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1691. (1863) Cours familier de littérature. XV « LXXXVIIe entretien. Considérations sur un chef-d’œuvre, ou le danger du génie. Les Misérables, par Victor Hugo (5e partie) » pp. 145-224

Épopée tragi-burlesque où il se dépense autant d’héroïsme qu’au siège de Troie, et où l’auteur ramène à la porte d’un cabaret douze ou quinze personnages tombés des nues dans ce trou de six pieds, parmi lesquels Valjean, qui ne sait non plus que faire et qui tire quelques coups de fusil, s’amusant à tuer des hommes ; douze ou quinze gamins de Paris et autant d’étudiants buvant dans une salle basse, pérorant et se battant tour à tour, Marius en tête, pour l’honneur du drapeau rouge. […] L’honnête agent de police Javert, combattu entre sa reconnaissance pour Valjean, par qui il a été sauvé, et le remords de son métier qui crie en lui, se débarrasse de lui-même en se jetant dans la Seine et en se noyant pour se tirer d’embarras. […] Ce lit innocent qui se découvre, cette adorable demi-nudité qui a peur d’elle-même, ce pied blanc qui se réfugie dans une pantoufle, cette gorge qui se voile devant un miroir comme si ce miroir était une prunelle, cette chemise qui se hâte de remonter et de cacher l’épaule pour un meuble qui craque ou pour une voiture qui passe, ces cordons noués, ces agrafes accrochées, ces lacets tirés, ces tressaillements, ces frissons de froid et de pudeur, cet effarouchement exquis de tous les mouvements, cette inquiétude presque ailée là où rien n’est à craindre, les phases successives du vêtement aussi charmantes que les nuages de l’aurore, il ne sied pas que tout cela soit raconté, et c’est déjà trop de l’indiquer.

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