Quand ceux que j’ai nommés se levèrent semblables à des prêtres de régénération, les vieilles murailles du monument littéraire s’ébranlèrent à leur voix, et tombèrent comme les remparts de Jéricho au bruit des trompettes israélites. […] Notre maître, le plus cher et le plus grand de tous, Victor Hugo, est en exil ; Lamartine, couronné d’épines, blessé au flanc, crucifié, écrit de longues histoires et se voit condamné à la littérature forcée ; Auguste Barbier se tait depuis qu’il a poussé, dans les ïambes, le cri sublime qui ne s’éteindra pas ; Alfred de Vigny ne parle plus qu’à de rares intervalles et comme attristé de faire entendre sa voix pure au milieu des coassements qui montent de tous côtés ; Balzac est mort après une agonie terrible. […] Au milieu du quinzième siècle, l’architecture religieuse qui sentait instinctivement qu’elle allait s’anéantir aux approches de la renaissance que devaient amener ensemble le divin outil de Guttemberg et la voix de Luther, l’architecture religieuse se débattit, dissimula sa décrépitude sous des ornements infinis et ne se transforma que plus vite. […] Il me semble que nous sommes revenus à ces temps pleins d’ombre du paganisme où les dieux vermoulus tressaillaient sur leurs autels désertés, en écoutant avec terreur les vagissements du nouveau-né de Bethléem ; il me semble qu’au milieu de nous j’ai vu passer des apôtres et que l’on entend parler dans les airs les voix encore indécises d’une religion nouvelle. […] Cherchons-les parmi nous, en nous, ces grands esprits qui ont illuminé tout un siècle du reflet de leur génie ; écoutons leur voix qui nous fera mieux apprécier les choses de notre temps ; mais, sous peine de mort, ne revêtons pas leurs idées, n’imitons pas leurs formes, pour mal répéter ce qu’ils ont si bien dit.