Il tire la vie de l’élément vers la vie de la plante et de l’animal, l’animal et la plante vers l’homme, l’homme vers Dieu. […] Mais Spinoza lui-même a bien de la peine à en tirer une loi morale qui oblige… Et puis, au fond, on n’est pas bien sûr de comprendre. […] Sur quoi, pris d’un vieux scrupule chrétien dans une période embrouillée, inachevée peut-être, et dont il n’est presque pas possible de saisir la construction grammaticale il s’efforce de distinguer entre « le Tout » des panthéistes, « ce second chaos… où Dieu s’évapore… où le bien n’est plus bien, où le mal n’est plus mal », et « le Tout » orthodoxe, « centre-Dieu de l’âme universelle »… Mais enfin, il reconnaît qu’il n’y voit goutte ; et il s’en tire par ce que j’appellerai une loyale défaite. […] Cette force divine immanente au monde, c’est celle qu’adoraient les stoïciens (Mens agitat molem… Spiritus intus alit), et c’est aussi quelque chose d’analogue à la force que reconnaît, par un postulat nécessaire, la doctrine de l’évolution, à ce je ne sais quoi qui, dans les minéraux, veut s’agréger ou se cristalliser ; qui, dans le règne végétal ou animal, veut vivre et croître, s’adapte aux milieux pour en tirer le plus de vie possible, assouplit et achève les types, et les transmet perfectionnés… Nul poète, nul philosophe, nul historien n’a mieux senti que Lamartine, ni plus superbement exprimé la marche évolutive de l’histoire.