/ 3766
2098. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. EDGAR QUINET.— Napoléon, poëme. — » pp. 307-326

— Un moi mystérieux Nous pousse ; alors on prend la vie au sérieux : Plus de jeux dans les prés, plus de frais sous le saule, Le soir plus de moments perdus en doux propos ; Il faut douze combats, et puis, pour le repos, La peau de lion sur l’épaule ! […] Que l’on essaye de se figurer, dans la langue prophétique du vie  livre de l’Énèide, tous les intérêts du monde antique rassemblés sur la limite de l’antiquité et des temps modernes, tant de peuples encore primitifs se groupant, avec leurs cultes et leur génie, autour de la louve romaine, dans l’attente du christianisme ; les Gaulois, les Bretons, les Germains nouvellement découverts ; en Orient, les Parthes, les Numides, les vieux et nouveaux empires ; et au faîte de tout cela, César, à l’œil de faucon, portant dans son génie réfléchi tout le génie des temps modernes ; et que l’on dise si l’épopée ne s’est pas trouvée là. […] Ce mélange d’imagination et d’histoire, d’enthousiasme et de sévérité, de récit idéal et de prophétie sensée, de personnification symbolique en Napoléon et de réalité vivante, de carnage des camps, de ruse dans les conseils et d’équité démocratique, demanderait, pour être réduit en œuvre et conduit à bien, la vie entière d’un Virgile, d’un Dante ou d’un Milton. […] Ce qui constitue le mérite, la vie de ce poëme, ce qui place M. […] Quinet est de tous les hommes celui chez lequel le système que nous avons en partie critiqué nous apparaît le plus identifié avec la nature intime, avec la vie habituelle, avec le tour de la pensée et de l’imagination.

/ 3766