Chaque plainte qui lui venait, chaque sourire passager, chaque tendresse de mère, chaque essai de mélodie heureuse et bientôt interrompue, chaque amer regard vers un passé que les flammes mal éteintes éclairent encore, tout cela jeté successivement, à la hâte, dans un pêle-mêle troublé, tout cela cueilli, amassé, noué à peine, compose ce qu’elle nomme Pauvres Fleurs : c’est là la corbeille de glaneuse, bien riche, bien froissée, bien remuée, plus que pleine de couleurs et de parfums, que l’humble poëte, comme par lassitude, vient encore moins d’offrir que de laisser tomber à nos pieds. […] le tendre poëte nous remet sur la mort de sa mère, sur ce legs de sensibilité douloureuse qui lui vient d’elle, et qui, d’abord obscur, puis trop tôt révélé, n’a cessé de posséder son cœur : Comme le rossignol, qui meurt de mélodie, Souffle sur son enfant sa tendre maladie, Morte d’aimer, ma mère, à son regard d’adieu Me raconta son âme et me souffla son Dieu Triste de me quitter, cette mère charmante, Me léguant à regret la flamme qui tourmente, Jeune, à son jeune enfant tendit longtemps sa main, Comme pour le sauver par le même chemin.