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583. (1870) La science et la conscience « Chapitre III : L’histoire »

Alors, derrière l’exhibition toute superficielle et toute dramatique de la scène extérieure, se laisse apercevoir au fond du théâtre une action moins animée, moins brillante, moins intéressante pour un simple public de spectateurs, mais bien plus propre à fixer les regards de l’observateur curieux de savoir le mystère des choses. […] Tandis que là ils semblent, à part le destin, en être les rois absolus, ici ils n’en sont plus que les ministres, obéissant à un souverain qui leur dicte ses volontés du fond du théâtre où l’historien les montre aux spectateurs. […] Si Sparte n’est et ne peut être qu’un camp, Athènes est et doit être tout à la fois un camp, un comptoir, un atelier, un théâtre, une académie, une tribune, en un mot le vrai sanctuaire de cette civilisation hellénique dont un héros encore barbare, mais fils de Philippe et élève d’Aristote, n’a été que le missionnaire par la conquête. […] Il en est tout autrement dans l’histoire moderne, où cette fatalité éclate dans des proportions en rapport avec la grandeur des théâtres sur lesquels elle joue son rôle à-côté de la volonté et de l’intelligence humaines. […] Il est certain que, sur les grands théâtres où se fait l’histoire moderne, l’homme semble bien petit, bien faible, bien impuissant, devant ces forces de toute espèce, physiques, physiologiques, économiques, sociales, qui ont une action si générale, si irrésistible par leur permanence et leur continuité même.

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