C’est l’art qui naît de la critique. […] La précision sert à l’art d’agir. […] Elle ne se présente pas seulement comme un art de jouir, comme un art de goûter, mais aussi comme un art de comprendre par l’intelligence, et même encore comme un art de créer. […] De plus, la critique n’est pas seulement un art de goûter, mais aussi un art de fixer le goût. […] Il ne voit pas d’art devant lui.
Après avoir composé le meilleur Livre que nous ayons sur les principes de l’Art dramatique, il prouva par sa Tragédie de Zénobie, que ce n’est pas tout d’être instruit, qu’il faut encore avoir le talent de réduire les instructions en pratique. […] La Menardiere, qui, dans sa Poétique, avoit traité avant lui de l’Art dramatique, n’a fait que commenter ce qu’Aristote & Castelvetro ont écrit sur le même sujet. Il parle à la vérité fort au long de l’Art du Théatre, de l’origine du Drame, de ses especes, des trois unités, des caracteres, des mœurs, des bienséances ; mais ce n’est pas là ce dont on avoit besoin : Aristote & ses Commentateurs avoient assez détaillé ces différentes parties de la Poésie dramatique. […] Le choix du sujet, par exemple, la contexture du plan, l’art de préparer les incidens, de nouer & de dénouer l’intrigue, la nécessité de soutenir l’action, la disposition des actes, la coupe & la liaison des scènes, & cent autres particularités sur lesquelles les Anciens ne sont entrés dans presque aucun détail, sont présentés chez lui avec une clarté de principes & une sûreté de goût, qui le mettent bien au dessus de tous ceux qui se sont exercés à écrire sur la Théorie & la Pratique du Théatre.
C’est l’art de lire comme en essence. […] En dehors de « lire lentement », il n’y a pas un art de lire ; il y a des arts de lire et très différents selon les différents ouvrages. Ce sont ces arts de lire que nous allons successivement essayer de démêler.
Même tout l’art dont est capable ce moyen âge qui lut les chefs-d’œuvre de la poésie antique sans y remarquer la fine splendeur des formes, cet art sortira de là : il manifestera l’énergie de son individualisme par ses châteaux, et la vivacité de sa foi par ses églises. […] Saint-Front de Périgueux, l’abbaye du Mont-Saint-Michel, les églises d’Auvergne, tout cet art roman qui s’épanouit au xie siècle, l’art gothique qui le continue, voilà par où le moyen âge participa au désir de créer, à la faculté de sentir le beau. Il était nécessaire de le dire, car la littérature ici ne reflète pas tout le génie national : si le Parthénon et une tragédie de Sophocle, un discours de Bourdaloue et les jardins de Versailles sont des manifestations étroitement apparentées du même génie, rien dans les formes littéraires du moyen âge français n’évoque l’idée de la conception esthétique qui fit surgir les grands monuments de l’art roman ou gothique.
L’auteur considéra que les deux seuls de ces chapitres qui eussent quelque importance par leur étendue, étaient des chapitres d’art et d’histoire qui n’entamaient en rien le fond du drame et du roman, que le public ne s’apercevrait pas de leur disparition, et qu’il serait seul, lui auteur, dans le secret de cette lacune. […] Il sait que l’art, sous toutes ses formes, peut tout espérer des nouvelles générations dont on entend sourdre dans nos ateliers le génie encore en germe. […] Mais dans tous les cas, quel que soit l’avenir de l’architecture, de quelque façon que nos jeunes architectes résolvent un jour la question de leur art, en attendant les monuments nouveaux, conservons les monuments anciens. […] Notre-Dame de Paris a peut-être ouvert quelques perspectives vraies sur l’art du moyen âge, sur cet art merveilleux jusqu’à présent inconnu des uns, ou, ce qui est pire encore, méconnu des autres.
Celui qui enseigne, comme le dit Quintilien, ne sçauroit communiquer à son disciple le talent de produire et l’art d’inventer, qui font le plus grand mérite des peintres et des orateurs. […] Nous avons vû des peintres sans génie, mais devenus célebres pour un temps, par l’art de se faire valoir, travailler plus mal durant l’âge viril qu’ils ne l’avoient fait durant la jeunesse. […] Le Sueur, qui n’avoit jamais été à Rome, et qui n’avoit vû que de loin, c’est-à-dire, dans des copies, les richesses de cette capitale de beaux arts, en avoit mieux profité, que beaucoup de peintres qui se glorifioient d’un sejour de plusieurs années au pied du Capitole. […] Que les hommes nez sans un génie déterminé, que ces hommes propres à tout s’appliquent donc aux arts et aux sciences, où les plus habiles sont ceux qui sçavent davantage. Il est même des professions où l’imagination, où l’art d’inventer est aussi nuisible, qu’il est necessaire dans la poësie et dans la peinture.
De telles recherches sont le complément naturel des premières ; elles importent essentiellement à la connaissance de notre histoire nationale… Les instructions que j’aurai l’honneur de vous adresser à ce sujet s’appliqueront, les unes, aux travaux à faire pour la découverte et la publication des manuscrits enfouis dans les Bibliothèques, Archives et Collections ; les autres, à un grand ensemble de recherches et d’études d’une nature différente sur les monuments d’arts en France, monuments bâtis ou monuments meubles, monuments religieux, militaires, civils, etc. […] Tous traités spéciaux qui concerneraient l’art de la peinture sur verre, la fabrication ou l’emploi des couleurs, les teintures sur laine et sur soie, seraient encore d’une valeur inestimable pour la science et l’art modernes. […] Les longues et continuelles querelles entre le collège des chirurgiens, fondé au xiiie siècle, et la Faculté de médecine, ont enfanté un grand nombre d’écrits qui peuvent faire connaître l’état et les prétentions de l’art chirurgical depuis Lanfranc jusqu’à Ambroise Paré. […] Mais on devra arriver, dans la voie des recherches que je sollicite, à fixer avec plus de précision les circonstances et l’origine des inventions mémorables en astronomie, en agriculture, en art militaire, qui ont changé la face de la science et de la société. — L’emploi de la vapeur dans les machines se voit au xvie siècle : en sera-t-il fait mention quelque part auparavant ? […] Des traités en langue vulgaire sur les divers arts et métiers, sur diverses parties des sciences d’alors, des livres de compte même peuvent devenir précieux pour l’histoire des origines et des progrès de la langue, par leur date, par leur terminologie, La littérature de ces époques revendique très directement, et à titre même de poèmes didactiques, les traités en vers sur la chasse, sur l’équitation, sur les échecs, etc.
Dans le pays de la plus cynique utilité, il ne vit que la beauté, la beauté par elle-même, la beauté oisive, inféconde, l’art pour l’art. […] Victor Hugo, traître à cet art pour l’art qui ne fut jamais pour lui qu’une religion de préface, et qui, en vieillissant, a livré sa Muse à de bien autres préoccupations ; M. […] dans ces Histoires extraordinaires, qui le sont bien moins par le fond des choses que par le procédé d’art du conteur, sur lequel nous reviendrons, et qui est, à la vérité, extraordinaire, il n’y a rien de plus élevé, de plus profond et de plus beau, en sentiment humain, que la curiosité et la peur, — ces deux choses vulgaires ! […] Tout cela, — des contes d’ogre pour des enfants qui se croient des hommes, — n’a qu’une prise d’un moment sur l’imagination du lecteur, et manque, comme impression d’art, de profondeur et de vraie beauté. […] A nos yeux, à nous qui ne croyons pas que l’Art soit le but principal de la vie et que l’esthétique doive un jour gouverner le monde, ce n’est pas là une si grande perte qu’un homme de génie ; mais nul n’est dispensé d’être une créature morale et bienfaisante, un homme du devoir social ; c’est là une perte qu’on ne rachète point !
Pour l’unité d’intérêt, il y est moins fidèle : c’est le plus difficile de l’art, et l’habileté n’y peut suppléer le génie. […] Mais ces libertés données à l’art avaient leur péril. […] Sa critique de l’art de ses devanciers n’est qu’une apologie indirecte du sien. […] Tout en pressentant la fragilité de cet art, sa grâce et son éclat nous éblouissent. […] L’émotion n’est pas trop chèrement payée par le léger tort que peut faire à l’art l’irrégularité du moyen.
Charles Baudelaire, appeler un art sa savante manière d’écrire en vers ne dirait point assez. […] Du jour où le livre fut inventé, les arts émancipés ont eu chacun un domaine séparé que le voisin ne peut envahir qu’à la condition de se suicider. […] Les poètes en ce temps-là n’écrivaient que pour les poètes ou pour les âmes assez grandes pour comprendre l’Art. […] En littérature, en art, tout ce qui existe a sa loi ; je suis à cet égard fataliste comme un Bédouin. […] L’ignorance est une vertu pour les filles, l’art n’est donc point fait pour elles.