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347. (1890) L’avenir de la science « XXIII »

Le travail intellectuel n’a donc toute sa valeur que quand il est purement humain, c’est-à-dire quand il correspond à ce fait de la nature humaine : l’homme ne vit pas seulement de pain. […] La vie brahmanique, d’ailleurs, a sur la vie cénobitique et érémitique cette supériorité qu’elle est en même temps la vie humaine, c’est-à-dire la vie de famille, et qu’elle s’allie aux soins de la vie positive, sans prêter à ceux-ci une valeur qu’ils n’ont pas ; l’ascète chrétien reçoit sa nourriture d’un corbeau céleste ; le brahmane va lui-même couper du bois à la forêt ; il doit posséder une hache et un panier pour recueillir les fruits sauvages. […] Le spiritualiste n’est pas celui qui croit à deux substances grossièrement accouplées ; c’est celui qui est persuadé que les faits de l’esprit ont seuls une valeur transcendantale. […] Étrange non-sens, car, les formules n’ayant de valeur que par le sens qu’elles renferment, il n’avance à rien de dire : « Je me repose sur le pape ; il sait, lui, ce qu’il faut croire, et je crois comme lui. » On s’imagine que la foi est comme un talisman qui sauve par sa vertu propre ; qu’on sera sauvé si l’on croit telle proposition inintelligible, sans s’embarrasser de la comprendre ; on ne sent pas que ces choses ne valent que par le bien qu’elles font à l’âme, par leur application personnelle au croyant.

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