Cela est si vrai quant à la pensée et à la langue, que, lorsque les Mémoires de Retz parurent, une des raisons qu’alléguèrent ou que bégayèrent contre leur authenticité quelques esprits méticuleux, c’était la langue même de ces admirables Mémoires, cette touche vive, familière, supérieure et négligée, qui atteste une main de maître et qui choquait ceux qu’elle ne ravissait jamais. […] Il était déjà de cette race de ceux qui, en fait d’agitations et de révolutions, aiment le jeu encore plus que le dénouement, grands artistes en intrigues et en influences et s’y complaisant, tandis que les plus ambitieux plus vrais et plus positifs tendent au but et aspirent au résultat. […] Ce fut là la première pensée sérieuse d’où sortit la Fronde, pensée qui ne se produisit dans le Parlement qu’à l’occasion de griefs particuliers, et qui, lorsque les troubles éclatèrent, fut bien vite emportée dans le tourbillon des intrigues et des ambitions personnelles, mais que Retz exprime nettement au début, que le Parlement ne consacra pas moins formellement dans sa déclaration du 24 octobre 1648 (une vraie Charte en germe), et qu’il y aurait de la légèreté à méconnaître. […] Et puis il y a, nous le savons, de certains moments où des maladies de même nature éclatent à la fois dans divers pays : cela est vrai des maladies physiques et aussi des épidémies morales. […] Cela fut vrai du prince de Condé, cela fut vrai même de Retz.