux ou trois joyaux ont été changés successivement de place, ont été essayés, puis supprimés. […] Il a exprimé au naturel ces brusques revirements dans les deux couplets qu’il intitule les Dissonances : Un soleil si chaud brûla ma figure, J’ai dû tant changer à tant voyager, Que d’un franc Romain je me crois l’allure ; Mais un vigneron à brune encolure Me dit en passant : Bonjour, étranger ! […] tout d’ailleurs a changé ; le collége est devenu un hôpital.
Dans cette triste inquiétude On passe ainsi la vie à chercher le bonheur : A quoi sert de changer de lieux et d’habitude, Quand on ne peut changer son cœur ? […] le temps qui m’entraîne Va tout changer autour de moi : Déjà mon cœur que rien n’enchaîne Ne sent que tristesse et qu’effroi… Ce bois même avec tous ses charmes, Je dois peut-être l’oublier ; Et le temps que j’ai beau prier Me ravira jusqu’à mes larmes.