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237. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre III. Besoin d’institutions nouvelles » pp. 67-85

Cependant l’arche d’alliance marche toujours devant le peuple : c’est le sentiment religieux, immortel comme nous ; c’est la certitude que Dieu ne cesse de veiller sur les destinées du genre humain. […] Dans de certaines contrées de l’Asie ou de l’Afrique, des colonnes tronquées s’élèvent au milieu de vastes déserts qui furent jadis des villes florissantes, et attestent encore aujourd’hui la puissance des vastes empires qui, depuis tant de siècles, ont cessé de régner : nous ne souffrirons point que de pareils débris continuent de peser sur la terre de la patrie, pour nous retracer une civilisation qui n’est plus, pour nous rappeler des souvenirs qui semblent nous importuner. […] Ainsi donc, et c’est ce que j’espère faire sentir plutôt que prouver ; ainsi donc, lorsque l’homme veut hâter, par la violence, cette marche naturellement lente, aussi bien que lorsqu’il veut y apporter des délais et des obstacles, il met toujours la société en péril : il ne faut pas cesser de répéter cette vérité, sous toutes les formes ; il faut, s’il est permis de parler ainsi, en lasser les peuples et les gouvernements jusqu’à ce que la crise actuelle soit passée.

238. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Horace Walpole »

Mais il ne cessa, toute sa vie, de chiffonner, de brocanter, de flâner aux boutiques de curiosités, de calliborgner aux vitrines ! […] Et de fait, Byron, le jaloux des gilets de Brummell, l’auteur du Don Juan et du Beppo, et qui jouait sur cette petite chanterelle comme Paganini sur sa seule corde, avait en lui du dandy, comme Horace Walpole ; mais Byron était un dandy dans un poète, et la flamme céleste du poète dévorait sans cesse le dandy toujours renaissant dans ses lettres, commentaire singulier de ses poèmes ! […] Il était perpétuellement occupé à se regarder dans les lettres qu’il ne cessait d’écrire ; car les lettres que nous écrivons sont nos miroirs !

239. (1907) L’évolution créatrice « Chapitre III. De la signification de la vie. L’ordre de la nature et la forme de l’intelligence. »

C’est dans la pure durée que nous nous replongeons alors, une durée où le passé, toujours en marche, se grossit sans cesse d’un présent absolument nouveau. […] Elle le côtoie sans cesse, d’ailleurs, dans la sensation. […] Au début était le maximum d’utilisation possible de l’énergie ; cette mutabilité est allée sans cesse en diminuant. […] Ainsi, d’un immense réservoir de vie doivent s’élancer sans cesse des jets, dont chacun, retombant, est un monde. […] Ainsi se créent sans cesse des âmes, qui cependant, en un certain sens, préexistaient.

240. (1912) Réflexions sur quelques poètes pp. 6-302

Ô Sémiramis, le plaisir des armes ne te touche plus, tu as cessé d’être toi-même. […] Il se tourmentait sans cesse, brûlant de hasarder toutes sortes de bagatelles. […] Il ne cessa de travailler et il donna coup sur coup plusieurs tragédies et une foule de tragi-comédies ou simplement comédies. […] tu es le trait d’union entre Corneille et Racine, et le temps ne cessera point de mettre sur ton front, chaque jour, de plus fraîches couleurs. […] Les oracles ont cessé ; Colletet est trépassé.

241. (1875) Premiers lundis. Tome III « Du point de départ et des origines de la langue et de la littérature française »

Dès le commencement du ixe le latin avait cessé d’être parlé, et n’était plus que la langue du culte, des lois et de l’administration. […] surtout, cette étude de nos origines linguistiques et littéraires, qui est en cours de développement, n’a cessé de marcher : de laborieux et nombreux défricheurs n’ont cessé de publier des textes ; des esprits ingénieux ont multiplié les remarques, les conjectures, les rapprochements ; enfin, des esprits philosophiques, tels que ne l’était pas Raynouard, tels que l’étaient déjà Fauriel et M.  […] L’étude de ces dernières ne devait être, un jour, tout à fait constituée que lorsque le secret mépris et le divorce entre les deux ordres d’érudits auraient cessé et auraient fait place à un effort commun, à un concours de direction et de méthode. […] et vous tous dont l’idiome vulgaire se rattache aux idiomes de ces peuples, vous êtes sans doute surpris et charmés des identités frappantes, des analogies incontestables que vous découvrez sans cesse entre vos langages particuliers. […] Les services que, depuis près de trente ans, n’ont cessé de rendre M. 

242. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre deuxième. La connaissance des corps — Chapitre premier. La perception extérieure et les idées dont se compose l’idée de corps » pp. 69-122

Sa limite est le moment où cesse la sensation de résistance. […] « Je vois un morceau de papier blanc sur une table ; je vais dans une autre chambre, et, quoique j’aie cessé de le voir, je suis persuadé que le papier est toujours là. […] Mais, quoique les sensations cessent, les possibilités demeurent en existence ; elles sont indépendantes de notre volonté, de notre présence et de tout ce qui nous appartient. […] Bien plus, elles sont et, après que nous aurons cessé de sentir, elles seront des possibilités permanentes de sensation pour d’autres êtres que nous-mêmes. […] L’enfant a cru et bientôt cesse de croire que sa balle saute et se sauve, que sa boule court sur lui et veut lui faire du mal.

243. (1884) Articles. Revue des deux mondes

Les médailles byzantines, les figures des cathédrales gothiques, avec leurs têtes grêles, étroites, leurs fronts comprimés, n’attestent-elles pas la décadence héréditaire d’une race d’hommes qui pendant mille ans avait cessé de penser ? […] Ou qu’il ne soit plus question de la loi du progrès, ou cessez de parler de la liberté. […] Pour Anaximène, c’est l’air, car la respiration cesse avec la mort. […] Il ne cesse de répéter qu’il faut d’abord observer scrupuleusement les êtres, déterminer ce qui est particulier à chaque espèce avant de rechercher ce qui est commun à un grand nombre ou à toutes. […] Il ne cesse de recommander l’alliance étroite de l’observation et du raisonnement ; faute de cadavres humains, il dissèque des singes et un assez grand nombre d’animaux.

244. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Sylvain Bailly. — II. (Fin.) » pp. 361-379

Vous voyez qu’après avoir placé mon peuple antérieur sur le second plateau (de l’Asie) et sous les remparts de Gog et de Magog, il faut bien que je m’en défasse, puisqu’il a cessé d’exister. […] C’est ici que l’âge d’or va cesser, mais pas tout de suite cependant. […] Mais cela n’empêche pas (et cette contradiction même ajoute à son mérite) qu’il n’y ait en lui une veine patriarcale ou pastorale bien prononcée, qui revient sans cesse au milieu de ses sentiments publics, et qui lui faisait dire un jour, avant sa gloire, parlant à un ami : Au lieu de bruire avec fracas comme un torrent éphémère, je voudrais, si jamais je parviens à être connu, que ma réputation ressemblât au ruisseau paisible, toujours clair, toujours pur, ombragé de rameaux qu’il féconde : souvent utile, toujours riant, il est le charme et les délices des campagnes qu’il arrose… Ensuite il se perd… Voilà le coin d’idylle chez Bailly. […] On ne cessa de l’insulter, on lui cracha au visage ; des furieux s’approchèrent pour le frapper malgré les bourreaux ; on lui jetait à la face des questions cyniques.

245. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Léopold Robert. Sa Vie, ses Œuvres et sa Correspondance, par M. F. Feuillet de Conches. — I. » pp. 409-426

Nous entendions dire sans cesse qu’il valait mieux vivre de peu, et de très peu même, que de risquer par une ambition trop grande de se donner des chagrins qui peuvent durer toujours. […] Il était de ceux qui s’avertissent sans cesse eux-mêmes et qui s’enfoncent l’aiguillon. […] Malgré l’accident funeste qui brisa sa carrière et qui l’arrêta dans son développement, et quoique son dernier tableau (celui des Pêcheurs) ait pu paraître empreint de quelque affectation mélancolique, il est certain, à lire ses lettres nombreuses, que sa pensée s’élevait et aspirait chaque jour plus haut avec l’âge ; il devenait plus hardi, ou du moins d’un horizon plus agrandi, en vieillissant ; il avait commencé par copier la nature, il ne cessait de vouloir s’y conformer, et il visait en même temps à un idéal, impossible peut-être à concilier avec cette reproduction sévère et scrupuleuse, mais que, dans son ardeur opiniâtre, il concevait toutefois en accord avec l’exacte vérité. […] On a remarqué qu’à cet égard, il est de l’école de Despréaux en peinture ; il efface, il corrige sans cesse, et n’est content que lorsqu’il a atteint, à force de retouches et de repentirs, l’expression longuement désirée : L’exécution, disait-il, est de beaucoup pour un succès complet dans les arts.

246. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Les Caractères de La Bruyère. Par M. Adrien Destailleur. »

Le livre de La Bruyère est du petit nombre de ceux qui ne cesseront jamais d’être à l’ordre du jour. […] Destailleur, l’histoire d’une belle et superbe indifférente, d’une insensible qui cesse de l’être, qui devient passionnée par jalousie, puis folle de cœur, puis tout à fait furieuse et qui s’emporte aux derniers dérèglements, nous montre que La Bruyère eût été, s’il eût voulu, un excellent auteur de nouvelles ou de romans. […] Il n’a donc pas vu qu’en histoire le droit dont on a mésusé cesse, à une certaine heure, d’être le droit. […] On conçoit qu’un moraliste satirique et souvent personnel comme il l’était, se fût fait une nuée d’ennemis que l’incroyable succès de son livre excitait sans cesse.

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