L’un des plus inattendus n’est-il pas de voir un philosophe qui ne s’était guère occupé que de psychologie et de métaphysique ; qui, s’il n’a pas eu d’idées en propre, un système construit à la façon de Hegel ou de Schelling, a du moins eu de belles parties de discussion, souvent de l’aperçu entre deux idées fausses et surtout un style, beaucoup trop admiré, il est vrai, car il n’est pas sincère, oublier, tout à coup, ce qu’il est et ce qu’il fut, abandonner la philosophie qui meurt plus par le fait de ses partisans que de ses adversaires, laisser là l’habituel sujet de ses méditations et se jeter obstinément dans les petits et obscurs détails de la biographie, et de quelle biographie encore ! […] C’est un écrivain qui travaille les poses de son style, mais c’est un généralisateur, sans originalité, par le style comme par la pensée. […] « Richelieu lui-même, — dit-il dans un style de faiseur de romances sous l’Empire, — ne fut point insensible à ses charmes, il s’efforça de lui plaire, mais ses hommages ne furent point accueillis. » Nous ne savons pas à quel point ce terrible muguet de Richelieu assouplit et inclina ses vertèbres de tigre pour faire accepter ses hommages, mais, s’il eut envie de cette Marion Delorme titrée (et pourquoi pas ? […] L’haleine y manque à l’auteur comme s’il avait accompli le plus difficile des travaux d’Hercule, et il se sert de ce qui lui en reste pour nous lamenter des adieux de cygne mourant dans un style qui dépasse de beaucoup le ton de pipeau auquel il a, dans ce dernier ouvrage, ramené l’histoire. […] Ce comédien de style et de ton, ce comédien plus que comédien, car ici il s’élève jusqu’au saltimbanque, cet évêque épicurien, bénissant les Muses et fermant le cycle de ses travaux sur les saintes femmes profanes du xviie siècle par une canonisation mythologique, n’est-il pas, en effet, le spectacle de la bouffonnerie la plus magnifique et la plus inattendue ?