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496. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Des lectures publiques du soir, de ce qu’elles sont et de ce qu’elles pourraient être. » pp. 275-293

Une lecture bien faite d’un beau morceau d’éloquence ou d’une pièce de théâtre est une sorte de représentation au petit pied, une réduction, à la portée de tous, de l’action oratoire ou de la déclamation dramatique, et qui, tout en les rapprochant du ton habituel, en laisse encore subsister l’effet. […] Fournir matière et jour à admiration, voilà la tâche en elle-même ; et quelle autre est plus enviable et plus belle ? […] Je voudrais qu’on se contentât de dire que c’est une des plus belles, et qu’on laissât entrevoir que le monde n’a pas commencé et ne finit pas à nous. […] ce jour-là, pour montrer qu’il n’avait pas d’intention systématique, il lut, comme contrepartie, une pièce de Victor Hugo sur l’aumône, où le pauvre a sa belle et large part. […] On parvint à le sauver, et on lui demanda pourquoi il avait voulu se noyer ; il répondit que c’était de désespoir d’avoir entrevu de si belles choses, et de sentir qu’il en était exclu par son ignorance. » On leur dirait : « Tout Grec libre savait écrire.

497. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres inédites de la duchesse de Bourgogne, précédées d’une notice sur sa vie. (1850.) » pp. 85-102

Cigongne, par exemple, qui possède le plus complet et le plus beau cabinet en fait d’ancienne poésie française. […] Elle a la meilleure grâce et la plus belle taille que j’aie jamais vue, habillée à peindre et coiffée de même ; des yeux très vifs et très beaux, des paupières noires et admirables, le teint fort uni, blanc et rouge, comme on peut le désirer ; les plus beaux cheveux blonds que l’on puisse voir, et en grande quantité. […] Pour vous parler comme je fais toujours, je la trouve à souhait, et serais fâché qu’elle fût plus belle. […] Elle a la taille très belle, on peut dire parfaite, et une modestie qui vous plaira. […] La duchesse de Bourgogne n’était ni belle ni jolie, elle était mieux que cela.

498. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Portalis. Discours et rapports sur le Code civil, — sur le Concordat de 1801, — publiés par son petit-fils — II. » pp. 460-478

Des témoins fidèles nous représentent avec vérité Portalis au Conseil des Anciens, débitant presque aveugle ses beaux discours. […] De même, dans son premier discours sur le Concordat (5 avril 1802), on retrouve fondus, mais dans une expression toute pareille, les beaux passages que nous avons déjà notés dans son discours au Conseil des Anciens en faveur des prêtres non assermentés. […] Ces belles paroles, à en bien pénétrer le sens, expriment toute la pensée morale du Code civil et le seul esprit général par lequel il nous soit permis de l’envisager ici. […] Le discours prononcé par lui au Corps législatif, le 5 avril 1802, en présentant le traité du Concordat, nous offrirait, au milieu de quelques redites, de belles et éternelles maximes d’État. […] Enfin il n’eut point à souffrir dans sa conscience de ces revirements politiques successifs qui brisent toujours plus ou moins l’unité d’une belle vie.

499. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre II : La littérature — Chapitre III : La littérature du xviiie et du xixe  siècle »

Que de choses belles, bonnes, excellentes, dignes d’admiration, qui ne nous apprennent pas nos devoirs : la science par exemple et les beaux-arts ! […] Quel beau mot ! […] Qu’y a-t-il en en effet de beau et de durable dans cette nouvelle littérature ? […] Dans certains cas, la tradition et l’imitation éloignent du beau au lieu d’y conduire. […] Sans doute il y a des époques plus ou moins favorables au beau ; mais, à toutes les époques, c’est en recherchant le beau sous des formes nouvelles, inspirées par le génie du temps, que l’on peut n’être pas tout à fait indigne des grandes époques de l’art.

500. (1864) Cours familier de littérature. XVII « CIIe entretien. Lettre à M. Sainte-Beuve (2e partie) » pp. 409-488

On sent que c’était murmurer à demi-voix, en plein jour, en beau soleil de trois heures après midi ; chaste et pur comme un rayon d’été ou comme le regard ravissant et respecté de cette charmante femme de votre meilleur ami, épars sur ce groupe de ses beaux enfants à peine éclos. […] Quiconque a passé dans ses belles années par ces épreuves si difficiles à traverser, se reconnaît dans ces limbes du pur attachement jouissant de contempler ces Béatrices de l’amour idéal, mais interdites par la sainte amitié. […] Le Poëte y survit, si l’Âme le mérite ; Le Génie au sommet n’entre pas au tombeau, Et son soleil qui penche est encor le plus beau ! […] Ce livre ne me plut pas, malgré les belles pages dont il est rempli. […] Il connut Virgile, il l’apprécia et le protégea ; la reconnaissance du poète a chanté, et le nom de Pollion est devenu immortel et l’un des beaux noms harmonieux qu’on est accoutumé à prononcer comme inséparables du plus poli des siècles littéraires.

501. (1893) Impressions de théâtre. Septième série

Il déborde de vie et de belle humeur. […] Le beau récit de buverie flamande ! […] La belle dame vient le voir sous un déguisement. […] Sa parole était enflée et vague, avec de beaux élans. […] Bref, il a une fort belle vie publique.

502. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. De Pontmartin. Causeries littéraires, causeries du samedi, les semaines littéraires, etc. »

Ce n’est pas précisément un critique que M. de Pontmartin, et j’ai dit pourquoi ; mais c’est un aimable causeur et chroniqueur littéraire à l’usage du beau monde et des salons. […] Aurélie n’a jamais été plus belle ; Jules n’a jamais été plus amoureux ; M.  […] Ce jour sera le dernier beau jour de la vie d’Aurélie. […] Mais après cela, je le demande, si le résultat est favorable à la charmante et pure jeune fille, y a-t-il dans nos mœurs modernes bourgeoises (il faut le dire à leur honneur) un obstacle raisonnablement invincible à ce que Jules Daruel, le jeune avocat distingué, épouse cette belle enfant si bien élevée, Aurélie, et qu’elle devienne la plus honorée comme la plus aimable des épouses et des mères ? […] — Et en conséquence de ce beau raisonnement et de cette idolâtrie superstitieuse pour le renom et le blason immaculé des d’Auberive, voilà le bonheur de deux êtres sacrifié à un honneur faux et à un préjugé de race.

503. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — Chapitre IV »

La jeunesse a brisé les belles idoles qu’elle adorait autrefois ; elle ne rêve plus, elle convoite ; elle n’aspire plus, elle calcule. […] Il y règne cette pauvreté, grimée en faux luxe, qui ferait paraître belles la tente de l’Arabe et la maison du berger. […] Déjà il rudoie le financier de la belle façon, lorsque madame Huguet s’avise d’exploiter la situation et d’y trouver un trésor. […] Cette offre, c’est la fortune, c’est le bonheur, c’est Cyprienne épousée la tête haute, le cœur rassuré… Un mot le dégrise de cette belle ivresse. […] Thérèse fait un beau contraste à cette créature.

504. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) «  Mémoires et correspondance de Mme d’Épinay .  » pp. 187-207

Vous êtes si gentille, Si mignonne et si belle, et d’un regard si doux, Que la beauté plus grande est laide auprès de vous. Mais tout ne répond pas au trait de ce visage Plus vermeil qu’une rose et plus beau qu’un rivage. Vous devriez, étant belle, avoir de beaux habits ; Éclater de satin, de perles, de rubis… Ma foi ! les beaux habits servent bien à la mine, On a beau s’agencer et faire les doux yeux, Quand on est bien parée, on en est toujours mieux. […] On aura beau faire et dire, le faux bonhomme en lui est démasqué, il ne s’en relèvera pas.

505. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Saint-Évremond et Ninon. » pp. 170-191

Ce qui contribua beaucoup à la lui adoucir, c’est qu’il vit bientôt arriver en Angleterre la belle duchesse de Mazarin, la nièce même de celui qui était la cause première de son malheur : il s’attacha à elle et l’aima pour son esprit, pour ses qualités solides, autant que pour sa beauté. […] « La vertu des femmes est la plus belle invention des hommes », ce mot singulier, qui est d’une muse spirituelle de notre temps, semble volé à Ninon. […] Clarice est donc de fort belle taille et d’une grandeur agréable, capable de plaire à tout le monde par un certain air libre et naturel qui lui donne bonne grâce. […] S’il est amoureux du mérite que l’on appelle ici distingué, peut-être que votre souhait sera accompli ; car tous les jours on me veut consoler de mes pertes par ce beau mot. […] Saint-Évremond a beau écrire à Ninon : « La nature commencera par vous à faire voir qu’il est possible de ne vieillir pas » ; il a beau lui dire : « Vous êtes de tous les pays, aussi estimée à Londres qu’à Paris ; vous êtes de tous les temps, et quand je vous allègue pour faire honneur au mien, les jeunes gens vous nomment aussitôt pour donner l’avantage au leur : vous voilà maîtresse du présent et du passé… » ; malgré toutes ces belles paroles, Ninon vieillit, elle a ses tristesses, et sa manière même de les écarter peut sembler plus triste que tout : Vous disiez autrefois, écrit-elle à son ami, que je ne mourrais que de réflexions : je tâche à n’en plus faire et à oublier le lendemain le jour que je vis aujourd’hui.

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