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265. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE RÉMUSAT » pp. 458-491

Du milieu de cette foule de bonnes plaisanteries qui lui échappaient sans cesse, jaillissaient encore des réflexions fortes et profondes, que son bon goût avait soin de revêtir toujours d’une sorte de couleur féminine… » Sans trop m’arrêter sur cet ancien portrait de famille placé aux origines de notre sujet, et qui le domine du fond, sans prétendre non plus pénétrer dans le mystère de la transmission des esprits, ne semble-t-il donc pas, presque à la première vue, que de si amples et si vives qualités maternelles aient suffi à se partager dans sa descendance, et à y fructifier en divers sens, comme un riche héritage ? […] Elle a senti qu’elle mourait, et cependant, en quittant une vie si heureuse, elle n’a laissé échapper que l’expression d’un regret aussi tendre que touchant : — Ne m’oubliez pas, disait-elle à ses parents et à ses amis en pleurs autour de son lit de mort ; j’aurais plus de courage s’il ne fallait pas vous quitter, mais du moins que je vive dans votre souvenir ! […] Il y avait là, nous dit un très-bon juge, un mélange assez pacifique de lumières modernes, de vœux rétrogrades, de goûts d’ancien régime, de mœurs simples amenées par le malheur des temps, de tristes regrets à la suite des douleurs de 93 : il y avait surtout un vif besoin de bonheur, de repos final et de plaisirs de société. […] Pendant des années, chaque soir, elle couchait au vif sur le papier ses souvenirs. […] Les éloges dont je l’avais accompagné, et qu’on vient de lire, ce grand nom même d’Homère que j’y avais mêlé à dessein et par précaution, n’avaient pu conjurer un accès de mauvaise humeur et de vive contrariété dans l’homme de parti et de coterie dont se compliquait en lui l’homme supérieur.

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