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976. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « Victor Hugo » pp. 106-155

Il paraît difficile d’admettre qu’il ait pris le Cri de guerre du Muphti, les malédictions du Derviche pour autre chose que des thèmes indifférents, aptes à de belles variations. […] Il sait être grandiose simplement dans une langue sculpturale et biblique, en un style fauve et comme recuit aux beaux passages de la Légende des Siècles. […] Victor Hugo s’associe de telle sorte à la simplicité de ses idées, qu’il reste indécis s’il use de son élocution prodigieuse pour dissimuler la faiblesse de sa pensée, ou si celle-ci s’interdit toute activité dépensée en belles paroles. […] Hugo parvient à figurer parfaitement, en apparence, des idées ou abstraites ou impensables, et qu’il se trouve amené à traiter en beaux vers les plus vagues sujets métaphysiques. […] Un héros est un beau jeune homme brave et rien de plus ; une jeune fille est un être chaste, joli et timide.

977. (1857) Cours familier de littérature. III « XVe entretien. Épisode » pp. 161-239

Vives glaneuses de novembre, Les grives, sur la grappe en deuil, Ont oublié ces beaux grains d’ambre Qu’enfant nous convoitions de l’œil. […] Printemps après printemps de belles fiancées         Suivirent de chers ravisseurs, Et, par la mère en pleurs sur le seuil embrassées,         Partirent en baisant leurs sœurs. […] Je viens ici pour tout oublier pendant quelques jours à ce beau soleil, que le sang et les larmes des peuples ne ternissent pas. […] Quand il fait beau, hors de la maison, je m’assois à une bonne place au soleil, contre un mur, contre une roche, contre un châtaignier ; et je vois en idée la vallée, le château, le clocher, les maisons qui fument, les bœufs qui pâturent, les voyageurs qui passent et qui devisent en passant sur la route, comme je les voyais autrefois des yeux. […] J’étais heureux d’avoir retrouvé ce vieillard, comme un homme se réjouit, après un demi-siècle, de retrouver dans une bruyère les traces d’un sentier où il a passé dans ses beaux jours, et qu’il croyait effacées pour jamais.

978. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Notes et éclaircissements. [Œuvres complètes, tome XIII] »

Par exemple, lorsqu’il dit que la raison de l’homme seule ne peut arriver à une démonstration parfaite de l’existence de Dieu, on triomphe, on s’écrie qu’il est beau de voir Voltaire prendre le parti de Dieu contre Pascal. […] Combien n’ai-je pas entendu, par de ridicules propos, condamner vos plus belles actions, et vous traiter d’hommes qui avaient usurpé une réputation dans un siècle d’ignorance qui manquait de vrais appréciateurs du mérite ! […] Enfin, Voltaire a dit dans sa belle Lettre à milord Hervey, tout ce qu’on a répété moins bien et redit mille fois, depuis, sur le siècle de Louis XIV. […] quel roi a répandu plus de bienfaits, a marqué plus de goût, s’est signalé par de plus beaux établissements ? […] Il était, en 1688 et 1689, de ces voyages de Marly tant brigués par les courtisans ; il couchait dans la chambre du roi pendant ses maladies, et lui lisait ces chefs-d’œuvre d’éloquence et de poésie qui décoraient ce beau règne.

979. (1889) Les artistes littéraires : études sur le XIXe siècle

Les roses, Les femmes, les chansons, toutes les belles choses,            Et tous les beaux amours. […]            Allons, un beau baiser ! […] Fut-il avant tout un poète, un adorateur du Beau, en dehors de toutes considérations étrangères ? […] « Le beau, déclarent-ils formellement, est ce qui paraît abominable aux yeux sans éducation. […] L’étonnement considéré comme une des bases fondamentales du sentiment du beau !

980. (1829) Tableau de la littérature du moyen âge pp. 1-332

Raynouard en a reproduit plusieurs dans son beau Recueil des poésies romanes. […] Il fait oublier le breuvage du matin, et la voix des belles chanteuses. […] Il l’avoue quelque part dans de beaux vers latins. […] Les étrangers y apprenaient le français et s’exerçaient à l’écrire, comme un beau et savant langage. […] Il fit beaucoup de bons et beaux livres.

981. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre I. Le Roman. Dickens. »

On l’embrasse les larmes aux yeux ; on le fait asseoir ; il est le plus bel ornement de la fête, et l’on envoie son œuvre à la Revue d’Édimbourg. […] Il se perdra, comme les peintres de son pays, dans l’observation minutieuse et passionnée des petites choses ; il n’aura point l’amour des belles formes et des belles couleurs. […] Marié ou non marié, peu importe ; elle le trouve beau, saint, sublime par lui-même, et elle le dit. […] Elle le supplie ; il s’attendrit ; elle l’emmène ; il devient le meilleur des pères, et gâte un beau roman. […] Ils ont une carnation si fraîche, un teint si délicat, une chair si transparente, et des yeux bleus si purs, qu’ils ressemblent à de belles fleurs.

982. (1887) Journal des Goncourt. Tome II (1862-1865) « Année 1862 » pp. 3-73

C’est un des beaux côtés de la noblesse, qu’on n’y fuit pas la pauvreté. […] L’idée est pourtant là, attirante et insaisissable, comme une belle et méchante fée dans un nuage. […] * * * — Le tourment de l’homme de pensée est d’aspirer au Beau, sans avoir jamais une conscience fixe et certaine du Beau. […] Les beaux hippogriffes de l’opium ! […] Il n’y a pas pour moi de plus belles années que les quinze premières années du règne de Louis XVI.

983. (1880) Goethe et Diderot « Gœthe »

… N’est-il pas temps, au moins, d’examiner, d’un œil moins idolâtre que les beaux yeux de madame de Staël, le génie de l’Allemagne, ses travaux, sa place, enfin, dans le monde de l’intelligence ? […] s’il y eut jamais des hommes dissemblables et des esprits contrastants, c’est Beaumarchais, la flamme de l’esprit faite homme, le passionné jusqu’à la pointe de ses beaux cheveux, qu’il avait beaux comme Mirabeau, — se ressemblant par là, ces deux Samsons du xviiie  siècle ! […] Evidemment, malgré les dépressions de l’âge, l’homme de ce portrait fut beau dans sa jeunesse. […] Werther fut écrit en pleine jeunesse, quand les facultés sont le plus à feu dans des hommes vivants ; mais ce beau lymphatique de Gœthe n’a jamais vécu… Il était à Strasbourg. […] Je trouve très beau que l’artiste vive dans son rêve.

984. (1881) Le roman expérimental

Renan veut dire que nous devons rester polis, joyeux, beaux diseurs et beaux convives, il a raison. […] On veut avoir ses années de belles erreurs. […] N’est-ce pas beau ? […] Et ils auront beau s’appliquer, vouloir bien écrire, croire que l’on fait un beau livre comme on fait une belle paire de bottes, avec plus ou moins de soin, ils n’accoucheront jamais d’une œuvre vivante. […] En un mot, la vie seule est belle.

985. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre quatrième. Du Merveilleux, ou de la Poésie dans ses rapports avec les êtres surnaturels. — Chapitre II. De l’Allégorie. »

dira-t-on, ne trouvez-vous rien de beau dans les allégories antiques ? […] L’allégorie morale, comme celle des Prières dans Homère, est belle en tout temps, en tout pays, en toute religion : le christianisme ne l’a pas bannie. […] Quant à ces dieux vagues que les anciens plaçaient dans les bois déserts et sur les sites agrestes, ils étaient d’un bel effet sans doute ; mais ils ne tenaient plus au système mythologique : l’esprit humain retombait ici dans la religion naturelle.

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