Pourquoi enfin son talent, qui a toujours poussé dans les mêmes directions, qui s’est acharné sur le même sujet pour en prendre et en vider toute la moelle, — car c’est du xvie et du xviie siècle qu’il s’agit encore dans la nouvelle histoire de Ranke, — pourquoi son talent est-il moins remarquable et moins fort que dans le temps de ses premières découvertes et de ses premiers aperçus ? […] Tous les fronts, il est vrai, ne sont pas également faits pour s’embellir des glorieux chevrons de la pensée, de ces rides qui vont bien aux talents éprouvés comme aux mâles visages. Il en est des talents qui ne sont pas réellement très forts, comme des femmes qui ne furent jamais réellement belles : vieillir les maigrit, les flétrit et les glace. […] Il a essayé de cacher le secret de son âme, le rayonnement de son opinion intime, sous une forme impartiale et dégagée, et à l’instant même le livre qu’il a écrit a perdu tout caractère, et l’ancien talent de Ranke, on se demande… où il a passé ? […] — c’est au nom du talent inutilement sacrifié de Léopold Ranke que nous accusons sa manière.