Vaincu, évincé des premiers et des seconds objets de son ambition, rejeté dans son fauteuil par l’âge, par la goutte, par l’attrait de la douceur sociale et de la vie privée, il trouve à raisonner sur le passé, à en tirer des leçons ou plutôt des remarques, des maximes, qui s’appliquent aux autres comme à lui. […] Comme on le respecte beaucoup, on attend qu’il ait fini pour glisser un mot ; mais il a trouvé l’art de ne jamais finir ; car, ayant respiré en toute hâte au milieu d’une parenthèse, il repart et court de plus belle, si bien que la parole lui reste toujours, que sa phrase commencée dans un salon se continue dans un autre ; que dis-je ? […] Bien des gens, après avoir trouvé ce bonheur en chaire, continuent de se donner ce plaisir en conversation. […] Je me trouve fort bien de ce marché ; à cette condition, je les défie de me tromper. […] Car tel homme est disgracié de visage, mais un dieu répare sa figure en le couronnant d’éloquence, et le monde trouve un charme à le regarder ; et lui, sûr de lui-même, il parle avec une pudeur toute de miel, et il brille parmi la foule assemblée, et jorsqu’il passe à travers la ville, chacun le contemple comme un dieu.