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14. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Th. Gautier. Émaux et Camées »

Gautier, de ce poète de la matière rutilante ou ténébreuse, personne ne songeait depuis longtemps à nier l’étrange force de talent qui éclate ou se concentre dans ses vers. […] Gautier un tel phénomène d’expression et de style, que la gloire littéraire, ce talent du talent, n’est certes pas trop pour le payer. […] Gautier, sans rien changer à ses conceptions esthétiques, s’est toujours élevé plus haut dans l’aire de son talent et de son vol pendant que tant d’autres sont si tristement descendus. […] Romancier, critique, écrivain de théâtre, il a éparpillé quelquefois magnifiquement un talent poétique, fait essentiellement pour le vers, ce despote heureux de sa pensée ; puis, dans un effort suprême, lui, le poète de l’effort, il s’est ramassé en un volume, d’une condensation souveraine, qui résume son genre de talent avec une incroyable énergie, mais qui n’en est pas peut-être l’expression dernière et l’infranchissable limite. […] cette déplorable conception poétique faite pour figer tout talent vivant, mobile et chaud, et le tuer par le froid qui tue des armées, cette déplorable conception, à laquelle avait échappé par miracle le talent de M. 

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