Il y prend, une à une, toutes ces philosophies sociales dont les imaginations du temps étaient affolées, et entre toutes celles de Babeuf, de Saint-Simon, de Charles Fourrier, de Pierre Leroux, qui voulaient plus que les autres se donner les airs d’être quelque chose, et qui n’étaient, comme les autres, rien de plus que les conséquences de la philosophie du xviiie siècle, et il faut voir avec quelle rapidité d’analyse il les discute et les découd en quelques lignes, de ce style mathématique et brillant qui caractérise sa personnalité d’écrivain !
Seulement, comme la poésie lyrique ne s’analyse pas et qu’il faudrait citer trop de pièces du nouveau recueil de M.
Le livre de l’Amour, — ce chef-d’œuvre de pointillé dans l’observation et de grâce inattendue dans le bien dire, que Sterne aurait admiré, et où les nuances, qui ondoient, chatoient, se fondent et s’évanouissent comme des lueurs d’opale dans le merveilleux observateur du Sentimental Journey, sont nettement fixées sous le regard par un procédé supérieur d’analyse sans rien perdre de leur ténuité et de leurs qualités presque immatérielles, — ce livre d’un agrafeur de nuances (ces mots-là sont faits pour lui seul), ce livre qui a tout dit et fait le tour du cœur, de ce muscle qui renferme l’infini, comme on fait le tour de la terre, de cette misérable petite chose que Voltaire appelait « un globule terraqué », nous ne croyons pas que Paulin Limayrac l’admire et l’aime mieux que nous.
Après une telle déception, je n’ai plus rendu justice à rien, ni aux conversations du livre, où le coup de raquette enlève le volant avec une précision et une rapidité d’escrime, ni aux analyses de sentiments et d’idées, légères, dentelées, à jour, ni aux masses de fleurs artificielles supérieurement exécutées et dont le livre est plein, il faut bien l’avouer.
De l’analyse on s’éleva jusqu’à la synthèse.
Un homme, un inconnu, devra publier quelque chef-d’œuvre d’ordonnance, d’unité, de concentration, d’analyse, qu’il faudra, pour qu’il parvienne au libraire et au public, qu’il passe par cette filière et ce laminoir du feuilleton.
La même erreur se reproduit à tout bout de champ dans l’analyse à contre-sens que fait M.
Seulement il faut aujourd’hui le rappeler, au moment où ils prirent pour champ d’analyse et de peinture les mœurs populaires, ils étaient, l’un et l’autre, dans cette ébriété Je jeunesse qui se grise même avec de l’eau claire et oui la croit pure, quand elle est sale.
Il faut bien le dire : il a diminué la notion du roman, de cette chose complexe et toute-puissante, égale au drame par l’action et par la passion, mais supérieure par la description et par l’analyse, car le romancier crée son décor et descend, pour l’éclairer, dans la conscience de ses personnages, ce que le poëte dramatique ne fait pas et ne peut pas faire.
II Or, c’est la vérité que M. de La Madelène a voulu exprimer, la vérité locale, qui n’est jamais que locale en matière de paysan, la vérité des mœurs, des traditions et du langage d’une contrée entre toutes les autres, la vérité étroite, exacte, mais vivante cependant, car M. de La Madelène est un artiste qui a puissance de vie, et l’analyse chez lui double l’action sans l’étouffer.