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382. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Vicq d’Azyr. — II. (Fin.) » pp. 296-311

Il n’avait pas besoin, pour paraître affable, d’étudier ses gestes, de donner à un corps robuste des attitudes contraintes, d’adoucir l’éclat de sa voix, de réprimer la fougue de sa pensée, de cacher les impulsions d’une volonté absolue (c’était une allusion sans doute à quelque confrère moins favorisé) : la nature l’avait fait aimable ; c’est-à-dire qu’en lui donnant de la saillie, de la finesse et de la gaieté, elle y avait joint cette sensibilité, cette douceur, sans lesquelles l’esprit est presque toujours incommode pour celui qui s’en sert, et dangereux pour ceux contre lesquels il est dirigé. […] Faut-il maintenant s’étonner qu’à la mort de Buffon, l’Académie française, ou plutôt la société parisienne tout entière qui allait entendre les éloges de Vieq d’Azyr comme elle allait applaudir au Lycée les leçons de La Harpe, aient désigné d’une commune voix l’éloquent médecin pour succéder au roi des naturalistes et pour le célébrer ? […] Je donnerai ici l’une de ces versions, qui montre à quel point ces grands mots tout chargés de foudre cachent souvent de timides pensées ; plus l’auteur tremble, et plus il grossit sa voix : Citoyens représentants, écrivait Vicq d’Azyr, vous avez dit un mot, et le sol de la liberté, labouré d’une manière nouvelle, produit une abondante moisson de salpêtre.

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