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1322. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Massillon. — I. » pp. 1-19

« On peut quelquefois, dit Voltaire, entasser des métaphores les unes sur les autres ; mais alors il faut qu’elles soient bien distinguées, et que l’on voie toujours votre objet représenté sous des images différentes. » Et il cite un exemple de Massillon ; il aurait pu aussi bien citer celui qu’on va lire : Souvenez-vous d’où vous êtes tombé ; … remontez à la première origine de vos désordres, vous la trouverez dans les infidélités les plus légères : un sentiment de plaisir négligemment rejeté ; une occasion de péril trop fréquentée ; une liberté douteuse trop souvent prise ; des pratiques de piété omises : la source en est presque imperceptible ; le fleuve, qui en est sorti, a inondé toute la terre de votre cœur : ce fut d’abord ce petit nuage que vit Élie, et qui depuis a couvert tout le ciel de votre âme : ce fut cette pierre légère que Daniel vit descendre de la montagne, et qui, devenue ensuite une masse énorme, a renversé et brisé l’image de Dieu en vous : c’était un petit grain de sénevé, qui depuis a crû comme un grand arbre, et poussé tant de fruits de mort : ce fut un peu de levain, etc. […] Il n’est point de parfait bonheur sur la terre, parce que ce n’est pas ici le temps des consolations, mais le temps des peines : l’élévation a ses assujettissements et ses inquiétudes ; l’obscurité, ses humiliations et ses mépris ; le monde, ses soucis et ses caprices ; la retraite, ses tristesses et ses ennuis ; le mariage, ses antipathies et ses fureurs ; l’amitié, ses pertes ou ses perfidies ; la piété elle-même, ses répugnances et ses dégoûts : enfin, par une destinée inévitable aux enfants d’Adam, chacun trouve ses propres voies semées de ronces et d’épines.

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