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659. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre premier. De l’amour de la gloire »

C’est, sans doute, une jouissance enivrante que de remplir l’univers de son nom, d’exister tellement au-delà de soi, qu’il soit possible de se faire illusion, et sur l’espace et sur la durée de la vie, et de se croire quelques-uns des attributs métaphysiques de l’infini ; l’âme se remplit d’un orgueilleux plaisir par le sentiment habituel, que toutes les pensées d’un grand nombre d’hommes sont dirigées sur vous ; que vous existez en présence de leur espoir ; que chaque méditation de votre esprit peut influer sur beaucoup de destinées ; que de grands événements se développent au-dedans de soi, et commandent, au nom du peuple, qui compte sur vos lumières, la plus vive attention à vos propres pensées ; les acclamations de la foule remuent l’âme, et par les réflexions qu’elles font naître, et par les commotions qu’elles excitent ; toutes ces formes animées, enfin, sous lesquelles la gloire se présente, doivent transporter la jeunesse d’espérance et l’enflammer d’émulation. […] Ceux qui sous un tel ordre de choses sont nés dans la classe privilégiée, ont à quelques égards beaucoup de données utiles ; mais d’abord la chance des talents se resserre, et à proportion du nombre, et plus encore, par l’espèce de négligence qu’inspirent de certains avantages ; mais quand le génie élève celui que les rangs de la monarchie avaient déjà séparé du reste de ses concitoyens, indépendamment des obstacles communs à tous, il en est qui sont personnels à cette situation ; des rivaux en plus petit nombre, des rivaux qui se croient vos égaux à plusieurs égards, se pressent davantage autour de vous, et lorsqu’on veut les écarter, rien n’est plus difficile que de savoir jusqu’à quel point il faut se livrer à la popularité, en jouissant de distinctions impopulaires ; il est presqu’impossible de connaître toujours avec certitude le degré d’empressement qu’il faut montrer à l’opinion générale : certaine de sa toute puissance, elle en a la pudeur, et veut du respect sans flatterie ; la reconnaissance lui plaît, mais elle se dégoûte de la servitude, et rassasiée de souveraineté, elle aime le caractère indépendant et fier, qui la fait douter un moment de son autorité pour lui en renouveler la jouissance : ces difficultés générales redoublent pour le noble, qui dans une monarchie veut obtenir une gloire véritable ; s’il dédaigne la popularité, il est haï : un plébéien dans un État démocratique, peut obtenir l’admiration en bravant la popularité ; mais si un noble adopte une telle conduite dans un État monarchique, au lieu de se donner l’éclat du courage, il ne ferait croire qu’à son orgueil ; et si, cependant, pour éviter ce blâme, il recherche la popularité, il est sans cesse près du soupçon ou du ridicule.

660. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLXe Entretien. Souvenirs de jeunesse. La marquise de Raigecourt »

Il parut alors changer de principes en changeant de rôle : il émigra, non pas pour combattre son pays, mais pour se réfugier dans les larmes de ceux qui, en voulant faire beaucoup de bien, ont ouvert la porte à beaucoup de mal.

661. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre I. La préparations des chefs-d’œuvre — Chapitre III. Trois ouvriers du classicisme »

Mais il est comme la conscience de son siècle : j’aperçois chez lui nettement ce qu’il faudrait beaucoup de peine et de temps pour analyser dans la société et dans la littérature du temps ; il révèle certains dessous, qui expliquent les caractères apparents. […] Il avait de riches pensions, mais il y a sans doute beaucoup de légende dans ce qu’on dit de son avarice.

662. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XVI. Les derniers temps de la comédie italienne en France » pp. 311-338

C’est ma femme qui a la manie d’avoir beaucoup de plain-pied ; car pour moi je me trouve assez bien logé. […] Chacun tâche de s’établir du mieux qu’il peut aux dépens d’autrui ; et la plus grande vertu dans mon empire, c’est d’avoir beaucoup de bien.

663. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Légendes françaises. Rabelais par M. Eugène Noël. (1850.) » pp. 1-18

Or, dans cette journée que je suppose qu’on puisse aller passer au xvie  siècle avec son auteur préféré, je doute que Calvin, de nos jours, eût beaucoup de chalands. […] Il a trouvé ainsi moyen de gâter par du système une Étude d’ailleurs estimable, qui suppose beaucoup de lecture et une connaissance assez intime de son sujet.

664. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Le maréchal Marmont, duc de Raguse. — III. (Suite et fin.) » pp. 47-63

Le duc de Reichstadt, qui allait avoir vingt ans, élevé avec beaucoup de soin par des hommes instruits qui avaient cultivé en lui ses nobles instincts et qui les avaient fortifiés par des études positives, n’avait encore paru que dans les réunions de la famille impériale et les fêtes de la Cour. […] De même un Arabe, dont la vie se compose de marches dans le désert, sait que, pour le traverser, il lui faut beaucoup de temps, qu’il doit ménager ses moyens et ses forces ; dès lors les jours s’écoulent à ses yeux sans précipitation ni lenteur, parce que d’avance il les a comptés ; il est entré dans un mouvement dont il a calculé les effets, auquel il s’abandonne avec confiance et tranquillité.

665. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Madame, duchesse d’Orléans. (D’après les Mémoires de Cosnac.) » pp. 305-321

Cette affaire me coûta beaucoup de peine et d’argent ; mais, bien loin d’y avoir regret, je m’en tins trop payé par le gré que Madame me témoigna. » Cette affaire lia plus particulièrement Cosnac avec Madame, et, dès ce moment, on le vit, en toute occasion, épouser ses intérêts et la servir. […] Le roi même, à mon retour, m’a témoigné beaucoup de bonté ; mais pour Monsieur, rien n’est égal à son acharnement pour trouver moyen de se plaindre.

666. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Ducis. » pp. 456-473

Né à Versailles le 23 août 1733, d’une mère française et d’un père savoisien, il avait beaucoup de ce dernier. […] Ducis, dans ses dernières années, a fait beaucoup de poésies diverses où il exprime ses prédilections, ses goûts ; il chante le ménage des deux Corneille, il célèbre et paraphrase La Fontaine en des vers qui se sentent de la lecture habituelle et de l’esprit du grand fabuliste.

667. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre III : La science — Chapitre I : De la méthode en général »

Duhamel sur la Méthode dans les sciences de raisonnement, œuvre d’un esprit serré et philosophique auquel je ne reprocherai qu’une chose : c’est de trop dédaigner les philosophes, car il pourrait retrouver parmi eux beaucoup de ses propres idées. […] Elle défendit l’usage des hypothèses contre une autre école, sortie d’elle et qui devait faire plus tard beaucoup de bruit dans le monde, l’école de M. 

668. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre IV : La philosophie — I. La métaphysique spiritualiste au xixe  siècle — Chapitre I : Principe de la métaphysique spiritualiste »

Les grands métaphysiciens, quel que soit leur langage, ne peuvent jamais s’éloigner beaucoup de la vérité. […] Vacherot a également, dans l’article Conscience du Dictionnaire des sciences philosophiques, développé avec beaucoup de force le point de vue de Biran ; et malgré les changements ultérieurs de sa pensée en Théodicée, il est resté, en psychologie, profondément attaché à ce point de vue.

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