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571. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Taine — III »

C’est ainsi que nous usons de la Vie d’Henriette Renan, et très souvent j’ai admiré la parfaite délicatesse littéraire des journaux français qui tous ont écarté l’idée, assurément fort tentante, de donner à leur public ces pages fameuses.

572. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre VI. Des éloges des athlètes, et de quelques autres genres d’éloges chez les Grecs. »

Cependant il a passé sa vie à célébrer des athlètes, mais toujours plein d’enthousiasme pour la victoire et froid pour le vainqueur ; à peu près comme ces hommes qui, ayant le besoin ou l’intérêt de louer, admirent comme ils peuvent, méprisent la personne, et flattent le rang.

573. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Alexis Piron »

Admirons à la fois et pleurons deux prodiges ; Un Dieu mourant pour l’homme et l’homme impénitent. […] Les raisons qu’il donne à sa décharge dans sa prose un peu hétéroclite sont des plus sensées : on vous élève ou l’on vous élevait en ce temps-là au collège à ne rien tant admirer que Virgile, Horace, Ovide, Térence, à faire des vers à leur exemple, à ne voir la belle et pure gloire que de ce côté. […] On a dit qu’il avait voulu tourner celui-ci en ridicule sur un point, en prêtant à son Damis la même méprise dans laquelle était tombé le célèbre poëte avec d’autres beaux esprits du temps ; ils avaient paru admirer sous la cornette un rimeur déguisé dont ils avaient fait fi d’abord quand il s’était présenté à eux sous son vrai nom. […] Elle dira ; « Je ne m’en cuide pas un zeste de plus », pour ; « Je ne m’en estime pas » Dans ses gentillesses, elle écrivait à Piron : « Bonjour, hibou ; aimez bien hibouse. » Piron l’aimait et l’admirait même ; « Vous bouillez d’esprit », lui écrivait-il un jour. […] La vérité, c’est que Piron avait passé son moment et n’était plus de l’époque ; toute cettegénération d’académiciens de la première moitié du siècle qui l’admiraient sincèrement et qui, si on l’avait souffert, l’auraient nommé à l’unanimité en 1753, avait disparu.

574. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Eugène Gandar »

Là, de sa chambre provisoire et de ce qu’il appelle son grenier de l’École d’Athènes, il put, dès le premier jour, rassasier ses regards, admirer à souhait l’Acropole et les lignes de l’horizon, le pays de la lumière (Venise n’est que le pays de la couleur), cette lumière « si transparente et si pure qu’on croirait toucher de la main les côtes et les montagnes d’alentour160 ». […] Gandar était de la seconde promotion de l’École d’Athènes, une espèce de promotion extraordinaire qui eut lieu en 1847, et où il figurait seul : il retrouvait en arrivant les élèves de cette nombreuse et brillante promotion première qui comptait Lévêque, Émile Burnouf, Louis Lacroix, Benoit (doyen à Nancy), Hanriot, Roux, — Grenier enfin, Grenier ouvertement incrédule à Homère, négateur hardi de l’exactitude tant admirée des descriptions homériques ; car, dès qu’il y a une douzaine de personnes réunies, il se trouve toujours un homme d’esprit en sus pour contredire et remettre en question ce que les autres admettent et admirent. […] II Il ne faut jamais revoir, dit-on, ce qu’on a trop aimé et admiré, de peur d’éprouver un mécompte. […] Ce qui dure sans avoir besoin d’une jeunesse nouvelle et sans craindre la décrépitude comme les œuvres des hommes, c’est la mer et l’horizon des montagnes et cette divine lumière que je retrouve tels que je les ai connus, aussi surpris qu’à mon premier voyage parce que je sors de nos brumes, et plus ému, parce qu’ayant eu déjà le loisir de les aimer, j’avais eu le temps aussi de les regretter plus d’une fois. » Ailleurs, regrettant la perte de quelques illusions, il se félicite d’en garder au moins une : « C’est, dit-il, mon amour pour la Grèce que je ne puis cesser d’admirer, après l’avoir retrouvée plus belle que mes souvenirs. » Je ne crois pas sortir de mon sujet ni abonder dans le trop de familiarité en relevant ce passage naturel d’une lettre à son frère Adolphe Gandar ; nous sommes dans le monde homérique où l’on ose être homme avec tout ce qu’il y a d’humain en nous, et où les pleurs qu’on verse ne sont pas une marque de faiblesse : « (Athènes, 5 mai 1853.) — Beulé m’a quitté dimanche (jour de la Pâque grecque).

575. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre quatorzième. »

J’admire beaucoup moins certaines nouveautés de détails, ces projets d’assemblées libres, se réunissant régulièrement, et tous ces pressentiments du gouvernement représentatif dont on a beaucoup trop loué Fénelon. […] En lisant Fénelon, on est poursuivi des images de ces hommes divins qu’il admirait tant dans Homère, lesquels répandaient les paroles ailées et tenaient les peuples suspendus à leur bouche d’or. […] Le génie de Molière n’a pas pu désarmer Bossuet, jugeant le comédien avec la sévérité des canons ; Fénelon, sans songer à la profession de Molière, loue l’Amphitryon et admire l’Avare. […] « La cabale admire cet ouvrage, écrit-il à son neveu ; le reste du monde le trouve peu sérieux et peu digne d’un prêtre. » Oui, si ce prêtre eût failli dans la foi ou dans la conduite ; mais un tel livre rehaussait la vertu du chrétien resté pur dans ce penchant presque païen pour le paganisme ; et ce qui n’eût été qu’une inconvenance dans un caractère et avec des talents médiocres, était d’un grand exemple dans un prêtre vertueux et dans un homme de génie. […] Il fut publié vers 1699, et il eut tout d’abord le malheur d’être trop admiré par les étrangers.

576. (1925) La fin de l’art

Mais ce n’est pas l’acquéreur qu’il faut admirer dans cette histoire, c’est l’amateur auquel il le repassera avec un bénéfice inconnu. […] Je sais, il s’en déroule parfois de telles à la cour d’assises et il faut peut-être, après tout, admirer le courage de qui a fréquenté, sans haut-le-coeur, de tels individus. […] Chateaubriand lui trouva du génie, Vigny l’aima ; Lamartine, toujours un peu morose, l’admirait, tout en la trouvant trop gaie, car cette poétesse était de l’humeur la plus riante et sembla toujours plus heureuse qu’éblouie de sa gloire. […] Quant à moi, j’admire plutôt la verdeur de cet homme qui, à soixante-dix ans passés, semble vouer ses derniers ans au laborieux métier de touriste. […] Le jardin n’est-il pas plutôt un lieu où l’on se promène, où l’on se repose, qu’un lieu que l’on vienne admirer et dont on veuille comprendre la belle ordonnance.

577. (1880) Goethe et Diderot « Gœthe »

Chapitre II : le théâtre Et d’ailleurs, quelle qu’ait pu être l’opinion particulière de Gœthe sur son théâtre, le théâtre a été mis en premier dans ses Œuvres par l’opinion générale de l’Europe, comme, parmi les pièces qui le composent, la plus admirée, la plus retentissante, a été Faust. […] Byron lui-même, le grand Byron, un bien autre poète que Gœthe, un dandy qui n’admirait pas grand’chose, l’admira au point de dédier son Manfred à l’auteur de Faust, en l’appelant avec trop de respect son modèle et son maître. […] Il laisse froids même ceux qui l’admirent, qui en conviennent tout en l’admirant. […] Les détails de sa dernière entrevue avec cette jeune Milanaise pouvaient être charmants, mais il ne les a pas vus, ce guetteur de statues et de peintures, qui tournait autour des moindres bibelots d’atelier pour en admirer les incertaines perfections.

578. (1924) Critiques et romanciers

Je n’admire rien de ce qu’il a dit, j’ai le dégoût de tout ce qu’il a fait. […] L’ennui, c’est qu’il a mis dans la chiennaille plusieurs écrivains et poètes qu’on n’arrive pas à mépriser ou qu’on admire. […] Dans sa chambre, décorée de dessins, d’estampes, et qu’un divan de soie bleue embellissait, il recevait souvent deux poètes à peine un peu plus âgés que lui : l’un qu’il admire sans nous étonner, Charles Baudelaire ; l’autre qu’il admire, et non pas sans nous étonner, Pierre Dupont. […] Banville, un citadin pâle, admirait qu’on mangeât si bien : Dupont lui parut un héros. Et Dupont, lisant les Cariatides, admirait qu’on écrivît ainsi, admirait l’habileté du poète : il en était — et ne le dissimulait pas — épouvanté.

579. (1866) Dante et Goethe. Dialogues

Ils veulent que son objet soit connu, aimé, admiré de tous ; ils le veulent exalté dans la mémoire des hommes. […] j’admire votre éloquence. […] J’admire Dante non pas à cause des doctrines et des symboles qui lui sont suggérés par son siècle, mais en dépit de tout cela. […] Il s’attache profondément à la plus belle entre toutes, à la seule qui aurait pu lui porter ombrage : il aime jusqu’à la fin, il honore, il encourage, il fait admirer Schiller. […] Il accomplit enfin en lui-même cette union intime de la philosophie et de la poésie que nous avons admirée chez Dante.

580. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « [Appendice] » pp. 417-422

L’autre admire ce qu’elle dit La flatte d’un air agréable, Et la traite de bel esprit, Et trouve sa jupe admirable.

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