Si un écrivain a jamais semblé un aérolithe singulier, tombé dans une langue et dans une littérature auxquelles sa tournure d’esprit, de parole, de syntaxe semblait, au premier abord, étrangère, c’est bien Mallarmé. […] Tantôt oui, tantôt non, mais peu importe : l’essentiel est que, siens ou étrangers, ils correspondent aux sentiments des autres hommes. […] La musique seule (qui n’est pas étrangère à la genèse de la Jeune Parque, écrite sous l’influence de Glück) relayerait ici la poésie. […] Il faut que le lecteur croie le poète, comme l’enfant par l’aigle ou l’homme par le cheval, emporté par un mouvement dont il n’est pas maître, par une âme étrangère qui l’« exerce ». […] Nous revenons à cette préoccupation leibnitzienne d’une caractéristique universelle, qui a si fort hanté les pensées de Valéry, et qui ne devrait pas être étrangère aux nôtres...
Il a occupé la chaire de littérature étrangère à l’Université de Genève. […] Ces influences ont été surtout des influences étrangères. […] Il se savait gré d’avoir des préoccupations qui leur étaient tout à fait étrangères. […] De même ils ont écarté du débat tout élément étranger, intervention du scandale, souci de l’opinion du monde. […] Il la sait à la manière des étrangers à qui manque toujours le sens de la tradition.
Le spectateur entre tout à fait dans l’illusion de la tragédie ; il s’intéresse assez au héros de la pièce, pour comprendre des mœurs étrangères, pour se transporter dans des pays entièrement nouveaux.
De cette persuasion encore, où l’on est que l’exorde doit être rare et surprenant, viennent ces exordes à ricochets, comme on pourrait les appeler, qui visent une idée très étrangère au sujet, pour rebondir brusquement vers lui par un retour inattendu : ces exordes en cascade, où d’une idée très générale on descend à une autre, et de celle-ci à une autre encore, jusqu’à ce qu’au dernier degré on rencontre celle qui ouvre le sujet, comme dans les jardins français une eau, tombant de vasque en vasque et de marche en marche, s’arrête enfin et se repose dans le bassin inférieur.
Au lieu que les mots plus beaux des langues étrangères font obstacle à la pensée en lui imposant, quelle qu’elle soit, leur musique et leur teinte, le mot français, incolore, atone, ne garde qu’un sens net, où l’esprit aperçoit tous les effets, tous les usages dont il est capable ; il prend le relief, l’harmonie, la lumière, la chaleur, que l’idée réclame ; il s’amortit ou éclate, il prête ou emprunte sa flamme, infiniment souple et mobile, élastique et subtil comme le plus léger des gaz, malgré la précision rigoureuse de sa définition, qui, dans aucun emploi, ne s’altère ni ne s’obscurcit.
Au fait, peut-être les étrangers sont-ils plus aptes que nous à entendre cette poésie.
Pour cet effet, il nous suffira d’extraire d’une de nos Lettres à un Seigneur étranger, l’endroit où nous lui avons rendu compte de l’Ecrit où M.
Philosophie, Eloquence, Poésie, Histoire, rien n’est étranger à votre goût.
Ce moyen serait bien plus sûr que d’appeller des artistes étrangers qui périssent transplantés, comme des plantes exotiques dans des serres chaudes.
La premiere maniere de s’occuper dont nous aïons parlé, qui est celle de se livrer aux impressions que les objets étrangers font sur nous, est beaucoup plus facile.